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site le 2/10/2002
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-----La
vérité prend souvent des chemins inattendus pour se manifester.
Il n'est donc pas déplacé de faire appel autant à la
raison qu'à l'irrationnel pour aller à sa recherche. Alors,
plongeons dans le domaine de l'imaginaire. -----En Kabylie, trois sortes d'individus peuvent être dénommés des Enchanteurs, parce qu'ils détiennent un pouvoir supermagique : les graphistes ; les conteurs ; et les troubadours. LES GRAPHISTES -----Il ne s'agit nullement des écrivains qui transcrivent en calligraphie ornementale des lettres, des mots ou des phrases. Il s'agit de ceux, et de celles, qui détiennent le secret des signes et dessins dont la signification remonte loin dans la nuit des temps. Cela n'a rien de mystérieux pour quiconque est initié en la matière. Mais, justement, comme ces significations restent limitées aux seuls initiés, tout décès des détenteurs d'explications appropriées entraîne une confusion ouvrant la porte à des interprétations fantaisistes. -----Alors, à force de se trouver désarmé devant la lecture ou l'interprétation exacte des messages ainsi transmis depuis la plus haute antiquité, il a été facile de les taxer de signes cabalistiques. Les vieilles femmes continuent de croire en la réalité cachée de ces graphismes ; elles les recopient fidèlement et les transcrivent pieusement dans les décors des poteries et des filatures. Les vertus attachées à ces tracés ont un influence mystérieuse et magique sur certaines personnes qui les choisissent comme emblèmes distinctifs reproduits pour orner le portique d'entrée de leur maison, marquer les barrières des champs, ou distinguer certains objets personnels. Plusieurs mères de famille appliquent à leurs enfants le signe qu'elles se sont choisis, ou qui leur a été recommandé, en le leur imprimant sur là tête ou sur le corps, soit avec du henné, soit avec des onguents. Chacun et chacune croit alors être ainsi relié, d'abord, à ses ancêtres et, au delà, à Dieu. -----Personne ne se hasarde à donner un sens intangible à ces motifs décoratifs. Tout est subjectif. Le seul domaine où tous les avis se rejoignent est celui du classement en éléments positifs ou négatifs, à savoir que ces symboles sont porteurs de vertus bénéfiques ou maléfiques. Les détenteurs ou détentrices de ces significations savent que cela leur procure un véritable pouvoir, et ils (elles) en jouent. Il leur arrive de procéder à une décoration ou de rédiger une amulette, lesquelles seront chargées de mystère et de magie susceptible de faire rêver, à savoir de faire sortir les êtres humains de leur carapace de chair pour les faire évader vers un autre monde peuplé d'esprits. Ces praticiens concurrencent souvent les religieux parce que ces derniers obligent à s'en remettre à un dogme pour élever l'esprit et l'âme, alors que les graphistes laïcs invitent les gens à croire en leurs propres moyens, en leurs propres sens et, finalement, en leur propre intelligence pour se sublimer. -----Le défi dure depuis longtemps et il est probable qu'il durera encore. En effet, les vieilles croyances kabyles n'ont jamais renié le surnaturel-irrationnel comme explication rationnelle de la nature. Dans l'esprit de tous, cela n'a rien à voir avec le mysticisme de la religion qui fait appel à une force extérieure, alors que chacun porte en lui de quoi remonter, intérieurement et sans intermédiaire-adjuvant, depuis l'humain jusqu'à Dieu. -----Dans cette relation directe entre la créature et son créateur, les représentations symboliques sous forme de points et de traits inspirent toues sortes de fantasmes. Cela permet une extrême concentration qui mène à l'illumination suprême susceptible de déclencher l'extase. Les explications se rapportant aux points, aux traits et aux cercles sont largement développées dans les paragraphes d'initiation du livre A.B.C.D. |
LES CONTEURS Wynna Nat-Iraten |