Le combat des maladies
infectieuses
Du dévouement au sacrifice
Les médecins de colonisation eurent
à faire face à de nombreuses épidémies et
maladies infectieuses. Ils se trouvèrent ainsi en première
ligne dans leurs vastes territoires, et plusieurs d'entre eux le payèrent
de leur vie. Mais ils bénéficièrent en temps réel
des avancées de la recherche médicale, dont ils firent immédiatement
profiter les populations les plus reculées.
Ils purent en effet s'appuyer sur un système de santé complet
organisé progressivement au niveau de l'Algérie en lien
avec la métropole. Ce fut le cas notamment dans la lutte contre
le paludisme avec la création en 1894 du premier Institut Pasteur
à Alger, devenu en 1909 l'Institut Pasteur d'Algérie, où
s'illustrèrent les frères Sergent, natifs du pays.
Un aperçu des principales maladies infectieuses
à combattre sur le terrain
- Le typhus, maladie très meurtrière transmise à
l'homme par le pou du corps, était présent en Algérie
sous forme endémo-épidémique. En 1868, une épidémie
déferla sur tout le pays tuant plus de 500.000 personnes. Une autre
épidémie se répandit dans toute l'Algérie
entre 1919 et 1924, puis en 1941, touchant 300.000 personnes, en tuant
une sur quatre. Les équipes sanitaires mobiles détruisirent
systématiquement les agents de la transmission et vaccinèrent
en 1942 plus de 4 millions de personnes.
- Le choléra, infection intestinale se manifestant par des
diarrhées souvent mortelles, apparut en 1834 à Oran, faisant
1.500 victimes, puis à Alger, en 1835, tuant 2.000 personnes, puis
encore en 1846-1849, 1865, 1884-1885 et la dernière à Tlemcen
en 1912. Les progrès des méthodes de réhydratation
eurent raison de la maladie, avant même l'arrivée des antibiotiques.
- Le paludisme qui faisait de nombreuses victimes autochtones,
et contre lequel on utilisa la quinine découverte par le docteur
Maillot.
- Le trachome, responsable de nombreux cas de cécité,
fut combattu à l'aide d'un réseau de dépistage et
de traitement couvrant tout le territoire.
- La variole disparut peu à peu grâce à la
vaccination jennérienne, progressivement acceptée par les
populations musulmanes, et à la présence des médecins
de colonisation.
- ... et bien d'autres maladies que nous ne citerons pas ici.
La lutte contre le paludisme et la création
de l'Institut Pasteur d'Algérie (voir Institut
Pasteur sur ce site)
En 1900, à la demande du Gouverneur Général Jonnart,
l'Institut Pasteur de Paris envoie dans une Algérie en proie au
paludisme, une mission permanente confiée aux frères Edmond
et Etienne Sergent, natifs d'Algérie, acteurs infatigables de la
lutte contre le paludisme, nommés à cette occasion médecins
de colonisation hors cadre. En 1909, toujours sous l'impulsion du Gouverneur
Général Jonnart, la mission permanente devient l'Institut
Pasteur d'Algérie. Edmond Sergent en devient le directeur en 1911
et en maintiendra l'activité jusqu'en 1962. Robert Néel
lui succédera jusqu'en 1971, date à laquelle l'IPA passa
sous autorité algérienne.
Les campagnes antipaludiques, organisées et surveillées
par les frères Sergent, s'appuyèrent sur la découverte
par Laveran, en 1880 à Constantine, de l'agent causal du paludisme.
Séance de quininisation
dans un douar.
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La
stratégie mise en oeuvre s'appuya sur l'identification de trois
facteurs
I- Le réservoir de virus constitué par les anciens infectés,
2- Les gîtes à larves d'anophélines,
3- Les individus indemnes exposés à l'infection.
La suppression d'un des deux premiers facteurs devait avoir pour résultat
la disparition du paludisme ; mais le but à poursuivre était
la suppression du réservoir de virus ; les anophèles, ne
pouvant plus s'infecter, cesseraient alors d'être dangereux, comme
on put le constater dans les régions autrefois palustres, aujourd'hui
assainies bien que peuplées d'anophèles.
Les mesures prophylactiques adoptées
furent
1- La quininisation curative et préventive,
2- Les mesures anti larvaires,
3- La défense mécanique des habitations. Par ailleurs, il
est reconnu que les grands travaux de dessèchement, de drainage
et d'hydraulique agricole, les progrès de l'hygiène publique
et privée, en concourant à l'assainissement du pays, hâtèrent
les succès de la lutte antipaludique.
Les campagnes des frères Sergent bénéficièrent
de l'appui de La Ligue contre le paludisme en Algérie, fondée
en 1903 par Messieurs les Professeurs Moreau et Soulié, avec pour
président d'honneur le Dr Laveran.
Les actions mises en place avaient
pour but, avec l'appui des médecins de colonisation
1- de vulgariser les notions sur l'origine du paludisme et les moyens
de le prévenir et de le guérir,
2- de faciliter aux habitants de l'Algérie la mise en pratique
de ces moyens.
La propagande orale consista dans des conférences publiques, illustrées
de projections quand cela était possible, faites dans les villes
et dans les villages agricoles par des médecins, des directeurs
d'école et des instituteurs. La Ligue obtint des pouvoirs publics,
à titre démonstratif et expérimental, l'assèchement
d'un lac fortuitement formé par les pluies près du village
de Zéralda, ce qui évita une épidémie meurtrière
de paludisme.
Détruisez le moustique.
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Détruisez le pou.
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Phlébotome
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Grâce au concours de son Président
d'honneur, le Dr Laveran, la Ligue put installer la protection mécanique
d'un certain nombre d'habitations et faire réaliser une expérience
de destruction de larves.
En 1905, onze maisons situées dans la plaine de la Mitidja et le
Sahel d'Alger, furent protégées par des toiles métalliques.
Pour ces maisons témoins on ne releva que 4,2% de cas de paludisme,
tandis que pour les maisons non grillagées, on trouva 63,1% de
cas de paludisme, dans la même période.
Les pétrolages supprimèrent ou diminuèrent le paludisme
dans les localités où ils furent pratiqués.
La quinine était donnée à la dose de 1 gramme tous
les lundis aux adultes, 50 centigrammes aux enfants au-dessous de 14 ans,
20 centigrammes au-dessous de 5 ans, et 10 centigrammes au-dessous de
1 an. Tous ceux qui observèrent régulièrement ce
traitement sont restés indemnes du paludisme.
Par ses travaux, ses études, les exemples d'applications pratiques
et par la propagande très active qu'elle réalisa, la Ligue
a préparé, facilité, accompagné l'action des
pouvoirs publics.
Jean Damidot
Sources :
Annick Opinel, Institut Pasteur dAlgérie (IPA), in Jeannine
Verdès-Leroux, L'Algérie et la France, Paris : Robert Laffont,
Collection Bouquins, 2009, p. 473-474
Pierre Rochiccioli, Maladies infectieuses, in Jeannine Verdès-Leroux,
L'Algérie et la France, Paris : Robert Laffont, Collection Bouquins,
2009, p. 550 552
Louis-Pierre-Alfred Imbert. La lutte contre le paludisme en Algérie.
Thèse pour le doctorat en médecine. Juillet 1908.
Jean Tremsal. Un siècle de médecine coloniale française
en Algérie. Deuxième édition. 1929. 115 pages + une
carte hors texte.
Jean-Pierre Dedet. L'Algérie d'Edmond Sergent. Kallimages, 167
pages.
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