Le tristement célèbre télégramme de Pierre Messmer Ministre des Armées de 1960 à 1969
Texte de Jean-Pierre Simon
Dossier : les Harkis

extraits du numéro 62, 1er trimestres 2016, de "Mémoire vive", magazine du Centre de Documentation Historique de l'Algérie, avec l'autorisation de son président.
www.cdha.fr

ici, en juin 2016

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Le tristement célèbre télégramme de Pierre Messmer

Pierre Messmer armant un Harki.
Pierre Messmer armant un Harki.

Cette période dramatique de mi-62 est illustrée par des propos et attitudes des gouvernants de l'époque difficilement qualifiables.

Ainsi, De Gaulle, le 3 avril de l'année déclarait : " il faut se débarrasser sans délai de ce magma d'auxiliaires qui n'a jamais servi à rien ". Le 12 mai, Louis Joxe intervenait à son tour : " les supplétifs débarqués en métropole en dehors du plan général de rapatriement seront en principe renvoyés en Algérie... Rechercher les promoteurs et les complices de ces entreprises et prendre les sanctions appropriées ". Le ministre des armées confirme le même jour dans un télégramme référence :
. 1334/MA/CAB adressé au commandement supérieur à Réghaia en Algérie :
" Il me revient que plusieurs groupes d'anciens Harkis seraient récemment arrivés en métropole.
Renseignements recoupés tendent à prouver que ces arrivées inopinées sont dues à initiatives individuelles certains officiers SAS.
De telles initiatives représentent infractions caractérisées aux instructions que je vous ai adressées.

Je vous prie d'effectuer sans délais enquêtes en vue déterminer départ d'Algérie de ces groupes incontrôlés et sanctionner officiers qui pourraient en être à l'origine.
En veillant application stricte instructions qui ont fait l'objet de votre note de service N° 1013/CSFA/EMI/MOR du 11 avril, informer vos subordonnés que, à compter du 20 mai, seront refoulés sur Algérie tous anciens supplétifs qui arriveraient en métropole sans autorisation de ma part, accordée après consultation départements ministériels intéressés
".

Pierre MESSMER

" Ma conscience est tranquille " affirme l'ancien ministre
Le principal responsable, c'est le FLN, qui les a trompés et les a massacrés " ( Le Monde, 27 sept 2001 ).


Simone Veil.

Simone Veil élue à l'Académie française à la place laissée vacante par la mort de Pierre Messmer, a évoqué, dans son discours de réception, le 18 mars 2010, cette période des accords d'Evian :
" Les accords d'Évian stipulaient qu'aucun Algérien ne serait inquiété pour ses engagements passés, notamment dans l'armée française... Pour nombre d'officiers français, ce fut un déchirement d'abandonner à leur sort des hommes qui avaient partagé leurs combats. Certains décidèrent leur rapatriement en métropole. Après y avoir un temps consenti, et ouvert des camps d'hébergement, les autorités françaises publièrent des instructions très strictes mettant fin au rapatriement.

Une nouvelle fois, Pierre Messmer se plia à la rigueur d'Etat, au devoir d'obéissance. Plus secrètement, il souffrit de ce drame, évoquant même dans des entretiens ultérieurs avec Philippe de Saint-Robert une situation de " non-assistance à personne en danger ". Plus que quiconque à l'époque, il eut le redoutable devoir d'incarner l'autorité de l'Etat...
".

Un devoir qui lui fit renoncer à la solidarité et à l'honneur.

Jean-Pierre Simon.