-Alger, la casbah :
ancienne résidence du Dey
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Forteresse de la Kasba
Texte sous l'article
L'Afrique du Nord illustrée - 22-9-1934 - Transmis par Francis Rambert
nov.2020

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ancienne résidence du Dey

Forteresse de la Kasba

ALGER INCONNU.

Forteresse de la Kasba.

En parlant de la Forteresse de la Kasba, nous touchons à l'un des points les plus anciens de l'histoire de la ville d'Alger.

Sommet culminant de la ville, que le colonel de Lamothe désigne comme la terrasse géologique de 115 mètres, il est évident que ce vaste plateau, dès son origine, tenta les premiers colons grecs qui vinrent au VIIème ou VIIIème siècle avant Jésus Christ et s'établirent, au nombre de vingt, dans le lieu qui devait, après bien des siècles, devenir la ville d'Alger.

Il y avait à ces époques reculées un cérémonial toujours observé lors de la fondation de colonies, qu'il est peut-être bon de rappeler et qui éclairera un peu la légende des Vingt compagnons d'Hercule.

Voici la façon dont les Grecs fondaient leurs colonies et dont fut fondée Icosion, latinisée plus tard en Icosium (Alger) .

Nous voyons, d'après l'historien Julius Caïus Solinus, qu'Hercule, explorateur grec vint fonder Icos ; nous retrouvons plusieurs fois trace de cet Hercule, sur le littoral méditerranéen, jusqu'à Tolède et aux Colonnes d'Hercule, aujourd'hui le détroit de Gibraltar. On y lit que ses Vingt compagnons choisirent un emplacement et y élevèrent des murailles, puis, selon le cérémonial usité en la circonstance, allumèrent le feu sacré, avec du feu apporté d'un sanctuaire de la ville d'où ils venaient.

La ville d'Icosion fut édifiée 7 à 800 ans avant notre ère, ayant, comme la plupart des villes grecques, un côté à pic d'où l'on précipitait les condamnés à mort. Il y a quelques années notre ami regretté l'ingénieur Bizet avait retrouvé, lors de la construction des casernes d'Orléans, des vestiges de tours rondes avec des soubassements carrés et des restes de vieilles poteries. Nous avons retrouvé à Alger des chapiteaux grecs qui portaient des Cariatides.

Afin de mieux assurer la défense de la ville les forteresses étaient, comme on le voit dans plusieurs villes de la Grèce antique, entourées de rues à escaliers placées en éventail et fermées en hauteur par des portes désignées sous le nom de portes de quartier. Il en existe encore à Alger, dans la haute-ville, dont la plupart sont voûtées comme l'étaient les rues des villes antiques.

Le souvenir s'est conservé très longtemps d'appellations royales telles que : Tombeaux des enfants du roi, d'anciennes Kasba comme la Kedima-el-Kasba.

Mais ce qui est intéressant et dont aucun historien n'a fait mention c'est l'existence d'un tombeau grec, qui se trouvait encore visible eu XVIème siècle, celui de l'enfant de Zaripha, il était situé près de la porte de secours donnent dans la campagne. Quel était cet enfant ? Nous savons, d'après des citations découvertes par M. Devoulx dans des anciens titres de propriétés voisines d'un cimetière, que celui-ci renfermait les Tombeaux des enfants du Roi. Ce qu'il y a de certain c'est que ce nom de Zaripha est grec et que si ce tombeau fut conservé jusqu'au XVIème siècle c'est vraisemblablement que cet enfant appartenait à une souche princière.

On ne commença à construire de nouveaux bâtiments sur l'emplacement de la plus ancienne forteresse qu'après l'arrivée des Turcs à Alger. La nouvelle Kasba qui remplaça le Kasba-el-Kedima fut construite entre les années 1555 et 1592. C'est à cette époque que fut placée la porte de style romain provenant d'un ancien édifice que l'on voit aujourd'hui. Il existe d'anciennes colonnes en marbre antique, soit grecques, soit romaines, disséminées dans la forteresse et dont l'étude est à faire en détail. En 1579, les fortifications comprenaient sept tours carrés reliées par des courtines appartenant à l'architecture militaire du XIIème au XIVème siècle et élevées probablement par l'émir Abou-Tachefin, le même qui édifia le minaret de la Granque Mosquée.

Car, nous disent deux manuscrits arabes, vers l'année 1320 Abou Tachefin revenant d'une expédition de Bougie, pour ne pas laisser son monde oisif l'occupa à construire une enceinte assez spacieuse, une mosquée qu'on appelle encore la Grande Mosquée dont le minaret fut achevé le 15 juillet 1323, et une Topane dite de Sidi Ramdan. Cette Topane était un arsenal que plus tard l'on appela la Kasba-el-Kedima. Peut-être cet arsenal succéda-t-il à l'ancienne forteresse construite par les premiers occupants, car c'était la coutume de réemployer les matériaux anciens

L'on voit sur la reproduction " Algieri fortificato " de l'année 1579, deux bastions, à droite et à gauche, appelés boulevards, remplaçant d'anciennes tours carrés du XIVème siècle. Sous le n° 40, le Tombeau de l'enfant de Zaripha, l'emplacement du cimetière des Enfants du Roi. Sur un autre plan de 1576 on lit, au-dessus des tours carrés, le nom latin Armamentaria qui veut dire arsenal, lieu où l'on dépose les munitions de guerre pour la défense des villes.

C'est tout ce qui concerne l'inconnu de la Forteresse de la Kasba. Des fouilles exécutées avec méthode apporteraient certainement des découvertes intéressantes pour l'histoire de la ville d'Alger, surtout pour ce qui a trait à ses origines grecques.

Henri MURAT.