| LE SITE, LE ROLE ET 
        L'HISTOIRE DE TIMGAD LE SITE DE TIMGAD. ----------Timgad 
        n'exerce peut-être pas sur celui qui la découvre la même 
        séduction que d'autres champs de ruines de l'Afrique du Nord. On 
        ne trouve ici ni le charme de Tipasa, 
        dispersée dans son paysage grec, ni celui dont s'enveloppent les 
        ruines de Djemila. Bâtie sur un sol relativement peu accidenté, 
        Timgad est une ville aux rues droites et monotones, où la raison 
        a peu plus de part que le cur. Elle n'a jamais tout à fait 
        dépouillé la rudesse de ce qu'elle fut à son départ 
        : une ville militaire. ----------Mais il 
        ne faut point s'en tenir aux premières impressions qu'elle apporte, 
        ni à la surprise de son immense spectacle de colonnes et de murs 
        ruinés, ni à l'émotion intellectuelle d'une richesse 
        archéologique qui, dans tout le monde romain, n'a guère 
        son équivalent qu'à Pompéi. Il faut la voir au printemps 
        au milieu des blés en herbe et quand la neige fraîche couvre 
        encore les sommets les plus proches. Il faut la voir sous le soleil de 
        midi, dressant ses pierres mornes dans la plaine brûlée. 
        La nuit aussi, quand la lune en transfigure l'image. Peut-être alors 
        deviendra-t-on sensible à la docilité d'une beauté 
        sévère. ----------Les hautes 
        plaines, qui, à travers l'Algérie, s'intercalent entre les 
        deux Atlas, ne constituent pas un ensemble uniforme, mais sont souvent 
        coupées par des chaînons qui les compartimentent. Ainsi au 
        Nord du massif de l'Aurès qui culmine à 2.307 m (dj. Chelia) 
        émerge en quelque sorte une longue arête montagneuse dont 
        l'élément principal, le dj. Bou Arif atteint 1.746 m au 
        Ras Fourar. Entre les deux s'allonge une plaine étroite qui vers 
        l'Est ne dépasse guère une vingtaine de kilomètres 
        de large et qui, à l'Ouest, de Timgad à Batna, n'est le 
        plus souvent qu'un assez étroit couloir. Cette plaine est à 
        une altitude moyenne d'un millier de mètres (Timgad : 1.040 au 
        musée, 1.080 au fort) si bien que les chaînons qui la bordent 
        au Nord et au Sud ne semblent, à l"oeil, qu'assez modestes 
        et d'autant que les ondulations de la plaine compromettent en quelque 
        sorte les horizons. Mais l'altitude ne se fera pas oublier du touriste 
        imprudent. Elle saura lui rappeler à l'occasion qu'il est dans 
        un pays froid où le soleil est chaud. ----------Les étroits 
        chaînons du Nord ne sont que des accidents topographiques. Mais 
        il n'en va pas de même de l'Aurès. Ce dernier est un énorme 
        massif qui, de la vallée 
        de l'Oued el-Kantara à celle de l'Oued el-Abiod, développe 
        ses chaînons sud-ouest, nord-est, sur une centaine de kilomètres 
        de longueur. Il est demeuré jusqu'aujourd'hui une zone refuge des 
        traditions berbères. Tel il nous apparaît, tel Procope l'a 
        vu voici quinze siècles : d'abord sauvage, d'accès difficile. 
        La montagne se défend elle-même, enlevant aux hommes l'obsédant 
        souci des forteresses. LE RÔLE DE LA VILLE. ----------A vrai 
        dire, la pénétration romaine semble y avoir été 
        plus profonde qu'on ne l'imaginait naguère. Mais en dépit 
        des routes qui le traversaient, l'Aurès resta en dehors des territoires 
        vraiment romanisés. L'Empire ne s'attacha pas d'ailleurs à 
        son intégration. On préféra contenir les populations 
        frustes et rétives que de tenter une assimilation dont la difficulté 
        se mesurait assez bien et dont le profit eut été maigre. La solution du problème de l'Aurès 
        apparut dans un réseau de fortifications qui ceinturerait le massif 
        rebelle et cette politique, inaugurée par les Flaviens, à 
        la fin du premier siècle de notre ère, resta celle de l'Empire, 
        pour autant qu'il la pût pratiquer, jusqu'à l'époque 
        byzantine.
 -
 ---------Thabudeos (Thouda), Badias (Badès) 
        ad Majores (Henchir Besseriani) surveillèrent le massif vers le 
        Sud ; Mesarfelta (el-Outaya) et Calceus (el-Kantara) vers l'Ouest. Mais 
        c'est vers le Nord que s'intensifiaient les cultures et c'est de ce côté 
        qu'il convenait d'opposer une barrière plus solide à la 
        concupiscence des montagnards. A cette intention s'élevèrent 
        entre autres Mascula (Khenchela), Thamugadi (Timgad) et Lambaesis (Lambèse) 
        où s'établit la légion à laquelle incombait 
        le maintien de la paix romaine en Afrique : la IIIè Légion 
        Augusta.
 
 ----------Cette organisation ne fut pas uvre 
        d'un jour. La légion avait été cantonnée d'abord 
        beaucoup plus à l'Est à Ammaedara (Haïdra). Mais vers 
        la fin du règne de Vespasien (69-79) elle s'était installée 
        à Theveste (Tebessa). Quelques décades plus tard elle avait 
        trouvé à Lambèse son siège définitif. 
        On ignore à quelle date précise. Mais il est possible que 
        ce dernier transfert n'ait pas été opéré sans 
        hésitation et que TIMGAD ait servi de camp provisoire à 
        la légion, à la fin du 1è siècle. Peut-être 
        a-t-on retrouvé le médiocre rempart qui l'entourait, si 
        médiocre que certains n'ont pas manqué d'y voir une construction 
        de basse époque. Si cette hypothèse est valable, la Timgad 
        primitive aurait été enfermée dans une enceinte rectangulaire 
        d'environ 355 mètres sur 325 et son extension aurait coïncidé 
        à peu près avec celle de la ville fondée plus tard 
        par Trajan. On serait en même temps amené à penser 
        que Timgad a pu être municipe avant de devenir colonie. Peut-être 
        municipe et colonie vécurent-ils un temps côte à côte.
 
 ----------Si Lambèse, située à 
        une vingtaine de kilomètres plus à l'Ouest et à proximité 
        de la grande voie Nord-Sud . qui emprunte le défilé d'el-Kantara, 
        était à coup sûr un meilleur emplacement pour le quartier 
        général de la légion, Timgad n'en était pas 
        moins un excellent point stratégique. Placée à l'entrée 
        du couloir qui suivait jadis la voie romaine, Tebessa-Lambèse, 
        que suit aujourd'hui la route qui la joint à Batna, elle commande 
        en outre les voies d'accès aux grandes vallées aurasiennes 
        de l'Oued el-Abdi et de l'Oued el-Abiod que gagnaient des voies romaines. 
        Le site où la ville devait s'élever ne se prêtait 
        pas moins à son établissement : un plateau ondulé, 
        légèrement incliné du Sud au Nord forme en bordure 
        de la plaine l'ultime contrefort de l'Aurès. Un double réseau 
        d'oueds dont les sources sont toutes proches et qui convergent vers l'aval 
        le limitent à l'Est et à l'Ouest. Un mamelon permettait 
        la construction facile d'un théâtre. La pierre était 
        abondante : grès dans les environs immédiats, calcaires 
        blanc ou bleu, qu'on trouvait à quelques dizaines de kilomètres 
        au Sud et au Nord. Enfin, l'eau ne manquait pas. L'Aïn-Morris, qui 
        alimente encore Timgad, sourd à 3 kilomètres au Sud. On 
        connaît l'existence d'autres sources aujourd'hui disparues et les 
        organisations hydrauliques qu'on a retrouvées çà 
        et là montrent que les précipitations servaient elles aussi 
        à l'alimentation de la ville.
 
 ----------Si l'on ajoute que la campagne d'alentour 
        était riche en grain, au témoignage de Procope, et en huile, 
        comme l'attestent les moulins à huile trouvés aux environs, 
        et qui à basse époque s'installèrent jusque dans 
        la ville même, on comprend que le site de Timgad ait été 
        retenu par l'autorité romaine pour fonder une ville et que le camp 
        de la légion, si tant est qu'il ait existé, n'ait pas été 
        abandonné après la fixation de celle-ci à Lambèse.
 LA COLONIE ROMAINE. ----------Quoi qu'il 
        en soit, c'est sous le règne de Trajan (98-117), en l'année 
        100, L. Muniatus Gallus étant légat, que fut fondée 
        par ordre de l'Empereur, la colonie de Thamugadi ou, pour lui donner son 
        nom officiel, la colonia Marciana Trajana Thamugadi dont les habitants 
        furent rangés dans la tribu Papiria. La légion fut chargée 
        des travaux qu'imposait la création d'une ville.
 ----------Cette ville de Trajan ne fut quelque temps 
        qu'un chantier dont les premiers colons furent sans doute très 
        peu nombreux, 250 a-t-on dit ; mais on n'en avait pas moins tracé, 
        dès le départ, un plan d'ensemble : la ville avait la forme 
        d'un carré de 1.200 pieds de côté, soit environ 355 
        mètres. Ce carré était coupé par deux voies 
        principales suivant ses médianes : le cardo maximus du Nord au 
        Sud, le decumanus maximus de l'Est à l'Ouest. Chacun des carrés 
        ainsi délimités fut divisé en trente-six îlots 
        carrés, d'environ 20 mètres de côté ou insulae 
        que séparèrent les cardines et decumani secondaires plus 
        étroits que les précédents.
 
 ----------Ce plan strictement géométrique 
        ne fut toutefois pas intégralement respecté. Pour des raisons 
        qui nous échappent, on ne construisit du côté de l'Ouest 
        que cinq rangées d'insulae au lieu de six. D'autre part, la construction 
        de monuments publics ou privés amena le groupement de deux ou de 
        plusieurs insulae. Celle du forum, en particulier, eut pour conséquence 
        de déporter vers l'ouest le cardo maximus sud qui ne se trouve 
        plus dans le prolongement du cardo maximus nord. Enfin, les remaniements 
        multiples que commande le déroulement de la vie apportèrent 
        quelques entorses au plan primitif. Cependant, ce plan resta dans ses 
        grandes lignes inscrit sur le sol et rien n'est plus net ni plus frappant 
        que sa disposition générale en damier dans laquelle des 
        rues rectilignes, dallées de grès, sauf le cardo et le decumanus 
        maximus qui le sont de calcaire bleu, séparèrent les blocs 
        monotones des insulae.
 
 ----------TIMGAD grandit vite et, dès la 
        seconde moitié du IIè siècle, elle avait déjà 
        débordé le cadre dans lequel Trajan avait prétendu 
        l'enfermer. Sa superficie primitive était d'une douzaine d'hectares, 
        elle finit par en couvrir au moins cinquante, débordant ses limites 
        initiales principalement au sud et à l'ouest de part et d'autre 
        de la route de Lambèse. Mais ces constructions nouvelles toutes 
        spontanées celles-là n'obéirent plus comme celles 
        qui les avaient précédées à une direction 
        générale. Le tracé des rues fut fait suivant une 
        géométrie moins exigeante et le contraste est flagrant entre 
        la régularité que présente l'aspect de la ville de 
        Trajan et le caractère assez anarchique de ses faubourgs.
 
 ----------N'en concluons pas, pour autant, que Timgad 
        ait été une ville immense, même à son âge 
        d'or. Elle n'était pas même à coup sûr une des 
        cités les plus importantes de l'Afrique. Sans doute ne risque-t-on 
        guère de se tromper en lui attribuant environ 15.000 habitants. 
        Cela représente une densité moyenne de trois cents à 
        l'hectare, le chiffre est déjà considérable.
 -
 ---------Nous savons peu de chose de l'histoire 
        de Timgad. Les textes antiques ne la nomment presque jamais et quand ils 
        le font, c'est le plus souvent sans rien ajouter à la mention de 
        son nom. Mais les très nombreuses inscriptions découvertes 
        permettent d'en mesurer la médiocrité. Ce fut une petite 
        ville, comme tant d'autres, dans l'Empire, où les vétérans 
        se retirèrent volontiers, mais qu'aucune activité économique 
        de quelque envergure, ni aucun événement intellectuel considérable 
        ne vinrent agiter. Si l'on en juge par ce que nous savons d'elle, la vie 
        y fut parfaitement " quotidienne ". Seules les ambitions humaines 
        en venaient parfois troubler la quiétude. Tel rêvait d'être 
        décurion ou duumvir, comme qui dirait conseiller municipal ou maire, 
        voire de représenter la ville au concilium provincial où 
        les cités s'associent dans la célébration du culte 
        impérial. Rien n'est trop coûteux pour atteindre ces nobles 
        buts ; celui-ci fait bâtir à ses frais un marché ou 
        une bibliothèque ; celui-là élève une statue 
        en l'honneur de l'Empereur ou à la gloire des Dieux, ne manquant 
        pas, bien entendu, de graver sur la pierre ce que lui doit la cité 
        et qui, à défaut de la faveur de ses contemporains, lui 
        vaut parfois la modeste immortalité que constitue le souvenir des 
        archéologues. Mais ces ambitions ne durèrent qu'autant qu'elles 
        furent profitables et l'épigraphie nous montre qu'au IV""' 
        siècle, on ne se fit pas faute d'échapper comme on put à 
        d'onéreux honneurs. L'État dût alors inscrire de force 
        sur l'album municipal tous ceux à qui leur fortune faisait un droit 
        d'y figurer.
 LE BAS-EMPIRE. ----------Le grand 
        événement de l'histoire de Timgad fut en somme celui de 
        tout l'Empire : l'apparition du Christianisme. Dès 256, pour le 
        moins, la communauté de Timgad avait un évêque et, 
        peu de temps après, sous Valérien (253-260) ou sous Dioclétien 
        (284-305), elle eut à compter des martyrs. Mais c'est le schisme 
        donatiste qui plus que ce glorieux témoignage allait lui donner 
        quelque lustre. La Numidie en fut la citadelle et les habitants de Timgad 
        apportèrent en nombre. semble-t-il, leur enthousiaste appui au 
        parti de Donat. Timgad fut un moment la capitale de la secte, lorsque 
        son évêque Optat en fut à la fin du IV` siècle 
        le véritable chef. Un concile donatiste s'y tint en 397 et le successeur 
        d'Optat, Gaudentius. avec lequel saint Augustin lui-même ne dédaigna 
        pas de se mesurer (contra Gaudentium. vers 421-422) fut à son tour 
        le champion d'une cause que l'hostilité impériale avait 
        inclinée vers la mort.
 ----------Mais les désordres suscités 
        par le schisme, l'affaiblissement du pouvoir que sollicitait partout une 
        tâche surhumaine ne furent point sans inconvénient pour la 
        ville. Elle se trouva la proie tentante de ceux-mêmes que sa crainte 
        avait si longtemps maintenus dans la sagesse. Peut-être restaura-t-on 
        alors l'antique rempart. Si la chose est vraie, on doit conclure qu'il 
        fut impuissant. A la fin du V' siècle ou au début du VIè, 
        les Maures de l'Aurès détruisirent la ville. Les murailles 
        furent rasées et les habitants déportés, nous dit 
        Procope, et l'archéologie confirme les incendies dont Timgad fut 
        victime, malheureusement sans en assurer la date. Mais il ne faudrait 
        point prendre Procope au mot et imaginer un anéantissement de la 
        cité contre lequel les pierres protestent. A l'époque byzantine, 
        encore, l'activité agricole se maintenait à l'alentours, 
        et dans la ville elle-même subsistait une vie précaire. Solomon, 
        le général de Justinien, n'eut pas besoin, quoique il s'en 
        soit glorifié, de la réédifier depuis ses fondations. 
        II n'en reste pas moins que l'élément essentiel de la Timgad 
        byzantine ce fut la forteresse qui se dressa à 400 m au sud de 
        la ville de Trajan.
 LA MORT DE TIMGAD. ----------Au milieu 
        même du VII' siècle, à la veille même de la 
        conquête arabe, les Byzantins élevèrent encore une 
        modeste chapelle et quelques indices laissent à penser que la ville 
        ne fut pas abandonnée immédiatement après. Mais, 
        sur ces derniers jours de Timgad nous ne savons rien. Les ruines se recouvrirent 
        peu à peu de terre et d'herbes, les souvenirs d'oubli. Pas un seul 
        historien ou géographe arabe n'en a, à ma connaissance, 
        fait mention. Ce n'est qu'en 1765 que le voyageur anglais Bruce la redécouvrit. 
        On ne voyait plus alors, semble-t-il, que le sommet de l'arc de Trajan, 
        le capitole, le théâtre, la forteresse et, çà 
        et là, des pans de murs et des colonnes éparses. Il fallut 
        attendre l'occupation française pour que les ruines attirassent 
        de nouveau les archéologues. Une courte mission épigraphique 
        de L. Renier, en 1851, en inaugura l'exploration scientifique, mais les 
        fouilles ne commencèrent qu'en 1880. Elles n'ont pas cessé 
        depuis et la majeure partie de la ville est aujourd'hui ressuscitée 
        à nos yeux. Il n'est pourtant pas exclu que des fouilles futures 
        réservent encore d'heureuses surprises. LES ASPECTS DE TIMGAD LES RUES ET LES MAISONS.----------Ce 
        qui crée la physionomie d'une ville, ce sont ses rues plus encore 
        que ses monuments. Celles de Timgad, on l'a dit, étaient rectilignes 
        et même strictement perpendiculaires les unes aux autres, à 
        l'intérieur du périmètre qu'avaient délimité 
        les urbanistes de Trajan. Elles n'offraient certes pas aux promeneurs 
        les charmes imprévus des villes du moyen âge, chrétien 
        ou musulman. Tout au plus les portiques qui en bordaient ça et 
        là quelques-unes parvenaient-ils à en assouplir la banalité. 
        Mais ils leur donnaient aussi un aspect monumental, qui ne devait point 
        manquer d'une certaine grandeur.
 
 ----------De loin en loin, une fontaine, auprès 
        de laquelle on se plaît à imaginer l'attroupement de toges 
        plus ou moins crasseuses, les cris des enfants et les bavardages des femmes, 
        apportaient à la rue une sorte de don de vivre. On en a retrouvé 
        plusieurs, à proximité du Forum et des Thermes. Mais si 
        l'on excepte la source dit Aqua septimiana felix, qu'on avait enfermée 
        dans un somptueux appareil d'édifices, la plus belle de toutes 
        était vraisemblablement celle que P. Julius Liberalis avait élevée 
        sur la route de Lambèse et par laquelle il n'avait pas dépensé 
        moins de 32.348 sesterces, soit environ 8.000 francs-or.
 
 ----------Les ares triomphaux constituaient un autre 
        ornement des rues. Le visiteur venant de Cirta pénétrait 
        dans la ville en franchissant une porte monumentale et il apercevait en 
        face de lui celle qui marquait l'entrée du forum sur le decumanus. 
        Mais s'il empruntait la route qui traversait la ville d'ouest en est, 
        celle qui menait de Lambeasis à Mascula, il ne rencontrait pas 
        moins de quatre arcs triomphaux. Deux d'entre eux indiquaient les limites 
        de la ville de Trajan, les deux autres, celles que l'agglomération 
        avait atteintes une soixantaine d'années plus tard, à l'époque 
        de Marc Aurèle. Le plus somptueux des quatre est encore à 
        peu près intact et est généralement connu sous l'appellation 
        inexacte d'arc de Trajan.
 
         
          | Arc 
              de Trajan |   
          |  |  |   
          |  face ouest | face est |  Construit à une date inconnue, mais certainement 
        au cours du second siècle, il fermait à l'ouest le decumanus 
        primitif de sa masse imposante. Les voitures empruntaient l'arche centrale 
        et l'on voit encore sous sa voûte les empreintes que leurs roues 
        ont laissées sur les dalles bleues. Deux portes latérales 
        étaient destinées aux piétons. Plus petites, surmontées 
        de niches où l'on avait placé des statues, elles étaient 
        encadrées de colonnes corinthiennes qui supportaient des frontons 
        semi-circulaires. Une attique couronnait l'ensemble qui devait accentuer 
        l'impression de lourdeur satisfaite que laisse encore aujourd'hui l'édifice 
        restauré.
 ----------Cependant, la plupart des rues présentaient 
        sans doute une assez grande banalité. Un quartier industriel s'étendait 
        au sud de la ville, à proximité des thermes. Quant au centre 
        du commerce, c'était sans doute le decumanus maximus. C'est 
        sur cette voie, à proximité du forum, qu'ont été 
        dégagées les étroites boutiques où s'effectuaient 
        les modestes transactions de jadis. C'est sur elle aussi que s'ouvraient 
        les marchés de la ville. Ils étaient au nombre de trois 
        : le marché de L'est, situé non loin du forum était 
        constitué par deux cours semi-circulaires sur lesquelles donnaient 
        les éventaires ; le marché de l'ouest, situé au delà 
        de l'arc de Trajan et connu sous le nom de marché de Sertius, du 
        nom du généreux citoyen qui l'avait fondé, formait 
        une abside ouverte sur une cour oblongue et bordée de portiques. 
        On peut y voir encore les tables de pierre où s'étalaient 
        les marchandises offertes à la tentation des clients. Quant au 
        troisième marché, il se trouvait à côté 
        du précédent et était, du moins à ce qu'il 
        semble, un marché aux vêtements.
 
 ----------Les rues n'offraient le plus souvent que 
        le visage aveugle des maisons. Comme la maison arabe, la maison antique 
        demeurait mystérieuse au passant. Comme elle, elle était 
        essentiellement constituée par une cour sur laquelle s'ouvraient 
        les pièces d'habitation, à moins que le luxe du propriétaire 
        ne lui permit d'adjoindre en quelque sorte à cet élément 
        fondamental un appartement privé. Les fouilles nous ont fait connaître 
        des maisons de toute importance. Quelques-unes n'occupent que le tiers 
        ou le quart d'une insula. D'autres en recouvrent deux ; telles les maisons 
        dites de Sertius et de l'Hermaphrodite qui offrent les images les plus 
        précises des demeures du patriciat local et dont la disposition 
        rappelle très exactement les édifices analogues de Pompéi 
        ou d'Herculanum.
 -
 --------Les cours bordées de portiques, les 
        bassins ou les jardinières qui ornaient les cours, les mosaïques 
        qui décoraient les pièces et principalement le tablinum 
        où le maître recevait ses hôtes, les thermes privés 
        qu'on a découverts dans certaines de ces maisons, tout contribue 
        à nous donner l'image d'une opulence qui sans doute fait un peu 
        méconnaître la misère toute proche et qui, elle, n'a 
        guère laissé de traces. Le goût africain romanisé 
        qui élevait à grand frais ces demeures somptueuses n'est 
        d'ailleurs pas irréprochable. La facture des mosaïques que 
        le Musée a recueillies est souvent médiocre. Celle des statues 
        est le plus souvent franchement détestable. En dépit des 
        critiques qu'il appelle, cet art n'en est pas moins émouvant : 
        il témoigne de la volonté des provinciaux d'imiter en toutes 
        choses la cité triomphale qui leur avait apporté sa paix.
 -
 ---------Mais la ville antique ne s'arrêtait 
        pas à l'endroit où les vivants cessaient d'édifier 
        à leur propre usage. Les maisons des morts relayaient celles des 
        vivants le long des routes. Si les nécropoles de Timgad sont dans 
        l'ensemble mal connues, du moins celle qu'on a découverte à 
        l'ouest de la ville, de part et d'autre de la route de Lambèse, 
        nous permet-elle de nous représenter ce que pouvaient être 
        les autres. Les tombes à incinération s'entremêlent 
        avec les tombes à inhumation. Constructions de toutes sortes d'ailleurs 
        ; depuis le tas de terre allongé suivant l'axe du corps et que 
        consolident des tuiles " affrontées ", jusqu'aux tombes 
        à caisson et aux lourds sarcophages qu'ornent parfois des sculptures 
        frustes ou le texte indigent d'une épitaphe.
 LE FORUM. LES LIEUX DE PROMENADE ET LES 
        TEMPLES.----------Le 
        Centre de Timgad c'est comme dans toutes les villes romaines, le Forum. 
        Celui-ci, l'un des plus vastes de l'Afrique du Nord, était constitué 
        par une vaste esplanade rectangulaire, pratiquement close sur ses quatre 
        côtés. On y accédait vers le sud par d'étroits 
        escaliers, vers le nord par un escalier monumental dont on a déjà 
        parlé. C'est sur cette esplanade, bordée d'un portique sur 
        presque tout son pourtour, que s'élevaient quelques-uns des principaux 
        monuments dont l'existence était indispensable à la vie 
        d'une colonie et qu'on avait construits pour la plupart presque à 
        ses débuts, c'est-à-dire au cours du second siècle.
 
 ----------Parmi ces édifices, il faut citer 
        au premier chef la curie qui servait de lieu de réunion à 
        l'assemblée des décurions, c'est-à-dire au conseil 
        municipal de la colonie. C'était une salle de petites dimensions 
        précédée par un portique et qu'ornaient quelques 
        statues. Mais son revêtement de marbre lui donnait sans doute un 
        lustre dont le pavement seul nous garde encore le souvenir. Sur la façade 
        orientale, de l'autre côté de la curie, se trouvait la basilique 
        civile, vaste nef où siégeaient les magistrats auxquels 
        incombait le soin de la justice. Tandis que les juges occupaient une tribune 
        située sur l'un des petits côtés de l'édifice, 
        les plaideurs et les oisifs devisaient dans la salle et même ne 
        se privaient pas d'y jouer aux dés, aux osselets, ou autres jeux 
        plus ou moins mystérieux pour nous, dont les dalles ont conservé 
        les traces.
 
 ----------C'est sur une de celles du forum, lui-même, 
        qu'on a relevé l'inscription : "Venari, 
        lavari, ludere, ridere,
 occ est vivere (chasser, prendre des bains, jouer, rire, çà 
        c'est vivre) dans laquelle l'un de ses habitués nous a confié 
        les principes de son épicurisme sommaire. Car la place et ses portiques 
        étaient aussi le rendez-vous de ceux qui n'avaient rien à 
        faire et qui trouvaient les uns auprès des autres le moyen d'occuper 
        les heures souvent longues d'une existence vide. Ils s'y croisaient avec 
        les gens d'affaires, avec ceux aussi dont la politique locale entretenait 
        l'intérêt ou l'ambition. Il faut les imaginer dans un décor 
        d'ailleurs tout différent de celui qui s'offre à présent 
        à nos yeux. Non seulement les portiques dissimulaient sans doute 
        à peu près l'horizon des montagnes, et son spectacle mouvant 
        suivant les saisons et les heures ; mais l'esplanade du forum lui-même 
        n'était pas jadis cette grande surface à peu près 
        unie que nous contemplons aujourd'hui. Elle était encombrée 
        de statues, une trentaine environ, que les riches habitants avaient élevées 
        à la gloire des Dieux, de la famille impériale ou de ceux 
        de leurs concitoyens à qui quelque raison valait cet insigne hommage. 
        Sans doute ce bric à brac n'était-il pas du meilleur goût. 
        La période impériale a été l'âge d'or 
        des sculpteurs mais pas celui de la sculpture. Pour autant que permettent 
        d'en juger les fragments recueillis, ceux de Timgad eussent été 
        mieux inspirés de s'adonner à d'autres occupations.
 
 ----------Fermons pourtant les yeux et ne retenons 
        que le souvenir de cet attachement à la cité et à 
        l'Empire que trahit la floraison de cet art officiel. Sans doute l'attrait 
        des fonctions publiques ne s'explique-t-il pas davantage aux IIme ou III- 
        siècles qu'à d'autres par le seul souci du devoir civique. 
        Du moins ceux qui les briguaient avaient-ils à cur de laisser 
        autre chose d'eux que le témoignage éphémère 
        de leurs vertus municipales. Quand ils s'avançaient sur la petite 
        tribune qu'on avait élevée en avant du temple, dit de la 
        Victoire, la plupart savaient sans doute qu'on attendait moins de leurs 
        mérites que de leurs bienfaits.
 
 ----------Ce n'est pas sur le seul forum que se 
        déroulait la vie quotidienne. Les thermes était eux-aussi 
        propices aux palabres. Le bain romain, dont le bain maure est l'héritier 
        abâtardi, se déroulait presque avec le rythme d'un office. 
        Du vestiaire, on gagnait le frigidarium où l'on trouvait les piscines 
        froides, puis une salle tiède (tepidarium), puis une autre où 
        l'on prenait un bain chaud (caldarium), le laconicum enfin, c'est-à-dire 
        la salle de sudation. La cérémonie se terminait normalement 
        par un massage. Mais les thermes comprenaient aussi des salles de pas 
        perdus et vraisemblablement de lecture. Il suffit de se promener dans 
        les grands thermes de Timgad, ceux du nord, proches de la porte de Cirta, 
        ou ceux du sud, proches de la porte de l'Aurès, pour mesurer l'importance 
        de ces édifices dans la vie roi-naine. Dans ceux du sud en particulier, 
        l'infrastructure est demeurée visible et nous permet de reconstituer 
        les procédés dont on usait pour les chauffer. Mais plus 
        révélateur peut-être que l'ampleur des monuments est 
        le nombre des thermes qu'on a découverts à Timgad. Il y 
        en a quatorze, sans compter ceux que comportaient certaines maisons et 
        qui étaient réservés à leurs occupants.
 
 ----------Mais la flânerie n'occupait pas 
        cependant la vie tout entière des Thamugadiens. Une bibliothèque 
        permettait à ceux qui le désiraient d'accéder aux 
        plaisirs de l'esprit et c'était chose précieuse en un temps 
        où les livres étaient chers et relativement rares. Timgad 
        la devait à la générosité d'un des siens : 
        M. Julius Quintianus Flavius Rogatianus qui n'avait pas ménagé 
        ses deniers pour faire de l'édifice un lieu attrayant. On pénétrait 
        d'abord dans une cour bordée d'un portique et qui s'ouvrait sur 
        le cardo nord. Au flanc de celle-ci s'ouvrait une salle semi-circulaire, 
        au haut. de laquelle était creusée des niches aux parois 
        garnies de marbre et dans lesquelles s'entassaient les rouleaux que constituaient 
        les volumina ; les lecteurs s'asseyaient à côté, sur 
        les marches.
 
 ----------Cependant, la grande distraction locale, 
        c'était à coup sùr le théâtre. Toutes 
        les villes n'en possédaient pas et les représentations étaient 
        pour les habitants des cités voisines l'occasion d'un déplacement, 
        pour Timgad celle d'une animation inaccoutumée. Bâti au flanc 
        d'une colline, au sud du forum, ce théâtre avait été 
        construit vers le milieu du second siècle et pouvait contenir 3.500 
        à 4.000 spectateurs. Comme tous les théâtres antiques, 
        il est essentiellement constitué par une série de gradins 
        disposés en demi-cercle et qui servaient de sièges aux spectateurs, 
        du moins à ceux du commun car les notabilités avaient droit 
        à des sièges plus confortables qu'on disposait sur des marches 
        en avant du premier rang. Ces gradins ont été restaurés 
        - ou plus exactement pour la plupart reconstitués - mais de la 
        scène il ne reste que le soubassement. Le mur de fond a disparu, 
        les dépendances du théâtre sont tout juste reconnaissables. 
        C'est ailleurs, à Djemila, ou à Khemissa qu'il faut aller 
        chercher l'image relativement complète d'un théâtre 
        antique.
 
 ----------Mais la cité romaine est bâtie 
        pour les Dieux, tout autant que pour les hommes. Leurs effigies ornent 
        les demeures privées comme les monuments publics ; les textes- 
        épigraphiques témoignent du souci qu'avaient les dédicants 
        d'attirer sur la ville autant que sur eux-mêmes leur attention favorable. 
        Pourtant Timgad est relativement pauvre en sanctuaires. Ceux de Saturne 
        et de Mercure ou de Cérès, n'ont été identifiés 
        que de façon incertaine et n'ont laissé, s'il s'agit bien 
        d'eux, que des restes archéologiques assez informes. En fait, trois 
        temples seulement, mis à part ceux qui bordaient au sud de l'Aqua 
        septimiana, nous offrent autre chose que la substructure de leur cella. 
        C'est d'abord celui qui se dresse sur le forum lui-même, à 
        côté de la curie et dans lequel on a voulu voir, on ne sait 
        trop pourquoi, un sanctuaire dédié à la Victoire. 
        De petite dimension, comme la plupart des temples antiques, il s'élevait 
        en arrière de la tribune, qu'il dominait de son portique tétrastyle. 
        Ainsi les orateurs pouvaient-ils sentir peser sur eux l'ombre toujours 
        inquiétante des Dieux.
 
        
          |  Vue d'ensemble 
              du marché de Sertius |  ----------Un autre 
        temple faisait face au marché de Sertius, dédié 
        celui-ci au Génie de la Colonie auquel on avait associé 
        d'autres divinités. Deux colonnes corinthiennes supportent encore 
        un fragment d'architrave et leur silhouette grêle se découpe 
        aujourd'hui sur le ciel. Elles suffisent à nous donner une idée 
        de la grâce de ce petit édifice que précédait 
        une cour asymétrique et auquel on accédait par un escalier 
        dont on a conservé les marches.
 ----------Mais le plus important des temples de 
        Timgad était son Capitole, sanctuaire par excellence dans les colonies 
        comme à Rome et dont Jupiter, Junon et Minerve se partageaient 
        l'usage. Bien qu'il ait été restauré - au moins partiellement 
        - dans la seconde moitié du IV"" siècle, l'édifice 
        présente à nos yeux l'image désolée de ses 
        portiques ruinés, de sa cella détériorée. 
        Les fûts des colonnes jonchent le sol de leurs tambours énormes 
        - sauf deux qu'on a pu remonter et qui attestent les vastes proportions 
        que le temple eut jadis - et dont, s'il faut en croire un dessin de Bruce, 
        on pouvait avoir encore quelque idée au XVIII`- siècle.
 TIMGAD CHRETIEN ET BYZANTIN.
 ----------Mais 
        on l'a dit, Timgad ne disparut pas avec les dieux du paganisme, le christianisme 
        triomphant dressa dans la ville convertie ses basiliques et ses chapelles. 
        Mais le schisme ne tarda pas à déchirer la tunique sans 
        couture et les ruines étalent encore, devant nous le témoignage 
        de cette division.
 
 ----------C'est probablement l'ensemble chrétien 
        le plus remarquable de Timgad que celui qui constitue le quartier donatiste 
        et qu'on a longtemps connu sous le nom impropre de monastère de 
        l'Ouest. L'essentiel en est constitué par une basilique à 
        trois nefs et dont la nef centrale se termine en abside et que précède 
        un atrium. Mais ce sont les annexes qui présentent l'intérêt 
        le plus vif : la maison de l'évêque donatiste Optat et, du 
        point de vue esthétique, le baptistère qui flanque l'atrium 
        au nord-ouest.Le bâtiment lui-même a disparu mais la cuve 
        de mosaïque est demeurée presque intacte à travers 
        les siècles. Les mosaïques polychromes aux dessins géométriques 
        couvrent encore les marches par lesquelles le néophyte descendait 
        pour recevoir le sacrement ; et, tout autour de la cuve le décor 
        floral continue de s'épanouir avec une inaltérable fraîcheur.
 
 ----------Mais quoique Timgad ait été 
        l'une des citadelles du donatisme, elle n'abandonna semble-t-il jamais 
        tout à fait l'orthodoxie qui finit d'ailleurs par l'emporter. De 
        l'autre côté de la route de Lambèse, celle-ci avait 
        elle aussi son église, moins vaste il est vrai que la précédente, 
        mais qui s'incorporait également dans un ensemble d'édifices 
        dont l'agencement et l'objet ne sont d'ailleurs pas toujours très 
        clairs.
 
 ----------Au reste, les églises ne manquent 
        pas à Timgad. Malheureusement la date de construction de la plupart 
        d'entre elles ne peut guère être fixée que d'une manière 
        très incertaine. On hésite souvent entre le V° et VIII 
        siècles, et cette imprécision n'autorise guère à 
        des conclusions générales. Un fait toutefois est frappant 
        - qui n'a d'ailleurs pas lieu de surprendre - les édifices chrétiens 
        ne se rencontrent qu'exceptionnellement dans la partie centrale de la 
        ville. Un seul est hors de conteste : c'est la petite chapelle qui s'élève 
        non loin du forum dans la maison de L. Julius Januarius dont on utilisa 
        les murs et l'atrium. Pour la plupart c'est en dehors de l'agglomération 
        qu'il se rencontrent mais avec des colonnes et des pierres disparates 
        et provenant des monuments antérieurs.
 
 ----------C'était déjà le cas 
        des deux grandes basiliques, donatiste eu catholique. C'est encore celui 
        de l'église qu'on a découverte à l'ouest, à 
        proximité de la route de Lambèse et dont la cour a servi 
        de cimetière. Celui aussi d'une petite chapelle sans doute byzantine 
        située au sud-ouest du Capitole.
 
 ----------Mais le site chrétien le plus émouvant 
        de Timgad est certainement l'immense nécropole qui s'étend 
        au sud de la ville. Plus de 10.000 tombes ont été mises 
        au jour, la plupart formées de simples tuiles affrontées 
        ; les épitaphes sont exception et Dieu seul peut reconnaître 
        les siens dans la foule anonyme des morts. Deux églises dominaient 
        jadis la nécropole. Elles n'offrent plus que des ruines confuses. 
        Mais l'une d'elles a livré une inscription qui nous apprend qu'elle 
        fut bâtie par Jean, duc de Tigisi, entre 641 et 647, à la 
        veille même des premières expéditions arabes.
 
 ----------Pourtant ce n'est pas dans ces constructions 
        religieuses qu'il faut chercher le souvenir du Timgad byzantin. Pour défendre 
        ce point stratégique important, le magister militum Solomon fit 
        bâtir en 539 une immense forteresse de 132 m. sur 67 dont les fouilles 
        récentes ont révélé l'extraordinaire état 
        de conservation. De l'extérieur on n'aperçoit que les hautes 
        murailles nues, flanquées de tours carrées et qui s'élèvent 
        encore à plus de 12 m. au-dessus du sol. Mais une fois franchie, 
        la porte unique par laquelle on pénétrait dans l'édifice, 
        au milieu de la face nord, on découvre un ensemble complexe et 
        imposant. Ce sont naturellement les casernements, les magasins, la petite 
        chapelle, aussi, avec son baptistère minuscule. Mais c'est encore 
        un immense bassin qui, sans le, secours de l'épigraphie, eut laissé 
        les archéologues dans une incertitude sans doute cruelle. Une inscription 
        a permis de dater du début du IIIè siècle la construction 
        non seulement du bassin mais des édifices qui l'environnent et 
        e appris qu'il était destiné à recueillir les eaux 
        de l'Aqua septimiana felix. Sans doute cette citerne toute faite et dont 
        l'alimentation était assurée par une source, parut-elle 
        aux Byzantins particulièrement désignée pour fixer 
        le site de leur forteresse
 
 . ----------Sans 
        souci de conserver le monument élevé avec un besoin périmé 
        de la grandeur, sans grand ménagement pour les sanctuaires des 
        dieux déchus. Ils élevèrent les murailles utilitaires 
        à l'intérieur desquelles s'abritait leur précaire 
        sécurité.
 o O o ----------On ne 
        prétend pas certes avoir donné dans ces quelques pages une 
        image bien précise de Timgad. Peut-ètre cependant suffiront-elles 
        à en montrer l'extraordinaire variété. Ce sont des 
        édifices de toute nature que la pioche a ramenés au jour 
        et leur construction s'étale sur plus de cinq siècles. Leur 
        intérêt est déjà en eux-mêmes, car certain 
        d'entre-eux sont parmi les mieux conservés de leur espèce. 
        Mais la valeur de Timgad tient plus encore ????????(illisible) impressionnante 
        des ruines, qui sont parmi les plus vastes et les plus évocatrices 
        que nous ait laissé le monde antique. Christian COURTOIS. TABLE DES MONUMENTS (voir 
        le plan) 
         
          | 1 Porte du Nord ou de Cirta | 28 Petits Thermes du Sud. |   
          | 2 Maison et chapelle | 29 Fort byzantin. |   
          | 3 Petits Thermes du Nord | 30 Chapelle du duc Jean |   
          | 4 Bibliothèque publique | 31 Nécropole chrétienne 
            et église |   
          | 5 Boutiques du decumanus | 32 Temple. |   
          | 6 Latrines | 33 Capitole |   
          | 7 Forum | 34 Eglise. |   
          | 8 Théâtre | 35 Cathédrale donatiste et dépendances. |   
          | 9 Temple de Cérès (?) | 36 Thermes du Capitole |   
          | 10 Temple de Mercure (?) | 37 Thermes de l'Ouest. |   
          | 11 Maison aux jardinières | 38 Maison |   
          | 12 Marché de l'Est. | 39 Temple du Génie de la Colonie |   
          | 13 Petits Thermes de l'Est | 40 Marché de Sertius |   
          | 14 Porte de Mascula | 41 Marché aux vêtements. |   
          | 15 Porte du Faubourg Est | 42 Thermes du marché de Sertius. |   
          | 16 Grands Thermes de l'Est | 43 Fontaine de Liberalis |   
          | 17 Thermes du Nord-Est | 44 Porte du Faubourg Ouest. |   
          | 18 Porte secondaire du Nord | 45 Maison et Thermes |   
          | 19 Maison de Corfidius Crementius | 46 Nécropole païenne. |   
          | 20 Maison de Januarius et Chapelle. 
 | 47 Eglise. |   
          | 21 Arc dit de Trajan | 48 Eglise. |   
          | 22 Maison de la piscina. | 49 Maison. |   
          | 23 Petits Thermes du Centre | 50 Edifices du Faubourg Nord. |   
          | 24 Maison de Sertius. 
 | 51 Thermes des Filadelfes |   
          | 25 Maison de l'Hermaphrodite. . | 52 Grands Thermes du Nord. |   
          | 26 Quartier industriel. | 53 Temple de Saturne (?) |   
          | 27 Grands Thermes du Sud |  |  
   |