| La " Royale "et 
        l'Algérie française Pierre Poutensan
 
        
          | À la 
            suite de divers incidents consulaires et diplomatiques entre la France 
            et le Portugal en juin et juillet 1831, une force navale venue de 
            Brest et de Toulon prend position sur le Tage, devant Lisbonne. Un 
            combat oppose Français et Portugais et, parmi les vaisseaux 
            de 74, 80 ou 90 canons, se trouve le vaisseau " Alger", 
            exactement un an après le débarquement victorieux de 
            Sidi-Ferruch le 14 juin et l'exil du dey Hussein le 10 juillet vers 
            l'Italie ( DARRIEUS (Henri, 
            amiral) et QUEGUINER (Jean, capitaine de vaisseau), Historique de 
            la Marine française: 1815-1918, L'ancre de marine, Saint-Mato, 
            1997, p. 33 et 34.). 
 Ce premier et imposant exemple, par son rang, va annoncer, au cours 
            du destin commun entre la Marine nationale et l'Algérie, une 
            osmose totale à travers les noms de baptême des navires 
            de combat. Nous nous attachons ici aux trois périodes les plus 
            proches de notre histoire: la Première Guerre mondiale, l'entre-deux-guerres, 
            la Seconde Guerre mondiale avec ses suites.
 |  La Première Guerre mondiale (1914-1918) 
        et les années vingt
 Excepté pour les navires en chantier 
        et autres constructions en cours, les arsenaux maritimes furent surtout 
        destinés aux fabrications pour l'armée de terre.
 Ce qui explique que l'on fit appel aux chantiers alliés. Ainsi, 
        l'un d'entre eux, le Japon, s'engagea à livrer, en moins d'un an, 
        douze torpilleurs d'escadre qui eurent " des noms d'habitants de 
        territoires coloniaux français ". Conçus suivant des 
        normes japonaises, surprenantes pour des Français et ayant des 
        hauteurs " sous barrots " adaptées aux " tailles 
        " des marins japonais, ils provoquèrent sur les têtes 
        de nos marins des chocs douloureux. Sauf quelques autres défauts, 
        ils rendirent de très grands services. Pour notre Marine, ce furent 
        L'Algérien, L'Arabe, Le Kabyle et Le Touareg.
 
 Ils furent de tous les théâtres d'opérations de la 
        fin de la guerre et des années suivantes et ne furent radiés 
        de la flotte qu'en 1935-1936 (  GARIER 
        (Gérard), Revue Navire et Histoire n° 6, mars 2000, Les torpilleurs 
        d'escadre de construction japonaise. Le type " Algérien, 1917-1936, 
        p. 33 et suivantes, photos du Kabyle, p. 35, tableau des marques particulières 
        p. 45.).
 
 Leur temps de service eut surtout comme cadre les années vingt 
        et le début des années trente, avec la Méditerranée 
        orientale, la mer Noire et aussi la guerre du Rif.
 
 Déjà dans les années vingt, les chantiers français 
        livrèrent des nouveautés aux noms " bien de chez nous 
        " : le contre-torpilleur Chacal en service en 1926; le contretorpilleur 
        Lion en service en 1930; le torpilleur Simoun en service 
        en 1927; le torpilleur Sirocco en service en 1927 ( Historique 
        de la Marine française: 1922-1942, op. cit., L'Ancre de marine, 
        St-Malo, 1996, p. 29 et 30 .).
 
 Mais les unités les plus importantes et les plus intéressantes 
        pour notre histoire datent des années trente.
 L'entre-deux-guerresLes années trente
 Pour le centenaire de l'arrivée des 
        Français dans la Régence, un croiseur de 10 000 tonnes, 
        L'Algérie, est mis en construction en août 1930 à 
        l'arsenal de Brest. Mis sur cale le 19 mars 1931 sur le chantier du Point-du-Jour 
        dans le Penfeld, il sera lancé le 21 mai 1932 et sa première 
        sortie en mer se déroule le 23 août 1933 ( MOULIN 
        (Jean), MAURAND (Patrick), Le croiseur " Algérie ", Marine 
        Éditions, Nantes, 1999, imprimerie Marne, Tours, p. 12 et 13.).
 L'Algérie, le dernier croiseur de 10 000 tonnes, était probablement 
        le meilleur du monde de ce tonnage, remarquablement protégé, 
        doté d'un rayon d'action approprié ( Historique 
        de la Marine française: 1922-1942, op. cit. p. 21.). 
        Du 16 au 22 juin 1936, il fait partie de la première escadre qui 
        se trouve à Alger ( Le croiseur 
        Algérie, op. cit., p. 19.).
 
 Toujours dans la période de célébration du débarquement 
        de 1830, parmi les sous-marins de la classe de 1 500 tonnes, se trouve 
        le Sidi- Ferruch mis en service en 1936 qui sera coulé devant Casablanca 
        le 11 novembre 1942 par les Américains avec les rescapés 
        de Mers el-Kébir.
 
 Déjà en 1934 avait été lancé un sous-marin 
        côtier de 630 tonnes, La Sultane, qui ne sera condamné que 
        le 26 décembre 1946 ( MASSON 
        (Philippe), La Marine française et la guerre 1935-1945, collection 
        Approches, Tallandier, 1991, p. 501.). Les programmes suivants 
        de 1931 à 1937 s'illustrèrent par le torpilleur le Mameluk 
        en service fin 1940; l'aviso-dragueur Gazelle lancé en juillet 
        1939 ( Historique de la Marine française: 
        1922-1942, op. cit. p. 29, 30, 34, 35.).
 
 Tous ces navires aux noms africains subirent des destins divers, mais 
        la reconstruction d'une partie de la flotte avec l'aide U.S., dès 
        1943, fit revivre d'anciens noms.
 La Seconde Guerre mondiale 
         En 1939 sont commandés à la 
        Royal Navy, des patrouilleurs chalutiers à capacité ASDIC 
        (détection anti- sous-marine) dont La Bônoise en octobre 
        1939, sabordée le 9 novembre 1942 au cours de l'opération 
        " Torch " (9MASSON 
        (Philippe), op. cit. p. 509 et DARRIEUS (Henri), op. cit. p. 35.).
 Début 1940, des chalutiers U.S. de 750 tonnes furent achetés 
        comme L'Algéroise, L'Oranaise. Le croiseur Algérie 
        fera partie en 1939 des forces combinées anglo-françaises, 
        surtout dans l'océan, à partir de Dakar, ou bien sera chargé 
        d'escorter des convois amenant des USA du matériel (avions et véhicules 
        automobiles divers). En mars 1940, il transporte 147 tonnes d'or, représentant 
        7 milliards de francs de l'époque, de Toulon au Canada. Puis en 
        juin, il participe à l'attaque des côtes italiennes du golfe 
        de Gênes, dans la nuit du 13 au 14 juin 1940 ( Le 
        croiseur " Algérie ", op. cit. p. 27 à p. 30.). 
        Faisant partie de la flotte d'armistice basée à Toulon, 
        le navire eut droit à quelques améliorations très 
        faibles par rapport à ce qui se faisait à l'époque 
        aux USA, en ce qui concerne la D.C.A.
 
 Mais c'est surtout l'installation de radars " à la barbe 
        des commissions d'armistice " qu'il faut noter.
 
 En 1942-1943, la marine de guerre française se retrouve, enfin, 
        officiellement face à l'ennemi " habituel ". Les 
        convois Dakar-MarocGibraltar-Algérie, au rythme d'une dizaine par 
        mois, sont ainsi escortés, par exemple, par le Simoun, entre autres 
        (11 Historique de la Marine française, 
        op. cit. p. 32.).
 
 Mais la " guerre en haillons " pour des bâtiments 
        mal défendus en D.C.A. et lutte anti-sous-marine va disparaître 
        à la mi-1943. Cessions et transferts de la Marine américaine 
        : six destroyers d'escorte (D.E.) de type Sénégalais 
        dont L'Algérien D.E. 107, cédé le 23 janvier 
        1944. Trente- deux escorteurs (P.C.) dont les Cimeterre, Tirailleur, 
        Spahi,Goumier, Mameluk, Légionnaire ( DARRIEUS 
        (Henri), op. cit., p. 328.).
 
        
          | 
              Les radars La Marine 
                nationale s'est intéressée à la détection 
                électromagnétique à partir de 1935 et des 
                essais sont réalisés sur l'aviso Ville-d'Ys dès 
                cette époque. On parle alors de DEM (détection électro-magnétique); 
                le terme radar sera introduit pendant la guerre par les Américains. 
                Les recherches ont d'abord pour but l'installation de barrages 
                pour protéger les ports de guerre puis, plus particulièrement, 
                pour détecter les avions mouilleurs de mines. Une station 
                est installée au cap Sicié fin 1939, puis à 
                Port-Cros début 1940. Les installations embarquées 
                ne commencent qu'à partir de 1941 avec l'installation d'un 
                appareil Sadir-Compagnie des Compteurs sur le Richelieu à 
                Dakar.
 En juillet 1941, la décision est prise d'installer la DEM 
                sur le Strasbourg et sur L'Algérie.
 
 Dès janvier 1942, L'Algérie reçoit la maquette 
                d'un appareil de la société LMT travaillant sur 
                l'onde de deux mètres. La puissance est de 60 W.
 
 Ce premier dispositif est complété en juillet-août 
                1942, par un nouveau récepteur, avec un dispositif de télémétrie. 
                La précision atteint 25 m à moins de 30 000 m et 
                reste de l'ordre de 500 m entre 30 et 150 km. Les antennes tournent 
                à 10 tours/minute et les jeux dans les commandes pénalisent 
                la mesure du gisement, avec une précision de plus ou moins 
                5°. Les portées mesurées ont été 
                de 35 km sur un bâtiment de ligne, 15 à 25 km sur 
                un croiseur et de 10 à 15 km sur un aviso ou un remorqueur. 
                Il est à noter que le matériel résiste bien 
                aux effets du tir du bâtiment porteur.
 
 Les aériens sont installés sur les vergues porte- 
                antennes de la tour donjon.
 
 Tout est détruit lors du sabordage du 24 novembre 1942 
                (Le croiseur " Algérie 
                ", op. cit. p. 77)
 
 La Royale n'était pas la seule à avoir expérimenté 
                la DEM puisque la ligne Maginot était aussi protégée 
                des attaques aériennes par de tels barrages de détection.
 |  Chasseurs de sous-marins, dragueurs, vedettes, 
        sont numérotés et renforcés par des navires concurrents, 
        transférés par la Royal Navy. L'aviso Gazelle, lancé 
        au début des hostilités en 1939, sera modernisé aux 
        Bermudes en 1943, entièrement destiné à la lutte 
        contre les avions et les sous-marins.
 Une remarque importante et assez pénible doit être présentée. 
        Si le Sénégalais, premier de la série des 
        D.E., a eu l'honneur d'être remis à la Royale par le président 
        Roosevelt, venu en compagnie de l'amiral Fenard, chef de la Commission 
        navale française pour la modernisation des forces maritimes (je 
        me souviens avoir vu l'événement aux Actualités cinématographiques 
        à Alger), l'appui U.S. décida de la refonte du Richelieu, 
        des différents croiseurs, contre-torpilleurs, torpilleurs, sous- 
        marins, etc. Mais les USA refusèrent de transférer tout 
        bâtiment neuf au- dessus des D.E. (ni croiseurs, ni porte-avions 
        !). Même les radars des cuirassés, croiseurs, étaient 
        du type contre-torpilleur, ne permettant que le tir de jour.
 
 Les Anglais en revanche, accordèrent des radars pour le tir de 
        nuit, en particulier en vue de la campagne d'Asie.
 
 En conclusion, on peut dévoiler que certains navires, non achevés 
        à l'armistice de 1940, furent terminés, comme L'Africaine, 
        sous-marin de la classe Aurore, catégorie côtier de 
        1 170 tonnes et lancé le... 7 décembre 1946 (  
        - MASSON (Philippe), op. cit. p. 502.).
 
 Cependant, dans les années cinquante en Indochine, un transport 
        de débarquement (L.S.T.) est baptisé Chéliff.
 
 Enfin, d'autres destroyers d'escorte, cédés par l'U.S. Navy, 
        les Arabe, Kabyle, Touareg et Berbère, de 1952 à 
        1960 (restitués à cette date), participèrent à 
        l'opération de Suez en 1956.
 
 Autre nom relevé, le transport de chalands de débarquement, 
        le T.C.D. Sirocco (L.9012) est, de nos jours, basé à 
        Toulon et a servi en mer Adriatique et mer Égée, à 
        l'occasion des conflits locaux actuels.
 o Je remercie Edgar Scotti de sa patience 
        pour sa " traduction " et la mise en page de mes textes manuscrits. |