| CHAPITRE IIILES CHEMINS DE FER À VOIE DE 1,000 M
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        b)Le Bône - Guelma et l'Ouenza -----L'histoire 
        des lignes à voie de 1 m Bône - Guelma et de l'Ouenza étant 
        particulièrement complexe, il nous a paru utile d'en récapituler 
        quelques points clés dans le tableau suivant.
 
         
          | Section  | Ouverture | Voie normale | Electrification  | Observations |   
          | Bône - Duvivier | 1876 | * | 1933 |  |   
          | Duvivier - Souk-Ahras | 1881 | * | 1932
 |  |   
          | Souk-Ahras - Oued-Keberit | 1888 | 1922 | 1932 | Partie double voie 1951 |   
          | Oued-Keberit - Tebessa | 1888 | 1946 | 1951 |  |   
          | Tebessa - Djebel-Onk | 1966 |  |  |  |   
          | Duvivier -Guelma | 1877
 | * |  |  |   
          | Guelma-Hammam-Meskoutine | 1878 | * |  | Abandonnée en 1957 |   
          | Hammam-Meskoutine - Oued-Zenati | 1879
 | * |  | Abandonnée en 1957 |   
          | Oued-Zenati - Le Kroubs | 1879 | * |  |  |   
          | Souk-Arhas -Tarja | 1884 | * | 1951 |  |   
          | Tarja - Frontière | 1884 | * |  |  |   
          | Oued-Keberit - Ouenza | 1921 | * | 1932 |  |   
          | Aïn-Chenia - Bou-Khadra | 1929 | * | 1932 |  |   
          | Tebessa - Rhilane | 1893 | 1946 | 1951 | 3 files rails avant 1959 |   
          | Rhilane - Le Kouif | 1893 | 1946 | 1951 | 3 files rails avant 1959 |   
          | Rhilane - Frontière | 1931
 | * |  | Abandonnée en 1951 |   
          | NB : Dans la colonne voie normale, le 
            signe * indique que la section correspondante a été 
            construite à voie normale, donc dès le départ. |   ------La ligne 
          
        Souk-Ahras - Tebessa, longue de 128 km, fut ouverte en 1888. 
        Elle avait été construite dans un but strictement militaire, 
        et personne ne se doutait à ce moment-là que, par le tonnage 
        transporté, elle allait devenir la ligne 
        la plus importante d'Algérie.------Effectivement, dès 1893, 
        les mines de phosphates du Kouif, au nord-est de Tebessa, commencent à 
        être exploitées. La société anglaise concessionnaire 
        de ces mines, qui sera plus tard francisée sous le nom de Compagnie 
        des Phosphates de Constantine, construit une ligne à voie 
        de 1 mètre allant du Kouif à Tebessa via Rhilane. Le gisement, 
        très important, est exploité également de l'autre 
        côté de la montagne et des embranchements miniers à 
        voie étroite (voie de 60 ?) aboutissent sur la ligne du Bône 
        - Guelma au nord de Tebessa. Dès le début du siècle, 
        la ligne Souk-Ahras - Tebessa est engorgée, et ce d'autant plus 
        que l'on découvre des gisements de fer très importants dans 
        l'Ouenza et à Bou-Khadra. Le Bône - Guelma propose plusieurs 
        solutions de grand central minier à voie normale sur des trajets 
        complètement différents de l'ancienne ligne et ce dès 
        le départ de Bône.
 ------Pour des raisons diverses, tous ces 
        projets sont refusés à Paris. Le Bône - Guelma, désabusé, 
        se tourne vers son réseau tunisien en délaissant son réseau 
        algérien. Ce dernier est finalement nationalisé en 1915 
        et repris par les CFAE. La solution retenue alors est très simple, 
        il s'agit de mette à voie normale la ligne Souk-Ahras - Tebessa, 
        tout en modifiant son tracé là où c'est indispensable. 
        Ce magnifique projet sera très long à mettre en place. En 
        première étape, en 1922, la ligne est mise à voie 
        normale simplement de Souk-Ahras à Oued-Keberit. Très sérieusement 
        rectifiée, elle est raccourcie dequelques 4 km.
 ------Parallèlement, les CFAE constatent 
        que le parc vapeur dont ils ont hérité du Bône - Guelma 
        est devenu complètement obsolète et ils décident 
        de le renouveler presque entièrement. C'est ainsi que pour la ligne 
        minière à voie normale Bône - Oued-Keberit, ils reçoivent, 
        en 1920 et 1921, 30 locomotives Décapod (150), puis en 1922, pour 
        la ligne Bône - Ghardimaou, 15 Mountain(241), et ces dernières 
        sont les premières françaises de ce type, avant celles de 
        l'Est et du PLM métropolitains. Notons que, très raisonnablement, 
        ils ont renoncé au compoundage jugé trop complexe pour eux, 
        et ils se contentent de la surchauffe. Ultérieurement, en 1928, 
        ils reçoivent 30 Décapod supplémentaires, toujours 
        à simple expansion et à surchauffeur, mais cette fois-ci 
        à 3 cylindres égaux, en imitation de ce qui se fait en métropole 
        sur le réseau de l'Est.
 ------Le concessionnaire des mines de fer 
        de l'Ouenza construit en 1921 une ligne à voie normale de 21 km 
        de la mine à Oued-Keberit. Ultérieurement en 1929, un nouveau 
        raccordement de 18 km s'embranche sur le précédent à 
        Aïn-Chedia et dessert les mines de Bou-Khadra. Ces deux lignes sont 
        exploitées elles aussi à l'aide de locomotives modernes 
        du type 151T, analogues à celles que l'on trouve sur l'Est et sur 
        le Nord métropolitains.
 ------Par ailleurs, il semble que ces deux 
        embranchements aient été repris par les CFAE en 1930. Mais 
        la situation évolue également au sud de la ligne. La ligne 
        de l'Est Algérien, que nous étudierons au paragraphe suivant, 
        est continuée par les CFAE et atteint Tebessa en 1926. La ligne 
        minière Tebessa - Rhilane - Le Kouif est reprise par les CFAE en 
        1927. Enfin en 1931, les CFAE ouvrent une ligne de 9 km de Rhilane à 
        la frontière, à la rencontre de la ligne venant de Tunis 
        des Chemins de Fer Tunisiens, ligne dont le dernier tronçon Kalaa-Djerda 
        - frontière est ouvert le même jour. Ainsi, une ligne à 
        voie de 1 m allait de Tunis à Ouled-Rhamoun, aux portes de Constantine. 
        Dans sa partie centrale, cette ligne algérotunisienne était 
        essentiellement à vocation militaire mais, comme nous le verrons, 
        son utilisation, bien que militaire, ne fut pas du tout ce qui avait été 
        prévu.
 
 ------Restons au début des années 30. Le trafic de 
        la ligne maintenant à voie normale Bône - Oued-Keberit et 
        de ses deux embranchements est devenu considérable. En particulier 
        au point de vue tonnage transporté, cette ligne est de loin la 
        plus importante de l'Algérie. Les CFAE ont alors beaucoup de mal 
        pour écouler ce trafic à peu près normalement. Divers 
        projets sont à nouveau élaborés, dont un central 
        minier mais cette foisci en direction de la Tunisie, et un doublement 
        de la ligne dans sa partie la plus montagneuse et la plus fréquentée. 
        Tous sont rejetés et remplacés par celui de l'électrification. 
        Cette dernière sera effectuée en 1932 et 1933, de Bône 
        à OuedKeberit, y compris les deux
 embranchements de l'Ouenza. A l'instar de ce qu'a entrepris le Maroc, 
        c'est le courant continu 3000 volts qui est choisi. Rappelons à 
        ce propos que les instructions ministérielles de 1920 qui avaient 
        retenu le courant continu 1500 volts pour l'électrification des 
        chemins de fer français, avaient prévu que, par dérogation 
        et à titre exceptionnel, le 1500 volts pouvait être remplacé 
        par le 3000 volts. Très curieusement, seuls le Maroc puis l'Ouenza 
        profitèrent de cette latitude.
 ------Nous reviendrons sur la période 
        de la dernière guerre au paragraphe suivant. Passons donc aux lendemains 
        immédiats de celle-ci. Le travail de mise à voie normale 
        est repris activement et, dès la fin de 1946, celle-ci entre en 
        service d'Oued-Keberit au Kouif. Toutefois, de Tebessa au Kouif, la ligne 
        est à trois files de rail pour maintenir la liaison par voie métrique 
        d'OuledRhamoun à Tunis. Ensuite, l'électrification est reprise 
        et elle entre en service en 1951 d'Oued-Keberit au Kouif. On en profite 
        également pour électrifier la courte section au profil difficile 
        Souk-Ahras-Tarja de la ligne de Tunisie via Ghardimaou, Tarja en étant 
        la première gare après SoukAhras. Plus au nord, à 
        la même époque, la ligne de l'Ouenza est mise à double 
        voie au sud de SoukAhras, exactement des Tuileries à Montesquieu, 
        donc sur un vingtaine de kilomètres d'une rampe très raide 
        (20 pour mille). Parallèlement, la ligne algéro-tunisienne 
        Rhilane - Kalaa-Djerda est fermée.
 ------Toutefois, le troisième rail 
        pour la voie métrique
 restera en place jusqu'en 1959 sur la section Tebessa - Rhilane - Le Kouif. 
        Parmi les premiers travaux réalisés par le nouvel Etat algérien 
        figure la reprise d'un très vieux projet qui est mis en exécution 
        et voit le jour en 1966. Il s'agit du prolongement de la ligne à 
        voie normale de l'Ouenza de Tebessa à Djebel-Onk sur environ 100 
        km. Compte tenu de l'importance que le pétrole a pris alors en 
        Algérie, cette ligne n'est pas électrifiée. Rappelons 
        que Djebel-Onk est le centre d'un très vaste gisement de phosphates 
        découvert en même temps que celui du Kouif mais resté 
        jusqu'alors inexploité par le manque d'un moyen de transport approprié.
 ------En conclusion de ce paragraphe, et 
        pour rester dans le cadre fixé pour ce chapitre, récapitulons 
        les lignes à voie de 1 mètre que nous avons rencontrées
 - Souk-Ahras - Tebessa 128 km
 - Tebessa - Rhilane - Le Kouif 28 km
 - Rhilane - frontière tunisienne 9 km
 Soit un total de 1651 km
 
 ajout du 1-05-2003LA COMPAGNIE DES CHEMINS DE FER DE
 BÔNE-GUELMA
 paru dans la revue du GAMT, n°70 
        , 2000/2...adhérez 
        !...
 ------Cette Compagnie 
        a été créée en 1875 (statuts du23 mars 1875 déposés le 24 mars chez Maître
 DUCLOUX, Notaire à Paris), pour la construction et l'exploitation 
        de lignes de chemin de fer, principalement en Algérie et en Tunisie. 
        Parmi les principales lignes dont elle était concessionnaire à 
        l'origine, celle de BÔNE-GUELMA lui avait été apportée 
        par la Société de Construction des BATIGNOLLES et celle 
        de DUVIVIER à SOUK-EL-ARBA et SIDI-HEMMESSI lui avait été 
        cédée par la Société des chemins de fer de 
        la MEDJERDAH. La Société de Construction des BATIGNOLLES 
        était un des principaux fondateurs de la nouvelle compagnie.
 ------De nouvelles 
        concessions s'y ajoutèrent progressivement et les constructions 
        activement menées par la Compagnie aboutissent une dizaine d'années 
        plus tard à la constitution d'un réseau homogène 
        en Algérie entre GUELMA et la . frontière tunisienne, en 
        Tunisie de la frontière algérienne à TUNIS (par la 
        Medjerdah) et autour de Tunis. La ligne ALGER-TUNIS a été 
        inaugurée en 1886 et elle est sur la moitié de son parcours 
        environ dans le réseau BÔNE-GUELMA.
 ------A partir 
        de cette époque, la compagnie gère son réseau algérien 
        mais c'est en Tunisie, qu'elle fait porter principalement ses efforts 
        d'extension vers le sud de la Tunisie (la ligne Sousse Kairouan est ouverte 
        le 1e" janvier 1888 et autour du Port de BIZERTE alors en construction. 
        En 1898 la compagnie rachète à la Société 
        de Navigation italienne la propriété du chemin de fer qu'elle 
        exploite en Tunisie et des terrains qu'elle y possédait.
 ------La loi du 
        29 juillet 1904 pour la réforme du régime des chemins de 
        fer en Algérie (4 compagnies se partagent alors le pays) a pour 
        effet de modifier considérablement l'activité de la Société 
        puisqu'elle conduit au rachat en 1910, par le Gouvernement Général 
        de l'Algérie, du réseau algérien de la compagnie, 
        après d'âpres négociations. Cet événement 
        brutal achève en fait l'évolution naturelle de la compagnie 
        depuis 20 ans vers une entreprise essentiellement tunisienne, puisqu'à 
        cette date pour 447 km de lignes algériennes, elle possède 
        1205 km de lignes tunisiennes. Désormais amputée du réseau 
        algérien, auquel elle devait son origine, la compagnie se consacre 
        désormais entièrement à ,l'exploitation etl'extension de son réseau tunisien. En 1910, le Président 
        de la République inaugure la ligne SOUSSE-SFAX qui relie le nord 
        et le sud de la Tunisie. A la fin de la même année, la compagnie 
        conclut avec le gouvernement tunisien une convention qui donne un cadre 
        à toutes les conventions et concessions antérieures depuis 
        l'origine, accorde à la compagnie la garantie d'intérêts 
        à l'instar de celle dont bénéficient les compagnies 
        de chemin de fer en France et fixe un Cahier des Charges.
 
 ------Le rachat des lignes algériennes n'est 
        pas encore entièrement liquidé (il ne le sera qu'en 1917 
        et les derniers contentieux ne seront définitivement réglés 
        qu'en 1924) lorsqu'éclate la guerre de 1914. La guerre confronte 
        la compagnie au départ du personnel tant français qu'arabe 
        et italien et à la diminution des transports de marchandises en 
        raison du ralentissement de l'activité des Mines ; à partir 
        de 1917 s'y ajoutent les problèmes d'alimentation en combustible. 
        La fin de la guerre laisse la compagnie à bout de ressources face 
        à l'augmentation des salaires et au difficile recrutement des cadres 
        (on décide alors de leur appliquer le statut des grands réseaux 
        métropolitains, en majorant leurs traitements d'un tiers, comme 
        ceux des fonctionnaires de la Régence de Tunis).
 ------Les 
        2 conventions de 1920 et 1922, conclues avec le gouvernement de la Régence 
        de Tunis assurent la survie de la compagnie en lui accordant les garanties 
        nécessaires mais en contrepartie l'état tunisien devient 
        propriétaire de toutes les installations en Tunisie et la soumet 
        à un contrôle étroit. Ce nouveau régime d'exploitation 
        est en fait celui de l'affermage.
 ------L'assemblée 
        extraordinaire du 8 juin 1923 reconnaît cette nouvelle situation 
        en transformant le nom de la Société qui ne correspondait 
        plus, depuis 1910, à la réalité, en "Compagnie 
        Fermière des Chemins de fer Tunisiens". La compagnie exploite 
        alors 1580 km de lignes et, sauf des embranchements en voies de desserte 
        de quelques km, la période de construction de lignes nouvelles 
        et désormais close.
 ------Avec 
        le règlement définitif en 1924 du rachat du réseau 
        algérien, c'est véritablement une nouvelle période 
        qui s'ouvre dans la vie de la compagnie.
 ------Dès 
        1924, elle commence à diversifier ses intérêts en 
        achetant avec la Compagnie DELMAS-VIELJEUX deux pavires charbonniers de 
        la flotte d'état qui feront la navette entre TUNIS et les ports 
        anglais pour assurer l'approvisionnement en charbon qui avait tant fait 
        problème pendant la guerre, les phosphates tunisiens assurant le 
        fret de retour.
 ------Elle 
        s'intéresse aussi au développement du tourisme et débute 
        alors dans les transports automobiles, tant pour les circuits touristiques 
        que pour assurer les correspondances avec les chemins de fer. Dans les 
        années 1926-1927 elle prend des participations dans la "Société 
        d'énergie électrique de Bizerte" et diverses autres 
        sociétés industrielles.
 ------A partir 
        de 1929, la compagnie s'intéresse de près au développement 
        économique de la Tunisie qui doit assurer le développement 
        parallèle des transports de marchandises. On la voit alors prendre 
        des participations dans la "société des silos des gares" 
        et dans la "Société des silos des ports". Pour 
        lutter contre la concurrence des transports automobiles qui devient plus 
        dure, elle crée une filiale, la "Société tunisienne 
        automobile transport", chargée d'organiser un service de camionnage 
        des lieux de production des céréales vers les gares et prend 
        une participation majoritaire dans la "Société tunisienne 
        des transports automobiles du Sahel" qui couvre le sud tunisien.
 ------La crise 
        économique vient alors ralentir considérablement le trafic 
        marchandises par suite de la dévalorisation du dollar qui avantage 
        les phosphates américains. A cela s'ajoute une faible récolte 
        de céréales en 1936. Ainsi, alors que la compagnie avait 
        retrouvé en 1928 une partie de la liberté qu'elle avait 
        perdue à la suite des accords de 1920 - liberté qui lui 
        avait permis ses efforts de diversification depuis cette date - elle doit 
        désormais se soumettre à un contrôle plus rigoureux 
        de l'état.
 ------C'est 
        dans cette conjoncture qu'éclate la deuxième guerre mondiale 
        qui fait tomber la compagnie dans le régime de la réquisition. 
        A partir de 1942 les relations étant coupées entre la France 
        et la Tunisie, l'exploitation locale est isolée du siège 
        social et administratif installé à Paris. Les relations 
        ne reprennent qu'en 1944. La convention de 1922 devait expirer en 1948. 
        A cette date on prévoit un nouveau régime de chemin, de 
        fer en Tunisie et les tensions politiques dans le pays emêchent 
        de prendre une mesure définitive ; la concession est donc reconduite 
        d'année en année jusqu'en 1957, année qui voit l'indépendance 
        de la Tunisie et la nationalisation de ses chemins de fer. A cette date 
        la compagnie ne possède donc plus que ses diverses participations 
        et prend le nom de "Compagnie française de transports et de 
        participations".
 Rémy BAISON Adh. 
        N° 2003Sources : A.N. Paris (1er étage) Côte 156 A9 Personnel de la compagnie 156 AQ 94-95
 94 - Registre matricule des personnels et répertoire de ce registre 
      1875-1927 95 - Dossiers de personnel (classement alphabétique, lettres 
      E à L) 1876-1922
 Le dossier complet se trouve aux A.O.M. à Aix-en-Provence
 
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