-------L'Histoire
d'un pays est intimement lié à la géographie qui
explique l'aspect humain issu des caractères physiques du sol.
Et nous savons que plus celui-ci est ingrat, plus son climat est rude,
plus l'homme s'y attache. Et l'on comprendra pourquoi les Français
d'Algérie, qu'ils soient de souche berbère ou de souche
européenne, soient attachés à leur sol natal. C'est
contre leur gré qu'ils en ont été arrachés
ou déplacés pour sauvegarder leur vie et celle de leurs
familles, à la suite de la décision du gouvernement de la
France d'amputer quatre-vingts pour cent du territoire national et de
larguer nos quinze départements, sans prévoir les conséquences
que cela entrainerait, tant pour nos provinces françaises d'Algérie
que pour la métropole. Et cela nonobstant la parole donnée
au nom de la France par l'Armée qui dut se parjurer pour satisfaire
au mensonge du pouvoir politique, et malgré les adjurations des
Français d'Algérie, de toutes confessions ou origines ainsi
que des partisans de l'Algérie française. De Gaulle avait,
lui-même, prévu les hécatombes auxquelles nous condamnerions
ce pays "si nous étions assez lâches et stupides pour
l'abandonner". Qu'a-t-il fait d'autre, en la faisant livrer à
des assassins et des bourreaux ?
La préhistoire
-------Expliquer les problèmes qui
se posent aujourd'hui à l'Algérie nécessiterait de
remonter jusqu'à l'origine de l'histoire de l'Afrique du Nord,
relative à la géomorphologie, discipline qui permet d'expliquer
et de décrire les formes du relief terrestre, d'une part et à
la géographie, science qui a pour objet la description et l'explication
de l'aspect actuel, naturel et humain, de la Terre, d'autre part.
-------Nous ne nous étendrons pas
sur les études relatives aux transformations, passées et
actuelles, subies par l'écorce terrestre, ce qui nous ferait évoquer
les données paléontologiques et archéologiques, mais
il nous faut retenir leurs résultats, depuis l'apparition de l'Homme,
par la mise à jour dans des fouilles de fossiles d'êtres
vivants qui peuplaient la terre et de vestiges matériels.
-------Dans le temps de la préhistoire,
l'Afrique du Nord était liée au continent européen.
Dans un raccourci des sciences précitées, nous nous situerons
à l'époque qui suit la dernière glaciation et la
dernière transgression marine qui l'a suivie, après la séparation
de l'Afrique et de l'Europe.
-------La Berbérie, d'après
les analyses et les diverses synthèses des éléments
fournis par ces sciences à la préhistoire, il semblerait
que l'Afrique du Nord soit entrée dans l'Histoire à la fin
du deuxième millénaire de notre ère. Mais ce qui
nous intéresse c'est l'apparition de l'homme en Afrique du Nord,
sachant que l'homo sapiens commença son développement, il
y a environ trente mille ans.
-------Les données de la paléontologie
basée sur l'étude des fossiles et de la paléohistologie
sur celle des tissus d'animaux et de végétaux conservés
dans ces fossiles, nous permettent de savoir que la faune nord?africaine
est celle d'un pays chaud et humide, durant le quaternaire, avant que
le climat ait évolué vers la sécheresse.
Le paléolithique inférieur est la phase la plus ancienne
de la première période de la Préhistoire caractérisée
par l'industrie de la pierre, qui se situe entre trois millions d'années
et le X` siècle avant Jésus?Christ. Les espèces
dont les fossiles sont mêlés aux outillages de cette période,
permirent de constater l'existence de rhinocéros, d'éléphants,
d'hippopotames, de bovidés, de girafes, d'antilopes et d'autruches.
Les cervidés, ruminants à corne, et les ursidés,
mammifères carnivores plantigrades et omnivores tels les ours,
vinrent du Nord à partir du paléolithique moyen, seconde
phase de cette première période. C'est pourquoi la faune
de la Berbérie présente un aspect africain et un aspect
eurasique. Isolée, cette faune restera propre à l'Afrique
du Nord en raison de la séparation de l'Europe et de l'Afrique.
Le chameau et le cheval, animaux domestiques, ont été introduits
avant notre ère. Le cheval semble l'avoir été vers
le 2"" millénaire.
La disparition de certaines espèces est le fait de l'homme au cours
de chasses préhistoriques ou, tout simplement, pour les besoins
des armées et des cirques. Par ailleurs, la déforestation
des surfaces terrestres du Maghreb est due au développement de
la vie pastorale, au déboisement volontaire et à l'extension
des zones de culture.
Les premiers berbères ? leur civilisation
Après ce bien trop bref exposé, que pouvons?nous savoir
des premiers hommes qui peuplèrent la Berbérie ?
Les restes humains retrouvés près de Rabat, au Maroc, présentent
les mêmes caractères que celui de l'homme de Néandertal
qui vivait entre 80 000 et 35 000 ans avant Jésus?Christ. Il avait
une petite taille, une grosse tête à face longue et crâne
plat. Le squelette de cet espèce d'homme a été découvert
en 1836, dans la vallée du Néander, près de Düsseldorf,
en Allemagne.
Dans le Constantinois, des squelettes humains, différents des précédents,
ont été découverts ; ils sont de grande
taille, supérieure à un mètre soixante?dix et se
rattachent à l'Homo Sapiens dont nous descendons et qui apparut
vers trente cinq mille ans avant Jésus?Christ. Ils ont été
dénommés "Hommes de Mechta el?Arbi", nom du douar
près duquel ils ont été découverts.
Malgré les siècles écoulés, la Berbérie
a conservé son caractère insulaire, et nonobstant les civilisations
successives qui venaient de l'extérieur du Maghreb. Retenons que
les "Montagnards" sont les plus conservateurs.
La civilisation berbère est une somme de traditions, de moeurs,
de coutumes et d'institutions d'ordre politique ou religieux. C'est pourquoi
l'on rencontre une si grande diversité dans les genres de vie,
tant dans le passé que dans le présent, bien qu'une grande
unité berbère perdure. Cette unité se manifeste par
les dialectes proches les uns des autres sans qu'ils soient rigoureusement
identiques. Essentiellement oral, chacun de ces dialectes n'a jamais fait
l'objet d'un développement écrit. Ils se rattacheraient
aux mêmes origines que les langues des peuples sémites du
Proche-Orient.
------- ------------Cependant le Berbère
connaissait une écriture, probablement, mais sans aucune certitude,
d'origine phénicienne. Des inscriptions découvertes de cette
écriture se retrouvent dans celle, actuelle, des Touareg, mais
elles n'ont pas toutes étaient déchiffrées. L'arabe
est parlé dans les villes alors que les parlers berbères
se sont maintenus dans les montagnes difficiles d'accès aux conquérants.
Le Français est aujourd'hui courant.
Anthropologies berbères
-------Les populations qui occupent, présentement,
le Maghreb, compte tenu de quelques rares métissages, sont les
mêmes que celles des temps préhistoriques.
Par l'anthropologie physique il est démontré que les Berbères
ne constituent pas une race homogène. Il suffit de comparer les
montagnards Kabyles avec les Mzabites. Alors que ceux-ci sont petits,
bruns, à face plate, ceux?là ont le crâne plus long
que large, la taille moyenne, les yeux clairs et les cheveux blonds ou
roux. Il existe une grande diversité anthropologique chez les actuels
Berbères qui tirent leur origine des hommes de "Mechta El
Arbi" et de "Préméditerranéens". Quelques
brassages des populations au néolithique ou antérieurement
sont à l'origine de quelques types somatiques particuliers résultant
de croisements avec soit des Nègres anciens, soit des Arabes. Ainsi,
après avoir parcouru les temps de la préhistoire, nous voici
aux portes de l'Histoire qui devrait nous conduire à la colonisation
phénicienne. Mais auparavant, il nous faut signaler et prendre
en considération certains récits qui relèvent peut-être
de légendes, mais dont leurs transmissions orales ont certainement
influencé les auteurs écrivains.
Influence des civilisations
-------La pénétration, en Afrique
du Nord, du peuple de Perse, ancien nom de l'Iran, qu'ils furent Mèdes,
au VIIè siècle avant Jésus Christ ou bien Achéménides,
du VIè, au IVè siècle avant Jésus Christ,
n'a jamais été prouvée ; seule la tradition s'en
est fait l'écho.
Mais la Crête fut un état dont la puissance résidait
dans la maîtrise des mers ; c'était une "Thalassocratie"
qui fonda sur le littoral de l'Afrique du Nord des comptoirs. C'est ainsi
qu'elle put propager sa civilisation qui était préhellénique,
antérieurement à l'invasion des
guerriers Doriens, peuple indo européen qui envahit la Grèce
à la fin du II` millénaire avant Jésus Christ. L'influence
phénicienne date du XIIè siècle avant Jésus
Christ et prit une certaine acuité.
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--------Quant à la
Berbérie, il est étonnant d'apprendre que, malgré
les siècles traversés, un ensemble de traditions soit conservé
: moeurs, coutumes, voire des règles établies dans l'intérêt
de la collectivité. Cette stabilité est puisée dans
le passé le plus lointain alors que la mentalité tribale
qui dominait, perdure. C'est pourquoi les maeurs des Berbères ont
subi peu de modifications. Ils chassent pour assurer, non seulement leur
pitance mais aussi leur sécurité car ils étaient
éleveurs de boeufs, de moutons, de chèvres et de chevaux
qui servaient pour leur susbistance et le troc. Les pâturages des
plaines et des montagnes en firent des transhumants. Les herbages des
régions humides du Tell dominant le littoral de l'Afrique du Nord,
pallient la sécheresse avant que soit mis en valeur le milieu naturel
par le développement de l'agriculture, bien plus tard.
-------Les tribus pastorales sont, par la
tradition, collectivement propriétaires du sol, même lorsque
leur genre de vie relève du nomadisme. Les tribus sédentaires
des plaines se répartissent les récoltes et tous les fruits
de leur travail collectif.
-------Les habitations étaient élémentaires
: les Berbères vivaient dans des grottes ou sous des tentes. Les
gourbis faits de pierres et de terre sèche remplacèrent
les cases faites de branches coupées. Pour se protéger des
pilleurs, des places fortes furent construites. Dans ces "Ksours"
ou " Bordgs" les berbères entreposaient leurs biens les
plus précieux et y édifièrent leurs greniers. Les
villes ne virent le jour qu'avec la colonisation phénicienne.
-------Le Berbère était végétarien
; bien qu'il appréciât, à l'occasion, le gibier, il
se nourissait de lait de chèvre et de céréales. L'eau
était sa seule boisson.
-------Le vêtement des Berbères
évolua au fil des siècles et en fonction du climat : ils
ont vécu nus puis les hommes portèrent une enveloppe phallique.
Pour se protéger du froid, ils se couvrirent de peaux de bêtes
et enfin tissèrent une tunique, la gandoura. Puis ils tissèrent
un manteau à capuchon qui leur servit à lutter contre le
froid et la chaleur, l'actuel burnous ou djellaba.
Leurs premières armes furent les pierres de la préhistoire,
puis rapidement la matraque. Arcs et javelots servirent, plus tard, à
l'attaque, alors qu'un coutelas, espèce de sabre court et large,
restait attaché au poignet et servait à égorger l'adversaire
au combat.
Cultes et religions des berbères
-------Au temps les plus reculés,
les Berbères étaient pénétrés de pratiques
religieuses touchant soit à l'animisme, croyance qui attribue une
âme aux animaux, aux phénomènes et aux objets naturels,
soit à la zoolatrie, croyance à la divinité des animaux.
Ils croyaient aux être détenteurs de pouvoirs magiques, les
génies qui, suivant les circonstances, devinrent localement des
Dieux, avant que ne s'imposent à leur vénération
les grands Dieux de l'Egypte, de Carthage et de Rome. Ils furent Chrétiens
jusqu'à l'invasion des Arabes qui les forcèrent à
se convertir à la religion musulmane. Nous aurons l'occasion d'en
retracer l'Histoire. Ils avaient aussi, des temps les plus éloignés,
le culte des morts. Les cadavres étaient enterrés en dehors
des lieux habités sous des tumulus constitués de pierres
et de terre. Les tumulus, en forme de cercle, d'un périmètre
d'environ cent cinquante mètres, sont des monuments typiques, exclusivement
berbères, recouvrant parfois des dolmens servant de chambre funéraire.
Parfois plusieurs cadavres étaient placés dans la même
tombe, après les avoir repliés. Peut-être est-ce la
peur du retour des morts ?
La famille.
-------La cellule familiale est le fondement,
depuis les temps les plus lointains, de la vie sociale des Berbères.
La famille est constituée d'agnats, c'est à dire de chacune
des personnes qui descepdent d'une même souche masculine. Les familles
de même origine vivent groupées, soit dans la même
région, soit se déplaçant ensemble ; ce groupement
de familles constitue la tribu. C'est donc une organisation qui obéit
au principe du patriarcat fondé sur le pouvoir exclusif ou prépondérant
du père, voire du grand-père. L'aîné des agnats
succède au vénérable "patriarche" de la
famille, au décès de celui-ci.
-------La polygamie est à l'origine
d'une natalité abondante.
-------Aux femmes sont réservées
les plus viles besognes. Les filles sont vendues par le père qui
marie, à son gré, ses fils.
-------Ainsi les peuples du Maghreb, conservèrent
avec la plus grande rigueur leurs moeurs, us, coutumes et traditions depuis
le début de l'entrée de l'Afrique du Nord dans l'Histoire.
La France les respecta.
Organisation sociale
et politique.
-------Les Berbères, qu'ils aient
une vie pastorale ou agricole, doivent, par nécessité, disposer
d'une force d'attaque ou de défense. Les sédentaires devaient
résister aux assauts des nomades qui voulaient conquérir
des terres de parcours pour leurs troupeaux et en garder ensuite l'usage
pour leurs transhumances.
-------Les villages sont édifiés
par les sédentaires, au centre des terres qu'ils cultivent, non
loin d'un point d'eau et en général le long d'un talweg.
-------La Gérontocratie est leur forme
d'organisation sociale dans laquelle les vieillards dominent. Elle est
identique pour les sédentaires et les nomades, mais ces derniers
sont plus disséminés sur le territoire.
-------Les tribus sont de véritables
petits Etats indépendants, souvent fédérés.
Une Assemblée est constituée par des représentants
de chacune des tribus. Un chef y est choisi. Là, intervient le
fameux et vieux démon qu'est le "Pouvoir". Le chef choisi
tentera, par tous les moyens de le conserver, à titre personnel
et héréditaire. II en devient l'alguellid, le roi. II en
résulte des guerres tribales. C'est ainsi que, au gré des
victoires et de l'effondrement des tribus, se forment des groupements
instables. Ces situations conflictuelles sont quasi permanentes et partant,
l'insécurité notoire, pour ceux qui, sans autorisation,
se déplacent à l'intérieur des limites territoriales,
sans cesse modifiées suivant le résultat des combats. Cela
dura jusqu'à ce que la présence française y mit un
terme et créa cette unité tant souhaitée mais jamais
atteinte depuis des millénaires.
-------Depuis que la France n'est plus en
Algérie, cette organisation resurgit, au grand dam de ceux qui
ont souhaité le départ de la France et qui découvrent
cette situation. Connaissaient-ils l'Histoire du Maghreb et notamment
celle de l'Algérie ? Je ne leur ferai pas l'injure de dire qu'ils
ne la connaissaient pas, mais qu'ils voulaient bénéficier,
en prenant le pouvoir, de tous les bienfaits que les enfants de France
et les Français d'Algérie ont apportés à cette
importante partie du territoire national français. Nous ne dirons
jamais assez qu'ils l'avaient transformée pendant cent trente années
par des labeurs quotidiens, de la sueur, du sang versé et des sacrifices,
jusqu'au suprême, celui de donner leur vie sans autre merci que
celui de savoir qu'ils défendaient la France et pour le plus grand
nombre, leur sol natal. Malgré les aides substantielles qui leur
sont versées par l'actuel gouvernement de la France, la situation,
antérieure à 1830, se recrée avec, en plus des conflits
entre chefs de partis politiques ou d'autres groupements tribals, une
nouvelle guerre religieuse entre musulmans. -------L'état
de misère dans laquelle la domination turque maintenait les Berbères
jusqu'à ce que les Turcs soient rejetés du Maghreb par les
Français, se reconstitue.
J'arrête là ces considérations pour revenir à
l'Histoire.
-------L'autorité du roi est proportionnée
à son prestige ; il se fait aider par ses parents ou des serviteurs,
pour l'administration de son royaume. Les chefs de tribus sont consultés
et le poids de l'avis de chacun d'eux est fonction des effectifs sous
son autorité.
Les hommes de guerre, cavaliers en général, sont fournis,
pour leur plus grand nombre, par la tribu du roi ; les soldats sont levés
dans les autres tribus.
-------Le roi perçoit les impôts
sous forme soit de dons volontaires soit de pillages des tribus insoumises.
Les tribus sont taxées en nature : bétail, récoltes
ou de leurs valeurs en argent.
-------Quand les tribus sont mécontentes
de leur roi, elles le massacrent et le remplacent par un nouveau chef
qui s'est fait remarquer par sa vaillance et son autorité.
-------Voilà l'organisation sociale
des populations Berbères, qui va être confrontée à
celle des Phéniciens, tout au long de la colonisation de ceux-ci
dans le Maghreb et, bien plus tard, sous les autres dominations.
Gaston Bautista
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