| -----C'est très 
        tôt après 1830, que naît l'idée de confier à 
        une Congrégation Religieuse la mission de créer en Algérie 
        une exploitation agricole importante qui pourrait jouer le double rôle 
        de ferme pilote et de modèle au plan de la morale et de la charité 
        chrétienne.-----M. De CORCELLE, alors député 
        de l'Orne, fut envoyé en mission d'enquête. A son retour, 
        avant 1842, il proposa que l'on confie cette double mission aux Trappistes.
 -----Son rapport disait notamment : "Les 
        Trappistes apporteraient une expérience agricole fort précieux 
        et des exemples de sainteté de nature à émouvoir 
        vivement l'imagination des indigènes. "
 -----Les terres vacantes étaient loin 
        de faire défaut. Celles qui semblaient vouées injustement 
        à l'inculture représentaient des superficies s'étendant 
        à perte de vue. Elles s'avançaient jusqu'aux remparts des 
        villes, qu'elles semblaient assiéger à la façon d'une 
        ceinture épaisse et impénétrable de boisements sans 
        éclaircies et de taillis sans issues. C'était la brousse 
        comme l'appelaient les soldats de l'armée d'Afrique.
 -----A quatre lieues d'Alger, le plateau 
        ondulé de Staouëli, où s'était joué le 
        sort des destinées de la France en Afrique, offrait le spectacle 
        d'un boisement aussi sauvage. Du point de vue de la colonisation, il importait 
        que la disponibilité de ses terres existat. Elle existait à 
        des degrés divers de sécurité et de salubrité.
 -----Avec l'encouragement du maréchal 
        Soult, président du Conseil et Ministre de la Guerre, le député 
        de Corcelle engagea des négociations avec Dom Joseph-Marie, vicaire 
        général de la grande Trappe d'Aiguebelle de la Drôme. 
        Le succès les couronna. Le supérieur des Trappistes était 
        inspiré par l'idée de créer en Algérie une 
        oeuvre comparable à celle que les Pères de Citeaux avaient 
        admirablement accomplie en France.
 -----Accompagné d'un religieux Dom 
        Joseph-Marie se rendit en Algérie à la recherche des terres 
        promises. Après un voyage à Bône, où la mémoire 
        de saint Augustin les attirait invinciblement, ils optèrent pour 
        les environs d'Alger qui se prêtaient infiniment mieux à 
        l'installation de l'établissement en projet.
 -----Enfin l'autorisation fut accordée 
        au supérieur de la trappe d'Aiguebelle, d'établir une maison 
        filiale en Algérie, sur une concession de terre de la région 
        de Staouëli.
 -----Voici les dispositions essentielles 
        de l'acte de donation constitutif de la propriété du Domaine 
        de la Trappe
 
         
          | --"Au 
            nom du Roi, -----"Nous, Maréchal de Franccee 
            Président du Conseil, Ministre Secrétaire d'Etat de 
            la Guerre ;
 -----"Vu l'arrêté de 
            M. le Gouverneur Général de 1 Algérie du 17 février 
            1843, approuvé par nous portant qu'il sera établi un 
            centre de population au lieu dit camp de Staouëli, dans la plaine 
            de ce nom
 -----"Vu les propositions présentées 
            en vertu de pouvoirs spéciaux par : Pierre Hercelin, prêtre, 
            en religion Joseph-Marie abbé de la Grande Trappee général 
            des Trappistes, demeurant à la Trappe, commune de Soligny (Orne) 
            ;
 -----"Vu l'acte constitutif de la 
            Société Civile des Religieux qui veulent s'établir 
            en Algérie ; "Avons arrêté et arrêtons 
            ce qui suit
 -----"Il est fait concession à 
            la Société Civile représentée par M. Hercelin 
            prêtre ci-dessus nommé, d'une superficie de terres et 
            broussailles dans la plaine de Staouëli, contenant 1020 hectares. 
            "
 -----"Fait à Paris, le 11 
            juillet 1843,
 ----"Signé : Maréchal 
            Duc de Dalmatie. "
 -----"Pour copie conforme,
 -----"Le Lieutenant-Général 
            Gouverneur de l Algérie,
 -----"signé : Bugeaud. "
 
 |  -------La Société 
        recevait, pour ses dépenses de premier établissement, une 
        avance de 62 000 francs. Elle était tenue de construire des bâtiments 
        d'habitation et d'exploitation, de mettre en culture, dans le délai 
        de deux ans, les terres qui étaient susceptibles de l'être 
        immédiatement. La moitié de la concession devait être 
        cultivée à la fin de la cinquième année et 
        le surplus dans une autre période de cinq années. Enfin, 
        une plantation de 10 000 arbres lui était encore imposée.-----On s'aperçut alors que cet acte 
        contenait maintenant des clauses telles, que cette concession avait toutes 
        les chances de se voir résiliée dans les cinq ans pour non 
        respect de celles-ci. Le R.P. Hercelin refusa donc de s'engager dans cette 
        galère.
 -----Parmi les membres de la Société 
        concessionnaire figurait le "Sieur" Martrin-Donos, en religion, 
        François-Régis. C'est à lui que fut confiée, 
        en qualité de supérieur, la direction de la trappe d'Afrique 
        dont il devint le prieur. Quarante autres Trappistes étaient désignés 
        comme ses collaborateurs. C'étaient des descendants lointains et 
        résolus de ces moines qui, au moyen âge, firent naître 
        l'agriculture en France. François-Régis et un prêtre, 
        Gabriel, se présentèrent au palais du Gouverneur Général, 
        à Alger, le 13 août 1843, ils furent reçus par le 
        maréchal Bugeaud qui les accueillit par ces paroles
 -----"Il ne 
        nous faut pas des célibataires pour coloniser l Algérie, 
        mais je suis soldat, vous m'apportez des lettres du Ministre de la Guerre 
        qui est mon chef, j'obéirai. Je vous accepte donc comme les enfants 
        les plus intéressants de la famille coloniale. "
 -----Sans en dire davantage, séance 
        tenante, devant François-Régis et le frère Gabriel, 
        le maréchal traçait à son état-major le rôle 
        qu'il aurait à remplir pour fournir à cette entreprise une 
        aide matérielle prompte et complète.
 -----L'installation des deux premiers moines, 
        les Pères François-Régis et Gabriel, aidés 
        par soixante condamnés militaires et quelques soldats du Génie, 
        commence le 20 Août, jour de la Fête 
        de Saint Benoit, fondateur de l'ordre.
 -----La première pierre du couvent 
        était posée solennellement le 14 septembre suivant, en présence 
        de l'Evêque d'Alger, du Maréchal BUGEAUD et de leurs suites 
        respectives. Dix frères Trappistes étaient arrivés 
        la veille à Staouëli, sous la conduite des Pères Hilaire 
        et JeanMarie. La cour centrale du futur couvent devait conserver un groupe 
        de palmiers, dont un, très grand, à l'ombre duquel avait 
        été installé l'autel de la Messe d'action de grâce 
        célébrée après la victoire de Staouëli 
        en Juin 1830.
 -----Pour 
        cette première pierre, on avait déposé au fond de 
        la fouille de fondation des boulets ramassés sur le champ de bataille, 
        on avait coulé par dessus une dalle de ciment, et sur celle-ci 
        avait été placée une pierre taillée prélevée 
        aux ruines d'une villa romaine située à proximité.
 -----Un peu plus tard, soucieux de rendre 
        un perpétuel hommage de reconnaissance au puissant concours du 
        maréchal Bugeaud, dont la devise célèbre était 
        : "Ense et Aratro", il fit apposer sur la façade intérieure 
        du corps des bâtiments une plaque de marbre que tous les visiteurs 
        du domaine peuvent lire. Elle porte les trois mots suivants "Ense, 
        Cruce, Aratro."
 -----L'épée, la croix et la 
        charrue, symbole appelé à présider à l'avenir 
        et à la prospérité de la nouvelle Trappe.
 -----Comme l'avait prescrit le maréchal, 
        les chantiers de travaux furent organisés malgré de multiples 
        obstacles avec une rapidité des plus louables. Des légions 
        d'ouvriers, soldats, sous-officiers et officiers du génie, travailleurs 
        civils, condamnés militaires, avec des convois de matériel 
        et de vivres s'emparèrent des lieux et se mirent ardemment à 
        la tâche.
 -----On trouva sur place les matériaux 
        à bâtir, et même du bois de charpentier.
 -----On orienta les constructions, on en 
        creusa les fondations, on planta des arbres de rapport et des arbres d'assainissement, 
        on traça des chemins d'exploitation, on utilisa les eaux apparentes, 
        on délimita les terres se prêtant à des cultures à 
        rendement immédiat, en un mot, on alla au plus pressé. Çà 
        et là, pendant que les murs hospitaliers se dressaient, le sol 
        dépouillé de sa gangue broussailleuse reculait la limite 
        des surfaces livrables au soc des charrues et propices au geste du semeur.
 -----Fin juin 1843, soixante hectares étaient 
        déjà défrichés, labourés et ensemencés.
 -----Hélas, l'année qui suivit 
        la fondation embryonnaire de la Trappe fut terrible pour le jeune monastère. 
        Des pluies torrentielles arrêtèrent les travaux sur tout 
        le littoral. La campagne fut compromise. Malheureusement la santé 
        le fut aussi. Une offensive de paludisme sema la mort dans les rangs des 
        trappistes et des soldats.
 -----Sur un total de quarante religieux onze 
        étaient morts. Le premier fut le frère Reing. Ils furent 
        enterrés dans la redoute Lamoricière, construite par le 
        lieutenant LAMORICIERE (le futur général) et ses hommes 
        au début de la bataille de Staouëli, et à côté 
        de la tombe du lieutenant Amédée de BOURMONT, le propre 
        fils du Maréchal commandant le corps expéditionnaire de 
        1830, tué pendant cette même bataille.
 -----Les pertes matérielles furent 
        élevées. On comptait sur la campagne prochaine pour les 
        réparer. Espoir déçu. Semées à tort, 
        dans les terrains sablonneux, les céréales connurent l'échaudage 
        et le sirocco acheva de détruire ce que cette maladie avait épargné.
 
 -----Au regard de François-Régis, 
        l'échec se transformait en révélation. L'affectation 
        des cultures au sol dont l'usage avait démontré les qualités 
        ou les excès se fit à l'avenir judicieusement. Là 
        où les céréales avaient échoué, les 
        cultures maraîchères triomphèrent. La production des 
        primeurs venait de trouver sa terre d'élection.
 -----Sans arrêt, les constructions 
        se complétaient, les défrichements agrandissaient leur zone, 
        le verger livrait de beaux fruits, et le rucher un miel recherché. 
        Les étables et les écuries étaient amplement pourvues 
        d'animaux, les hangars abritaient du matériel sans cesse accru. 
        Enfin l'assainissement faisait reculer la fièvre. La concession 
        qui comptait plus d'un millier d'hectares, si elle n'était encore 
        que partiellement assainie et travaillée, se montrait sous des 
        dehors satisfaisants. La dure partie jouée pour la conquête 
        des trésors du sol était considérée comme 
        gagnée.
 -----"L'établissement 
        connu, dit Gabriel Verge, auteur d'une remarquable étude sur cette 
        oeuvre, devint dès lors un centre quasi officiel d'exploitation 
        agricole d'où partait la lumière de la colonisation agricole 
        ; les colons venaient y puiser des exemples d'organisation, de culture, 
        de méthode, de travail ; de nombreux voyageurs de passage en Algérie 
        ne manquaient pas d'aller visiter la Trappe de Staouëli où 
        d'ailleurs ils trouvaient le meilleur accueil, jusqu'aux hommes politiques, 
        de lettres et artistes qui venaient admirer l'oeuvre de colonisation réalisée, 
        chercher des inspirations poétiques ou de génie. "
 -----Le progrès 
        accomplissait chaque année de nouvelles étapes.
 -----Les céréales, la vigne, 
        les arbres fruitiers, les légumes, le géranium à 
        parfum, la basse-cour, l'élevage en recueillaient les bienfaits. 
        L'oeuvre forestière n'était pas moins digne d'éloges, 
        le pin maritime, le pin pignon et l'eucalyptus dont l'emploi comme bois 
        d'oeuvre rendit des services exceptionnels que l'on a encore sous les 
        yeux, se partagèrent la conservation et la salubrité du 
        domaine.
 -----Ferme généreuse en ressources, 
        la Trappe ajoutait des dépendances à ses constructions : 
        magasins, caves, greniers, ateliers, distilleries et même une hôtellerie 
        destinée à l'hébergement des étrangers uniquement 
        nourris par les produits du 'domaine.
 -----Au point de vue foncier, la concession 
        s'était agrandie par l'apport de nouvelles parcelles et d'une seconde 
        concession de quarante-quatre hectares, ce qui porta sa superficie totale 
        à 1290 hectares ayant la forme d'un quadrilatère.
 -----Les trappistes corrigèrent les 
        inconvénients inévitables d'une exploitation à si 
        grand rayon en créant sur les parties éloignées des 
        petites fermes dénommées Aiguebelle, Fontbonne, Saint-Scholastique, 
        Saint-Bernard, Saint-Benoît, Saint-Etienne, Saint-Michel, dont l'exploitation 
        avait été confiée à des colons fermiers avec 
        leurs familles.
 -----Enfin, un moulin à farine avait 
        été installé sur le domaine. La farine servait à 
        la fabrication du pain pour le personnel et pour les indigents. Le surplus 
        de la récolte en blé était vendu.
 -----Les prévisions de François-Régis 
        sur les qualités du sol ne se trompaient pas, lorsqu'elles attribuaient 
        à la vigne et aux primeurs le plus sûr et le plus privilégié 
        avenir. Mais aussi les travaux maraîchers étaient-ils des 
        plus soignés. Quant au vignoble, il était enrichi par des 
        cépages qui sont la gloire des vins de France : Morrastel, Grenache, 
        Faranah, Clairette, Terret, Malvoisie, Muscat, Tokay.
 -----L'ampleur des résultats obtenus 
        détermina le Gouvernement à délivrer à la 
        Société Civile de Staouëli le titre de concession, 
        la dotant de la propriété définitive et dans les 
        conditions du droit commun, des terrains dont elle n'avait eu que la propriété 
        provisoire.
 -----Sur la proposition du maréchal 
        Randon, Gouverneur Général de l'Algérie, un décret 
        impérial, en date du 16 août 1853, conférait à 
        François-Régis la croix de la Légion d'Honneur, avec 
        la mention suivante
 -----"De 
        Martrin Donos, en religion François -Régis, prêtre 
        directeur de la Trappe de Staouëli, a puissamment contribué, 
        depuis 1843 au développement de la Colonie Algérienne par 
        la fondation d'un établissement agricole, considéré 
        à juste titre comme un modèle. "
 -----"Jamais récompense ne fut 
        aussi noblement méritée. "
 -----La Trappe de Staouëli rendit, sous 
        forme d'une large contribution d'assistance, les avances et les subsides 
        grâce auxquels elle avait pu franchir le cap des heures inquiétantes 
        de la création.
 -----Les revenus du domaine étaient 
        élevés et répandaient le bien-être partout. 
        Ils alimentaient largement les oeuvres secourables. Ils contribuaient 
        à créer des écoles, à construire des églises 
        ; ils dotaient avec largesses la Maison Mère d'Aiguebelle et les 
        hôpitaux d'Alger. Les communes environnantes de Zéralda, 
        Guyotville, Ouled Fayet, Mahelma et Douaouda, leur sont redevables de 
        leurs premiers édifices communaux.
 -----L'importance sociale et religieuse des 
        Trappistes ne doit pas être masquée par leur succès 
        de colons ; le Supérieur de la Trappe accompagnera en 1853 la colonne 
        de pacification des BABORS commandée par le Général 
        RANDON, et c'est lui qui célèbrera la messe au camp de l'OUED 
        AGRIOUN le 14 juin, jour anniversaire de Marengo, de Friedland et du débarquement 
        de Sidi-Ferruch.
 -----C'est à la Trappe que le général 
        YOUSOUF, converti au christianisme en 1845, vient faire sa première 
        communion, alors qu'il commande la Division d'ALGER.
 -----En 1865, lors de son voyage en Algérie, 
        NAPOLEON III viendra à la Trappe. Le défrichement a bien 
        avancé, cinq cents hectares sont en culture, cent autres vont être 
        ensemencés à l'automne. De très nombreux arbres - 
        orangers et autres fruitiers, essences forestières - avaient été 
        plantés ainsi que 50 hectares de vigne. Tous les ateliers nécessaires 
        à l'autonomie presque complète de l'exploitation étaient 
        créés et les bâtiments - y compris deux caves pour 
        le vin - étaient terminés.
 -----Les officiers de la suite de l'Empereur 
        furent étonnés de trouver parmi les moines un certain nombre 
        de leurs anciens subordonnés ; les mémoires disent même 
        que parmi les frères trappistes qui assistèrent à 
        la pose de la première pierre en 1843, figurait un ancien soldat 
        du 26° de Ligne qui avait participé, sur les mêmes lieux 
        où s'élevait le couvent, à la bataille de Staouëli.
 -----C'est en quête de nouveaux perfectionnements 
        à apporter à l'exploitation agricole qu'il avait pour ainsi 
        dire pétrie de ses mains, que le 13 mai 1880, François-Régis 
        fut arrêté par la mort et prit le chemin de l'éternel 
        repos.
 -----Le fondateur disparu, ses successeurs 
        n'eurent ni le goût aussi vif, ni l'application aussi constante, 
        ni la foi aussi entière qui, pendant trente-sept années 
        avaient animé une entreprise magistralement conduite au succès.
 -----Ils prirent possession de ce lourd héritage 
        dont le degré de fortune foncière et l'importance des réserves 
        financières étaient tels qu'ils considérèrent 
        superflu d'y ajouter un complément de revenus. Ce fut une erreur.
 -----La loi fondamentale de l'Algérie 
        réside dans sa rapide évolution. Elle fut méconnue 
        des nouveaux exploitants et le vieux dicton d'après lequel "qui 
        n'avance pas recule" trouva à la Trappe de Staouëli sa 
        déplorable justification.
 -----D'année en année le domaine 
        donna des signes de faiblesse. Le matériel vieillissait, l'usure 
        ou l'ancienneté le rendait moins apte aux travaux. L'entretien 
        n'était pas assuré. La cave et la distillerie se ressentaient 
        de l'absence de ces précautions méticuleuses qui sont les 
        garanties nécessaires de leurs travaux.
 -----Néanmoins, le domaine ne s'en 
        allait pas à la dérive, il était trop solidement 
        construit pour ne pas résister à un défaut de soins 
        ou à des pratiques périmées, mais on sentait qu'il 
        se désarmait contre les crises agricoles possibles et les coups 
        de l'adversité toujours à craindre.
 -----Cette impression devait malheureusement 
        se réaliser. De 1895 à 1902 des orages s'amoncelèrent 
        à l'horizon économique et politique. Ils éclatèrent 
        comme une calamité, la crise agricole provoqua un désastre 
        dans le monde de la viticulture. Presque simultanément les Congrégations 
        religieuses eurent à souffrir d'une législation forgée 
        contre leurs voeux. La plus vive inquiétude s'installa au monastère 
        de Staouëli, suivie de son cortège de maux et d'angoisses. 
        Comment n'aurait-il pas eu à en redouter les suites puisqu'il était 
        à la fois viticole et foyer de la religion !
 -----Par ailleurs le domaine couvrait mal 
        ses frais et les réserves entamées s'épuisaient. 
        Longtemps comprimés, les besoins se faisaient plus impérieux. 
        L'emprunt hypothécaire s'imposa. Les lois de séparation 
        des églises et de l'état achevèrent de détruire 
        la confiance des religieux. Au surplus, la dureté des temps leur 
        mesurait avec une aigre parcimonie leurs moyens d'action.
 -----La Société Civile de Staouëli 
        s'estimant impuissante à surmonter de pareils obstacles décida 
        d'aliéner le domaine conquis sur la brousse, arraché à 
        la fièvre et transformé en un magnifique champ de richesse 
        agricole par la volonté ardente et l'âme inspirée 
        de son prieur François-Régis.
 -----Spectacle douloureux que celui du départ, 
        en 1904, des Trappistes, abandonnant à la fois un joyau de la colonisation 
        française et la contrée où tant de témoins 
        de leur prodigue et charitable bienfaisance, inclinaient, sur leur passage, 
        d'indicibles regrets et l'hommage d'une impérissable reconnaissance.
 -----Ils reviendront en Algérie après 
        1920 et s'installèrent à TIBARINE, près de LODI.
 (A suivre) -----Madiana 
        DELAYE Adh. N° 184 Maurice BEL Adh. N° 38
 -----Sources 
        : Cet article a été réalisé à partir 
        d'un opuscule sur la TRAPPE de STAOUELI datant "des années 
        50" et d'un extrait de la Revue "Feux" de l'association 
        des anciens de la St Do d'Alger (2° trimestre 1990) rédigé 
        par Maurice BEL.-----N.D.L.R.du GAMT : On a eu souvent tendance 
        à confondre les Pères Blancs et les moines Trappistes. Certes 
        ces 2 ordres étaient vêtus de blanc, mais alors que les seconds 
        avaient le capuchon des moines, les premiers portaient la chechia et étaient 
        des missionnaires. Chargés d'évangéliser l'Afrique 
        du Nord et la Kabylie en particulier, ils étudiaient la langue 
        arabe et la langue berbère. L'un d'eux le Père Jean-Marie 
        DALLET a rédigé le dictionnaire Kabyle - français 
        qui fait référence. En acceptant le serment qui liait les 
        premiers Pères et Frères à leur "petite société" 
        le cardinal LAVIGERIE, leur fondateur avait l'habitude d'ajouter de sa 
        main : "Bon pour le martyre".
 -----Nous nous inclinons respectueusement 
        devant leur sacrifice, en particulier celui des 4 Pères assassinés 
        le 27 Octobre dernier à Tizi-Ouzou.'
 
 
 
 
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