
          
          Joyau romain pourvu d'un digne écrin 
          
          TIPASA est désormais protégé contre les Vandales 
          modernes
         Une ceinture de barbelés 
          autour des ruines de Tipasa a failli provoquer un nouveau débat 
          concentrationnaire. Cette innovation a suscité bien des commentaires. 
          
          
          Dans la cohorte (hétéroclite) des adversaires on trouve 
          les chasseurs de grives, les gardiens de chèvres, les dresseurs 
          de chiens, les campeurs abusifs, les dénicheurs de mésanges, 
          les amateurs de mosaïques (à emporter). Tous ceux qui, pour 
          des raisons de convenance personnelle, avaient transformé les 
          ruines en terrain de jeu, de chasse ou de pillage. Plus, il faut le 
          dire, quelques 
          esthètes pour qui toute clôture évoque Büchenwald. 
          
          
          Le chur des partisans est unanime. Il unit chardonnerets, grives 
          et étourneaux, ravis de pouvoir enfin vivre en paix, à 
          tous ceux qui se désolaient de voir Tipasa envahie par les nouveaux 
          Barbares. 
          
          Ces Barbares sattaquaient à tout ce qui leur tombait sous 
          la main. 
          
          Aux arbustes à lapproche de Noël, aux pinpignons par 
          gourmandise, aux fleurs par délicatesse et aux colonnades par 
          désuvrement. 
          Je suis allé à Tipasa voir, de près, le corps du 
          délit. Il ma fallu longtemps chercher le fameux fil de 
          fer qui ceint le parc Trémeaud. Parce quil est presque 
          entièrement dissimulé dans les pierres et la verdure. 
          
          
          Plus apparent sans doute à Sainte-Salsa, il ne rompt pas lharmonie 
          du paysage. Les esthètes sont trop exigeants. 
          
          Quant aux autres, ceux qui avaient affecté Tipasa à leur 
          usage personnel et désinvolte, ils pourraient sans doute invoquer 
          une prescription millénaire. Ils nont somme toute fait 
          que perpétuer une très ancienne tradition. Tipasa a toujours 
          été la terre délection des industrieux de 
          tout acabit. On peut y voir des choses bien étranges. Des sarcophages, 
          par exemple, servant dassise à lamphithéâtre 
          romain où se déroulaient les jeux du cirque. Ou encore 
          de multiples tombeaux venus sagglutiner à côté 
          des tombes de hauts dignitaires placées sous la protection des 
          saints. Pour être immémoriale, cette tradition ne devait 
          pas être éternelle... 
          
          Ce joyau quest Tipasa a, désormais, un digne écrin. 
          Quatre mille arbres ont été plantés, cinq kilomètres 
          de sentiers tracés, les parcours de visite entièrement 
          balisés. 
          
          Lentretien de lensemble demande des soins constants. Il 
          faut enlever les herbes parasites, surveiller les plantations, ouvrir 
          dans la végétation dheureuses perspectives. 
          
          Le résultat est admirable. Le paysage étonnamment varié. 
          A travers dépais buissons, vous pénétrez 
          dans un sous-bols. La lumière parvient tamisée, le bruit 
          des vagues assourdi. Brusquement, au détour dun chemin, 
          sans transition aucune, surgit une basilique ou un arc. De telles merveilles 
          méritaient vraiment dêtre protégées 
          contre les Vandales modèle 53.