Le camp Basset à
Beni Messous
A 8 km au sud-ouest d'Alger, un grand domaine
occupait un vaste territoire situé entre El Biar, Air de France,
Chéragas et Dély Ibrahim, et délimité, au
sud, par la route "d'Alger à Koléa" (future
Nationale 41), à l'est et au nord par le "chemin vicinal
n°13" des Beni Messous à la Bouzaria" (future
Départementale 45) et au nord-ouest par l'hôpital-hospice
et l'orphelinat et, à l'ouest par le village des Beni Messous.
Sur cet espace acquis vers 1870 par la famille Desplaces, puis, vers
1885, par la famille Vialar, une ferme avait été installée,
reliée à la route par un chemin vicinal bordé de
palmiers, qui, plus de 45 ans plus tard, servira d'entrée sud
au camp Basset et sera baptisée "Allée Maréchal
de Lattre de Tassigny".
Entrée du Camp Basset
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CIT 160 - Entrée du
Camp Basset - Poste sud
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Camp Basset - Allée
Maréchal de Lattre de Tassigny
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Poste de Contrôle et
sortie du Camp Basset
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Dès la fin des années 1920
(mais peut être avant) et jusqu'à la seconde guerre mondiale,
ce territoire dit de la "ferme de Beni Messous" est
utilisé par l'armée comme terrain de manuvre et
d'exercices en campagne notamment pour l'artillerie. Ainsi le samedi
14 février 1931, l'école de perfectionnement des officiers
d'artillerie d'Alger organise un exercice en campagne précisant
:
"Rendez-vous à 14 heures à la ferme de Beni Messous
(Allée des Palmiers) sur la route de Chéragas. Une camionnette
partira du Parc (rue de Lyon) à 13 heures et suivra l'itinéraire
: Cartoucherie, chemin Yusuf, boulevard Galliéni, El Biar, Châteauneuf.
Elle quittera cette dernière station à 13 h 55 pour se
rendre au lieu du rendez-vous. Les officiers de réserve pourront
prendre cette voiture au passage. Se munir du plan directeur, boussole,
sitogoniomètre, papier, crayon" (lÉcho
d'Alger du 22 janvier 1931).
Écho d'Alger
du 22 janvier 1931
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Il ne semble pas qu'avant le début
de la seconde guerre mondiale des unités se soient installées
de façon permanente sur le territoire de la ferme de Beni Messous.
Mais pendant la période 1939-1945, l'armée s'établit
durablement sur le domaine l'utilisant comme précédemment
comme terrain de manuvre et champ de tir mais aussi en y implantant
des bâtiments de casernement. Dans lÉcho
d'Alger du 4 février 1944, la population de Chéragas
est avisée que "des tirs au fusil et au fusil-mitrailleur
seront effectués vendredi 11 février de 7 h 30 à
16 h 30 (avec arrêt de 11h 30 à 12 h 30) au champ de tir
de circonstance de Beni Messous. Il y a donc danger de s'aventurer aux
abords du ravin ouest, cote 176,8, de Beni Messous".
Écho d'Alger du 4-2-144
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Parmi les unités cantonnées
pendant cette période sur la propriété de Beni
Messous (qui n'a pas encore été aménagée
en camp), le 1er Bataillon de Pionniers Indochinois
(commandant Lebret) reçoit, au mois de mai, la visite du Gouverneur
Général Châtel qui inspecte les locaux réservés
à la troupe "décorés dans la plus pure
tradition indochinoise par les soldats eux mêmes" (Echo
d'Alger du 9 mai 1942).
Echo du 9 mai 1942
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Quelques mois plus tard, ce bataillon déplore
la mort de deux de ses soldats, le sergent-chef Le-Kim et le caporal
Le-Phat-Hue, tués lors des combats fratricides suivant le débarquement
des alliés en Algérie le 8 novembre 1942.
Écho d'Alger du 16-11-1942
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Après la fin de la guerre, le camp
accueille progressivement et durablement plusieurs unités, appartenant
principalement à l'Arme du Train.
Le 520ème Groupe de Transport (GT 520)
est recréé au camp de Beni Messous le 16 mai 1946 où
il restera jusqu'à son transfert à Boufarik en février
1963. C'est un groupe de transport lourd équipé de gros
poids lourds (Willème, Berliet, Saviem, Simca, etc.).
Insigne du GT 520
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Créé en 1947 à Oran,
le Centre d'Instruction du Train n°10 (CIT 10) est transféré
en 1950 à la ferme de Beni Messous avant d'être dissout
en 1951. Il est reconstitué en 1955 toujours à Beni Messous
au sein du GT 520 et est recréé
sous le nom de Centre d'Instruction du Train
n°160 (C.I.T. 160), le 1er mai 1956 dans la même
garnison où il restera stationné jusqu'en juillet 1962
avant de rejoindre la métropole où il sera dissout le
15 août 1962.Cette unité a en charge la formation des appelés
du contingent aux métiers de l'Arme du Train.
Insigne du CIT 160
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CIT 160 - Bâtiment
de la CCS (Compagnie de Commandement et des Services
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Les conducteurs sont formés au sein de la FRAC
(Formation Rationnelle Accélérée de Conducteurs)
qui décerne les permis de conduire militaire : VL, PL et moto.
Cette formation est dispensée sur un ensemble de voies sur route
et sur pistes en tous terrains, qui occupent une vaste superficie à
l'intérieur du camp.
CIT 160
La FRAC - Piste et Tour de Contrôle
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Pour les VL cet apprentissage se fait notamment
sur des véhicules arborant une large bande blanche sur le capot
: Jeep Willis et "Jeep" française VLR Delahaye (véhicule
léger de reconnaissance).
CIT 160 La FRAC -
Le PC
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Le CIT 160 a aussi pour mission la formation
de dépanneurs au sein de la FRAD (Formation Rationnelle Accélérée
de Dépanneurs).
CIT 160 - Vue du terrain
de sport et de la FRAD
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Pendant la guerre d'Algérie, l'autorité
commandant le CIT 160 est également responsable du sous-secteur
d'Alger-Sahel ouest.
La musique du CIT 160 apporte son concours aux célébrations
locales comme la remise du fanion à l'Unité Territoriale
139 de Bouzaréah. Une partie de ces musiciens se retrouvent dans
un excellent ensemble de variétés, type "big band"
qui anima les bals des 20 et 21 septembre 1958, lors des "Journées
de l'Algérie Française" au Parc de Miremont à
Air de France et accompagnèrent pour l'occasion le chanteur Luc
Davis.
La 210ème Compagnie de Circulation Routière
(CCR 210) formée en 1950 à Alger rejoint le
1er janvier 1952, le camp de Beni-Messous, qu'elle occupera jusqu'à
son transfert en métropole, en 1963 où elle sera dissoute.
Insigne de la CCR 210
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CCR 210 - Bâtiments
et Jardins de la Compagnie de Circulation Routière
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Vue de la CCR 210
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La plus grande partie de ce camp est occupée
par ces unités du Train, logées dans des bâtiments
en dur, ou en préfabriqué et même sous des tentes
(camp "Verdun"où étaient hébergés
les nuveaux incorporés du contingent dans l'attente de leur affectation
dans les différents pelotons).
Village de toile "Verdun"
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Outre les bâtiments administatifs des différentes compagnies,
le camp dispose bien évidemment de cuisines et de réfectoires,
d'un stade avec parcours du combattant, de stands de tir, mais aussi
d'un foyer avec salle de lecture contigü à un "jardin
d'agrément".
Les cuisines et réfectoires
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Le Foyer du Soldat
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Le Jardin d'agrément
du Foyer
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Intérieur de la salle
de lecture
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Le stade
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La portion nord et nord-est est réservée
au stationnement temporaire d'autres unités et utilisée
par les préparations militaires élémentaire et
supérieure (PME et PMS). C'est au camp de Beni Messous que les
élèves des PME et PMS consacrent certains de leurs dimanches
à se former au maniement des armes, à des séances
de tir, au parcours du combattant, à la topographie etc. (l'obtention
du Brevet de Préparation Militaire Élémentaire
était alors indispensable à la demande de sursis d'incorporation
jusqu'à 25 ans ou 27 ans, en vue de la poursuite des études).
Insigne de la Préparation
Militaire Terre
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Brevet de PME
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Ils pouvaient également demander
à être formés à la conduite automobile sur
les pistes de la FRAC.
Certficat d'aptitude à
l'emploi de Conducteur Auto
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Avril 1960 Francis
Rambert devant une jeep-école Delaye de la Préparation
Militaire
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Certains (dont je fus), qui souhaitaient obtenir
le Certificat Prémilitaire à l'emploi d'élève
gradé étaient tenus d'effectuer, dans ce camp, pendant
les vacances de Pâques, une période bloquée de 8
jours, ce qui leur permettait de prétendre à une permission
supplémentaire de 11 jours pendant leur service actif, avantage
dont je n'ai pas oublié de bénéficier.
Avril 1960
-Francis Rambert devant le "Simca cargo" qui avait
amené les stagiares au camp Basse
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Quatre stagiaires pendant
la période bloquée d'avril 1960
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Certificat d'aptitude à
l'emploi d'Elève gradé
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Nous n'avons trouvé ni l'origine de l'appellation
"Camp Basset" ni la date à laquelle il fut donné
au camp de Beni Messous, qu'il ne faut pas confondre avec deux autres
établissements militaires situés à proximité,
au nord de la départementale 45, vers Air de France :
le chenil de lÉtablissement Cynophile de la Gendarmerie
installée en 1949 et lÉcole Militaire Annexe des
Transmissions de l'Afrique du Nord (EMAT/AFN) dont les travaux de construction
avaient débuté en 1953, et qui s'y installa progressivement
à partir d'avril 1955 au fur et à mesure de la mise en
service des divers bâtiments (troupe, restauration, cuisine, instruction,
atelier auto), mais certains n'avaient toujours pas le jour (bâtiment
commandement, mess mixte et infirmerie) lors de la dissolution de l'EMAT/AFN
le 9 octobre 1962.
Merci d'avance aux lecteurs qui pourraient me communiquer des renseignements
plus précis sur l'histoire du Camp Basset (unités qui
y ont été stationnées à différentes
époques, origine du nom de "Camp Basset", historique
de l'établissement et du développement du camp)
Références
Site de Jean Delamare : "L'Arme du Train en Algérie"
http://delamarejean.free.fr/l_arme_du_train_en_algerie/Train%20en%20Algerie/index.html
Site de Francis Rambert : "Air de France, Bouzaréah et environs"
http://rambert.francis.free.fr/environs/delyibrahim/beni_messous/benimessous.htm
Articles de lÉcho d'Alger trouvés sur le site Gallica
de la BNF http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb327596899/date.r=l'echo-d'alger.langFR
Illustrations
- Cartes postales Collection Renée et Francis Rambert