Aménagements hydroélectriques d'AlgérieD'Oran à Tiaret, barrage Saint Denis du Sig ou des Cheurfas
mise sur site le 7-2-2012
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Dès la conquête de l'Algérie, la politique de l'eau a été l'objet d'une étude minutieuse de la part des pouvoirs publics. L'une des premières et des plus belles réalisations de l'époque fut sans contredit l'établissement de ce fameux barrage du Sig qui permit une fertilisation rapide et rationnelle de la magnifique plaine environnante. L'Illustration lui consacra un article très documenté dans son numéro du 20 avril 1845. Nous nous faisons un plaisir de reproduire ce précieux document, persuadés qu'il saura intéresser plus d'un de nos lecteurs. La domination française en Algérie semble se consolider chaque jour davantage par l'influence des murs, des usages et de la civilisation européenne. Nous trouvons incessamment des preuves nouvelles de cette espèce de transformation sociale dans les nombreux journaux qui apparaissent de toutes parts en Afrique : " le Moniteur Algérien ", " l'Akbar ", " le Safsaf ", " la Seybouse ", " l'Écho d'Oran ", " la France Algérienne ", " le Courrier d'Afrique ", " l'Écho de l'Atlas ", indépendamment de " l'Algérie " et de " l'Afrique ", qui se publient à Paris. Tantôt ce sont les fêtes du carnaval qui attirent les indigènes au milieu de nos garnisons et de nos camps; tantôt des chefs arabes eux-mêmes, comme les quinze cheikhs ou caïds des environs de Guelma, se réunissent et se cotisant pour offrir à leur tour un bal, avec ambigu et vin de Champagne, aux colons et à la garnison. Et qu'on ne s'imagine pas, comme le faisait remarquer dernièrement, avec raison, " la Seybouse ", que les Arabes ne progressent à notre contact que dans le goût des plaisirs. Une tendance générale vers tout ce qui est utile se manifeste parmi eux de plus en plus. Ainsi, au lieu de se contenter, comme jadis, pour la construction de leurs maisons, de quelques mauvaises murailles de boue, ils commencent à employer nos entrepreneurs et nos maçons européens et à construire avec goût, même avec un certain luxe, des corps de bâtiments vastes et commodes. Ils comprennent parfaitement aussi que les routes et les ponts ne sont pas seulement des moyens créés par nous pour aller les chercher au loin et les soumettre plus facilement, mais qu'ils sont encore de puissantes ressources pour les travaux d'agriculture, pour la célérité et la sécurité des communications entre eux. Jusqu'ici les ruisseaux et les rivières leur opposaient, dans leurs crues rapides, des obstacles presque insurmontables, alors que leurs besoins les appelaient soit à la ville et au marché, soit dans les tribus. Ils sentent à présent les avantages de franchir ces obstacles en toute saison, et ils viennent sous l'heureuse inspiration de M. le général Randon, de laisser construire, à leurs frais, dans la plaine de Bône, trois ponts sur des ruisseaux fréquemment traversés par eux durant l'été, et trop profonds dans l'hiver pour offrir des gués sûrs. Chacun s'est montré satisfait de payer sa quote-part de la dépense qu'ont occasionnée ces petits, mais utiles travaux. Les avances faites ont été remboursées avec autant de régularité que d'empressement par l'entremise des cheikhs et des caïds qui n'ont eu à prélever qu'environ un franc par tente. Les Arabes ne veulent pas s'arrêter là ; de tous côtés, on est surpris de les entendre proposer d'établir, également à leurs frais, par les soins de l'Administration, d'autres ponts semblables dans les lieux où ils les croient nécessaires; ils vont même jusqu'à proposer de contribuer à la construction des ponts plus importants et plus dispendieux à élever sur les grandes rivières d'Algérie. N.B : CTRL + molette souris = page plus ou moins grande TEXTE COMPLET SOUS L'IMAGE. |
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Barrage du Sig. Dès la conquête de l'Algérie, la politique de l'eau a été l'objet d'une étude minutieuse de la part des pouvoirs publies. L'une des premières et des plus belles réalisations de l'époque fut sans contredit l'établissement de ce fameux barrage du Sig qui permit une fertilisation rapide et rationnelle de la magnifique plaine environnante. L'Illustration lui consacra un article très documenté dans son numéro du 20 avril 1845. Nous nous faisons un plaisir de reproduire ce précieux document, persuadés qu'il saura intéresser plus d'un de nos lecteurs. La domination française en Algérie semble se consolider chaque jour davantage par l'influence des murs, des usages et de la civilisation européenne. Nous trouvons incessamment des preuves nouvelles de cette espèce de transformation sociale dans les nombreux journaux qui apparaissent de toutes parts en Afrique : " le Moniteur Algérien ", " l'Akbar ", " le Safsaf ", " la Seybouse ", " l'Écho d'Oran ", " la France Algérienne ", " le Courrier d'Afrique ", " l'Écho de l'Atlas ", indépendamment de " l'Algérie " et de " l'Afrique ", qui se publient à Paris. Tantôt ce sont les fêtes du carnaval qui attirent les indigènes au milieu de nos garnisons et de nos camps; tantôt des chefs arabes eux-mêmes, comme les quinze cheikhs ou caïds des environs de Guelma, se réunissent et se cotisant pour offrir à leur tour un bal, avec ambigu et vin de Champagne, aux colons et à la garnison. Et qu'on ne s'imagine pas, comme le faisait remarquer dernièrement, avec raison, " la Seybouse ", que les Arabes ne progressent à notre contact que dans le goût des plaisirs. Une tendance générale vers tout ce qui est utile se manifeste parmi eux de plus en plus. Ainsi, au lieu de se contenter, comme jadis, pour la construction de leurs maisons, de quelques mauvaises murailles de boue, ils commencent à employer nos entrepreneurs et nos maçons européens et à construire avec goût, même avec un certain luxe, des corps de bâtiments vastes et commodes. Ils comprennent parfaitement aussi que les routes et les ponts ne sont pas seulement des moyens créés par nous pour aller les chercher au loin et les soumettre plus facilement, mais qu'ils sont encore de puissantes ressources pour les travaux d'agriculture, pour la célérité et la sécurité des communications entre eux. Jusqu'ici les ruisseaux et les rivières leur opposaient, dans leurs crues rapides, des obstacles presque insurmontables, alors que leurs besoins les appelaient soit à la ville et au marché, soit dans les tribus. Ils sentent à présent les avantages de franchir ces obstacles en toute saison, et ils viennent sous l'heureuse inspiration de M. le général Randon, de laisser construire, à leurs frais, dans la plaine de Bône, trois ponts sur des ruisseaux fréquemment traversés par eux durant l'été, et trop profonds dans l'hiver pour offrir des gués sûrs. Chacun s'est montré satisfait de payer sa quote-part de la dépense qu'ont occasionnée ces petits, mais utiles travaux. Les avances faites ont été remboursées avec autant de régularité que d'empressement par l'entremise des cheikhs et des caïds qui n'ont eu à prélever qu'environ un franc par tente. Les Arabes ne veulent pas s'arrêter là ; de tous côtés, on est surpris de les entendre proposer d'établir, également à leurs frais, par les soins de l'Administration, d'autres ponts semblables dans les lieux où ils les croient nécessaires; ils vont même jusqu'à proposer de contribuer à la construction des ponts plus importants et plus dispendieux à élever sur les grandes rivières d'Algérie. Mais, de tous les travaux d'utilité publique exécutés jusqu'à ce jour, il n'en est pas, après les routes, qui aient plus vivement impressionné les Arabes et excité à un plus haut degré leur reconnaissance, que ceux du barrage du Sig. La vaste plaine du Sig qu'on traverse pour aller d'Oran à Mascara, a environ 28 kilomètres de longueur depuis le point où la rivière sort des montagnes jusqu'à son confluent avec l'Habra. Sa largeur varie de 12 à 16 kilomètres. Cette plaine a été de tout temps d'une grande fertilité. Les Turcs y avaient établi un système de canaux d'irrigation par les eaux du Sig, que des barrages construits à trois reprises différentes et successivement détruits par la violence du courant, élevaient à une hauteur considérable. Les traces de ces barrages attestent l'importance que les indigènes attachaient aux irrigations. Le troisième barrage, renversé il y a environ cinquante ans, après neuf années d'existence, avait, dans cet espace de temps, changé complètement l'aspect de la vallée, qui s'était couverte d'habitations et de riches cultures. Cette fertilité, dont le souvenir est resté dans le pays, a disparu avec la cause qui l'avait fait naître, et la plaine du Sig, naguère le grenier d'Oran, est redevenue en grande partie inculte comme elle l'était auparavant. La nombreuse et riche tribu des Garabas, qui habite cette plaine, ayant demandé que le barrage fût rétabli, offrit en même temps de concourir à l'exécution des travaux par la fourniture gratuite de la pierre, de la chaux, du sable et d'une partie de la main-d'uvre. Outre l'avantage de nous rattacher les arabes par des travaux qu'ils regardent comme un immense bienfait, le rétablissement du barrage du Sig avait aussi un puissant intérêt colonial. En effet, si une partie de la plaine est cultivée par les indigènes, l'autre appartient au Domaine, et le moment ne saurait être très éloigné d'y établir plusieurs centres de population européenne. L'Administration prépare un projet de colonisation de cette belle contrée. Sa position entre Mostaganem, Arzew et Oran, et les routes qui la traversent en rendent l'exécution possible dans un avenir prochain. Le rétablissement du barrage présentait de grandes difficultés ; les ruines du dernier barrage prouvent la violence du fleuve quand les eaux sont grossies par les pluies d'hiver. Aussi n'a-t-on négligé aucune précaution pour donner à cet ouvrage toute la solidité désirable. On a choisi, pour l'emplacement du nouveau massif, un point où le lit de la rivière, avant de déboucher dans la plaine, se trouve resserré entre deux masses de rochers qui offrent le double avantage d'assurer contre les affouillements les extrémités de la digue, et de préserver, par leur élévation, le pays en aval des inondations, lorsque les eaux, pendant l'hiver, viendront à franchir la crête du barrage sur une hauteur de plusieurs mètres. Cette large muraille, toute en pierre de taille liée par un ciment de pouzzolane factice, a dix mètres de hauteur au-dessus du fond du lit de la rivière et neuf mètres d'épaisseur sur quarante-quatre mètres de largeur. Construite au milieu de sources rapides et abondantes, il a fallu des efforts singuliers pour lui former des fondations solides en béton hydraulique et en pierre, et jetées à une profondeur de quatre mètres. Des aqueducs ménagés dans l'épaisseur de la maçonnerie, et garnis de vannes, permettent de vider le bassin d'amont. Deux massifs de maçonnerie, également munis d'aqueducs et de vannes, ont été établis de chaque côté du barrage, à l'origine des deux canaux d'irrigation, afin d'en fermer l'accès à l'eau au moment des grandes crues. Ces travaux ont coûté 150.000 francs. En décembre 1844, toutes les rivières de la province d'Oran ont démesurément grossi. Les eaux du Rio-Salado se sont assez élevées pour passer au-dessus du tablier du pont jusqu'à une hauteur de quarante centimètres. Le pont du Chélif a été emporté, mais les flots ont été impuissants sur le barrage du Sig. Ce magnifique travail est à peine terminé, et déjà il a subi la plus grande épreuve qui puisse en garantir la durée, en résistant à l'impétuosité du torrent, sans éprouver le moindre dommage. Après avoir rempli le bassin naturel formé par le lit de la rivière, les eaux qui descendaient avec violence ont reflué à plus de quatre kilomètres en arrière, et n'ont pas tardé à dépasser le parement supérieur, malgré les quatre canaux de décharge ménagés dans l'épaisseur du barrage : elles ont coulé par dessus la maçonnerie sur une épaisseur de près de deux mètres. En attendant les résultats matériels de cet ouvrage hydraulique, l'effet moral qu'il a produit sur les indigènes est très satisfaisant. Le barrage du Sig est un de ces monuments impérissables qui transmettra à la postérité la gloire du nom français et laissera de longs souvenirs comme les travaux gigantesques des Romains ; il honorera les ingénieurs auxquels est due la conception de ce projet et celui qui, sous leur direction, l'a fait exécuter : ce sont M. le capitaine Vauban, chef du Génie à Oran; M. Aucour, ingénieur des Ponts et Chaussées de la province, et M. le lieutenant du Génie Chaplain. En 1845, on entreprendra les travaux d'irrigation projetés sur les deux rives du Sig et qui sont le complément indispensable du barrage. Un jaugeage calculé avec soin a fait connaître que, pendant les plus grandes sécheresses, le volume d'eau débité par le Sig n'était jamais moindre de 4 mètres 800 millimètres par minute, quantité qui suffit pour arroser convenablement une surface de terrain considérable. Resserrée entre deux berges très élevées, la rivière du Sig s'élèvera à une hauteur assez grande, et sera assez abondamment fournie pour donner, d'avril en septembre, trois mètres cubes d'eau par seconde, et arroser quinze mille hectares de terres On comprend facilement de quelle richesse sera, pour cette contrée, une telle irrigation, et quelle prospérité elle apportera dans le village du Sig qui se forme sur le bord de la rivière, à une lieu du barrage. Déjà le fossé d'enceinte est presque entièrement creusé ; la grande route de Mascara à Oran traverse le village par le milieu ; à droite et à gauche se tracent les lots destinés aux colons. Auprès se trouve la forêt de Mouleï-Ismaël, qui fournira du bois en abondance, et plus tard sera une autre source de prospérité pour le pays par sa grande quantité d'oliviers. Le voyage du Sig est facile à faire : aujourd'hui, une auberge est établie au Tlélat; des gardes sont placées de distance en distance pour la sécurité des voyageurs, et on peut parcourir toute cette route avec autant de tranquillité que les rues de Paris. |
Le nouveau programme d'équipement d' "Electricité et Gaz d'Algérie " comporte, au cours des prochaines années, la réalisation d'un nouvel aménagement hydroélectrique de même échelle que celui de l'Oued Agrioun : l'Oued Djendjen Supérieur, dont les études et les travaux préparatoires (cités du personnel routes, réseau électrique, tension, galeries de reconnaissances, etc...) sont actuellement achevés, et les travaux de l'aménagement proprement dit prêts à démarrer.
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