mise sur site le 25-10-2003
-La pacification du Sahara et la pénétration saharienne (1852-1930)
CHAPITRE 3 : Les premiers projets du chemin de fer transsaharien - L'échec de la mission Flatters
Cahier II du Centenaire de l'Algérie
par
le général O.MEYNIER
Directeur des Territoires du Sud
Publications du Comité National Métropolitain du Centenaire de l'Algérie
Alger, 1930
collection personnelle.

n.b : tous ces textes ont été passés à l'OCR, je ne les pas vérifiés minutieusement. Veuillez pardonner les erreurs éventuelles, vous pouvez même me les signaler.Merci
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CHAPITRE 3

------En fait, les récits de voyages de tous ces explorateurs, militaires, civils, religieux, avaient frappé vivement l'imagination et l'opinion françaises. Sans doute se fit-on au début de singulières illusions sur la signification de traités comme celui de Ghadamès et de Ghat, traités signés avec des chefs indigènes dont les titres nobiliaires l'emportaient et de beaucoup sur leur faible autorité. Sans doute aussi, se faisait-on encore, faute d'avoir médité suffisamment les écrits des Barth, des Schweinfurth, des Nachtigal, de fausses idées sur les richesses actuelles des confins soudanais.
------Toujours est-il que, dès après la guerre de 1870-71, fut lancée dans l'opinion, et cela d'une façon très ardente, une campagne en faveur de la création d'un nouveau chemin de fer appelé Transsaharien, lequel souderait les possessions Françaises des deux rives du Sahara, à ce moment là en pleine voie de développement.
------L'ingénieur Duponchel fut le premier technicien averti qui lança la grande idée dont la réalisation n'est encore aujourd'hui envisagée que dans un certain délai. Son ardeur et son enthousiasme passèrent dans le peuple français dont l'âme, après les grands revers de 1870, ne voulait pas se laisser abattre. Une grande commission fut nommée par M. de Freycinet, alors ministre des Travaux publics, pour étudier la question, et de nombreuses missions dirigées par des hommes de talent, les Pouyanne; les Choisy, les Rolland, furent envoyées dans le sud algérien pour en examiner les possibilités de réalisation.
------Aucune d'entre elles n'obtint de résultats décisifs, car elles ne dépassèrent en aucun point la ligne précédemment atteinte par nos premiers explorateurs.
Seules les missions dirigées par le lieutenant-colonel Flatters, ancien chef du bureau arabe de Laghouat, réussirent à pousser au Sud la ligne Ghadamès, Temassinine, El-Goléa, précédemment atteinte.
------Il n'est pas nécessaire de rappeler ici l'effroyable issue de cette aventure. Après une tentative de percée vers le Soudan par les régions Ajjers, Flatters, contraint à la retraite mais non découragé, se porta franchement sur le Nord-Est du Hoggar d'où il escomptait gagner le Soudan de Zinder et de Kano par le puits d'Assiou.
Le massacre de la mission Flatters à Bir-El-Gharama (16 février 1881), les épisodes douloureux de la retraite des vestiges de son escorte vinrent, pour un temps, porter un coup fatal à la question qui paraissait en si bonne voie, du chemin de fer transsaharien.
------Le chef de la mission avait en réalité affronté, avec des moyens matériels insuffisants, une tâche à ce moment-là prématurée. Son œuvreétait condamnée d'avance; eut-elle réussi à atteindre le Soudan, elle n'était nullement assurée de l'accueil qu'elle y trouverait chez des sultans noirs puissants, cruels et disposant de troupes nombreuses... Il ne pouvait être question d'un succès pour une, mission de ce genre qu'autant qu'une tête de pont soudanaise, sur l'autre rive du Sahara, lui permettrait de s'y réorganiser en vue d'un retour difficile. Dix-huit ans plus tard, la mission Foureau-Lamy allait démontrer à nouveau, par l'exemple, que cette condition était primordiale. Que serait-il advenu d'elle, malgré son admirable encadrement et sa solide organisation, si elle n'eût trouvé Zinder déjà occupé et nos soldats soudanais prêts à l'accueillir ?

 



------C'est devenu un lieu commun d'assurer que la mission Flatters porta un coup décisif à œuvre de la pénétration française au Sahara et que l'exécution du Transsaharien s'en trouva reculée de vingt années.
En vérité, à quoi pouvait correspondre cette conception â priori d'une voie ferrée intercoloniale, sinon internationale, se lançant avant toute reconnaissance et même toute exploration préalable, sur un tracé choisi de la façon la plus arbitraire vers un objectif incertain qui, suivant les auteurs, pouvait être aussi bien Dakar que Tombouctou, Kano ou le Tchad ? - Dakar étant à ce moment le seul point en notre possession.
------En réalité, nous pensons que ce fut la sagesse même de remettre à plus tard des projets de cette envergure. Pour le moment, on se recueille, on se borne à consolider l'occupation algérienne du Sud des trois provinces, en occupant le M'Zab, Ouargla, Touggourt et Djenien Bou Rezg et en poussant vers Aïn-Sefra et Biskra le terminus des chemins de fer de pénétration. De ces points rayonne notre action politique plus au Sud. Des explorateurs mieux préparés que ceux du début procèdent à des reconnaissances scientifiques de court rayon qui préparent l'opinion indigène à notre venue. Parmi eux, Foureau procède à partir de 1882 à la glorieuse série de ses voyages sahariens qui aboutiront, finalement, en 1898, à la constitution de la mission Foureau-Lamy. La mort du marquis de Mores à El-Ouatia vient signifier que la France a enfin compris ses destinées. D'autres suivront le glorieux chevalier.
------C'est durant cette période que peuvent être rassemblés et recueillis les premiers documents cartographiques sérieux sur le Sud du Sahara dont la carte Lannoy de Bissy au 1/2.000.000 allait longtemps constituer le principal monument.