Ben Aknoun - Châteauneuf, El-Biar

Répondant à l'aspiration de tous les hommes de bonne volonté de ce pays

Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier par le gouverneur général Léonard, en présence de nombreuses personnalités politiques de l’Algérie.

Echo du 27-4-1954 - Transmis par Francis Rambert

Répondant à l'aspiration de tous les hommes de bonne volonté de ce pays

Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier par le gouverneur général Léonard, en présence de nombreuses personnalités politiques de l’Algérie.

Cette cérémonie a revêtu un caractère de symbole que tous les orateurs ont souligné. Il s’agit là d’un événement riche de conséquences.

Dans cet établissement, depuis octobre, sont dispensés, à près de 400 élèves, confondus, les « enseignements traditionnels de l’Islam et les prestigieuses disciplines de la culture française ».

Cela découle de la réforme de 1950-51 qui transforme les médersas en lycée franco-musulman. Les élèves y suivent l’enseignement secondaire que couronne le « bac » et, parallèlement, un diplôme de fin d’études islamiques qui leur ouvre, notamment, la carrière de mouderrês.

Sans compter que l’Institut supérieur d’études islamiques, y puisera également un recrutement de valeur.

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mise sur site :avril 2025

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En haut, à gauche, le lycée d'El Biar ( entre CREPS et CITÉ) est-il le lycée franco-musulman ?
Répondant à l'aspiration de tous les hommes de bonne volonté de ce pays


Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier
Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier
Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier


Répondant à l'aspiration de tous les hommes de bonne volonté de ce pays



Répondant à l'aspiration de tous les hommes de bonne volonté de ce pays

Le lycée franco-musulman de Ben-Aknoun a été solennellement inauguré hier par le gouverneur général Léonard, en présence de nombreuses personnalités politiques de l’Algérie.

Cette cérémonie a revêtu un caractère de symbole que tous les orateurs ont souligné. Il s’agit là d’un événement riche de conséquences.
Dans cet établissement, depuis octobre, sont dispensés, à près de 400 élèves, confondus, les « enseignements traditionnels de l’Islam et les prestigieuses disciplines de la culture française ».
Cela découle de la réforme de 1950-51 qui transforme les médersas en lycée franco-musulman. Les élèves y suivent l’enseignement secondaire que couronne le « bac » et, parallèlement, un diplôme de fin d’études islamiques qui leur ouvre, notamment, la carrière de mouderrês.
Sans compter que l’Institut supérieur d’études islamiques, y puisera également un recrutement de valeur.
Cette rénovation a sauvé les médersas classiques dont l’enseignement n’attirait presque plus de scolaires. Par contre, en juillet dernier, 564 candidats se sont présentés à l’entrée du lycée franco-musulman ; 167 ont été reçus. Le recteur Gau, à ces chiffres, a insisté sur la nécessité d’agrandir les deux autres medersas. Celle de Tlemcen va l’être.
A Constantine, l’annexe créée récemment ne répond déjà plus aux besoins.
Le recteur a aussi souligné l’innovation que constitue l’ouverture du nouveau lycée de jeunes filles franco-musulman. Installé rue Ben-Cheneb, dans les locaux de l’ancienne médersa, il a reçu en octobre dernier 27 élèves sur 40 candidates.

« Formule des plus heureuses, a insisté M. Hadj Saddok, président de l’Association des anciens élèves de la medersa, qui résoudra le grave problème de la formation de la femme musulmane ».

Dans l’instauration de cet enseignement bilingue le proviseur Ibnou Zekrl a voulu voir l’affirmation d’une œuvre sagement entreprise et suivie. S’adressant alors aux élèves, il leur déclara : « Répondez à la sollicitude que l’on vous témoigne par la discipline et le travail qui sont l’honneur de l’homme ».

Engagement qu’avait d’ailleurs pris au nom de ses camarades, l’élève de première, Madi Rachid : « Nous travaillerons assidûment et resterons attachés à tout ce que notre devoir nous demande d’être ».

Discours du président Farès

Mettant en relief les enseignements profitables des cultures arabo-islamique et française « qui peuvent se combiner heureusement et donner à ceux qui en recueillent les fruits, les éléments nécessaires à une exceptionnelle largeur de vue », le président de l’Assemblée algérienne en a souligné l’incomparable importance :
« Dans cette Algérie du Moghreb, consciente et orgueilleuse de son originalité, véritable carrefour des civilisations, les deux éléments ethniques principaux, chrétien et musulman, sont encore, à mon sens, trop étrangers l’un à l’autre. La cause en est d’abord pour chacun, de l’ignorance de la langue, de la religion, et des mœurs de l’autre ; la méconnaissance de ce qu’est, également pour chacun, la conception des valeurs humaines essentielles dans le cadre de sa civilisation propre et, cet état de chose, a malheureusement maintenu une imperméabilité qui n’est plus compatible avec une vie en commun dans l’estime et la confiance réciproques.
En donnant à notre jeunesse une double culture, nous détruirons les causes de cette ignorance, et nous lui permettrons de s’enrichir des mutuelles différences.
Dans ce pays, où, avec plus de rapidité qu’ailleurs, se précipite l’évolution générale, où des hommes de tous les milieux seront appelés demain, et par leur propre valeur, à occuper des postes essentiels ou importants à la tête de la marche vers le progrès, il faut que ceux qui sont issus d’origines différentes se rejoignent enfin, pour voyager ensemble vers l’avenir ».
Le président Farès a également insisté sur l’intérêt qu’il y avait à développer « un enseignement identique et largement ouvert pour les filles. Car en Algérie, surtout en milieu musulman, la différence entre le pourcentage d’instruction chez les garçons et chez les filles, est déjà trop gravement ressenti.
Sans même parler du rôle de la femme dans la cité moderne, a-t-il poursuivi, où elle est de plus en plus appelée, par goût ou par nécessité, à effectuer les mêmes tâches que l’homme, les jeunes musulmans, qui ont été éclairés par la lumière de l’instruction, s'aperçoivent avec terreur que leurs épouses sont restées trop loin derrière eux. Le remède doit donc venir de la femme musulmane elle-même ».

Discours de M. R. Léonard
Le Gouverneur général a tout d’abord affirmé sa conviction- que les traditions spirituelles de la vieille Medersa, « lentement élaborée depuis un siècle, ne seront en rien oubliées, ni reniées du fait de ce changement de cadre ».
M. Léonard estime par ailleurs qu’il n’y a pas contradiction entre le progrès et la tradition s’il existe un harmonieux équilibre entre deux principes opposés.
« Tout ce qu’il y a de bon dans le passé doit être utilisé dans le présent pour préparer un avenir meilleur ».
L’Algérie n’est-elle pas, plus qu’aucun autre pays, appelé à donner l’exemple d’une volonté d’harmonie, dans la synthèse ? N’est-elle pas appelée à faire mentir le fameux aphorisme de Kipling selon lequel l’Orient et l’Occident ne se rencontreront jamais
Le Gouverneur général cite alors de nombreux exemples puisés sur cette terre, infirmant ce point de vue :
« C’est dans cet esprit. J’en suis persuadé, que les maîtres appelés à enseigner dans ce lycée participent à l’œuvre d'enrichissement de deux mondes l’un par l’autre, et cette œuvre répond à l’aspiration, consciente ou non, de tous les hommes de bonne volonté de ce pays. Une amitié et une connaissance mutuelle sont à préserver, à nourrir, à développer, fondées sur un idéal commun de justice sociale, de paix et de progrès. C’est Aristote, l’une des sources communes à nos deux civilisations, qui le disait : Une amitié n’est valable, durable, féconde, que si elle s'oriente vers le bien. Et je trouve en cette pensée de notre cher Saint-Exupéry la maxime que nous pourrions inscrire au front de l’œuvre qui s’édifie sur cette terre d’Algérie : « Si tu veux unir les hommes, conduis-les à bâtir ensemble, et tu les changeras en frères ».
Puis M. Léonard a défini le rôle incombant aux élites qui acquièrent dans nos écoles « un bagage culturel qui leur crée non seulement des droits mais aussi, mais surtout, des devoirs ».
Et, s'adressant aux jeunes lycéens, le Gouverneur général leur a dit :
« Demain, vous serez des magistrats, des fonctionnaires, des éducateurs. Chacune de ces fonctions exigera de vous de solides qualités professionnelles que vous devez vous efforcer d’acquérir, à la fols pour réussir dans la carrière de votre choix, et pour maintenir la haute réputation de ce lycée.
Mais vous serez avant tout les pionniers de deux civilisations sœurs, les nécessaires intermédiaires, le trait d’union, entre les différentes races qui vivent sur cette terre algérienne. Vous porterez, en un mot, un message de fraternité par lequel vous contribuerez à assurer à ce pays un avenir lumineux au sein de la grande communauté française