| Alger, Algérie 
          : documents algériens | 
| .....si modeste soit-elle, une équipe pour travailler et progresser, pour remplir une certaine mission, a besoin de moyens matériels. La demande est considérable, Ce n'est pas soixante centres qu'il faudrait visiter, mais quatre-vingt-dix, au cours de la saison 53-54, et cent vingt au cours de la saison ,suivante (notamment des centres assez éloignés comme Biskra, Touggourt, Djelfa, L aghouat, Ghardaïa, Aïn-Sefra, Colomb-Béchard, qui n'ont pas encore été visités, sans compter ceux beaucoup plus proches qui ont pour nom : Sétif, Bordj-Bou-Arréridj, Médéa, Affreville, Orléansville, Tizi-Ouzou, Relizane, SaintDenis-du-Sig, Mostaganem, etc.. | 
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| ----------En 
        octobre 1952, à la demande de M. Ch. Aguesse, inspecteur principal, 
        chef du Service des Mouvements de jeunesse et d'Éducation populaire 
        en Algérie (Direction générale de l'Éducation 
        nationale), une équipe théâtrale était créée 
        par Henri Cordreaux, instructeur national d'art dramatique, qui en assumait 
        la direction, avec le concours de Jean Rodien et Jean-Pierre Ronfard, 
        instructeurs régionaux, et d'Yvette Cordreaux, comédienne. ----------BUTS. 
        -  ----------2°) Troupe itinérante, elle était destinée à affronter tous les publics d'Algérie, aussi bien celui des grandes villes que des petites villes ou des villages les plus reculés, et à l'aide de spectacles très divers, de parvenir à la connaissance aussi complète que possible de ces publics, de leurs goûts, de leurs besoins, de leurs désirs, afin de dresser peu à peu, lentement et méthodiquement, une sorte d'atlas géographique du public des trois départements. Entreprise complexe s'il en fût, en raison de l'étendue du territoire, de la diversité ethnique et linguistique de la population, de son degré d'instruction et de culture, etc... OEuvre de longue haleine qui ne pouvait être menée à bien par des enquêtes,. questionnaires ou statistiques, mais seulement par le contact vivant d'une .troupe théâtrale en représentation. ----------Après une année d'expérience, il apparut que bien des erreurs avaient été dites ou écrites à propos du public algérien par des personnes qui ne le connaissaient pas, ou le connaissaient très imparfaitement, s'étant contentées de la fréquentation de quelques grandes villes du littoral ou de quelques foyers ruraux situés à proximité de ces villes. Le public algérien n'est pas seulement celui d'Oran, d'Alger, de Constantine ou de Bône, celui de Mahelma, de Montpensier ou d'Assi-Bou-Nif, mais aussi celui de Batna, de Boghari ou de Mascara, de La Meskiana, d'Aflou ou de Nemours ; de même que le public du département de Constantine n'est pas celui du département d'Alger, ou encore moins celui du département d'Oran. Une troupe qui a pour ambition de s'adresser à tous ces publics, doit d'abord, en toute honnêteté, chercher à les connaître aussi parfaitement que possible. ----------3°) Troupe théâtrale ayant pour objet essentiel de présenter sur l'ensemble du territoire des spectacles dramatiques et d'établir par ce moyen des relations vivantes avec les différentes couches de la population, il lui fallait en premier lieu monter et exploiter de tels spectacles, et allier ainsi aux préoccupations de l'instructeur, celles du comédien. Clef de voûte de tout l'édifice, le spectacle devait être considéré à la fois comme un moyen et comme une fin en soi, et à ce double titre exiger, tant dans sa préparation que dans sa diffusion, les plus grands soins. Ce rôle de décentralisation théâtrale qui lui était ainsi dévolue dès le départ, devait apparaître peu à peu comme le plus important, la plupart des villages et des petites villes, et même quelques grandes villes de la côte, ne recevant jamais, ou que très rarement, la visite de troupes itinérantes de qualité. Mettre le public, tous les publics d'Algérie en présence du phénomène théâtral, lui faire éprouver des joies et des émotions que seul le théâtre est capable de faire naître, lui permettre de quitter de temps à autres ces salles obscures qui sont devenues son unique lieu de plaisir (et trop souvent son opium) pour le faire accéder à ce monde d e poésie, de lumière, de couleur, de forme et de son qui est celui du théâtre, un monde vivant peuplé de personnages de chair et d'os, telle était la mission qui apparaissait comme la plus urgente en même temps que la plus noble, à une époque où le terrible isolement des bourgs et des campagnes risquait d'avoir, sur le plan social, les répercussions les plus graves. ----------4") 
        Troupe placée sous l'égide de la Direction générale 
        de l'Education nationale, il importait que sa mission 
        éducative ne fut jamais perdue de vue, sans pour autant céder 
        à des préoccupations didactiques trop apparentes qui auraient 
        risqué d'éloigner une partie importante du public. Bénéficiant 
        d'une situation privilégiée, n'ayant pas à résoudre 
        les redoutables problèmes financiers qui se posent ordinairement 
        dans l'organisation des tournées à forme purement commerciale, 
        et ne se trouvant par conséquent pas dans l'obligation de " 
        plaire " à tout prix au public, il était de son devoir 
        de ne faire appel qu'à des uvres de la plus haute qualité, 
        même si ces uvres apparaissaient parfois comme un peu difficiles 
        pour le public, et de révéler des auteurs, des décorateurs, 
        des musiciens dont, sans elle, il risquait de n'avoir jamais la révélation. ----------Personnel. - Au cours de l'année scolaire 1952-1953, quatre comédiens se sont partagés les énormes tâches de cette équipe théâtrale : tâches d'instructeurs, d'acteur, de débardeur, de machiniste, de menuisier, de régisseur, d'électricien, de costumier, de conducteur de camion, etc... Il y fallait des gens d'une résistance physique à toute épreuve, ayant reçu, tant sur le plan de la culture générale que sur le plan du métier de comédien, une excellente formation. Aucun d'eux, d'ailleurs, n'était novice en la matière Henri Cordreaux, depuis 1932, sans aucune interruption, s'était consacrée au théâtre, Yvette Cordreaux depuis 1944, Jean Rodien depuis 1946, et Jean-Pierre Ronfard, avec quelques arrêts dus à ses études et à ses obligations militaires, depuis 1947. ---------Matériel. - Un matériel simple, peu coûteux, de volume réduit, entièrement démontable et parfaitement adapté à son objet, permettait de s'équiper n'importe où, qu'il y ait une scène ou qu'il n'y en ait pas, que celle-ci soit une scène normale de théâtre, ou une scène improvisée avec des planchers posés sur des tables ou des fûts. Un équipement complet de projecteurs et de rhéostats assurait l'autonomie des moyens d'éclairage, et autorisait la permanence des jeux de lumière, quel que soit le lieu de représentation. ----------Transport. - Une camionnette 1.000 kg. Renault était mise à la disposition de l' " Equipe théâtrale " par le Service de l'Education populaire, pour lui permettre de transporter le matériel et le personnel d'un boutà l'autre du territoire algérien. La conduite en est assurée à tour de rôle par les comédiens. | ----------Local. 
        - Les répétitions, la fabrication 
        des décors et des accessoires, le réglage des éclairages, 
        ont lieu dans le charmant petit théâtre du Centre éducatif 
        d'El-Riath, à 8 km. d'Alger, en plein Sahel. ----------Premier 
        spectacle. - Prologue parade de bateleurs. Série 
        de jeux de clowns inspirés des Parades de Thomas Gueullette (XVIII'°° 
        siècle). " L'enfant d'éléphant 
        " de Rudyard Kipling. Chansons folkloriques et modernes. Poèmes 
        de Jules Lafforgue. Une scène du " Christophe Colomb 
        " de Claudel. " Le chant d'amour et de mort du Cornette 
        Christophe Rilke " de R.M. Rilke. " Les animaux 
        malades de la peste ", jeu dramatique d'après La Fontaine. 
        " L'âne et la jeune fille ". Ballet pantomine 
        sur le concerto pour Basson de Mozart. ----------L'ostracisme 
        dont font habituellement preuve les professionnels vis-à-vis des 
        amateurs, et qui se traduit souvent par des tracasseries de tous ordres 
        et un mépris parfois bien injustifié, est impensable en 
        Algérie. Le théâtre professionnel ne peut arriver 
        à conquérir un public, souvent inculte et n'ayant aucune 
        inquiétude de la chose théâtrale, qu'avec l'aide des 
        amateurs. Le théâtre amateur est dans ce pays, du moins sur 
        la plus grande partie du territoire, la base de tout l'édifice 
        théâtral. C'est grâce à son action, au goût 
        qu'il aura su donner au public pour les oeuvres dramatiques, que les troupes 
        professionnelles pourront chaque année conquérir de nouvelles 
        positions. 
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