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Edmond T. GRÉVILLE tourne à Alger les extérieurs de son prochain film :
" LE TAPIS VOLANT "

Disciple du regretté LOUIS DELLUC
Edmond T. GRÉVILLE tourne à Alger les extérieurs de son prochain film :
" LE TAPIS VOLANT "

Depuis quelques temps, les auteurs de films font de plus en plus appel à l'Algérie. C'est là un fait qu"on ne saurait trop souligner et qui prouve ben que les ressources cinématographiques de notre pays sont réelles et particulièrement séduisantes.

En février dernier, Jack Lee tournait dans le Constantinois, à Bou-Saâda et à Alger les trois quarts de son importante production en technicolor " South of Algiers ". Jean-Achille Faux s'est récemment installé à Oran ou il prépare la réalisation, maintenant imminente, de " La paix des hommes ". Aujourd'hui, c'est Edmond T. Gréville qui enregistre dans notre belle capitale les extérieurs d'un film provisoirement intitulé " Le tapis volant ".

Cette visite est d'autant plus significative que Gréville compte certainement parmi les meilleurs représentants de l'école française.

Venu à l'écran à une époque que les Jacques Feyder, L'Herbier, Gance,et autres Cavalcanti devaient si magnifiquement illustrer, il est un de ceux, en tout cas, qui sont restés fidèles aux conceptions du regretté Louis Delluc et qui estiment, avec juste raison, que le cinéma doit être, avant tout, " l'art du mouvement ". Un art fait d'un ensemble de moyens, de procédés et de possibilités qui sont sa propriété originale et absolue. Un art majeur. Un art dont il sut, d'ailleurs, découvrir très tôt les véritables promesses et qui lui inspira, dès 1928, un essai absolument remarquable, " Le train des suicidés ". Trois ans plus tard, il nous proposait " Remous " une manière de chef d'œuvre qui lui ouvrait, désormais et toutes grandes, les portes de l'avenir.


TEXTE COMPLET SOUS L'IMAGE.

"Le tapis volant" ne semble pas avoir vu le jour. Je n'ai rien trouvé ni sous ce titre ni sous un autre. La filmographie de Edmond T.Gréville ne mentionne rien à ce sujet. Rien en 1952. En 1953, est noté " l'envers du paradis". Tournage : du 14 janvier au 18 mars 1953 avec Erich von Stroheim. Film aux oubliettes?

Echos d'Alger du 11-6-1952- Envoi : Francis Rambert
sur site oct.2023

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Edmond T. GRÉVILLE tourne à Alger les extérieurs de son prochain film :
Edmond T. GRÉVILLE tourne à Alger les extérieurs de son prochain film :
"LE TAPIS VOLANT"
* Suite de la page 8

Malheureusement, chez nous, les cinéastes n'ont pas toujours le droit de s'exprimer. librement. Aussi, refusant de se soumettre aux lois impératives des marchands, Gréville alla-t-il se fixer bientôt à Londres, où il séjourna jusqu'à la veille de la guerre, s'imposant dans les studios anglais par ses dons exceptionnels d'animateur et l'élégance de son style.

Et puis, en 1939, c'est le retour en France, où il tourne successivement « Menaces a, « Une femme dans la nuit e, « Dorothée cherche l'amour a et « Le diable souffle»

Une activité dont l'origine remonte si loin dans le temps laisserait volontiers supposer qu'Edmond-T. Gréville est ce qu'il est convenu d'appeler un honorable vétéran et qu'il porte tous les stigmates d'une sénilité naissante. Pas du tout ! L'homme que j'ai devant mol est un homme jeune, à l'allure sportive et, ce qui ne gâte rien, d'une extrême complaisance. Il y a peut-être une raison à cela, car je ne tarde pas à apprendre que Gréville était autrefois journaliste.
— Eh ! oui, me dit-il... La aussi j'ai débuté de bonne heure. Songez un peu, à vingt et un ans j'étais rédacteur en chef de « Vu = ! J'aurais pu, bien sûr, poursuivre dans cette voie. Mais le cinéma m'attirait. Alors, j'ai tenté résolument ma chance.
— Et vous avez réussi !
— Mon dieu, je ne regrette rien.-Mon métier me plaît énormément. Il m'a valu bien des déceptions ; mais, d'autre part, bien des joies. La joie de découvrir, par exemple, des horizons nouveaux et inespérés. Des pays comme le vôtre, si riche de lumière, si exaltant sous son ciel céruléen. Je dois vous avouer qu'à mon arrivée, j'ai eu très peur.

Alger baignait dans le brouillard. Fort heureusement, tout s'est arrangé dès le lendemain, ce qui m'a permis de tourner pendant huit jourà en toute quiétude et d'utiliser eu maximum les précieux avantages du 'Roux-color. Mon film sera entièrement réalisé, en effet, d'après ce procédé que Marcel Pagnol fut le premier à expérimenter dans a La belle meunière ». A cette époque, il n'était pas encore au point. Mais à l'heure actuelle, après trois an,s do minutieuses recherChes, il donne c:'excellents résultats et, en toute sincérité, je crois que le Roux-color, invention essentiellement française, peut maintenant rivaliser avec :es procédés étrangers les plus réputés.

Mon chef opérateur. Willy Factor (le cousin germain du célèbre spécialiste américain du maquillage Max Factor) est bien de cet avis.

Du « Tapis volant », je dirai seulement qu'Il s'agit là d'une comédie d'aventures et d'action qui se déroule entièrement en Afrique du Nord, en Algérie et au Maroc où je Cois me rendre à la fin de l'été. Ici, je n'ai tourné que quelques séquences sur les quais, à la Pêcherie, à l'hôtel Aletti et à l'aérodrome de Maison-Blanche avec le concours. de Jacques 'Semas et d'Eve'yn Cormond. Mais j'espère qu'elles sauront mettre en valeur l'extraordinaire photogénie de cette ville qu'il serait sans doute indispensable de doter au plus tôt d'un matériel de studio et, si possible, d'un petit laboratoire de développement et de tirage.
Je sais que vous avez entrepris une campagne dans ce sens. Vous devriez insister, cette organisation éventuelle répondant à des nécessités qui ne se discutent même pas. Pour en revenir au « Tapis volant e, j'ajouterai que je n'ai pas engagé tous mes interprètes. Jacques Serna.s (qu'il n'est sans doute pas utile de vous présenter) et Evelyn Cor mond, qui a déjà tourné en Algérie dans « Corniche d'amour », doivent être entourés de plusieurs comédiens notoires et d'une vedette internationale dont je ne puis, pour l'instant, vous révéler le nom. Quant à mon producteur, le voici. C'est M. Fasquelle, l'éditeur parisien bien connu de tous les bibliophiles e.

M. Fasquelle me serre très aimablement la main, et avant de prendre congé d'Edmond T. Gréville, je lui pose encore cette question :
— Que pensez-vous de la crise que subit actuellement le cinéma français ?
— C'est une crise de qualité, mais c'est aussi une crise d'hommes. Je n'hésiterai pas à prétendre que les auteurs dramatiques en portent toute la responsabilité. Car ces messieurs ont oublié que le cinéma est un art visuel. Ceux d'entre eux qui pourraient nous donner quelque oeuvre puissante et originale n'ont pas le sens du cinéma. Ils n'ont pas sondé sérieusement ses possibilités. Ils n'en ont pas étudié la technique. Il leur faudrait faire toute une rééducation mentale et tout un apprentissage de la composition visuelle qu'en raison de leur âge, ou de leur cristallisation intellectuelle, ils n'envisagent même plus.
En ce qui concerne les écoles professionnelles, Gréville n'en est pas partisan.
— Pour arriver à faire un bon film, la théorie ne " suffit pas. Il faut, d'abord, avoir du talent et comprendre d'instinct le cinéma. Le reste est une question d'expérience qui ne s'acquiert qu'à la longue, à force de travail et d'observation.

Cette affirmation me rappelle la réponse que me fit un jour Louis Jouvet, à oui je venais de demander si la création d'un conservatoire national à Alger ne lui paraissait pas opportune :
— Mon cher, un conservatoire c'est fait pour décerner des prix...

André SARROUY.

Nous publierons dans notre chronique cinématographique de vendredi prochain une interview exclusive de Jacques Sernas.