sur site le 8/04/2002
-les Berbères : Sacré nom de nom
Wynna Nat-Iraten
pnha n°54 février 1995

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-------Le monde moderne se distingue par sa mécanique et sa technologie. Tout est par ordre, catégorie, classement et regroupement suivant des caractéristiques spécifiques. C'est bien ; c'est même très bien... sauf que c'est trop lorsque cela s'applique à des humains. On y encourt de graves risques d'erreurs surtout lorsqu'un individu ou un groupe humain a été catalogué dans une fausse rubrique.
-------C'est ce qui est arrivé aux NordsAfricains.
-------En attendant de revenir sur quelques aberrations, notamment celle concernant leur appellation, (Maghrebins ?!), il y a lieu de rétablir certaines vérités en commençant par ce qui se rapporte aux noms et prénoms.
La colonisation avait pourtant bien ficelé les choses ; du moins le croyait-il. Ainsi que cela est expliqué dans le livre "A.B.C.D.", les autorités françaises de conquête et d'occupation de l'Algérie avaient inventorié, répertorié et étiqueté les familles en dotant chaque chef du foyer d'un nom patronymique. Cela signifie que ces noms étaient une invention et une obligation du moment, et que cela ne rattachait les familles étiquetées à aucune de leurs racines puisque les patronymes n'existaient pas dans les souches d'origine.
-------Les Français et les Berbères, notamment les Kabyles, qui ignorent cette opération, commettent une simple erreur. Mais ceux d'entre eux qui s'imaginent qu'il s'agit d'une marque distinctive de longue lignée familiale commettent une faute ; surtout ceux qui se sont pris au jeu au point de faire de cet étiquetage une sacro sainte institution.
-------Il faut avouer que c'était pourtant bien commode pour certains esprits ( qui se défendent d'être mal intentionnés), de l'Indigénat, tous ces "gens de là-bas". -------Et voilà que ces critères ségrégationnistes commencent à voler en éclats et semer le trouble. ------- -------Comment faire désormais avec tous ceux qui cherchent, ou parfois réussissent, à se fondre dans la communauté française non seulement en rejetant la marque distinctive de la colonisation par francisation de nom, mais en lui donnant quelques fois une consonnance internationale ? Et il y a mieux, ou pis, selon l'idée que l'on se fait de la chose, certains adultes changent aussi leur prénom et s'avisent d'attribuer à leur progéniture des prénoms non évocateurs du "folklore indigène".
-------Quand on vous le disait que tout fout le camp...
-------Passe encore que les noirs américains se donnent pour nom : George Washington ou John Kennedy ou Martin Luther King, mais que Mohand devienne Victor, Maxime, Felix, ou Florent et que Fatima devienne Paula, Justine, Cecilienne, ou Monique, cela confine à de la provocation. A cette allure, il sera bientôt impossible de deviner qu'il s'agit de "Noraf".
-------Le malheur dans cette histoire, et les Kabyles sont loin de s'en douter, c'est que leurs ancêtres ont porté, et fait sanctifier par leurs martyrs, la plupart des prénoms répandus dans le paysage français bien avant que le Gaulois n'aient fait connaissance avec la civilisation née du monde Judéo-Chrétien.
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-------Voici, à titre indicatif, un bref aperçu de quelques noms, tirés des matyrologes chrétiens romains, et dont personne ne dit jamais qu'il s'agit de Berbères. Cette question sera développée plus amplement dans le troisième livre du coffret consacré à la "Mémoire d'un Peuple", volume intitulé "Notre Place au Soleil" Adrien (qui devient abbé à Cantorbery), Alexandre, Anastase, Arcade, Augustin, Aurele... Cassien, Célestin,Cécilienne, Cler, Commode, Constantin, Corneille, Cyprien... Damien... Émilien, Eugène... Félix, Fidèle, Flavien, Florent, Fortunat, Fulgence... Gelase, Germaine... Hermès... Janvier, Jules, Just, Justine... Laurent, Macarie, Marcel, Marcelin, Marcienne, Martial, Maxime, Miltiade. Monique... Octavien... Paulin... Saturnin, Sévère, Séverin... Tertullien, Théodore, Théodule, Thimotée... Valérien, Victor, Victorin, Vincent... Zenon... et même Déogratias !
-------Arrêtons pour aujourd'hui cette longue citation et pourtant déjà trop riche aux yeux de ceux qui vont se sentir gênés, dépités, ou même peut-être incommodés. Si toutefois il reste des curieux intéressés par le sujet, il leur est loisible de jouer les prolongations en dressant un tableau faisant figurer, d'une part, les simples martyrs et, d'autre part, ceux devenus des saints. A titre de question subsidiaire, pourquoi ne pas distinguer ceux qui sont restés évêques de ceux devenus... PAPES (dans cette dernière rubrique, il y en a au moins 3).
-------De quoi ? De quoi ? Tout ces prénoms sont des noms de Berbères ? Et de plus ce sont des Berbères devenus des saints au sein de la Sainte Église Apostolique Catholique et Romaine ? Pour ceux qui n'ont pas les Nord Africains authentiques en odeur de sainteté il y a de quoi se faire débaptiser afin de se faire appeler Paul, Daniel, Luc ou Mathias... Mais, de grâce, ayez pitié d'eux et n'allez pas leur dire que ce sont là des prénoms juifs : ils ne s'en remettront jamais de passer "de Caroube en Syllabe". Tiens, tiens, on dirait que même la citation "De Charybde en Scilla" en a subi un coup dans cet épisode allusif à un certain racime.
-------Ah ! Nom de NOM, quelle Histoire!

Wynna Nat-Iraten