CHAPITRE
PREMIER
LA POLITIQUE FRANÇAISE
-------Au
cours de ce siècle, la France a changé cinq fois de gouvernement
et par conséquent de politique.
Restauration
-------C'est
la Restauration qui a conquis Alger. C'est elle qui a déclenché
l'évolution. Et plus précisément, c'est le dernier
roi de la Restauration, c'est Charles X.
-------Ceci est
curieux. Parce que, de tous les chefs d'État qui ont successivement
présidé aux destinées de la France à travers
le siècle dernier, Charles X semble bien avoir été
celui qui fait la plus pauvre figure.
-------On peut faire
une comparaison curieuse. Dans la succession de ce colosse génial
que fut Napoléon 1er, la France n'a absolument rien trouvé.
Elle a trouvé l'Algérie dans la succession de Charles X.
C'est à vous dégoûter d'être un homme de génie.
-------Une nation
n'a probablement pas intérêt à être conduite
par un homme exceptionnel, par trop disproportionné avec la taille
moyenne de l'humanité.
-------Un peuple
intellectuel à l'excès, comme le nôtre, ne sent pas
assez quel rôle immense et bienfaisant tiennent les hommes ordinaires
dans la conduite des grandes affaires. Peut-être sont-ils une matière
amorphe, et en quelque sorte un meilleur conducteur, à travers
lequel passent sans résistance les effluves des forces profondes.
Ils résistent moins aux poussées de la destinée,
aux lois générales inexprimées qui régissent
l'évolution des organismes politiques et sociaux.
Louis-Philippe
-------Le gouvernement
de Louis-Philippe a continué et achevé la conquête
de l'Algérie .Il l'a achevée parce qu'elle était
commencée, et qu'il était pris dans l'engrenage ; parce
qu'il n'a pas pu trouver de demi-mesure satisfaisante ; parce que le roi
avait du sens politique; mais sans l'appui de l'opinion, indifférente
et même hostile. On a pu dire que nous sommes restés en Algérie
parce que nous n'avons pas pu en sortir. Ce fut une conquête à
contrecoeur, par à-coups, sans plan préconçu, avec
des alternatives de découragement et de recul.
-------L'homme même
à qui on finit par confier les effectifs et l'autorité nécessaires
pour la mener à bien, le maréchal Bugeaud, avait commencé
sa carrière en signant le traité de la Tafna, qui était
un demi-abandon.
-------Ce même
Bugeaud pourtant avait pris pour devise un aphorisme latin : Ense et aratro
; qu'on pourrait traduire à peu près : l'épée
n'a de sens que si elle cède la place à la charrue.
-------On entrevoit
déjà l'avenir de l'Algérie qui était d'être
une colonie au sens étymologique du mot, une colonie de colons,
une colonie de peuplement.
La
seconde République
-------La courte
existence de la seconde République s'est écoulée
dans un tumulte d'émeutes françaises et européennes.
Elle a pourtant laissé sa trace en Algérie. Les déportations
qui suivirent l'insurrection de juin y ont déposé des germes,
dont on ne songe pas assez peut-être combien ils furent intéressants.
-------Une grande
place en Algérie est occupée par les colons d'origine italienne
et surtout espagnole, dont l'éducation politique était peu
avancée, dans l'atavisme desquels le préjugé religieux
antimusulman était prépondérant. Les déportés,
aux convictions politiques ardentes, ont apporté l'esprit civique
et laïc. Ils ont été un ferment de grande importance.
Le
second Empire
-------La politique
du second Empire fut en Algérie, encore que négativement,
extrêmement intéressante. A titre d'expérience avortée
elle éclaire le sens de l'évolution.
-------Le
second Empire a suivi une politique exactement inverse de celle du gouvernement
précédent, et surtout du suivant. Il a vigoureusement remonté
le courant.
-------«Ç'a
été l'époque du Royaume Arabe »
: Napoléon III, empereur des Français, était conçu
comme sultan des musulmans algériens, à peu près
comme François-Joseph était empereur d'Autriche et roi de
Hongrie. Il mettait un simple lien personnel entre deux entités
politiques aussi indépendantes que possible.
-------Pratiquement,
cela signifiait une barrière aux progrès de la charrue européenne.
Les colons étaient parqués dans des réserves autour
de quelques grandes villes. Tout le reste était le royaume arabe.
Les indigènes, gouvernés par les officiers des bureaux arabes,
y étaient efficacement séparés de la colonisation,
tenus sous cloche, abandonnés à leur propre puissance évolutive.
-------C'était
une idée intéressante. Une certaine analogie est évidente
avec ce que nous appelons aujourd'hui le protectorat. .
-------Le second Empire, gouvernement autoritaire,
a tenu solidement le gouvernail algérien. Il fut même un
temps où il a voulu le prendre directement en main. Il créa
à Paris un ministère de l'Algérie, qui fut confié
au prince Napoléon. La grande innovation était que l'Algérie
dût être gouvernée à distance, de Paris directement,
par un ministre. C'est l'effort d'administration directe le plis marqué
qui ait été jamais fait par la métropole. Qu'il ait
été fait par l'Empire, rien de plus normal.
-------Cet effort échoua très vite.
On dut reconnaître l'impossibilité de gouverner d'aussi loin,
hors de tout contact avec les réalités. L'esprit faux que
fut le prince Napoléon était tout désigné
pour une entreprise chimérique. Son cousin l'empereur, qui ne l'aimait
pas, la lui a confiée peut-être avec l'arrière-pensée
qu'elle était condamnée à l'échec.
Mais après comme avant le prince Napoléon, l'Algérie
fut aux mains d'un gouverneur général tout puissant, qui
fut invariablement un militaire, chef naturel des bureaux arabes, tout
dévoué à l'idée du royaume arabe.
-------Les colons, contenus et bridés, ont
eu pour les bureaux arabes une haine passionnée, injurieuse. Ils
en ont dit beaucoup de mal, ce qui était
de bonne guerre. Mais il ne faut pas les en croire : les violences de
polémique sent nécessairement d'une extrême injustice.
Les officiers de bureaux arabes furent et sont encore dans l'ensemble
un corps magnifique d'hommes pénétrés de leurs devoirs,
admirablement au courant de leur besogne. Ils ont fait et ils font encore
dans la société indigène une très belle uvre
de pacification des esprits.
-------L'expérience
du royaume arabe a donc été faite dans les meilleures conditions,
continuée pendant près de vingt ans, avec esprit de suite,
par des hommes dévoués et compétents.
-------Or,
voici les résultats qu'elle a donnés. On les trouvera exposés
plus en détail aux chapitres II et III.
-------En
gros, dans le royaume arabe, pendant la durée du second Empire,
les statistiques ont accusé dans le chiffre de la population indigène
un recul d'un cinquième. Elle est tombée de 2.500.000 à
2.000.000 d'habitants, en pleine paix, par simple insuffisance de vie
moderne et de prospérité matérielle, pendant que
la colonisation marquait le pas.
-------En
face de ce fait brutal, un esprit impartial peut difficilement se refuser
à la conclusion : il faut admettre un lien entre la prospérité
des colons et celle des indigènes.
-------En
tout cas, la IIIè République a tiré cette conclusion.
Elle a fait l'épreuve du fait dont le second Empire avait fourni
la contre-épreuve.
La
troisième République
-------On sait que
l'empire colonial français a été l'uvre de
la IIIè République. La Tunisie et le Maroc, le Soudan tout
entier et le Congo, Madagascar, le Tonkin et l'Annam. Conquêtes
républicaines que tout cela. Mais ce qu'on ne sait pas assez, c'est
que l'Algérie elle-même, l'Algérie des colons, l'Algérie
économique, est elle aussi, on le dira plus longuement aux chapitres
suivants, uvre républicaine; le grand élan est postérieur
à 1870. Comme tout l'empire colonial français, l'Algérie,
qui en est la clef de voûte, a été l'uvre de
la IIIè République.
-------En
bonne justice, il faut faire hommage des résultats obtenus à
la politique suivie. Ce fut exactement le contraire de la politique impériale.
-------Un
grand fait capital, source d'émotions intenses, fut la nomination
d'un gouverneur général civil. Dans les toutes premières
années de la IIIè République, le gouverneur général,
qui avait toujours été jusque-là un militaire, fut
pour la première fois un civil, Albert Grévy,
le frère du président. L'événement fut accueilli
par les colons comme un triomphe et c'en était un.
-------L'Algérie
a pris alors sa curieuse figure de prolongation de la France métropolitaine,
au point de vue administratif, et électoral. Trois départements
français avec tous leurs organes, préfectures et sous-préfectures,
dont une attribution essentielle est naturellement la préparation
des élections à la Chambre et au Sénat.
-------Cette
conquête du bulletin de vote pour les Chambres françaises,
l'Algérie l'avait saluée avec enthousiasme, mais elle ne
s'en contenta pas longtemps.
-------Le
15 décembre 1898, le gouverneur-général, M.
Laferrière, inaugurait les Délégations financières,
petit parlement algérien. C'était une concession aux émeutes
dites antijuives. L'Algérie désormais, tout en conservant
sa représentation au parlement français, a son autonomie
financière. Un résultat de cette création fut que
l'Algérie, qui avait été jusque-là plus ou
moins à la charge de la France, en est venue bien vite à
ne plus coûter un sou au contribuable métropolitain.
-------Tels sont
les grands tournants de l'histoire politique algérienne sous la
IIIè République. Le sens général de cette
évolution a été manifestement l'extension à
l'Algérie des principes politiques de la démocratie métropolitaine.
La direction politique de la colonie a été mise progressivement
aux mains des colons eux-mêmes.
-------En
face des résultats obtenus, il est difficile de nier que les colons
ont fait un bel usage du pouvoir qui leur était confié.
Les
Personnalités marquantes
-------Le gouvernement
français a toujours été représenté
par des Gouverneurs généraux. Il n'est pas à l'échelle
du présent travail d'en donner la liste complète, qui serait
longue, ni de s'essayer à dégager la part de chacun. Beaucoup
ont été des hommes éminents, des personnalités
attachantes: Bugeaud, Mac-Mahon, Chanzy, Cambon... pour ne citer que les
plus anciens.
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-------Il serait
injuste de ne pas citer le nom de M. Jonnart.
Entre 1900 et 1920 environ, ses trois proconsulats mis bout à bout
ne doivent pas faire loin d'une quinzaine d'années, ce qui est
un record. Le début du XXè siècle fut le moment où
la grande prospérité économique éclata en
Algérie comme une explosion. ]Jonnart a eu plus longtemps qu'aucun
autre gouverneur général l'honneur de présider à
cette magnifique évolution.
-------- D'autres hommes, qui ne furent pas
gouverneurs généraux, ont pesé de la façon
la plus heureuse sur l'évolution de l'Algérie.
-------Jules
Ferry n'a pas seulement déclenché
l'établissement en Tunisie du protectorat français. Comme
rapporteur du budget algérien, il a exercé une action profonde.
-------Burdeau
fut un autre rapporteur du budget, dont le rapport en 1892 fut une date
importante.
-------Paul
Bert n'a guère touché directement
aux affaires algériennes; mais son uvre dans la politique
coloniale de la IIIè République a eu sa répercussion
en Afrique du Nord.
-------Parmi
les parlementaires d'Algérie, M. Etienne
a occupé une place à part. Il était un type excellent
du colon algérien, avec ses qualités et sans doute aussi
ses défauts. Pour exercer une action, il n'a pas eu seulement à
sa disposition les ressources propres de son tempérament. II a
eu l'immense avantage de durer très longtemps. II représentait
le département d'Oran, où le corps électoral est
moins instable qu'à Alger.
-------La pacification
du Sahara et du Maroc a été de grande conséquence
pour l'Algérie, oui doit assurément une part clé
reconnaissance au général Laperrine
et au maréchal Lyautey.
-------Au
berceau de l'Algérie, on n'a que l'embarras du choix peur signaler
une foule de personnalités marquantes. Mais cet embarras du choix
est grand. On serait fort embarrassé pour désigner l'homme
en particulier qui puisse revendiquer pour lui cette uvreéminemment
collective que fut la mise en valeur de l'Algérie.
-------Dans cette
uvre collective il faut souligner celle du Gouvernement général,
organisé en services et bureaux. Pendant que les gouverneurs passaient,
en grand nombre, sous leur succession souvent rapide, le gouvernement
général durait immuable. C'est la condition essentielle
du travail utile.
-------La
carrière administrative en Algérie a été une
carrière fermée; le fonctionnaire y entre au début
de la vie, pour devenir plus tard, s'il réussit, un directeur à
cheveux gris; il n'en sort pas : aucune porte n'ouvre normalement sur
d'autres administrations françaises ou coloniales. Le résultat
est que le gouvernement général est pénétré
d'esprit algérien: il a l'instinct de la situation, le sentiment
inné des réalités et des possibilités.
-------Si
par impossible le Gouvernement général oubliait l'Algérie,
elle aurait vite fait de se rappeler à lui. Les colons ont leur
vie politique, leurs assemblées, leurs journaux ; une opinion publique
parfois acariâtre apporte incessamment au Gouvernement Général
l'appui rectificatif de son contrôle. Entre l'Algérie et
son gouvernement, il y a symbiose.
-------L'uvre
du gouvernement général n'en a été que plus
avisée et par conséquent plus efficace. Mais c'est une uvre
de collaboration.
-------Le
gouvernement général a suivi l'Algérie, il ne prétend
pas l'avoir faite, pétrie de ses mains.
-------Non,
ces initiatives individuelles qui ont construit l'Algérie il ne
faut pas les chercher seulement au haut de l'échelle administrative.
Elles furent innombrables et obscures. L'Algérie s'est (bâtie
un peu comme une fourmilière, anonymement. Personne n'a fait l'Algérie
exprès, en accord avec des principes, suivant un plan établi.
-------Un
historien récent de l'Empire Romain prétend que Rome a conquis
son empire sans l'avoir voulu, par inadvertance, sous la pression inaperçue
des événements. C'est peut-être ainsi que se font
toutes les grandes choses.
L'Interdépendance
de la France et de l'Algérie
-------Cette force
intérieure de développement et d'autonomie, qui s'est attestée
en Algérie, il faut noter qu'elle a ses limites.
L'Algérie a été conquise par l'armée française
et elle ne tient que par l'armée française. Le colon, homme
pratique, en est extrêmement conscient.
-------N'en concluez
pas que l'indigène gît écrasé sous la botte.
Rappelez-vous simplement que jamais depuis 2.000 ans, l'Afrique du Nord
n'a été capable, sans le secours de l'étranger, d'organiser
elle-même son ordre et sa paix. Elle en est aujourd'hui aussi incapable
que jamais.
-------Songez encore,
que la viticulture est la grande ressource économique de l'Algérie,
qui est donc étroitement liée au consommateur Français.
Ceci aussi va très profond. L'Afrique du Nord depuis 2.000 ans
n'a été prospère que lorsqu'elle
faisait partie d'un empire extérieur à elle, dont les marchés
lui étaient ouverts.
-------On
a souvent rappelé la proximité matérielle d'Alger
et de Marseille. Cette proximité est le moindre des liens qui unissent
les deux pays. L'hypothèse de l'indépendance algérienne
est inconcevable.
Perspective
d'Avenir
-------Un centenaire
est une coupure artificielle dans une évolution. Mais celui-ci
coïncide, à peu de chose près, avec un événement
énorme, la fin de la grande guerre c'est-à-dire peut-être
avec un grand tournant de l'histoire de France.
-------La
France vient de réaliser son rêve séculaire. Toutes
les monarchies de l'Europe ont croulé : la démocratie est
victorieuse partout. La France dé 89 est un peu dans la situation
d'un parti politique qui a réalisé son programme.
-------En
conséquence il semble que les préoccupations coloniales
tiennent une place croissante dans l'opinion publique. Notre empire africain
était, naguère encore, coupé en deux par le Sahara.
Il ne l'est plus depuis que le Sahara se traverse en quatre jours dé
diligence automobile.
-------Si
nous considérons les choses sous cet angle, l'Algérie répond
à la question angoissée que nous voyons si souvent posée
dans la presse : « Ah, si nous avions des
colons! » Vous moquez-vous? Vous avez en Afrique du Nord
1.100.000 colons enracinés, entraînés, aventureux,
et qui commencent à se sentir à l'étroit. A la fin
du XVIIIè siècle l'Amérique du Nord avait en tout
et pour tout 2.000.000 de colons Anglais, pas davantage.
-------On
n'envisage presque jamais le phénomène colonial dans son
ensemble; en dehors de ses modalités particulières dans
le temps et dans l'espace. On ne généralise pas assez le
problème. II est évident que depuis trois ou quatre siècles,
depuis Vasco de Gama et Christophe Colomb, nous sommes entrés dans
une crise de colonisation aiguë, progressivement phagédénique.
Au XVIIè et au XVIIIè siècle, 1 Europe a colonisé
l'Amérique tout entière de la Terre de Feu à la baie
d'Hudson. Au XIXè siècle, la colonisation ou la civilisation
Européenne ont pénétré toute l'Afrique du
Nord au Sud. Au XXè siècle, la question qui se pose sous
nos yeux est de savoir si la vieille Asie sera européanisée
ou si elle s'européanisera elle-même. Il y a là une
courbe d'une ampleur, d'une continuité impressionnantes.
-------Nous
n'avons encore que des histoires nationales, à base scolaire, ad
usum Delphini, à l'usage du petit citoyen. Nous ne pouvons pas
avoir autre chose : la vie est trop dure; il y a là une question
de vie ou de mort, une question pragmatique
-------Quand le recul du temps permettra
la création d'une histoire universelle, planétaire, il est
probable que le phénomène colonial apparaîtra dans
les temps modernes le phénomène central autour duquel tout
le reste se groupe.
-------C'est à
peu près ainsi que dans l'antiquité, dans les siècles
qui ont précédé l'ère chrétienne, toutes
les histoires nationales convergent vers le grand phénomène
colonial, l'Empire Romain, c'est-à-dire la colonisation par l'homme
gréco-romain, ou par sa civilisation, de tout le monde alors connu.
-------Il semble
évident en effet que dans le passé humain, tel que nous
le connaissons, la période moderne a un prototype, et un seul,
la période gréco-romaine.
-------Il semblerait
se dégager une sorte de loi. Toutes les fois que, sur un point
déterminé de la planète, il se crée une accumulation
énorme de forces, d'intelligences, de richesses, de ressources,
alors cette accumulation se déverse tout autour; c'est un écoulement
irrésistible; il est rendu inévitable par le déséquilibre,
et il continue jusqu'à ce que l'équilibre soit rétabli.
Cette loi humaine du phénomène colonial aurait de l'analogie
avec la loi physique des vases communicants.
-------Sur notre
petite planète, l'humanité, à tout prendre, tend
nécessairement vers une certaine unité. Cette unité
ne peut être que le résultat d'un brassage. Le phénomène
colonial serait une modalité de ce brassage. Une autre modalité
serait peut-être les invasions de barbares, mais ceci est une autre
paire de manches.
-------Si on considère
le phénomène colonial sous cet angle, et je ne vois pas
comment on pourrait contester la légitimité du point de
vue, alors nos discussions momentanées, nos répugnances
esthétiques, nos indignations politiques et sociales, et d'ailleurs
aussi inversement nos convoitises, apparaissent réduites à
une échelle extraordinairement petite, et on a peut-être
le droit d'en faire abstraction.
-------Dans l'espèce,
dans l'ensemble de l'Afrique française, notre devoir évident
est d'éveiller à la vie moderne, comme nous l'avons fait
en Algérie, et avec son aide, notre moitié de continent.
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