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EL-ACHOUR
Historiquement, El
Achour est un village dont la création est annoncée dans
le plan Guyot du 12 mars 1842. Voici ce que l'on peut y lire à
propos du futur centre de colonisation.
El Achour est sur un plateau à l'exposition du sud-ouest,
et dominant les terres qui seront données aux colons.
Ces terres paraissent devoir être fertiles et cultivables
surtout en céréales et prairies artificielles.
On remédiera par des plantations imposées aux
concessionnaires à la nudité du sol. Le territoire
se composera d'une ferme domaniale de 100ha environ appelée
El Achour, et de quelques autres propriétés abandonnées
d'environ 23ha appartenant à divers particuliers qui
depuis 10 ans n'y ont fait aucun acte de culture. |
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C'est donc dès sa conception, un commune destinée
à connaître un développement limité, car 123ha,
c'est vraiment peu. Il y avait de quoi installer 10 à 20 familles
au maximum selon la taille des lots.
Par contre le village, si l'on en croit la carte de 1873, paraît
avoir été surdimensionné.
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L'espace protégé
est loin d'être entièrement bâti. On voit sur la
carte des constructions assez dispersées et non jointives,
un maillage de rues inachevé et de grands espaces nus. L'église
est à l'écart du village. Il semble que persiste encore,
sur la gauche, une tour de guet.
Pour éviter des problèmes d'orientation, il faut savoir
que, sur cette carte, le " haut " indique le nord-est et
non le nord.
Le guide Quétin de 1848 signalait une belle fontaine. |
Les circonstances de cette fondation de village illustrent
des principes énumérés dans le plan Guyot, notamment
l'un de ceux évoqués dans le paragraphe sur l'origine des
terrains ; à savoir confiscation des biens beylicaux et des terres
non cultivées.
Au début, lors de sa création en 1842,
El Achour avait été rattaché à la commune
de Dély Ibrahim.
La commune ne devint CPE qu'en 1876.
Le territoire communal
Il a la forme d'un rectangle de 4,5km sur moins de 2km de large. : soit
au maximum environ 700ha. Il n'a pas de limites naturelles ; ses limites
suivent les routes de Draria et de Douéra.
Le territoire s'étend de part et d'autre d'une vallée peu
profonde (50m) aux versants en pente modérée. Les habitations
sont toutes situées sur les dos de terrains qui limitent la commune
; aucune ferme et aucune mechta dans le fond de la vallée. Les
vignes ont été plantées le long de la route de Draria.
Ailleurs on ne voit que des broussailles, même en 1935, ou des pâturages
; et on peut imaginer des cultures de céréales ou de pommes
de terre.
Cette commune d'El Achour est la
plus discrète, la plus petite et la moins peuplée
de toutes les communes du Sahel, et même de toutes les communes
d'Algérie.
C'est aussi l'une des communes les plus européennes.
En 1954 il n'y vivait que 526 habitants, dont 224 européens.
Le pourcentage de musulmans y était alors relativement faible :
58%, contre 69% pour sa voisine de l'ouest (Ouled Fayet) et 89% pour sa
voisine de l'est (Draria).
Il n'y avait dans cette commune aucun hameau, aucun château,
aucune institution originale, aucun monument, hormis un très modeste
monument aux morts, surmonté d'un coq en bronze qui s'était
posé là à une date inconnue et qui a dû s'envoler
en juillet 1962 dans des circonstances tragiques pour Besançon.
Je n'ai pas non plus trouvé trace d'une quelconque personnalité
de stature nationale.
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l'image pour une meilleure lecture (110 ko)
Le territoire
communal
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Le village centre
Il est tout aussi modeste que la commune.
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Il est un peu à l'écart de la route
de Draria .
Outre le carrefour en Y de la photo ci-contre, il
ne possédait guère que 3 rues. Par rapport à
1873, les maisons étaient plus nombreuses et plus jointives,
mais l'emprise totale au sol n'avait pas changé : l'église
était toujours isolée, comme en 1873. Le village s'était
densifié, mais n'avait pas grandi.
La bretelle de la route de Draria arrivait devant le monument aux
morts porteur du coq en bronze
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La desserte de ce
village était assurée par les autobus de la ligne d'Alger
à Douéra, et par eux seuls.
Ces bus ont d'abord été ceux de la société
Seyfried. Cette société fut vendue vers la fin des années
1950 à la société des autocars blidéens. En
1962 c'étaient ses cars Chausson rouges qui faisaient un petit
crochet vers le centre d'El Achour, entre Dély Ibrahim et Baba
Hassen.
Supplément historique rapide
sur le 13 mai et les CSP
Quand on évoque le 13 mai sans préciser, il s'agit d'une
allusion à une énorme manifestation des partisans de l'Algérie
française tenue le 13 mai 1958,
à Alger, devant les bureaux du Gouvernement Général.
La raison de cette manifestation est l'inquiétude des manifestants
face à des rumeurs de " bons offices " anglo-saxons qui
risquaient d'être imposés au faible Gouvernement de Pierre
Pflimlin en cours de formation à Paris. Cette manifestation eut
d'importantes conséquences, à commencer par la naissance
d'un CSP (Comité
auto-proclamé de Salut Public)
présidé par le vainqueur de la " bataille d'Alger "
contre le terrorisme, le Général Massu. Le Général
Salan est alors Commandant en Chef des troupes en Algérie. Des
gaullistes accourus en hâte à Alger persuadent les deux généraux
qu'ils doivent faire appel à de Gaulle, seul capable de sauver
l'Algérie française. Les deux généraux obtempèrent,
et de Gaulle se dit prêt.
Le 28 mai à
Paris Pflimlin démissionne. Les gaullistes ont gagné : certains
comme Soustelle, croyaient sincèrement que de Gaulle serait le
sauveur ; la plupart se moquaient éperdument du sort de l'Algérie.
Le 1er juin, de Gaulle
est investi Président du Conseil par l'Assemblée Nationale.
Le lendemain la même assemblée lui accorde les pleins pouvoirs
pour l'Algérie.
Le 4 juin, le sauveur arrive
à Alger. Ce n'est pas Zorro, mais il masque bien ses intentions,
si toutefois il en possédait de claires à l'époque.
A la foule des Algérois il dit "
je vous ai compris ". C'est bref, ça sonne bien,
c'est agréable à entendre et ça n'engage à
rien. Puis il enchaîne " je déclare
qu'à partir d'aujourd'hui la France considère que dans toute
l'Algérie il n'y a qu'une seule catégorie d'habitants, il
n'y a que des Français à part entière ".
En 1919 cette assertion aurait pu avoir des suites heureuses malgré
l'oubli de l'existence de deux catégories d'habitants. En 1958
elle est à la fois fausse (s'il n'y avait eu qu'une seule catégorie,
il n'y aurait pas eu de problème non plus) et dangereuse pour les
10% d'européens. Que ferait-on des Européens si un jour
la majorité des " Français à part entière
" décidait démocratiquement de n'être plus française
du tout ? L'hypothèse est, en 1958, dans la logique du collège
unique et, vu les circonstances, probable. Personne à l'époque
n'a osé poser la question iconoclaste ; et tout le monde a applaudi.
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Parmi les auditeurs il y avait sûrement des
représentants des CSP des villages ; peut-être même
de celui d'El Achour.
Le CSP du 13 mai, sous la présidence du Général
Massu et la vice-présidence
du Docteur musulman Sid Cara,
avait pris le nom de CSP d'Algérie Sahara. Par la suite,
et surtout après l'investiture de de Gaulle comme chef du
Gouvernement français, il se créa des CSP dans la
plupart des villes et villages d'Algérie, habituellement
dirigés par un officier et mêlant Européens
et musulmans.
Ce fut peine perdue. Dès qu'il sentit son
pouvoir affermi, de Gaulle en octobre, ordonna aux officiers de
quitter les CSP. L'émotion fut si grande à Alger que
le CSP d'Algérie Sahara envoya à Paris une délégation
entièrement musulmane. De Gaulle refusa se la recevoir. Les
CSP perdirent toute influence, et disparurent de facto avant la
Noël 1958.
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