| CONCLUSION ---------Nous 
        croyons avoir, dans les pages qui précèdent, donné 
        quelques images justes capables de faire comprendre le charme de l'Afrique 
        du Nord. Nous aurions pu multiplier encore les citations ; nombreux sont 
        les écrivains disparus ou heureusement bien vivants, dont nous 
        n'avons cité aucun passage. Qu'ils veuillent bien excuser les lacunes 
        de cette brochure aux dimensions modestes et imposées comme telles; 
        qu'ils ne pensent pas avoir été les victimes de je ne sais 
        quel mystérieux ostracisme.
 -
 --------Il nous est arrivé souvent de citer 
        des passages relatifs au Maroc pour faire comprendre tel ou tel trait 
        de murs, telle ou telle forme de pittoresque commune à toute 
        l'Afrique du Nord. ------
 ---J'espère que le lecteur ne nous en fera
 le reproche, car il ne peut manquer de savoir que là où 
        nous avons le mieux respecté le décor extérieur de 
        la vie indigène et les murs indigènes, c'est dans 
        l'empire du Moghreb. Pour revoir de nos yeux l'Algérie de Fromentin, 
        il faut aller visiter aussi le Maroc des Chevrillon et des Tharaud. L'explication 
        en est simple : au début de présence en Algérie, 
        la France avait désappris la pratiqué 
        coloniale, ou plutôt c'est depuis notre arrivée en Algérie 
        que nous avons formé peu à peu une doctrine coloniale nouvelle. 
        Cette doctrine est aujourd'hui fixée : elle
 vise non pas l'assimilation des indigènes à notre propre 
        civilisation, mais le respect de leurs villes, de leurs coutumes, de leur 
        pensée, l'association de leurs intérêts avec lés 
        nôtres. À la lumière de l'expérience acquise 
        depuis un siècle, ne soyons pas trop sévères pour 
        ceux qui, en Algérie, ont transformé les villes, ont un 
        peu trop bousculé les paysages. C'est de leurs erreurs, comme de 
        leur succès, qu'est sortie cette expérience. Puisse-t-elle 
        nous aider sûrement désormais, puissent les hommes de demain
 déférer dans toute l'Afrique du Nord au désir qu'exprimaient 
        Jérôme et Jean Tharaud, dans une belle page écrite 
        pour le seul Maroc. Ce sera à la fois notre dernière citation 
        et notre conclusion
 ---------"Au 
        Maroc, la claire raison du général Lyautey, et chose encore 
        plus rare, son profond sentiment de la beauté musulmane et de la 
        nôtre propre, s'emploient à nous épargner le spectacle 
        de destructions imbéciles, et à faire respecter ici une 
        noble manière de comprendre la vie, qu'ailleurs, mal avertis encore, 
        nous avons méprisée. Dans cet immense bled qu'envahit derrière 
        moi le crépuscule, il a construit des routes, pacifié des 
        tribus, aménagé des ports, bâti des cités nouvelles, 
        retenu sur le bord de l'abîme de grands vestiges du passé, 
        que les indigènes eux-mêmes laissaient aller à la 
        ruine, sauvé de vieux métiers, remis les artisans sur la 
        trace de leur génie d'autrefois ; là où l'immobilité 
        ressemblait trop à la mort, il a apporté la vie ; les sentiments 
        du vieux Moghreb, ses traditions, ses moeurs, rien n'a été 
        brutalisé ; et devant moi, ce soir, ces deux cités d'Islam, 
        si paisibles sous la lumière déclinante, peuvent s'endormir 
        dans leurs murailles, au moins avec l'illusion qu'elles ont gardé 
        leur secret... Dans ce pays du Sultan Noir où tout est dominé 
        par quelque influence invisible, puisse l'esprit du Général 
        vivre toujours au fond des choses et l'emporter sur des façons 
        brutales et des égoïsmes grossiers ! Puissions-nous ne pas 
        déranger un seul pli au blanc linceul de chaux qui couvre Rabat 
        et Salé ! Dans l'âge de fer où nous vivons, on ose 
        à peine écrire qu'il est permis de tout attendre de l'intelligence 
        et de l'amour. C'est vrai, on n'ose pas le dire, mais il faut pourtant 
        l'espérer... (J. THARAUD. - Rabat ou les heures 
        marocaines. Paris, Plon, in-12, p. 279 à 281.)
 
 
 
 |