Alger, Algérie : documents algériens
Série culturelle :fÈtes religieuses
Le Mouloud à Alger et Sidi Abderrahman
5 pages - n°43 - 2 janvier 1950

-La fête du Mouloud, de la naissance, le Noël islamique, fut considérée de bonne heure comme une innovation justifiée. On la célébrait par des processions et des sermons dans l'Egypte des Fatimites au XIè siècle. Au début du XIIIè en Orient, à Arbela, un beau-frère de Saladin, ainsi que le rapporte Ibn Khallikàn, offrait à cette occasion un grand repas au peuple ; passait ses troupes en revue, envoyait des cadeaux aux derviches, faisait faire une procession nocturne aux flambeaux.

mise sur site le 21-02-2005
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----------Le Mouloud, anniversaire de la naissance du Prophète, le 12 rabi' premier, tombe cette année le 2 janvier. C'est à coup sûr l'une des fêtes les plus populaires en Afrique du Nord, même si elle n'a pas le prestige liturgique des deux aïds, l'aïd Sghir, qui termine le jeûne du Ramadhan, l'aïd el Kébir, fête du sacrifice solennel à l'issue du pèlerinage.
----------L'année musulmane étant lunaire et plus courte de onze jours que l'année solaire, chaque mois fait en trente trois ans le tour des saisons et le Mouloud tombe actuellement en hiver. Mais c'est au printemps comme l'indique d'ailleurs le sens étymologique du mot rabi', que naquît, à la Mecque, dans la fraction hachimite de la grande tribu de Qoraïch, celui qui devait devenir Sidna Mohammed l'Envoyé d'Allah. C'est également un 12 du même mois, qui tombait alors en été, que, le 8 juin 632, le Prophète mourut à Médine, après avoir accompli une mission qui devait marquer un tournant de l'histoire.
----------La fête du Mouloud, de la naissance, le Noël islamique, fut considérée de bonne heure comme une innovation justifiée. On la célébrait par des processions et des sermons dans l'Egypte des Fatimites au XIè siècle. Au début du XIIIè en Orient, à Arbela, un beau-frère de Saladin, ainsi que le rapporte Ibn Khallikàn, offrait à cette occasion un grand repas au peuple ; passait ses troupes en revue, envoyait des cadeaux aux derviches, faisait faire une procession nocturne aux flambeaux. Pour l'Occident, le Sultan méridine Abou Yacoub, fit de la " nuit bénie " une fête officielle dès 1292, et nous savons que les cours de Fès et de Tlemcen célébraient pompeusement, au XIVè siècle, le Mouloud, qui n'a cessé d'être une des fêtes les plus chères au cœur des Maghrébins, la coutume n'ayant pourtant été définitivement adoptée en Tunisie qu'aux environs de 1400.
----------La procession aux flambeaux se retrouve en divers endroits. Sur les hauts plateaux d'Algérie, les jeunes gens font parler la poudre. Un taleb chante le panégyrique du Prophète, auquel répondent les refrains des assistants porteurs de grands cierges de cire aux formes ingénieuses et de diverses couleurs. A Salé, la procession se fait la veille de la fête avec de grands cierges-candélabres monumentaux décorés d'alvéoles multicolores. Elle visite les différents sanctuaires et se termine à Sidi Ab'dallah ben Hassoun où les cierges sont suspendus jusqu'à l'année prochaine. Selon la tradition, c'est le Sultan saadien, Ahmed al Mansour, qui aurait introduit cette coutume pour l'avoir admirée à Constantine.
----------Ce Sidi ben Hassoun vivait au XVIè siècle, et est un exemple pour nos temps de luttes effrénées. Originaire des Slès, il remarqua qu'il perdait la sérénité de son âme quand il s'agissait de querelles de çofs, de questions politiques ou tribales. Il se réjouissait immodérément quand les siens avaient le dessus sur d'autres musulmans, sur d'autres hommes. Il se reprocha donc la joie qu'il éprouvait à voir souffrir d'autres fils d'Adam, d'autres serviteurs de Dieu, et il vint à Salé. Ses compatriotes le conjurèrent de rentrer chez eux. Sans répondre, il alla remplir un vase à la mer et le déposa sur le sol.
----------- Vous voyez, dit-il aux envoyés, cette eau. Tout à l'heure si agitée dans la mer, comment se fait-il qu'elle reste maintenant immobile et calme ?
- C'est qu'elle a été retirée de la mer.
- Vous avez raison,
dit le saint. L'exil épure et calme. Je resterai ici.
----------Dans plusieurs villes et notamment à Meknès, le Mouloud est la grande fête des Aïssaouas et donnait lieu à l'impressionnante procession avec des milliers d'adeptes enthousiastes.
----------A Tlemcen, c'est dans les maisons qu'on allume des candélabres avec des bougies de cire verte. On met le henné aux filles, on donne des pétards aux garçons. Le matin, les petites filles. vêtues de leurs plus beaux habits, enveloppées du haïk et couvertes de bijoux, font des visites et mangent du fanid, pâtisserie faite de farine, de cire d'abeilles et de sucre, pétrie en forme de bougie, de chandelier, de panier. Les fiancés envoient de ce fanid à leurs fiancées avec du henné et un mouchoir de soie. Le huitième jour, l'on va en pèlerinage à 'Sidi Bou Médine, vers lequel monte la techouicha
(proprement le nom de la huitième journée qui suit la naissance d'un enfant) la procession des Aïssaouas et autres confréries populaires en dansant frénétiquement au son des bendir et des raïtas.
----------Dans les montagnes de Kabylie, les gens de la taddert achètent un bœuf dont la viande est partagée entre tous les habitants du village. Le soir, les enfants se promènent avec des bougies allumées dans des tiges de roseaux, réduction de la traditionnelle procession aux flambeaux, en chantant : " C'est aujourd'hui la fête du Prophète. Les anges dans le ciel sont contents et nous aussi ". Une coutume émouvante est de faire participer les absents au repas du soir. Sur la table basse, on pose la cuillère du père qui est allé au pèlerinage, du fils qui est parti travailler à Alger ou en France. Ce qui reste clans les plats est recouvert et emporté : c'est la part des anges.
----------Dans le M'Zab, l'on allume partout des cierges ; les femmes donnent des soirées joyeuses dans les maisons ; les_ hommes passent la nuit à psalmodier dans les Mosquées.
----------A Alger, où nous nous arrêterons davantage, tout le mois du Mouloud est marqué par une intense activité religieuse dans les mosquées en général et tout spécialement au sanctuaire fameux de Sidi-Abderrahmân, dont le tombeau couvert de belles soieries est, plusieurs jours auparavant. dévêtu, nettoyé et revêtu en grande pompe, aux sons des musiques ( Le samedi et le mercredi qui précèdent la fête, quand ce mercredi tombe au moins trois jours avant (cette année les 24 et 28 décembre). On joue des tambourins (bendir) et des thol (tambours) le samedi et l'on distribue du pain et de l'huile. Le mercredi, on joue en outre de la ghaïta (hautbois), et l'on distribue le couscous sucré.).
----------Les enfants confectionnent avec des roseaux et des tiges de fenouils des espèces de lustres compliqués qu'on appelle qoublas, coupoles ou mnâra, lustres et où ils allument de nombreuses bougies colorées. Le gâteau traditionnel, car toute fête doit avoir en Afrique comme en France son plat et ses pâtisseries, est la tammina faite avec de la semoule grillée, du beurre et du miel. Ce plat a été choisi sans doute pour ce jour, parce que c'est celui qu'on apporte aux mères le septième jour de leurs couches.
----------L'élément caractéristique de la fête est la récitation des maoulid. Ce sont des gacidas, des poésies en l'honneur du Prophète, imprégnées d'un ardent amour pour l'envoyé d'Allah, " la meilleure des créatures " et qui ont fini par constituer un genre littéraire spécial. On les lit à la radio. On en fait des recueils imprimés ou manuscrits qui s'accroissent sans cesse, car chaque année on en compose de nouveaux. On les chante à Sidi Abderrahmân.
----------Au lieu de la psalmodie habituelle des hezzabin, chanteurs de Coran, on entend alors clans les mosquées les divers modes de la musique classique. Les chanteurs spécialisés des maoulid, les qeççaïddin, les chantent en effet sur les mélodies anciennes de la musique dite " andalouse ", ou de Grenade, mais sans accompagneraient d'instruments. Chacun (les vendredis, qui suivent la fête, donne ainsi lieu à de pieux concerts, successivement à la Grande Mosquée, à Djamaa Djedid, à Sidi Ramdan, à Sidi Mhammed Chérif, à Sidi Mhammed ben Abderrahmân de Belcourt, à la Mosquée de Kouba.
----------Tous les Algérois et les visiteurs d'Alger connaissent, à l'une des extrémités de la ville haute, le joli monument élevé à la fin du XVIIè siècle par le dey Haj Ahmed al Atchi dans le plus pur style algéro-turc, avec son minaret carré à étages d'arcatures. Il est le principal édifice d'un groupe de sanctuaires bâtis autour d'un cimetière aux vieilles stèles de marbre, aux cyprès centenaires, d'où l'on domine la ville basse, le port, l'immense étendue bleue de la mer. Il y a là Sidi-Mansoûr, au milieu (les Faïences et (les soieries, qu'on y a transporté quand on a abattu la Porte Bab-Azoun.
----------Il y a aussi Sidi Ouali Dada, que les gravures populaires montrent navigant sur un tapis de prière tiré par des poissons. Et' près de sa tombe, le fameux bâton dont il frappa la mer pour déclencher la tempête qui engloutit la moitié de la flotte espagnole en 1541 et obligea Charles Quint. parvenu jusqu'au Fort l'Empereur et dont les canons étaient déjà braqués sur la ville, à lever le siège et à se rembarquer.
----------La salle funéraire de Sidi-Abderrahmân est couverte de carreaux de faïences multicolores et d'inscriptions calligraphiques. Des lustres, des étendards, des neufs d'autruche descendent de la coupole. Le catafalque en forme de lit et à balustrade ciselée qui cache le tombeau, est couvert de soieries anciennes aux nuances délicates et de broderies d'or et d'argent. Huit groupes de colonnes engagés dans les murs subsistent de l'ancien mausolée de 1611, remanié en 1696 lorsqu'on transforma la Qoubba de type hispano-mauresque avec toit de tuiles vertes à quatre pentes, en grande salle de prière, avec mirhab sous une coupole octogonale sur trompes d'angle à la mode turque.
----------Les Qeççaïdines sont assis par terre le long du mur où se creuse le mirhab, la niche vide qui indique la direction de la Mecque et de la prière. Pendant plus d'une heure, ils chantent en choeur les poésies qui racontent pieusement les -merveilles qui ont accompagné la naissance du fondateur de l'Islam, il y a treize siècles, au coeur des déserts de la péninsule arabe, et l'amour fervent dont sont pleins pour lui tous les cœurs musulmans. Puis, les deux paumes levées vers le ciel, avec toute l'assistance, ils récitent la Fatiha, première sourate du Coran.
----------A l'issue de la cérémonie, pendant que les meskines mangent un abondant couscous servi dans des grands plats de bois par les serviteurs religieux de Sidi-Abderrahmân, les invités sont aspergés d'eau de fleur d'oranger et boivent la traditionnelle cherbât, sorte de " sorbet ", épais sirop de sucre rafraîchi, parfumé d'ambre.
----------Quel est donc ce Sidi-Abderrahmân, patron de la ville d'Alger et vénéré comme l'un des grands saints de l'Algérie, vers la tombe duquel affluent les pèlerins particulièrement nombreux en ce mois (le ~Iouloud, et devant lequel aucun plaideur, de si mauvaise foi fut-il, n'oserait se parjurer ?
----------De nombreuses légendes courent sur lui, des récits extraordinaires qu'on répète sans doute sans y croire à la lettre et dont plusieurs sont chargés de l'espèce de vérité supérieur que recèlent bien souvent les légendes.
----------Les uns vous diront que Sidi-Abderrahmân empêcha Alger de tomber dans la mer vers laquelle elle se penche. Ce jour là, Sidi Brahim al Ghobrini, le saint de Cherchell, était venu à Alger les enfants se moquaient de lui et lui jetaient des pierres ; il se leva et porta la main à sa chéchia s'il Veulesait, Alger tombait dans la mer ; heureusement Sidi-Abderrahmân, qui passait par là, l'arrêta au moment oùil n'avait encore penché sa coiffure que selon un angle point trop dangereux.
----------D'autres vous diront que l'austère Sidi-Abderrahmân n'aimait point la danse et les divertissements profanes et qu'il bouleversa le rocheux pays des Beni Salah, dans l'Atlas blidéen, pour punir les gens d'un village qui voulaient l'obliger à participer à leur fête.

 

----------Une autre histoire, fort savoureuse, le montre en compétition avec le santon des Flittas, Sidi Mhanimed ben Aouda, auquel il enseigna pittoresquement la vanité des prodiges que tous les mystiques sérieux considèrent comme des accidents secondaires, plutôt génants et dangereux, le long (le la voie spirituelle, dont l'essentiel est le détachement, la connaissance et l'amour. Sidi ben Aouda avait pour spécialité de dompter les lions, et au siècle dernier encore ses héritiers en promenaient, sagement attachés et pleins de baraka, dans le Tell. Il vint donc voir Sidi-Abderrahmân, monté sur un lion. ce qui, on le conçoit, produisit une certaine sensation dans la bonne ville d'Alger. Sidi Abderramân vit tout de suite que son confrère oranais manquait de modestie. T1 lui offrit l'hospitalité pour la nuit.
----------- Où dois-je mettre mon lion ? demande Sidi ben Aouda.
-----------A l'étable, avec ma vache.
----------Le lendemain matin, le voyageur, voulant repartir, chercha sa monture. En vain. Le lion n'était plus dans l'étable. C'était la vache qui l'avait mangé.
-----------Mais la plus jolie histoire qu'on raconte sur le patron d'Alger, est une variante d'une anecdote mystique qu'on rencontre en Orient et en Occident, au Maroc avec Lalla Miinouna, en Anatolie dans le poème de Jalâleddine Roumi, et jusqu'en France dans les Confessions de Jean-Jacques Rousseau.
----------Donc, Sidi-Abderramân, raconte-t-on, avait l'habitude, quand la tuer était belle, de voguer aux environs d'Alger, assis sur son tapis de prière. Abordant uh jour sur une plage, il rencontra un pauvre berger qui jouait de la flûte avec tant d'ardeur qu'il n'entendit même pas le salâm du saint. C'est qu'il avait fait le voeu de jouer trois jours de suite si le bon Dieu lui envoyait un fils. Cet enfant venant de naitre, il tenait sa promesse, plein de reconnaissance et de joie. Mais Sidi-Abderrahmân n'aimait pas, nous l'avons vu, la musique, et la flûte moins encore que tout instrument. Il déclara que cette façon de remercier Dieu était absurde et même blâmable.
----------- Je n'en connais pas d'autre, dit le berger. Je ne suis qu'un pauvre ignorant.
-----------Le Seigneur ne peut accepter de tels hommages, poursuivit le savant. Je vais t'enseigner la façon de prier et quelques versets du Livre Sacré.
----------Ayant appris au berger la Fatiha et les gestes rituels de la prière, il se rembarqua, satisfait de lui-même et de sa science. Mais bientôt il entendit derrière lui une voix qui l'appelait. Il se retourna et vit le berger. Et le berger marchait sur les flots.
------------ O grand saint, criait-il, viens à mon secours ! Aussitôt après ton départ, j'ai commencé la prière que tu avais eu la grande bonté de m'enseigner. Mais je me suis embrouillé. Ma pauvre tête n'a pas voulu se rappeler les mots sacrés. Je suis bien à plaindre idiot que je suis, et Dieu toutpuissant ne voudra pas m'entendre si tu ne viens pas de nouveau à mon aide.
----------Ainsi donc le saint, le savant, le docteur, avait besoin d'un tapis pour voguer sur la mer ; et le pauvre berger ignorant y marchait les pieds nus. Sidi-Abderramân comprit la leçon, admira en son coeur la puissance et la bonté d'Allah et dit au berger
----------- Ne te tourmente plus, mon ami. Continue comme auparavant à jouer de la flûte pour l'amour (le Dieu. Les actes valent par les intentions, et ceux qui l'aiment de tout leur coeur sont plus près de' Dieu que nous tous.
----------En réalité, Sidi-Abderrahmân Tsa'libi appartenait à la tribu arabe des Tsa'Iba qui occupait la Mitidja, avait eu son heure de prospérité au XIIIè siècle et avait été à peu près ruiné au XIVè siècle par le Sultan de Tlemcen. Il naquit probablement aux Issers, vers l'année 1385 d'une famille (le pieux lettrés. Il vint de bonne heure à Alger. Mais cette ville, alors très modeste, n'avait rien d'une capitale intellectuelle et ce qu'il y trouva fut loin d'étancher sa soif de savoir. Fidèle au conseil du Prophète d'aller chercher la science jusqu'en Chine, s'il le faut, il voyagea d'école en école, pendant de nombreuses années. Il séjourna quelque temps à Bougie, dont les maîtres étaient réputés, passa par Tunis, se rendit au Caire, fit le pèlerinage de la Mecque, étudia de nouveau à Tunis, se fixa enfin à Alger, en 1418, et y vécut encore une cinquantaine d'années. Il habitait, dit-on, une maison dans une impasse près d'une petite mosquée qui a porté son nom jusqu'à sa démolition en 1859, rue (le la Charte, dans le quartier de la Marine. Cette maison elle-même a été démolie vers 1864.
----------Sa vie était consacrée entièrement à l'étude, à l'enseignement, à la composition de ses livres dont les plus connus sont un Commentaire du Coran, le Jawahir, et un ouvrage sur le jugement dernier et les mystères de l'autre monde, l'ouloum et fakhirat, qui a été imprimé au Caire à la fin du siècle dernier.
----------Ce dernier livre regorge de hadits, d'anecdotes, de sentences et de réflexions sur la mort, l'avantage qu'il y a à y penser, la nécessité de s'y préparer, sur les épreuves de la tombe, l'Antéchrist (Dejjâl), Gog et Magog, la Trompette de la Résurrection, le jugement, le pont Cirath, si difficile à traverser, la géhenne, le paradis, l'égorgement de la Mort, l'intercession du Prophète. Il précise que les pauvres seront les premiers à entrer au Paradis ; que les parents y seront accueillis par le sourire des enfants qui les auront précédés dans la mort, comme s'ils étaient allés en avant reconnaître le chemin. Il décrit longuement les jardins, les demeures, les rivières, les cultures, les oiseaux, les nourritures et les boissons du céleste séjour, les houris et leur dot (les bonnes actions). Et il couronne cette montagne de citations, jamais ennuyeuses, en disant qu'au-dessus de toutes les joies, il y a la vision de Dieu face à sa face, son salâm ; en affirmant que le contentement d'Allah vaut mieux que tout le paradis.
----------On dit encore. à Alger que Sidi-Abderrahmân avait d'innombrables élèves, faisait le matin la classe à 1.000 garçons et le soir à 1.000 filles, ce qui montre son désir d'obéir au précepte du Prophète recommandant l'instruction comme un devoir pour tout musulman et pour toute musulmane.
----------Nous avons vu qu'il avait compris la nécessité de ne pas s'en tenir à la seule science extérieure et que le pauvre berger lui avait enseigné la nécessité vitale de l'amour. On le vante d'ailleurs d'avoir su équilibrer harmonieusement les deux voies, l'intérieure et l'extérieure, le droit canon et la théologie mystique. La vénération dont il est l'objet montre que pendant les siècles qui suivirent sa mort, Alger n'était pas seulement une ville de commerçants et de corsaires, niais attachait une suprême importance à l'intelligence et à la spiritualité.

Emile DERMENGHEM.

BIBLIOGRAPHIE

Sur SIDI ABDERRAHMAN, voir notamment
- YAHYA IBN KHALDOUN, Histoire des Beni Abd et Waâd, trad. Bel., Alger, 1913, II, 289.
- HAFNAWI, Ta'rîf et Khalaf bi rijâl es salaf, Alger, 1324/1906, I, p. 63-68.
- AHMED BABA, Naïl al ibtihâj, Fès, 1317, p. 148-151 et Takmibat ed dibaj, ms.
-- Biographie en tête de Kitab al ouloum al fakhirat, Le Caire, 1317.
- ABOU RAS, Voyages extraordinaires, trad. Arnaud, Alger, 1885, p. 20-21 et 164-165 et Revue africaine. 1879, p. 122-123, 1883, p. 147 ; trad. Gorguos, Rev. Afrie. 1861, p. 121-124.
- Complément à l'histoire des BENI ZEIYAN, rois de Tlemcen, ouvrage du cheikh Mo'hamed Abdel-el-Djalil AL-TENESSY, par M. l'Abbé J.J.L. BARGES, 1887, p. 393-396.
- Moh. BEN CHENEB, Etude sur les personnages mentionnés dans l'Idjaza du cheikh Abd et Qadir et Fâsy, Actes du 14,11" Congrès des Orientalistes, Alger 1905, 3me partie, 1908, No 53, p. 269-271.
- DEVOULX, Les édifices religieux de l'ancien Alger, Alger, 1870 ; chap. VII, p. 37 et suiv.. et Revue
Africaine, 1863, p. 176-188, 1867, p. 53.
BROCKELMANN, II, 249, Encyclopédie de l'Islam, s.v. Tha' alibi, par Brockelmann.
G. MARCAIS, Sidi Abd-er-Rahmân, patron d'Alger et son tombeau, Feuillets d'El-Djezaïr, juillet 1941 ; et Manuel d'art musulman, L'architecture, II, 1927, p. 792-795.
- TRUMELET, Les Saints de l'Islam ; les Saints du Tell, 1881, p. 33-40.
- J. DESPARMET, Coutumes, institutions et croyances des indigènes de l'Algérie, trad. Pérès et Bousquet, T. II, eh. II (à paraître), chap. III du texte arabe de 1905.

Sur le MOULOUD, voir notamment
- Encyclopédie de l'Islam, notice de H. Fuchs, à Mawlid, p. 481.
- IBN KHALLIKAN, Wafayât, éd. Boulaq, 1299 II, 550.
- Majmou' al Qacaid, Alger, Roudoci, 1925.
- M. SOUALAH, La Société indigène de l'Afrique du Nord, 311, édit., 1946, II, 226.
- A. GOICHON, La vie féminine du Mzab, 1927, 161-165.
-- A. ROBERT, Fêtes religieuses et pratiques musulmanes. Société archéol. Constantine, 1925, 9-15.
- Rob. BRUNSCHVIG, La Berbérie orientale sous les Hafsides, 1947, 11, 304.
- A. BEL, Tlemcen, La population, 117.
- S. BOULIF'A, Textes berbères en dialecte de l'Atlas marocain, 1909, 168-175.
- DOUTTE, En tribu, 1914, p. 398.
- P. MARTY, L'année liturgique à Tunis, Rev. des Etudes islamiques, 1935.
- A. BRUNEL, Essai sur la confrérie religieuse des Aissaouas, 1926.
- V. LOUBIGNAC, La procession des cierges à Sale, Hespéris, 1945 et 1946.