| ------Vous les connaissez 
        tous. Dans les milieux de la chasse sous-marine on les appelait familièrement, 
        mais respectueusement, les "caïds", les "fabricants 
        de mérous", ceux qui auraient sorti une "barrique" 
        des eaux de l'Harrach ou de la Macta, voire même des bassins de 
        la Place de la Concorde, s'ils avaient été à Paris 
        !...------Leurs noms ? Médina, Caya, Diaz, 
        Dessault, Valentin, Lamure, Almanza, Oliva, Escoda, Triay, Peretti, Lacombe, 
        tous ceux qui ont parté aux quatre coins du monde, la renommée 
        et le courage des chasseurs sous-marins Pieds-Noirs.
 ------C'est avec ces champions que nous avons 
        évoqué les souvenirs merveilleux de leurs sorties. Les photos 
        étalées sur le bureau, c'était à qui se remémorerait 
        les détails de telle ou telle expédition : "Tu te rappelles, 
        là, c'était lors des championnats d'Algérie, en 60, 
        à Bône. Et là, c'était au habibas, avec Dessault 
        et Triay...". Ah ! cette virée aux Habibas... Pendant quarante-huit 
        heures l'équipe de fer Dessault, Lacombe, Triay, écuma les 
        eaux oranaises. Et, ce n'est pas sans un frisson sous les écailles 
        que les mérous des Andalouses à Bou-Zadjar se souviennent 
        de cette mémorable aventure, dont parla toute l'Algérie 
        sous-marine.
 ------Les débuts de la chasse se situent 
        aux environs des années 1932-1935. Cela commença avec une 
        lunette sous-marine "bricolée" faisant eau à chaque 
        plongée. L'armement était plus que modeste : une tige métallique 
        (ou de bois) terminée par un trident ou "fouëne" 
        propulsion par détente du bras. le respirateur fit son apparaition 
        aussitôt après. En 1935 le chasseur troqua son harpon à 
        main pour un fusil projetant un harpon à l'aide d'un ressort ou 
        de lanières de caoutchouc.
 ------C'est pendant cette période 
        primaire que je fis mes toutes premières armes avec Gabby Peretti 
        d'Arzew (Otan). Il fut et restera pour moi un excellent équipier: 
        fouineur, tireur de grande classe et le plus grand capteur de cigales 
        que je connaisse.
 ------Certes, à l'époque, les 
        chasseurs n'étaient pas légion. Mais s'il n'y avait pas 
        la quantité, il y avait la qualité, tous étaient 
        de fines lames : Caruana avait une solide réputation de " 
        tueur "qui avait franchi la Méditerranée. Le " 
        vieux Jo" accumulait ses chapelets de Bars, loups et daurades et 
        il n'a pas encore pris sa retraite.
 |  | ------En ce temps-à 
        les histoires les plus fantastiques concernant de prétendus monstres 
        n'étaient pas faites pour vulgariser ce nouveau sport. II faut 
        avouer que les pionniers d'alors entretenaient quelque peu ce climat craignant 
        (déjà) la concurrence.-------Aussi, durant de longues années, 
        la chasse demeura-t-elle inconnue du public pour qui les chasseurs n'étaient 
        que des "fous plongeants". Elle fut révélée 
        et vulgarisée grâce aux films sous-marins réalisés 
        par le Commandant Cousteau et Frédéric Dumas. Clubs, compétitions, 
        livres et conférences contribuèrent à sa diffusion.
 -------En ce qui concerne l'Algérois, 
        qu'il me soit permis d'ajouter que mon vieil ami Freddy Tondeur, chasseur 
        et plongeur intrépide fut - ainsi que le Dr William Goeau-Brissonnière 
        - à l'origine du grand essor pris par ce merveilleux sport, dans 
        les trois départements français d'alors : Oran, Alger, Constantine.
 -------Les cracks furent nombreux chez nous, 
        au point qu'il est difficile de pouvoir très nettement désigner 
        les meilleurs. Chacun se souviendra de la renommée mondiale du 
        " Club des Chasseurs sous-marins d'Alger ", avec ses deux vedettes 
        Caïa et Diaz. L'un champion du monde de chasse sous-marine, l'autre 
        recordman de plongée avec 35 mètres. Ma joie (car j'étais 
        leur manager et président du club cité) fut de courte durée. 
        Mon club fut gagné par un mal insidieux et tenace : la championnite. 
        Je me suis alors effacé de l' arêne subaquatique... Un jeune 
        chasseur, cependant, montait à toutes palmes et de harpons, j'ai 
        nommé René Lacombe. Plongeur infatiguable, tireur d'élite, 
        c'était un véritable " radar à poissons ". 
        Je le destinais aux grandes compétitions. Malheureusement, à 
        mon départ, il s'éclipsa également. C'est lui qui 
        avait fignolé et mis au point la " bombe " Dessault qui 
        sera champion du monde.
 Jean Medina
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