L'ARMÉE D'AFRIQUE DURANT
L'ANNÉE 1918.
|
450 Ko |
Le dossier de ce Mémoire Vive est consacré à l'Armée d'Afrique pendant la Première Guerre Mondiale. En 2014, le numéro 56 avait consacré plusieurs pages à ce thème. Aussi avons-nous décidé de nous attarder plus longuement sur l'année 1918, centenaire oblige, et de faire découvrir à nos lecteurs des sujets méconnus comme le conflit mondial au Sahara ou le rôle d'aviateurs originaires d'Algérie durant la Grande Guerre. Rappelons que dès le premier jour de la guerre, trois divisions d'infanterie, la 37éme la 38ème et la 45ème composées de Zouaves, de Tirailleurs, de Chasseurs d'Afrique, d'Artilleurs et de Bat. d'Af., furent acheminées sur le front et participèrent aux premiers combats en Belgique. Ils furent très vite rejoints par des Spahis et des Légionnaires. Quatre ans plus tard, peu d'hommes ayant participé à ces premiers combats ont survécu. La guerre en Europe s'étendait sur deux fronts, le Front Occidental et dans les Balkans, le Front serbe.
L'ARMÉE D'AFRIQUE DURANT L'ANNÉE
1918. Le Front Occidental
:
Au cours des trois années de guerre, les régiments de l'Armée d'Afrique ont subi de terribles pertes, aussi, le 18 janvier, de nouveaux régiments de Marche de Tirailleurs sont constitués, ce sont les 10ème et 11ème R.T.A. Du 27 au 31 mars, le 4ème Zouaves prend part à la bataille d'Orvillers Sorel, gagne une nouvelle citation et la fourragère aux couleurs du ruban de la Légion d'Honneur. Au même moment, le 2ème Zouaves est engagé en Lorraine à Nomény appuyé par les 1ère et 4ème Compagnies de Mitrailleuses du 3ème Tirailleurs. Quelques jours plus tard, ce régiment relève le 11ème Tirailleurs qui avait subi son baptême du feu au début du mois et enlève le quartier du Haut des Trappes. Le 1er avril, les Zouaves entrent dans Beuvraignes et Tilloloy. Le 18 avril, en Picardie, le 3ème bis de Zouaves attaque Château Sans Nom ; la 2ème Compagnie du capitaine Moutet enlève la position ennemie. Pendant ce temps, Le 8ème Zouaves est engagé au sud d'Amiens. Le 1er mai, le 3ème Zouaves, à Villers Bretonneux relève une unité de la Marocaine. Il tient le plateau de Cachy avec une unité australienne jusqu'au 1er août. Pour l'anecdote, le 3 mai, un soldat du 46ème bataillon australien, Dloy, Charles Williams, ancien de la Légion Étrangère, trouve la mort en essayant de récupérer le corps du sous-lieutenant Champion du 3ème R.T.A. tué lors de l'attaque du Monument de Villers Bretonneux ; Williams est cité à l'ordre du régiment par le lieutenant-colonel du 3ème Tirailleurs ; le régiment avait également perdu le sous-lieutenant Martin. Pendant ce temps, le 2ème R.C.A. est engagé dans la bataille des Monts en Belgique. Le 9 mai, le 2ème Zouaves relève le 3ème R.T.A. qui est mis au repos une quinzaine de jours dans la région de Saint Fuscien. Du 30 mai au 2 juin, le 3ème bis de Zouaves résiste à toutes les attaques ennemies sur la Crête d'Ormes à Vrigny. Du 9 au 13 juin, lors de la contre-offensive Mangin, le 1er Zouaves participe à la bataille du Matz sur la ligne Montdidier-Compiègne. Il est ensuite dirigé vers la Marne où il participera à la seconde bataille de la Marne. Le 2ème Zouaves rejoint le 3ème Zouaves à Villers Bretonneux. Le 1er juillet le 13ème R.T.A est reconstitué. Il est formé de bataillons d'autres R.T.A. et/ ou de régiments Mixtes de Zouaves et de Tirailleurs. Il n'y a pas de 12ème R.T. car les multiples de 4 sont réservés aux Tunisiens. Le 8ème R.T.A. est engagé dans la bataille de Picardie à Orvillers Sorel dans l'Oise, ainsi que le 4ème Zouaves qui gagne le 31 mars sa 6° citation et la fourragère aux couleurs de la Légion d'Honneur. Le 7ème R.T.A. est engagé à Chaudun.
Juillet, deuxième bataille de la Marne.
Le 7ème R.T.A reconquiert les villages de l'Echelle et de Chazelle. Le 2ème R.T.A. sous les ordres du lieutenant-colonel d'Auzac de la Martinie franchit l'Avre en amont de Guerbigny et prend aux Allemands 27 canons, des mitrailleuses, un matériel considérable et fait plusieurs centaines de prisonniers. Le premier lieutenant-colonel du régiment en 1914, Sibra, décèdera des suites de ses blessures. Celui qui lui succéda, le lieutenant-colonel Le Lain, sera évacué suite à ses blessures. Le 18 juillet les légionnaires attaquent en forêt de Villers Cotterets et font 450 prisonniers. En août, le 2ème Zouaves combat à Moreuil où il gagne une troisième palme ; il est qualifié de "régiment d'avant-garde". À Noyon, en septembre, il obtient une quatrième citation ; il reçoit le qualificatif de "régiment d'élite"! Il finira la guerre dans les combats de Chauny et Ternier. En août toujours, le 2ème R.T.A. fait 1 000 prisonniers en marchant sur Hirson.
À Moreuil, également, le 1° bataillon du 3ème Zouaves avec à sa tête le commandant Rouire s'illustre avant de se diriger vers le village du Plessier. Le bataillon Rouire est rejoint par le 5ème bataillon, commandant Grapinet et le 11ème (Dody). Le 3ème Zouaves prend 60 canons à l'ennemi. Le 20 août, le 4ème Zouaves enlève Ourscamp. Le 29 août le 3ème Zouaves participe à la prise de Noyon, 1er bataillon, commandant Chaligne. Le 30, l'adjudant Laffont avec une poignée d'hommes fait prisonnier une compagnie allemande et se saisit de 30 mitrailleuses au mont Saint Siméon. Le régiment est une nouvelle fois cité à l'ordre de l'Armée par le général Humbert. Le 10 septembre, le 2ème bataillon de Zouaves enlève la ligne de la Suippe à la Retourne. Le 30 septembre, le 1er R.T.A. s'illustre à Prunay (Reims). Il récidive du 16 au 20 octobre en reprenant plusieurs villages aux Allemands et en faisant 400 prisonniers. Le 4ème R.T.A. est dans l'Aisne et en Picardie. Les 10, 11, 12 octobre, le 1er Zouaves libère à Voncq et à Grivy-Loisy environ 5 000 civils retenus par les Allemands. Il reçoit alors une cinquième citation à l'ordre de l'Armée. Le 7ème R.T.A. libère le premier village des Ardennes. Le 25 octobre, le 3ème bis de Zouaves enfonce les lignes allemandes et prend Saint Forges ; il fait 800 prisonniers et prend à l'ennemi 6 canons et 36 mitrailleuses. Cela lui vaut la Fourragère aux couleurs de la Médaille Militaire. Le 1er novembre, le régiment éprouvé par de lourdes pertes, est relevé. Il rejoint l'Algérie après le 11 novembre. Le 4 novembre, à Oisy, sur le canal de la Sambre à l'Oise, les 2ème bataillon (capitaine Brémond), 4ème bataillon (commandant Iraçabal) et le 1er bataillon (commandant de Bernard) du 3ème R.T.A., en liaison avec le 63ème bataillon de Chasseurs, se portent à l'attaque afin de consolider la position, font reculer l'ennemi et ont la joie de délivrer de nombreux compatriotes prisonniers des Allemands. Ces derniers reculent encore et nos troupes délivrent les villages du Rainsart et Rue La Haut le 9 novembre. La 13ème Compagnie commandée par le sergent Gomez surprend l'ennemi au nord de Glageon et le contraint à s'enfuir. Le 11, le 3ème R.T.A. reçoit l'ordre de franchir la frontière belge quelques heures avant d'être prévenu que les Allemands avaient demandé à signer l'armistice. Le 26 novembre, le régiment défile dans Morhange en Lorraine et le 11 janvier 1919 dans Mayence en Allemagne ; il fera partie des troupes d'occupation dans cette ville.
Les 10ème et 11ème R.T.A. d'abord à Verdun, participent à la poussée sur la Meuse du 5 au 11 novembre. Le 2ème Zouaves obtient une cinquième citation à Hirson Le 13ème R.T.A. s'illustre en Champagne et à Somme Py. À l'armistice, le 3ème Zouaves reçoit la fourragère rouge. En février, 1919, il est cantonné à Idstein en Allemagne. Le 14 juillet, la médaille militaire est décernée au drapeau. Le 24 août, il débarquait à Philippeville, retrouvant ainsi la terre d'Afrique où il reçut le 26 un accueil triomphal à Constantine. Le 11 novembre, le 2ème R.C.A opère en Thiérache qui sera inscrit sur son drapeau ; un mois auparavant, il aura perdu son chef de corps, le lieutenant-colonel Baudinot. Le régiment fera partie des troupes d'occupation en Allemagne avant de rentrer en Algérie en novembre 1919, puis de gagner Oujda. Après s'être illustré en Picardie, dans les Flandres sur l'Aisne et en Champagne, le 3ème R.C.A. entre en Lorraine le 17 novembre puis occupe la région du Palatinat en Allemagne jusqu'au 10 avril 1919, date à laquelle il retourne en France pour regagner l'Algérie le 19 juillet. Le 17 novembre les légionnaires entrent dans Château Salins occupé par les Allemands depuis 1870 avec à sa tête le colonel Rollet. Le 5ème Régiment de Spahis qui était entré dans Strasbourg le 22 novembre participe au défilé de la victoire dans la capitale alsacienne le 9 décembre.
Le conflit en Serbie. En décembre 1917, c'est le général Guillaumat qui commande l'armée française ; celui-ci a été lieutenant en Algérie à Teniet el Haad en 1892, puis entre 1895 et 1897 capitaine au 2ème Régiment Étranger, toujours en Algérie, avant d'être muté au Tonkin. Général commandant la 2ème Armée à Verdun en 1917, il est envoyé en décembre dans les Balkans afin de préparer une nouvelle offensive en Macédoine où le 1er R.C.A participe à la prise de Monastir ; mais la situation en France contraint Clémenceau à le rappeler comme Gouverneur militaire de Paris en juin 1918.
C'est le général Franchet d'Esperey qui le remplace. Lui aussi est un ancien de l'Armée d'Afrique ; né à Mostaganem, lieutenant au 1er Régiment de Tirailleurs Algériens, il participe à la campagne de Tunisie, commandant au 18ème Bataillon de Chasseurs à pieds, il fait partie de l'expédition contre les Boxers en Chine en 1900. Général de Division au Maroc en 1912, il est général d'Armée en 1914 et contribue grandement à la victoire de la première bataille de la Marne. Sitôt arrivé dans les Balkans, Franchet d'Esperey prévoit un plan audacieux qui consiste à attaquer les Bulgares par la montagne. Le 15 septembre, il lance l'offensive sur les massifs de Dobropolje et de Vetrenik ; les pertes françaises sont terribles, mais les Bulgares reculent. Le 21 septembre le général Jouinnot-Gambetta à la tête de la Brigade à cheval des Chasseurs d'Afrique lance un raid de 70 km dans la montagne à 2 000 mètres d'altitude et fonce sur Usküb (aujourd'hui Skoplje) qu'il prend, appuyé par des Spahis Marocains, le 29 septembre. C'est la dernière charge à cheval victorieuse de la cavalerie française. La prise de la ville a un énorme retentissement ; Ferdinand, roi des Bulgares adresse un télégramme au kaiser Guillaume : "le désastre de Macédoine sera notre malheur à tous". Effectivement, le 30 septembre à midi les Bulgares signent l'armistice en présence de Franchet d'Esperey qui reçoit leur capitulation ; le général poursuit sa chevauchée, entre en vainqueur à Belgrade et poursuit sa route avec le 4ème R.C.A. sur Bucarest afin de relancer la Roumanie dans la guerre. Pendant ce temps, le 1er R.C.A. franchit le Danube le 24 octobre et stationne en Hongrie à Arad, ville qu'il occupe jusqu'en août 1919. La capitulation de l'Empire Ottoman le 30 octobre et celle de l'Autriche le 3 novembre arrêtent son avancée victorieuse. Gérard Crespo Extrait du Mémoire Vive n°70
|