Les opérations militaires : 1832-1837 n°1
pnha, n°85,décembre1997
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Abd-el-Kader, Commandant des Croyants
25 mai 1833

-----Les cheikhs des anciennes tribus, notamment les Douairs et les Sméla avec qui la France entretient des échanges de vues, ne comprennent pas que le bey soit choisi parmi les principaux Turcs restés au Méchouar de Tlemcen alors qu'ils sont leurs oppresseurs.
-----Le Marabout Mahdi-ed-Din ne fait plus l'unité autour de sa personne, ses troupes subissent de sérieux revers dans leurs attaques, sans cesse renouvelées, d'Oran. Il renvoie ses combattants leur fixant rendezvous en mai 1833. Son fils Abd-el-Kader, après s'être particulièrement distingué au cours des combats livrés contre les Français, à Oran, est proclamé, le 21 novembre 1832, sultan, dans la plaine d'Eghris. Le 25, il entre dans Mascara. Il abandonne le titre de sultan et prend celui de "Commandeur des Croyants", Emir et Mouminin. Il tente de réorganiser ses forces alors que les garnisons françaises entretiennent de bonnes relations avec les tribus voisines.
-----C'est alors que le général Desmichels qui succède au général Boyer, se rappelle la doctrine du général Clauzel et croit voir, en Abd-el-Kader, le chef capable de pacifier l'intérieur, grâce aux qualités dont il fait montre.
-----Le chef du gouvernement de la France doit fixer clairement son attitude à l'égard de l'Algérie ; il est soumis aux pressions d'opinions contraires, les colonialistes et les anticolonialistes, ce qui le conduit à chercher des atermoiements, préjudiciables à la politique à mener sur le terrain, au contact des populations.

Premier Gouvernement Général des Possessions françaises dans le Nord de l'Afrique.

-----Sans attendre les instructions qu'il sollicite
auprès du gouvernement de la France. Desmichels fait le premier pas et demande à Abd-et-Kader de libérer quatre soldats prisonniers. La négociation débute et le général croit en la bonne foi de l'Emir avec qui il signe un traité, après un échange de notes datées du 4 février 1834. Les stipulations de l'accord représentent Abd-elKader comme un souverain indépendant traitant d'égal à égal avec les Français. C'est alors que voyant une marque de faiblesse dans la politique du gouvernement de la France, il décide, dès lors, de lui disputer la domination de l'Algérie.
-----Le 22 juillet 1834 est institué en Algérie un Gouvernement Général des Possessions françaises dans le Nord de l'Afrique. Drouet d'Erlon en fut le premier gouverneur et prend possession de son poste début Septembre 1834. -----La politique du Général Clauzel est appliquée derechef ; elle consiste en l'occupation de quelques points de la côte avec, alentour, un espace vital qui permet, tant aux garnisons qu'aux citadins de se ravitailler tout en assurant leur sécurité. Mais la paix, cet état de concorde entre de mêmes membres d'un groupe humain nécessaire à l'éclosion d'une nation,
n'existe pas. A l'intérieur, les tribus subissent les lois imposées par les chefs de guerre et s'entre-déchirent. L'armée' française tente d'entretenir des relations, les plus acceptables possibles, avec leurs chefs respectifs dans l'espoir de les amener à reconnaître la souveraineté de la France. Partout où son drapeau flotte l'entente règne entre les habitants, ce qui dérange les chefs, avides du pouvoir et les incite à guerroyer.
-----La romanisation et la christianisation ont fait place, par la terreur, à l'islamisation de l'Afrique du Nord qui souffre des ambitions personnelles des deux principaux chefs de l'intérieur de l'Algérie ; le Bey Ahmed à Constantine et l'Emir Abd-elKader en Oranie.
-----Ce dernier d'ascendance maraboutique, a des rivaux et des ennemis, notamment parmi les familles ou tribus qui traditionnellement fournissent les chefs et particulièrement les chefs militaires tels elGhomari, cheikh des Angad, Mustapha ben Ismaël, cheikh des Douairs et Sméla, Kaddour ben Mokhfi, chef des Bordjia et Sidi Larbi, cheikh des tribus du Chéliff. Dès que l'entente de l'Emir avec la France fut connue, la révolte contre celui-là se développa. Les Douairs et Sméla attaquent son camp près de Tlemcen, Abd-el-Kader s'échappe de justesse pour se réfugier à Mascara qui va devenir son fief. Le général Desmichels lui apporte son aide et le conseille sur la stratégie à adopter pour lutter contre ses adversaires. Il lui fournit armes et poudre, ce qui lui permit de devenir le maître reconnu du pays situé entre la longue frontière du Maroc et la rive gauche du non moins long oued Chéliff qui coule sur plus de 700 kilomètres, dominé, d'Est en Ouest par les massifs de l'Ouarsenis, les monts de Saïda, de Daïa et de Tlemcen.

Abd-el-Kader combat la France et les Français.

-----Les cheikhs Sidi Larbi et Ghomari refusent l'aman, Abd-el-Kader les fait exécuter, sans autre procédure à la fin de l'année 1834, ce qui lui permet, en toute quiétude, d'organiser son vaste domaine tout en cachant son but réel qui est de chasser les Français qui l'avaient aidé. Pour cela il partage son territoire en deux Khalifaliks, celui de Tlemcen et celui de Mascara. Chacun de ces deux Khalifaliks est subdivisé en Aghaliks desquels dépendaient les tribus commandées par des Caïds. Son plan consiste à franchir plusieurs étapes :

----1) Assurer son pouvoir par la mainmise sur le Titteri, à Médéa et Miliana ;
-----2) Evincer le bey de Constantine, Ahmed, avec l'appui des Kabyles de la région de Bougie,
-----3) Avec l'aide du sultan du Maroc, expulser les Français.
-----Pour parvenir à ses desseins, il propose au Gouverneur général de rétablir l'ordre dans le Titteri et la province de Constantine. Drouet d'Erlon, bien que méfiant, ne réagit pas contre les actions militaires de l'Emir qui met à la raison ses adversaires, même ceux qui appartiennent à sa propre famille.
-----Après la défaite de Bou-Hamar (Hadj Moussa), Mélana et Médéa sont occupées. Le général Trézel remplace le général Desmichels. Il se rend très vite compte des ambitions d'Abd-el-Kader et s'attache à les limiter. Il lui fait savoir que les notes, échangées le 4 février 1834, ne font pas partie du texte de la convention signée le 24 février. Cela est la première source de difficultés et constitue un frein aux sournoises ambitions d'expansion de l'Emir qui va réagir, ouvertement, ne laissant plus aucun doute sur ses intentions. Comme Abd-el-Kader avait le monopole du commerce des grains, il empêche le ravitaillement Oran, ce qui conduit le généralTrézel à passer à l'action. L'émir lui tend personnellement une embuscade sur la route qu'il emprunte pour se rendre au camp du Tlélat. Mais Abd-el-Kader est battu et s'esquive pour se mieux venger sur la route du retour à Oran de la colonne française qui est attaquée dans le défilé de la Macta et vite submergée ; la troupe est disloquée, le convoi pillé et les blessés massacrés. Le général Trézel parvient à Arzew ou sont ramenés 150 blessés, après avoir perdu 254 hommes, son matériel, des armes dont un obusier de campagne. Le général Lamoricière, à la tête des cavaliers Douairs et Sméla quitte Oran pour Arzew, ce qui permet au reste de la colonne Trézel de rejoindre Oran.
-----Trézel revendique sa responsabilité dans ce qu'en France l'on catalogue de désastre, il est rappelé. Drouet d'Erlon qui avait désavoué l'entrée en campagne de Trézel est remplacé par le Maréchal Clauzel, premier successeur du Maréchal Comte de Bourmont.
-----Des renforts militaires sont envoyés de France, en Algérie. Avec l'un d'eux, il y avait le fils du roi des Français, Louis Philippe 111, le duc d'Orléans.
-----L'infanterie régulière d'Abd-et-Kader
Le choléra sévit, en juin 1835, à Alger, ce qui retarda l'arrivée des renforts. A la fin de l'épidémie, les opérations commencent par des travaux au camp du Figuier et, en Septembre l'occupation de Rachgoun, à l'embouchure de laTafna.
-----Abd-el-Kader s'inquiète, il cherche une alliance avec l'Angleterre à qui il demande de l'aide. Il envoie sa famille dans le Sud et retire de Mascara toutes ses richesses entassées.
-----Le corps expéditionnaire, rassemblé par le Maréchal Clauzel, comprend quatre Brigades commandées respectivement par Oudinot, Perrégaux, d'Arlanges et Combe. Elles sont renforcées des fameux cavaliers des tribus Douairs et Sméla, des Zouaves du Général Lamoricière et de fantassins turcs. L Emir lance sans cesse des attaques mais sans succès. Clauzel prend pied dans la montagne et débouche sur le plateau d'Aïn Kébira, le 5 décembre 1835. C'est la débandade dans les contingents d'Abd-elKader qui pillent Mascara avant l'entrée des troupes de Clauzel dans la capitale de l'Emir, le 8 décembre 1835. Clauzel n'occupe pas Mascara et rentre à Oran en passant par Mostaganem. C'est alors qu'Abdel-Kader qui avait été abandonné par les siens, à la suite de ses échecs, rassemble quelques fanatiques partisans et s'attaque au Méchouar de Tlemcen dont il veut s'emparer. Il est battu, Clauzel entre le 13 janvier 1836 après quelques combats d'avantgarde dansTlemcen, l'ancienne capitale du Maghreb.

Colonel Gaston Bautista