COMMUNICATION DE
M. ADDAB, Conseiller municipal, au sujet de l'ouverture éventuelle
d'un débit de boissons au n° 1 du boulevard Laurent Pichat.
M. ADDAB.
Mes chers Collègues,
Les membres du Conseil municipal ont été saisis par diverses
lettres-circulaires émanant du Comité de quartier Belcourt-Cervantès
et concernant l'ouverture éventuelle d'un débit de boissons
au n" 1 du boulevard Laurent Pichat.
Ce débit de boissons s'ouvrirait au 4ème étage d'un
immeuble à usage d'habitations et, de ce fait, surplomberait les
terrasses de tout le quartier Belcourt-Cervantès et aurait comme
spectacle l'élément féminin vaquant à ses
occupations quotidiennes.
Ce sera là, mes chers Collègues, une atteinte grave aux
moeurs et coutumes de la population musulmane dont l'inquiétude
et l'émotion légitimes se sont déjà manifestées
à l'annonce de l'ouverture d'un tel établissement.
Conscients de cet émoi, nous vous demandons de vous associer à
la résolution émanant de la population de Belcourt-Cervantès
et dont je vous donne lecture :
La population de Belcourt-Cervantés, réunie ce jour, 28
novembre 1953, à 18 h. 30, au cinéma " Scheherazade
", rue Chopin, Belcourt, à l'appel du Comité de quartier
" Belcourt-Cervantès ", adopte la résolution suivante
:
Considérant la réouverture éventuelle d'un débit
de boissons au 1, boulevard Laurent Pichat, Alger ;
Considérant que cette ouverture n'apporterait que perturbation
clans ce grand quartier si elle venait à être autorisée
;
Considérant que ce local était fermé depuis 20 ans
et utilisé à usage d'habitation depuis plusieurs années
;
Considérant qu'un débit de boissons dans ce lieu avait déjà
soulevé l'indignation générale il y a 20 ans ;
Considérant qu'une demande d'ouverture formulée en 1948
avait fait l'objet d'un rejet définitif de la part des autorités
;
Considérant que l'intérêt d'une collectivité
ne doit aucunement être sacrifié au profit d'un exploitant
o
Considérant que l'ouverture d'un tel lieu serait une provocation
aux moeurs et coutumes de la population ;
Considérant que pour sauvegarder son honorabilité et faire
respecter ses moeurs et coutumes, la population de Belcourt est absolument
en droit de s'opposer énergiquement à la réouverture
d'un débit de boissons au-dessus des terrasses musulmanes ;
Considérant, par ailleurs, que le quartier populeux de Belcourt
est infesté de lieux de proxénétisme et de stupéfiants
;
Considérant que, malgré les protestations et les milliers
de pétitions ,la population musulmane de Belcourt ne semble pas
avoir jusqu'à présent mérité l'attention et
la sollicitude de l'Administration ;
La population de Belcourt-Cervantés :
- s'oppose énergiquement à l'ouverture d'un débit
de boissons au 1, boulevard Laurent Pichat;
- demande que ses moeurs et coutumes soient respectées.
M. Jacques Chevallier, Député- Maire. - Mon cher Collègue,
l'affaire dont vous entretenez le Conseil municipal a déjà
fait l'objet de plusieurs démarches de ma part auprès du
Préfet, à la demande de vos collègues, et notamment
de M. Abdelhamid.
Une réponse a été faite par la Préfecture
- que je vous ai transmise -, laquelle nous faisait connaître qu'il
ne s'agissait pas de la réouverture d'un café, mais de l'ouverture,
avec attribution d'une licence nouvelle.
Si vous voulez que le Conseil municipal émette un voeu et entre
dans vos vues - je ne pense pas que nos collègues soulèvent
des objections -, il serait nécessaire que votre texte fut soumis
à la Commission d'administration générale pour en
revoir la rédaction.
Je pense que nos collègues seront d'accord sur le principe, eu
égard aux arguments extrêmement valables que vous avez fait
valoir, relatifs aux coutumes musulmanes.
Lorsque le texte aura été revu, nous le soumettrons à
l'approbation du Conseil municipal qui se réunira la semaine prochaine
pour liquider les questions budgétaires.
Etes-vous d'accord ?
Adopté.
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