| ------------Andalou, 
        ayant voyagé en Orient, mort au Moghreb, Sidi Abou Madiân 
        est le principal initiateur du çoufisme en Occident. De lui dérive, 
        par Ibn Machîch et par Châdzili, le vaste mouvement chadzilite 
        dont les Derqaoua, les Kittaniyn, les Kerzaziyn, les Cheikhiyn, les Naciriyn, 
        les Zianiyn, les Aïssaoua. etc... sont des rameaux. Il est écrivain, 
        savant, poète. Il est le Ghoûts, le Grand Secours, qui est, 
        au sommet de la hiérarchie des saints, comme l'aspect mystique 
        du Qouthb, du Pôle. Il est patron de Tlemcen. Son mausolée 
        et la mosquée voisine sont parmi les chefs-d'uvre de l'architecture 
        méridine. Des milliers de pèlerins viennent chaque année 
        les visiter.------------Aboû 
        Madiân Chou'aïb ben al Hossein al Ançârî 
        naquit dans la région de Séville vers 520/1126, d'une famille 
        d'origine arabe plutôt modeste. Son père mort, il fut élevé 
        par des frères aînés, gardant leurs troupeaux avant 
        d'apprendre le métier de tisserand. Quand il voyait quelqu'un lire, 
        il s'approchait de lui et ressentait une angoisse de ne pouvoir en faire 
        autant ; lorsqu'il passait devant une mosquée ou une école 
        son coeur palpitait. Il s'échappait pour aller au cours des professeurs. 
        Ses frères étaient opposés à cette vocation. 
        L'un d'eux le menaça un jour de son épée ; Chou'aïb 
        para le coup avec son bâton, et le fer se brisa. Interdit, le frère 
        le laissa aller. Le jeune homme rencontra, au bord de la mer, ou du Guadalquivir, 
        un vieillard, vêtu seulement d'un cache-sexe, qui pêchait 
        à la ligne (un clou tordu au bout d'une ficelle), qui écouta 
        son histoire et lui conseilla d'aller à la ville commencer sa quête 
        de Dieu par l'étude de la science. Chou'aïb traversa le détroit, 
        vécut à Tanger et à Ceuta avec le pêcheurs, 
        se rendit à Marrakech, où il fut accueilli par ses compatriotes 
        andalous qui voulurent ]'inscrire sur les rôles de la milice.
 ------------C'est 
        à Fès qu'il se fixa un certain temps et finit par trouver 
        ce qu'il cherchait après s'être assis dans maint et maint 
        cercle d'étudiants. C'est o d'Aboùl-Hassan Ibn Harzihim 
        (mort à Fès en 559/1165) qu'il reçut pour la première 
        fois un enseignement vivant, car ce maître parlait "pour Dieu" 
        et non pas du bout des lèvres, touchait l'esprit et le coeur, non 
        seulement les oreilles. Par lui, Chou'aïb prit contact avec les écrits 
        des maîtres çoufis, spécialement Mouhâsibi, 
        et sans doute aussi Chazâlî, que le cheikh admirait vivement.
 LES ANNEES D'APPRENTISSAGE. ------------Bien 
        qu'il travaillât parfois comme tisserand, le jeune homme devait 
        être l'un des plus pauvres parmi les pauvres étudiants. Fès 
        attirait déjà de nombreux tholba n'ayant guère d'autres 
        ressources que la galette quotidienne et le couscous périodique 
        des fondations pieuses. Un jour qu'il retirait son mante au au cours du 
        maître il rougit en apercevant que ses vêtements tombaient 
        en lambeaux. Le Cheikh fit une collecte parmi ses élèves 
        et noua en cachette la somme recueillie à une extrémité 
        du manteau de Chou'aïb.------------Ce 
        soir-là, l'étudiant rentra dormir dans une grotte du Zalagh, 
        où il retrouvait d'habitude une gazelle qui dormait près 
        de lui et lui donnait même de son lait. Cette fois, Chou'aïb 
        remarqua que des chiens, affectueux à l'ordinaire, aboyaient après 
        lui, et que la gazelle le fuyait. Il se demanda pourquoi, trouva l'argent 
        et se dit : " Cette saleté est sur 
        moi, à mon insu. Voilà pourquoi les bêtes me méprisent. 
        " Et il jeta l'argent. La gazelle revint ; les chiens lui firent 
        fête le lendemain matin et le cheikh, à qui il raconta son 
        aventure lui dit : "Réjouis-toi, 
        ton destin est fixé. "
 ------------Ayant 
        entendu parler d'Aboù Ya'za, Chou'aïb Aboû Madiân 
        alla le voir dans son désert de Taghia. C'est de ce rude montagnard 
        berbère qu'il déclarait avoir reçu l'initiation à 
        la voie çoufie remontant. par Jounaid de Bagdad, à Sârî 
        as-Sagathî, à Habîb et Ajamî et à Hassan 
        al Baçri. On cite aussi parmi ses maître Alî ben Ghalib 
        (mort en 592/1166) qui fut surtout un érudit, Aboûlhassan 
        ach Chawi ou Salaoui, et surtout Aboû Abdailah ad Daqqâq de 
        Sijilmassa, mort à Fès, qui semble avoir été 
        plutôt un illuminé qui lui aurait donné le froc çoufi 
        et la licence d'enseigner.
 ------------Plusieurs 
        biographes assurent qu'il rencontra à La Mecque le grand Abdelqader 
        Jîlânî et que c'est de lui qu'il reçut la khirqa 
        avec beaucoup de secrets (asrar).
 ------------Moins 
        probables sont les rapports qu'il aurait eus, en Orient, avec Ar-Rifâ'î, 
        (mort en 578/1182), le fondateur des derviches hurleurs, bien qu'on précise 
        que les deux mystiques échangèrent leurs manteaux et que 
        celui d'Aboû Madiân était teint au kermès. Il 
        s'agit plus vraisemblablement, comme le dit AlBâdisi d'une certaine 
        affinité spirituelle.
 ------------Quoi 
        qu'il en soit, nous voyons qu'Aboû Madiân concentra en lui 
        les enseignements initiatiques dérivés d'Al Jîlâni, 
        d'Aboû Ya'za et d'Al-Ghazâli (par Ibn Harzihim et par Aboû 
        Bakr Ibn al Arabî, maître d'Aboû Ya'za), toutes silsilas 
        qui dérivent elles-mêmes de Jounayd et de l'Ecole de Bagdad, 
        et qu'il transmit à Chacizîlî, par l'intermédiaire 
        de Moulay Abdesselâm Ibn Machîch.
 A BOUGIE, AU XIIè 
        SIECLE. ------------Après 
        avoir accompli le pèlerinage et le classique voyage d'études 
        en Orient, Aboû Madiân se fixa à Bougie. Il avait pensé 
        se retirer dans la solitude, mais un songe survenu à l'un de ses 
        amis l'avait averti que sa vocation était d'enseigner dans les 
        villes. Petit port peuplé surtout d'Andalous au milieu du XIè 
        siècle, Bougie (Bijaya en arabe, Begaït en berbère) 
        était devenue la capitale des Beni Hammad, qui s'y maintinrent 
        jusqu'à la conquête almohade en 1152. Elle resta centre intellectuel 
        jusqu' au XV' (1). En 1184, elle fut occupée quelque temps par 
        les Banou Ghaniya, aventuriers almoravides venus de Ma jorque, qui essayèrent 
        en vain d'arracher la Berbérie orientale à la dynastie almohade. 
        Aboû Madiân, cantonné dans l'enseignement et la dévotion, 
        ne semble pas avoir joué un rôle politique, comme le feront 
        les Jazoûli, les Ben Yoûssef et maints autres chefs d'ordre. 
        Ce n'est qu'à la fin de sa vie qu'il devint, on ne sait pourquoi, 
        suspect au calife. Andalou, lui-même, il trouvait à Bougie 
        des compatriotes nombreux en même temps qu'un milieu intellectuel 
        favorable. L'admirable site de cette petite ville lui semblait disposer 
        favorablement l'âme à jouir des bonheurs licites de ce monde. 
        On passait souvent par Bougie pour se rendre d'Espagne en Orient. Tel 
        fut le cas de Mohyieddîn Ibn Arabî, qui avait épousé 
        à Séville une pieuse femme, Mariem, issue de la grande famille 
        bougiote des Ibn Abdoûn. L'illustre auteur des Foutoûhât 
        y passa en 597/1200 un peu après la mort d'Aboû Madiân. 
        Il y était peutêtre venu en 590/1193, allant de Tlemcen à 
        Tunis. Il appelle Aboû Madiân " notre cheikh et imâm... 
        le maître des maîtres ", et se réfère souvent 
        à lui. Il note l'hostilité des juristes à son égard. 
        La réaction contre les penseurs originaux, philosophes ou çoufis, 
        avait commencé dans les dernières années du règne 
        de Ya'qoûb al Mançoûr et c'est peut-être pour 
        cela qu'Ibn Arabî quitta le Moghreb pour l'Orient en 1200.------------Les 
        anecdotes rapportées par les biographes, les recueils des sentences 
        et les poèmes d'Aboû Madiân peuvent nous donner une 
        idée de ses méthodes, de ses enseignements et de sa " 
        voie ".
 ------------Il 
        avait le don d'intuition et de lecture des âmes. Il connaissait 
        la physiognomonie, le sens profond et les correspondances des formes, 
        des attitudes et des gestes avec l'état présent et futur 
        de l'âme, au point de pouvoir annoncer en voyant un de ses élèves 
        remuer comment il tournerait vingt ans plus tard. Un autre de ses élèves 
        s'était disputé avec sa femme et songeait à la répudier. 
        Le maître vit sa colère et son intention " écrites 
        sur son burnous ". Le prenant à part, à la fin du cours, 
        il lui dit : " garde ta femme et crains 
        Dieu (Coran, XXXIII. 37)... Comment l'un de vous peut-il se laisser aller 
        à la colère au point de casser sa propre vaisselle comme 
        tu l'as fait cette nuit ? Remplace ce que tu as cassé et ne recommence 
        plus. "
 ------------Aboû 
        Madiân avait eu, comme le lui avait annoncé Aboû Ya'za, 
        un fils d'une négresse. Ce fils, nommé Aboû Mohammed 
        Abdelhaqq, était doué de double vue en présence de 
        son père. Agé de sept ans, il disait, par exemple : 
        Je vois sur la mer tels et tels bateaux où il se passe ceci et 
        cela... " Quelques jours après, les navires arrivaient 
        à Bougie et l'on constatait l'exactitude de la description. Si 
        on lui demandait : " Comment vois-tu ces 
        choses ? " , il disait : " Avec 
        mes yeux ", puis il se reprenait, non, 
        c'est avec mon cur et aussitôt précisait 
        : " non, c'est avec mon père, quand 
        il est présent et que je le regarde. Quand il n'est pas là, 
        je ne vois rien. "
 ------------Sa 
        parole était si émouvante que les oiseaux s'arrêtaient 
        dans leur vol pour l'entendre et parfois tombaient morts, selon Tâdilî. 
        Mais il ne se laissait pas aller aux facilités. Il avertissait 
        bien ses novices qu'il ne suffisait pas de faire de belles phrases, que 
        l'effort s'imposait pour trouver le sentier, et que pour suivre ce dernier 
        il faudrait aller de tourment en tourment. Pour suivre son enseignement, 
        il fallait se présenter pur extérieurement et intérieurement, 
        le corps propre, l'esprit net et disponible. Il semble avoir *été 
        plutôt méfiant à l'égard des grandes effusions. 
        Ses disciplesdevaient d'ailleurs insister sur cette " nuit obscure 
        de l'étroitesse ", lait al qabdh au sein de laquelle Dieu 
        se révèle mieux que dans les grâces sensibles et les 
        consolations même spirituelles ; les adversités, non seulement 
        mortifient l'amour-propre et répriment les passions, mais encore 
        poussent l'âme à ne chercher refuge qu'en Dieu, inspirent 
        une adhésion à sa volonté qui vaut mieux que tous 
        les exercices de dévotion.
 ------------L'originalité 
        ne l'effrayait pas pour autant, et il se souciait assez peu des critiques. 
        Deux savants ayant entendu parler de ses connaissances exotériques 
        et ésotériques, s'étonnaient, car ils avaient aussi 
        appris qu'il n'avait pas dépassé dans le Coran la Sourate 
        de l'Empire, la soixante-septième. Ils vinrent s'asseoir dans l'une 
        des deux mosquées de Bougie où il professait, attendirent 
        qu'il eut fini de parler et le saluèrent. Il les appela par leurs 
        noms, connus intuitivement, et répondit à leur question, 
        qu'en effet. il n'avait pas dépassé la Sourate de l'Empire. 
        Elle était pour lui le comble de la magnificence, le lotus de sa 
        limite (Coran LIII, 14). Il eut, en allant plus avant, été 
        brûlé par la splendeur de la Face du Généreux. 
        Puis " il marmotta sur eux une formule à la manière 
        çoufie, pointant le doigt à droite, puis à gauche, 
        et disant : Biya qoul alaya doul fa ana al koul ", phrase énigmatique 
        qui signifie sans doute : " Parle par moi et indique-moi : Je suis 
        le tout. " Les deux juristes partirent convaincus qu'il était 
        un g and initié doué d'intuitions dépassant toutes 
        connaissances acquises.
 ------------Aboû 
        Madiân n'en disait pas moins qu'on ne peut connaître qu'une 
        faible partie des sciences divines, cee que peut prendre de la mer le 
        bec de l'oiseau dont Al Khadir traduisit les paroles à Moïse. 
        Comme les grands çoufis de sa lignée, il se méfiait 
        des miracles et disait que celui qui leur prête attention est comme 
        un idolâtre.
 ------------En 
        droit canon, il était de rite malikite. En théologie, il 
        approuvait, dit-on, les quadariya contre les
 abariya. qui nient le libre arbitre. Non moins raisonnablement il s'opposait 
        aux anthropomorphistes qui prennent à. la lettre les expressions 
        coraniques sur la face, la main, la bouche d'Allah. Il croyait, avec les 
        ahi al Komoun, que les âmes de toutes les générations 
        ont été créées en même temps et leurs 
        germes déposés en Adam.
 SENTENCES ET POEMES. ------------A défaut 
        d'ouvrage en forme, Abou Madiân a laissé des recueils de 
        sentences soigneusement ciselé s, denses, parfois d'une obscurité 
        peut-être voulue, sur lesquelles se sont exercées la sagacité 
        et l'ingéniosité des commentateurs. Les unes sont pleines 
        de bon sens, les autres comme systématiquement paradoxales.------------" 
        C'est la corruption du peuple qui enfante les 
        tyrans et c'est à la corruption des grands qu'est due l'apparition 
        des fauteurs de troubles " est une maxime qui fait penser 
        à la phrase de Joseph de Maistre sur les abus et les révolutions. 
        " Qui se connaît soi-même ne 
        se laisse pas séduire par les flatteries... La prétention 
        vient de la sottise... Celui qui regarde les créatures avec concupiscence 
        perd l'expérience et le profit qu'il pourrait tirer d'elles... 
        " ne manquent pas de finesse psychologique, de même 
        que " Prends garde aux novateurs, tu épargneras 
        ta religion ; prends garde aux femmes, tu épargneras ton coeur 
        " , se réclame de toute une tradition de moralistes.
 ------------Il 
        insiste surtout sur la nudité spirituelle, la libération 
        de tout le contingent. " N'arrive pas à 
        la liberté parfaite celui qui doit encore quelque chose à 
        son âme... Le cur n'a qu'une direction ; quand il la prend, 
        il s'éloigne des autres... Quand la vérité apparaît, 
        elle fait tout disparaître... Celui qui a la réalité 
        de la dévotion ne prend au sérieux ni ses actes, ni ses 
        états, ni ses propos... Toute vérité qui n'efface 
        pas la marque et les traces de l'être n'est pas une vérité... 
        Le signe de la sincérité, c'est la disparition du créé 
        lors de la contemplation du Réel (al-haqq). "
 ------------Il 
        professait que le brisement du coeur du pécheur vaut mieux que 
        le zèle content de soi du vertueux. il préférait 
        même la négligence accompagnée d'humilité à 
        l'effort rendu vain par l'orgueil.
 ------------Il 
        se plaçait dans la perspective théocentriste : " Regarde 
        le fait que Lui te regarde et non le fait que toi tu Le regardes... C'est 
        la présence de la vérité qui est le paradis, son 
        absence qui est l'enfer. .Sa proximité est joie, son éloignement 
        tristesse, sa compagnie vie, sa séparation mort. Le fruit du çoufisme 
        c'est l'abandon confiant de tout ton être. Les épreuves sont 
        la preuve de l'agrément divin. La Vérité (qu'elle 
        soit exaltée !) on ne la voit que quand on meurt. "
 ------------Les 
        poèmes de Sidi Aboû Madiân sont encore chantés 
        dans les concerts spirituels et accompagnent les danses extatiques. Ils 
        ont été réunis en un diwan (Par Chaouar 
        de Tlemcen, édité à Damas en 1357/1938. Toutes les 
        attributions ne sont pas certaines. quelques traductions de quelques poèmes 
        ont été publiées dans L'Islam et l'Occident, 1947 
        ; dans la revue Simoun, Oran. 1952.). Les uns sont des qacidas 
        classiques, monorimes ; les autres des mouwachchah, genre andalou 
        suivant des règles différentes, ou des zajal qu'on 
        appelle aujourd'hui melhoûn, en dialectal, avec strophes 
        et scansion plus syllabique que métrique.
 ------------On 
        y trouve, avant Ibn Khamîs de Tlemcen et Ibn al Fâridh du 
        Caire, les thèmes de la poésie mystique arabe avec le symbolisme 
        amoureux et bachique qui n'a cessé de se développer jusqu'à 
        nos jours. Les idées sont celles des sentences auxquelles les résonances, 
        les rythmes et les irisations de la poésie donnent une valeur d'efficacité.
 ------------Mes 
        heures sont embellies par un Bien-Aimé nôtre dont l'amour 
        est non trésor.
 ------------Nous 
        désirons Quelqu'un dont il nous est impossible de nous passer.
 ------------Moi 
        je suis le cheikh de la boisson et l'échanson des beautés. 
        Je me plais au déchirement des vêtements (Tantzlq, 
        action de déchirer ses vêtements pendant un certain état 
        d'extase.).
 ------------Etendez 
        mon tapis de prière. Approchez de moi l'aiguière ; vin sur 
        vin.
 ------------Répandez 
        l'usage de mes concerts, ô maîtres de la réalisation.
 ------------O 
        Moi ! Qui est " Moi " ? En vérité, je suis perdu 
        dans l'ivresse.
 ------------Faites-moi 
        entendre la douceur des musiques et peut-être qu'alors je " 
        saurai ".
 ------------Selon 
        son serviteur le nègre Bilâl, Aboû Madiân récitait 
        souvent ce vers :
 ------------Dis 
        : Allah ! et abandonnes l'existence et tout ce qui s'y rapporte, si ta 
        volonté s'attache ait véritable but.
 VERS LE LIEU, PROPICE 
        AU SOMMEIL. ------------Aboû 
        Madiân était parfois l'objet des critiques des ulémas 
        littéralistes, des juristes exotériques, et sans doute ne 
        les convertissait-il pas tous à la " connaissance nécessaire 
        ", comme il avait fait pour Aboû Zahr. fonctionnaire enrichi 
        qui avait distribué ses biens aux pauvres. Certains le dénoncèrent 
        au calife almohade, insinuant que son prestige pourrait l'inciter à 
        se présenter comme mahdi. Le mahdi est le personnage 'qui doit 
        paraître à la fin des temps, faire triompher la religion 
        et aider Jésus à vaincre l'antéchrist. L'inspirateur 
        de la dynastie almohade, au début du siècle, Ibn Toumert, 
        s'était intitulé mahdi. La fin du monde n'était pas 
        venue ; Abdelmoumine et ses héritiers s'étaient fortement 
        installés dans ce monde et avaient réalisé le plus 
        brillant des empires maghrébins, allant d'Espagne à Tunis. 
        Après avoir favorisé la pensée libre et encouragé 
        les philosophes, Yaqoûb et Mançoûr, engagé dans 
        la guerre, avait jugé nécessaire de s'appuyer sur ce qu'on 
        appelle les forces spirituelles, et il avait sacrifié les philosophes, 
        Averroès, et même les mystiques, au clergé des uléma 
        et des foqaha ennemis de la spécula tion. De ce revirement date 
        sans doute le principe de la décadence intellectuelle du monde 
        musulman qui eut tout juste le temps de passer la philosophie à 
        l'Europe, tandis que le çoufisme s'abritait dans les organisations 
        confrériques.------------Le 
        calife Yacoûb fit donc dire à Aboû Madiân de 
        venir au Maroc, ordonnant au goum de Bougie de l'accompagner avec égards. 
        Comme ses amis s'affligeaient, il leur dit que sa mort était prochaine 
        mais qu'elle devait survenir ailleurs qu'à Bougie. Vieux et infirme, 
        il n'avait plus guère de force pour bouger ; aussi le Tout-Puissant 
        lui avait-il fourni une escorte pour le conduire au lieu de son repos. 
        Il mourrait d'ailleurs avant d'atteindre le Sultan, lequel ne tarderait 
        pas à le suivre. Plusieurs de ses amis, apaisés par ses 
        paroles, partirent avec lui.
 ------------Comme 
        ils arrivaient aux bords de l'Isser, non loin de Tlemcen, au lieu dit 
        Aïn Taqbalet, le vieillard se sentit fatigué. Voyant au loin 
        le fort (ribath) d'El Eubbâd, il murmura : " Que ce lieu est 
        propice au sommeil. " Il descendit de sa monture et l'on installa 
        le campement. Après avoir râlé trois heures, il fit 
        la chahada et dit : " Ailalhou al Haqq. 
        Dieu est la Vérité " et mourut. Son corps 
        fut transporté à El Eubbâd où les Tlemcéniens 
        lui firent d'émouvantes funérailles.
 ------------C'était 
        en l'année 594 de l'Hégire (13 novembre 1197 - 3 novembre 
        1198) et il avait environ 85 ans. Aboû Yoûssouf Ya'qoûb 
        al Mançoûr mourut en 595 (ianvier 1199) après quatorze 
        ans de règne. Averroès, que le calife avait rappelé 
        à sa cour, mourut lui aussi, en route, comme Aboû Madiân, 
        la même année 594.
   SIDI 
        BOUMEDINE. ------------Depuis 
        lors, le hameau d'El Eubbâd (les Dévots, les Adorateurs) 
        porte le nom de Sidi Boumedine (prononciation populaire de Sidi Aboû 
        Madiân). Bien que Sidi Daoudi soit toujours vénéré, 
        c'est Sidi Boumedine qui lui a succédé comme patron du pays, 
        moul et bled. C'est au nom de Sidi Boumedine et Ghouts que les mendiants 
        demandent l'aumône. C'est à lui que les poètes viennent 
        demander l'inspiration et les étudiants le succès de leurs 
        travaux. Les poètes ont chanté les beautés du lieu, 
        les grâces que l'on y trouve pour ce monde et pour l'autre, la paix 
        et la joie qu'on y respire. On y venait en pèlerinage de fort loin, 
        d'Egypte, de Syrie, d'Iraq, et du Sous. Les voeux y sont exaucés 
        et les prières qu'on y fait rapprochent de Dieu.------------La 
        première visite d'Ibn Battouta, passant à Tlemcen, en 1349, 
        fut pour Sidi Boumedine. Ibn Khaldoûn fit retraite au cours de sa 
        vie aventureuse et professa dans la Médersa voisine en 1369. Léon 
        l'Africain et Marmol en parlent au XVI' siècle. Mais le plus beau 
        pèlerinage individuel fut sans doute celui d'Aboû 'I Abbâs 
        Ahmed, sultan déposé de Constantine, allié du mérinide 
        Aboû Salim, qui, en 1359, sur la tombe d'Aboû Madiân, 
        s'engagea par serment à ne rendre le mal que par le bien.
 ------------Les 
        monuments actuels, chefs-d'oeuvre de l'architecture et de la sculpture 
        maghrébine, sont dus aux Mérinides, sultans de Fès, 
        qui occupèrent un certain temps Tlemcen aux dépens de la 
        dynastie locale des Banou Zeïan ou Abdelwadites. La politique des 
        Mérinides s'appuyait volontiers sur les médersas et les 
        sanctuaires, ce qui nous a valu de nombreuses oeuvres d'art. La tombe 
        d'Aboû Madiân fut de leur part l'objet d'une vénération 
        toute spéciale, soit piété sincère, soit déférence 
        calculée pour le patron d'un pays conquis. Ils édifièrent 
        autour d'elle une mosquée, une médersa, une hôtellerie, 
        un hammâm. Le mausolée proprement dit datait de l'Almohade 
        Mohammed en Nacer (vers 1200) qui avait eu à coeur de réparer 
        les torts de son père à l'égard du Pôle des 
        Saints. La mosquée fut construite par Aboûlhass.n le mérinide, 
        mort en 1351.
 ------------On 
        arrive par une petite place triangulaire à la pointe de laquelle 
        se trouve la petite tombe dite de Sidi et Eubbâd. Par une porte 
        à auvent et un petit couloir on accède à une cour 
        étroite et longue, séparant la mosquée (au sud) et 
        le mausolée (au nord). Une porte en arc brisé, encadrée 
        de faïences, surmontée d'un auvent porté par deux colonnes 
        donne accès à l'escalier dont les huit marches en carreaux 
        de faïence conduisent à une cour carrée où quatre 
        colonnes d'onyx supportent des arcades en fer à cheval, et qui 
        précède la chambre sépulcrale couverte d'un dôme 
        à douze pans couvert luilr.€me à l'extérieur 
        d'un toit de tuiles vertes à quatre pentes. Le plan général 
        date de la fin du XII" siècle almohade. L'ornementation très 
        riche date d'Yaghmorassan, le fondateur de la dynastie des Banou Zeïan 
        (XIII s.), d'Aboûlhassan le mérinide, au X1V` et des Turcs 
        aux XVII, et XVIII' siècles. De petites fenêtres donnent 
        un jour très discret à travers des vitraux bleus, verts, 
        rouges, orangés. Dans la pénombre, on distingue les ex-votos 
        : neufs d'autruche, lustres de cristal, étendards de soie, tableaux, 
        tentures brodées d'or. Les douze pans de la coupole sont décorés 
        de vingt-quatre arcades en plein cintre d'où partent des combinaisons 
        géométriques aboutissant à une étoile de vingt-quatre 
        pointes. En bas, un lambrissage de faïence bleue, blanc rosé, 
        violet de manganèse, vert de cuivre, et jaune, est d'époque 
        turque et de fabrication sans doute italienne. Perpendiculairement au 
        mur du fond s'allongent les catafalques de Sidi Aboû Madiân 
        (à droite) et de Sidi Abdessalâm et Tounsî (mort dans 
        la première moitié du XII, siècle) recouverts des 
        habituelles soieries. A côté de l'escalier, un puits sacré, 
        dont la margelle d'onyx est profondément entamée par le 
        frottement de la chaîne. Une arcade donne accès à 
        deux petits cimetières, l'un à ciel ouvert, l'autre dans 
        une chambre pavée (W. et G. 
        MARÇAIS - Les monuments arabes de Tlemcen, 1903, p. 230. G. MARÇAIS. 
        - Manuel d'art mersuhnan, 1937.11, 474. A. BEL. -- Tlemcen, p. 69. BROSSELARD. 
        --- Inscriptions arabes de Tlemcen, Revue Africaine, 1559.).
 ------------Sidi 
        Aboû Madiân n'est pas oublié à Fès qui 
        vit ses débuts dans les études et la voie mystique. Il y 
        a un magânn dans le quartier d'Errmîla : une placette, une 
        mosquée en ruines avec une petite cellute, sa Khaloua, une 
        source, un palmier entre la rivière et la mosquée. Certains, 
        peu nombreux, assurent qu'il y a un corps sous le catafalque. L'eau de 
        la source guérit les fièvres quand on se lave pieds ei mains, 
        ou tout le corps, après avoir accroché un chiffon à 
        la porte et mis deux pains pour les pauvres dans une niche. Comme le saint 
        demandait de l'eau pour ses ablutions, une vieille lui avait dit " 
        Tu ne ferais pas tant d'ablutions si tu avais 
        à aller chercher ton eau. "Aboû Madiân 
        avait alors enfoncé dans la terre un pieu à travers le feu 
        d'un four, et l'eau avait jailli. Avant le délabrement de la Mosquée, 
        les émigrés tlemcéniens venaient y faire le dzikr 
        le Vendredi, et un tha'am annuel. Les Tlemcéniens émigrés 
        à Damas y ont installé une zaouïa de Sidi Aboû 
        Madiân.
 LA PROCESSION DES CONFRERIES. ------------Vers 
        le village de Sidi Boumédine, monte, de Tlemcen, trois fois par 
        an, pour l'Aïd es Sghir, à la fin du Ramedhan, pour l'Aïd 
        et Kebir, la fête du mouton, et pour le Mouloud, naissance du prophète 
        (La procession porte alors le nom de Techouicha.). 
        une impressionnante procession.------------Dans 
        la vallée, près du cimetière, au carrefour d'Aïn 
        Ouazouta, après un caroubier sacré effondré niais 
        qui bourgeonne encore et dont le tronc couché à plat sur 
        le bord de la route est couvert de pierres ~,otives et de chiffons propitiatoires, 
        a lieu la fates des enfants. Les carrosses, fiacres de louages à 
        1a mode de 1900, tirés par des paires de chevaux plutôt maigres, 
        les conduisent en bandes bruyantes devant les éventaires des marchands 
        de gâteaux : maqrouts, ghribiyas, ka'aks, zlabiyas ruisselantes 
        de miel. Et l'on se prend à évoquer un autre saint de Tlemcen, 
        le charmant " fou de Dieu " Sidi et Halwî, qui après 
        avoir été cadi de Séville, finit ses jours ici, dansant 
        et chantant dans les rues en vendant des bonbons aux enfants.
 ------------Le 
        cortège passera le long du vieux cimetière devant la qoubba 
        d'un cadi si extraordinairement honnête que cela parut mériter 
        la canonisation. Il laissera à gauche, près d'une source, 
        sous un frêne, les six arcades romantiquement ruinées de 
        Sidi-Bou-Ishaq et Tayyar, le Volant, qui faisait la prière de midi 
        à la Mecque, celle de l'açr à Jérusalem et 
        revenait à Tlemcen, pour le coucher du soleil. A droite, il apercevra, 
        au milieu des tombes aux stèles grises, mauves, ocres, vieux rose, 
        bleu pâle. vert d'eau, entre les vieux figuiers et les admirables 
        cyprès du cimetière neuf, les tuiles vertes sous lesquelles 
        repose le grand théologien Snoussi, sensible, timide et délicat, 
        qui recommandait à ses disciples de ne pas écraser les insectes 
        sur les routes, et parmi les nombreuses vertus merveilleuses duquel on 
        compte le fait qu'il rendait les livres prêtés avant qu'on 
        ait eu l'idée de les lui réclamer. Il montera alors la côte 
        jusqu'à la petite place triangulaire dont nous avons parlé, 
        qui précède les bâtiments du sanctuaire et de la mosquée. 
        Une terrasse, devant deux cafés maures domine la placette et permet 
        un coup d'aeil d'ensemble.
 ------------Chacun 
        a mis un costume neuf. Les petits garçons courent dans des vestons 
        d'étoffe fantaisie ou drapés dans des burnous blancs ou 
        roses. Des petites filles ont revêtu comme pour la nuit de leur 
        premier jeûne, de longues robes de soie couvertes de lourds bijoux 
        ; elles ont sur la tête le mendil lamé d'argent dont les 
        franges roses retombent sur leurs épaules, ou le tâj l'étrange 
        bonnet pointu qui " couronne " gracieusement leur chevelure 
        brune.
 ------------Le 
        bruit monte des bendaïr et des ghaïtas. La route devient poudreuse. 
        Des bannières de soie blanches, vert pâle, orange, mauve, 
        apparaissent. Voici le confrérie des Hamdaoua qui arrive avec ses 
        joueurs de, tambourins et ses danseurs. Sur un rythme anapestique obsédant, 
        les khouan se penchent en avant et en arrière tout en achevant 
        de gravir la côte. Trois d'entre eux montent à reculons. 
        Ils sont si excités ou cherchent ài paraître si excités, 
        que d'autres frères les retiennent par le bras, cependant qu'avec 
        de beaux gestes cadencés une femme essuie tout en marchant la sueur 
        qui coule sur leurs visages.
 ------------Voici 
        maintenant les abïd, les nègres, la troupe la plus 
        bruyante avec leurs énormes tambours, tboul et leurs qraqeb, 
        castagnettes géantes de fer, dont ils ne ménagent pas l'usage. 
        Les plus vieux ont des colliers de barbe blanche autour de leur face noire. 
        Ils vont la plupart du temps sur un rythmei iambique, et, chose curieuse, 
        cette procession, comme le fameuse procession d'Echternach dans le catholique 
        Luxembourg en l'honneur de Saint Villibrod qui guérissait les nerveux, 
        comporte une avancée interrompue par une légère marche 
        en arrière, comme la cadence des vagues à, la marée 
        montante.
 ------------Comme 
        intermède, voici les profanes joueurs de guellal qui ont quitté 
        aujourd'hui le quartier réservé pour venir chanter aussi 
        et danser en l'honneur de Sidi Bou Médine. Frappant la peau qui 
        clôt le grand vase de terre pendant à leur droite par une 
        Borde qui passe sur leur épaule gauche, ils avancent à petits 
        pas sur le plus entraînant des rythmes et reculent après 
        avoir recueilli, collés avec de la salive sur le front, non plus 
        des pièces d'or ou d'argent, mais des billets généralement 
        assez fripés.
 ------------Le 
        clou de la fête est le défilé des Aïssaoua. Derrière 
        les étendards aux soies flottantes alourdies de broderies d'or, 
        les joueurs de tambourins et de hautbois acides plongent la troupe et 
        à un certain degré l'assistance, dans une sorte d'hypnose. 
        Ils ne s'arr etent que pour laisser aux vieillards de la conférie 
        le temps de prononcer, pour qui le demande, quelque invocation qui remplit 
        la corbeille du frère quêteur. Certains danseurs semblent 
        se livrer à quelque obsédante passion, ou à quelque 
        cure presque douloureuse.
 ------------Voici 
        un danseur qui s agite dans une souple gandoura les mains croisées 
        derrière le dos. Il a perdu sa chéchia en route et son crâne 
        rasé rend un peu brutale sa figure aux peux clos. Tout d'un coup, 
        il sort des rangs, se jette sur un jeune homme de l'assistance et veut 
        le mordre au mollet. On le retient à temps et le jeune homme, quitte 
        pour la peur, gravit en hâte le talus. Alors l'homme se met , genoux, 
        les mains toujours dans le dos, et, la bouche au sol, veut manger une 
        pierre. Son surveillant l'empêche encore cette fois de faire un 
        malheur. D'autres frères d'ailleurs font une haie entre les énergumènes, 
        les enthousiastes au sens grec du mot, et la foule et assument non sans 
        fatigue le service d'ordre, Certains khouan se transforment psychiquenrent 
        en chien, en chacal, en chameau, en lion et miment les gestes de ces animaux. 
        Une femme saute en ondulant comme un serpent.
 ------------Sur 
        la place s'organise une danse générale en cercle. Les Khouan 
        ne tiennent par les mains qu'ils secouent violemment en cadence. Ils agitent 
        rythmiquement les reins, les épaules, la tête. Ils font de 
        lents mouvements plongeants de temps en temps, un saut et une pirouette.
 ------------Il 
        faut faire un effort pour détailler tout cela, pour échapper 
        à l'envoûtement, pour ne pas sortir de soi-même par 
        l'étrange porte ouverte par les rythmes et les timbres. On s'aperçoit 
        alors que le sabbat est mené par un grand diable maigre drapé 
        de blanc et auquel ne manque même pas la barbiche de Méphisto. 
        Il anime les danseurs, il centre leur agitation. il canalise leur frénésie, 
        il ordonne leur folie, il règle leur ivresse. Son geste préféré 
        est de lancer alternativement un bras à gauche puis un bras à 
        droite, en levant très haut, genou ployé, la jambe du même 
        côté. comme indiquant du doigt tendu l'orient et l'occident. 
        Et soudain nous le voyons qui prend son vol dans un bond vertical avec 
        double entrechat.
 ------------Toute 
        'l'après-midi résonnent les bendaïr, les gargabou, 
        les thboui, et les ghaïtas ; toute l'après-midi dansent les 
        khouan ; avant de redescendre sur la grande route de Tlemcen, les diverses 
        conféries présentes pénètrent dans le sanctuaire.
 ------------On 
        se demande comment elles s'y prennent, en un si petit espace et avec une 
        telle cohue. Il est en tout, cas difficile de pousser plus loin l'observation.
 ------------Je 
        me suis demandé d'abord quel rapport pouvait exister entre le savant 
        plutôt austère dont nous venons de dire la vie, et l'exubérance 
        de cette foule ; ee que le Pôle, le Ghouts, l'auteur des poèmes 
        raffinés et des sentences subtiles, le professeur de Bougie qui 
        portait ombrage au sultan de Marrakech, pourrait panser de toute cette 
        frénésie. C'était sans doute un point de vue extérieur 
        et simpliste. L'étude de l'hagioura des pratiques mystiques et 
        des fêtes populaires, semble bien montrer qu'il n'y a pas contradition. 
        Non seulement, il faut des méthodes diverses adaptées aux 
        diverses catégories d'individus, mais il y a temps pour tout, pour 
        l'étude, pour la méditation, pour la prière rituelle, 
        pour les séances de concert spirituel et danse extatique. pour 
        les réjouissances collectives. Dans tous les cas, ii y a une énergie 
        qui se concentre ou se libère, dans tous les cas, une ferveur et 
        un amour qui s'épanouissent. La détente elle-même 
        est nécessaire pour poursuivre l'effort. Et c'est peut-être 
        justement parce qu'il est le ghouts, le grand secours, prenant sur lui 
        les douleurs et les peines, que Sidi Bou Médine accueille avec 
        bienveillance le joyeux délire de ces pélerins passionnés.
 BIBLIOGRAPHIE. ------------Sur 
        Sidi Aboû Madiân, voir surtout------------YOUSOUF 
        ET TADILI dit Ibn-az-Zeyyàt (mort vers 1230), Taclmawwouf (manuscrit 
        dont les extraits m'ont été obligeamment communiqués 
        par Hadj Ahmed Bennani).
 ------------IBN 
        ARABI (mort en 1240) - Foutoûhât al Makkiya, Boulaq, 1293-1876, 
        I, pp. 288, 318, 330, 838. -- Mouhâdarat al abrar, Le Caire, 128t1-1865, 
        1, 76, 145, 171, 178, II, 11, 24, 60,. 111. 128. 179. - lawâgî 
        an noujoum, Le Caire, 1325-1907, 69, 71, 96, 114, 116, 117, 151, 152, 
        166, 171, 196. - Arnr 11,
 ------------GHOBRINI 
        (mort en 1314), Onouan ad diraya, ALGER, 1328-1910.
 ------------ABOU 
        ZAKARYA Yahya ibn Khaldoûn (mort vers 1376), Histoire des Beni Abd-elWad. 
        rois de Tlem
 cen, trad. Bel. 1. 1903.
 ------------IBN 
        QONFODH (mort vers 1406), Ouns al fagir, Ms Rabat 385, Wafayat, éd. 
        Pérès, ALGER, 1939, p. 46.
 ------------IBN 
        MERIEM (écrit vers 1475), Bostân, trad. Provenzali, 1910.
 ------------CHA'RANI 
        (mort en 1565) Ath Thabaqât al koubra, LE CAIRE, 1343-1925, 133, 
        135.
 ------------IBN 
        AL QADHI, Jadhouat al iqtibâs, Ms 504. Bibliot. Univ. ALGER, fol. 
        138, 139.
 ------------IBN 
        AL ABBAR, Takrnila, éd. Codera 11, 175, N" 2015.
 ------------AHMED 
        BABA (mort en 1627) ; Naïl et Ibtibâj, en marge de Dibâj 
        d'Ibn Fahroûn, 1351-1932, pp. 127-129 Kifayat. ms, fol. 35-37.
 ------------MAQQARI 
        (mort en 1632), Nafb, at tib. Le Caire, 4 VOL. 1304-1887, IV, 269, 274.
 ------------BOU 
        RAS, Voyages extraordinaires, trad. Arnaud, 1880, pp. 88-89.
 ------------IBN 
        ASKAR, Daouhat an nâchir, trad. Graulle, 1913 p. 113.
 ------------RAWDH 
        AL QARTAS, tract.. Beaussier, 1860, pp. 365. 385, 386.
 ------------KETTANI, 
        Çalouat al anfâs, Fès, 1316-1898, I, 364-366.
 ------------HAFNAOUI, 
        Tarif al khalef, 1909.
 ------------ABDELHAMID 
        HAMIDOU, Sa'adat al abadiya, Fès, 1935.
 ------------ABBE 
        BARGES, Tlemcen, 1859, pp. 260-317. -- Vie dag, célèbre 
        marabout Cidi Abou Medien, autrement dit Bou-Médin, 1884.
 ------------MOH. 
        BEN CHENEB, Essai sur les personnages mentionnés dans l'idjâza 
        du Cheikh Abd et Qadir el'Fâ
 sy ; IV" congrès des Orientalistes, ALGER, 1905, PARIS, 1908, 
        N" 350, pp. 531-532.
 
 ------------Pour 
        les sentences et poèmes d'Aboû Madiân, outre 
        les ouvrages cités en notes, voir
 ------------BIDAYAT 
        AL MOURIDIN, Ms 938, Bibliot. Nat. Alger.
 ------------OUNS 
        AL WAHID, Ms 2-105 (8) fol. 337-343, Bibliot. Nat. PARIS, édité 
        au Caire 1301-1884, avec un commentaire de Ahmed Bâ'chan.
 ------------TAHFAT 
        AL ARIB, pub. et trad. en latin par F. de DOMBAY, Vindobonae. 1805, Ebn 
        Médirai Mauri Fessani Sentenciae quaedam arabicae.
 ------------DIWAN, 
        édit. Chaouar de Tlemcen, Damas, 1357-1938.
 
 ------------Voir 
        aussi : Bibliothèque Nationale Paris, Ms Arabes 1230, 3410, 4585, 
        5320. Bibliothèque Nat. Alger. Mss 59, 376, 1859.
 ------------Medersa 
        de Tlemcen, Mss. 28, 84.
 
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