Mgr Lavigerie 
          le " premier colon d'Algérie " 
          par Paul Birebent
        
          
            |  Mgr 
                Lavigerie en 1867, 
                in Un géant de l'apostolat, par 
                le père Cussac des Pères 
                Blancs.
 | 
        
         
          
          Archevêque d'Alger depuis 1867, élevé à la 
          dignité de cardinal par le pape Léon XIII en 1882, Mgr 
          Lavigerie ne devait jamais se remettre de ce qui, pour ses contemporains 
          et les historiens, allait devenir l'affaire du " toast d'Alger 
          " (Voir aussi l'algérianiste 
          n° 55 de septembre 1991.)
          
          Dans les premiers jours du mois de novembre 1890, l'escadre française 
          de Méditerranée, commandée par le vice-amiral Duperré 
          ( Descendant de l'amiral commandant 
          la flotte lors de l'expédition de 1830. ) jetait l'ancre 
          en rade de la ville. Depuis longtemps de grandes festivités étaient 
          prévues pour célébrer l'événement. 
          En l'absence du gouverneur général Tirman, il revenait 
          à l'archevêque d'Alger, second personnage dans la hiérarchie 
          algérienne, d'accueillir les officiers de la Flotte.
          
          Le mercredi 12 novembre, Mgr Lavigerie recevait avec faste, dans sa 
          résidence archiépiscopale de Saint-Eugène, l'état-major 
          de l'escadre et les plus hautes autorités civiles et militaires 
          de la capitale algérienne. A la fin du banquet, l'archevêque 
          prononçait une courte allocution: " Permettez-moi avant 
          de nous séparer, de boire à la Marine française 
          si noblement représentée aujourd'hui au milieu de nous... 
          " et il poursuivait sur un tout autre registre: " Plaise 
          à Dieu que le même spectacle se reproduise dans notre France 
          et que l'union qui se montre ainsi parmi nous, en présence de 
          l'étranger qui nous entoure, règne bientôt entre 
          tous les fils de la Mère patrie. L'union en présence de 
          ce passé qui saigne encore, de l'avenir qui menace toujours, 
          est en ce moment, en effet, notre besoin suprême. L'union de tous 
          les bons citoyens est aussi, laissez-moi vous le dire, le premier voeu 
          de l'Eglise et de ses Pasteurs, à tous les degrés de la 
          hiérarchie. Quand la volonté d'un peuple s'est nettement 
          affirmée, que la forme du gouvernement n'a en soi rien de contraire... 
          aux principes, qui, seuls peuvent faire vivre les nations chrétiennes 
          et civilisées lorsqu'il n'y a plus, pour arracher son pays aux 
          abîmes qui le menacent, que l'adhésion sans arrière-pensée 
          à la forme du gouvernement, le moment vient de déclarer 
          enfin l'épreuve faite... et de sacrifier tout ce que la conscience 
          et l'homme permettent, ordonnent à chacun de nous de sacrifier 
          pour le salut de la Patrie... En dehors de cette acceptation patriotique, 
          rien n'est possible, en effet, ni pour conserver l'ordre et la paix, 
          ni pour sauver le monde du péril social, ni pour sauver le culte 
          même dont nous sommes les ministres. Ce serait folie que d'espérer 
          soutenir les colonnes d'un édifice sans entrer dans l'édifice 
          lui-même pour empêcher ceux qui voudraient tout détruire, 
          d'accomplir leur oeuvre... Messieurs à la Marine Française 
          " (Le cardinal Lavigerie et son 
          action politique, J. Tournier, 1913.3).
          
          Cette allocution qui demandait à l'ensemble du peuple de France 
          et, en particulier aux catholiques, de se rallier sans arrière 
          pensée au gouvernement de la République provoquait dans 
          l'assistance une profonde émotion. Les officiers se levaient 
          pour ovationner le cardinal, mais devant l'attitude contrariée 
          et réprobatrice de leur amiral se rasseyaient.
        
           
            |  La salle du toast, à l'archevêché de Saint-Eugène.
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          Au départ des autorités, les élèves du collège 
          de Saint-Eugène entonnaient " La Marseillaise 
          ", chant séditieux et inacceptable pour les ultras catholiques 
          qui s'en emparaient aussitôt pour dénoncer les propos de 
          l'archevêque. Les journaux métropolitains, avec virulence 
          s'en prenaient au " toast d'Alger " et à leur auteur, 
          l'accusant d'ingérence politique, de trahison, de capitulation. 
          L'" affaire " prenait une extension considérable, atteignait 
          l'Italie pontificale et sapait l'énergie de l'archevêque 
          jusqu'à l'épuisement total et à sa mort deux ans 
          plus tard.
          
          Charles-Martial Allemand Lavigerie est né à Bayonne en 
          1825. Il était l'aîné des trois enfants d'un père 
          contrôleur des douanes, autoritaire et ambi 
          tieux, et d'une mère discrète et cultivée. Attiré 
          très jeune par la religion, Charles Lavigerie débutait 
          au petit séminaire de Larressore au pied des Pyrénées, 
          et poursuivait ses études à celui de Paris avant d'achever 
          ses " humanités " à Saint-Nicolas-du-Chardonnet. 
          En 1843 il intégrait Saint Sulpice puis l'école des Carmes 
          pour apprendre la philosophie scolastique et la théologie et 
          se préparer aux grades académiques. En juin 1849 il était 
          ordonné prêtre, et se perfectionnait à la Sorbonne 
          où il passait avec succès deux thèses de doctorat. 
          Entré dans la vie active comme aumônier chez les Bénédictines, 
          puis les Augustines et enfin les Carmélites, il faisait la connaissance 
          de Mgr Dupuch le premier évêque d'Alger et de son successeur 
          Mgr Pavy, venus à Paris prêcher pour leurs oeuvres d'Afrique.
          
          En 1857, nommé docteur en théologie, il obtenait à 
          la Sorbonne la chaire d'histoire ecclésiastique. Il découvrait 
          en parallèle l'influence française et catholique en Orient 
          et prenait la tête d'une fondation dont le but était, par 
          l'intermédiaire des écoles, de développer le rayonnement 
          de son pays.
          
          En 1859 et en 1860 après les massacres des chrétiens du 
          Liban et de Syrie par les Turcs et les Druzes, il se rendait sur place 
          et constatait " le rôle bienfaisant de la France et de 
          l'Eglise dans toutes les Echelles de la Méditerranée 
          " ( La fabuleuse épopée 
          de l'Afrique française, H. Servien, 1991.). Il sentait 
          alors naître en lui le désir profond de consacrer sa vie 
          au développement de cette oeuvre civilisatrice et avouait: " 
          J'ai trouvé mon chemin de Damas " ( 
          La fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. 
          cit.). Il collectait, en lançant un appel au clergé 
          et aux catholiques, des secours qu'il allait distribuer lui-même 
          en Orient. A son retour, reçu par le gouvernement, il évoquait 
          la nécessité pour le Liban d'être placé sous 
          le protectorat de la France.
          
          En 1861 l'abbé Lavigerie était nommé prélat 
          de la Maison de Sa Sainteté Pie IX au Vatican. Un séjour 
          de près de deux ans à Rome lui permettait de s'initier 
          aux subtilités des Affaires étrangères auprès 
          des Congrégations romaines, aux rapports entre l'Eglise et l'Etat, 
          et de mesurer l'ampleur des tentatives des partis politiques pour imposer 
          leurs vues à la Papauté.
          
          En 1863, appelé à l'évêché de Nancy, 
          l'abbé Lavigerie devenait le plus jeune évêque de 
          France. Trois ans plus tard, après le décès de 
          Mgr Pavy, évêque d'Alger, le maréchal de Mac Mahon, 
          gouverneur général de l'Algérie, se préoccupait 
          de lui trouver un successeur.
          
          
        Il prenait contact avec Mgr Lavigerie 
          et lui proposait de le faire nommer à Alger qui venait d'être 
          élevé au rang d'archevêché ( En 
          même temps qu'étaient créés le 16 novembre 
          1866 les évêchés d'Oran et de Constantine.). 
          Le gouverneur général ne tenait pas compte des réserves 
          de prudence de l'empereur Napoléon III, qui jugeait le jeune 
          évêque trop vif et trop impulsif pour intervenir dans un 
          pays neuf, où les questions religieuses devaient être abordées 
          avec beaucoup de prudence.
          
          En rejoignant son affectation, le 16 mai 1867, Mgr Lavigerie apportait 
          avec lui des sentiments de paix et de tolérance mais aussi une 
          volonté affichée d'évangélisation des populations 
          africaines, aussi bien blanches que noires. Alger était son premier 
          pas vers le reste du continent. Il savait que sa détermination 
          allait heurter les tenants du régime établi dans la colonie 
          quand, dès son arrivée, il confiait à un évêque 
          de ses amis : " L'Algérie n'est qu'une porte ouverte 
          par la Providence sur un continent barbare de deux cents millions d'âmes. 
          C'est là surtout qu'il faut porter l'oeuvre de l'apostolat catholique... 
          Voilà la grande perspective qui m'attire " (La 
          fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. cit.).
          
          Dans l'Algérie qu'il découvrait, régnait depuis 
          la conquête le " régime du sabre ". La seule 
          idée colonisatrice était celle du " royaume arabe 
          " et sa place dans l'Empire français. D'un côté 
          les colons, de l'autre les indigènes et entre eux un seul contact: 
          les " bureaux arabes ". Le nouvel évêque ne pouvait 
          accepter cet état de choses. Il rendait hommage aux colons, à 
          leur travail, à leur courage et les incitait à se regrouper, 
          à participer à la vie publique, à supplanter la 
          toute puissance des militaires. Il demandait aux prêtres, peu 
          nombreux, d'apprendre la langue locale, ce qui leur était interdit 
          par l'administration, de tendre la main aux Arabes, de les approcher. 
          Il interpellait le gouvernement au travers de la commission du budget 
          afin que les Français de l'Algérie soient représentés 
          au Parlement, et préparait la constitution d'une délégation 
          qui, sous la conduite du " gant jaune " Dupré de Saint 
          Maur, devait se rendre à Paris l'année suivante.
          
          Dans l'immédiat le nouvel archevêque se voyait confronté 
          à une situation désastreuse d'une très grande actualité 
          et qui nécessitait des réponses d'urgence que le Gouvernement 
          général n'apportait pas.
          
          L'année précédant son arrivée avait été 
          marquée par une sécheresse inhabituelle, accompagnée 
          d'une invasion de sauterelles qui avaient anéanti les récoltes. 
          Elles avaient provoqué une immense famine et entraîné 
          un mortel exode des populations indigènes à travers le 
          pays. Le choléra et après lui le typhus avaient frappé 
          à leur tour, en causant une effroyable mortalité. Informé 
          par les prêtres des petits villages: " En interminables 
          théories des êtres hallucinants, décharnés, 
          loqueteux, se traînaient sur les routes et dans les rues, beaucoup 
          tombaient et ne se relevaient plus " (L'Algérie, 
          l'oeuvre française, P. Goinard, 1984.), Mgr Lavigerie 
          qui avait déclaré vouloir " faire de la terre 
          algérienne le berceau d'une nation grande, généreuse, 
          chrétienne, d'une autre France en un mot, répandre autour 
          de nous les vraies lumières d'une civilisation dont l'Evangile 
          est la source et la loi... " (La 
          fabuleuse épopée de l'Afrique française, ouvrage 
          cité.), réagissait aussitôt: " Il 
          recueillit tous les squelettes vivants qui erraient aux carrefours des 
          routes "( Le cardinal Lavigerie, 
          op. cit.).
          
          Il les hébergeait à l'archevêché, au séminaire, 
          dans des cours, sous des tentes. Les religieuses les nourrissaient et 
          les soignaient. Un orphelinat était ouvert à Ben Aknoun 
          sur les hauteurs d'Alger, où étaient accueillis près 
          de 2000 orphelins.
        
           
            |  
                 Bâtiment central de l'orphelinat de Ben-Aknoun, à 
                  El-Biar,
 dirigé par les Frères des Écoles chrétiennes.
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          Pour obtenir des fonds que le gouvernement ne lui accordait pas, l'archevêque 
          se rendait en France et sollicitait le concours des journaux catholiques. 
          Il en appelait aux évêques et aux oeuvres de bienfaisance. 
          Son appel de détresse connaissait un immense retentissement. 
          Les députés votaient des subventions et les dons privés 
          affluaient. Cela ne suffisait pas. Quand des orphelins disparaissaient 
          emportés par les fièvres et les épidémies, 
          d'autres prenaient leur place, plus nombreux encore. Dans son argumentaire 
          pour obtenir des ressources et des secours en faveur de ses déshérités, 
          Mgr Lavigerie, dénonçait la duplicité des autorités 
          qui lui refusaient leur soutien mais qui favorisaient la construction 
          de mosquées, accordaient des subventions aux écoles coraniques, 
          soutenaient l'enseignement du Coran chez les Berbères de Kabylie 
          qui ne l'avaient jamais pratiqué, et finançaient, sur 
          deniers publics, des pèlerinages à La Mecque. Pour justifier 
          son attitude il critiquait la conduite de la politique officielle du 
          " royaume arabe " voulue par Napoléon III, qui empêchait 
          l'assimilation des indigènes en les éloignant des Européens. 
          Il allait plus loin encore en accusant les bureaux arabes de freiner 
          la pacification, de cacher à l'opinion l'état réel 
          de l'Algérie et de favoriser les insurrections afin de justifier 
          leur raison d'être.
          
        
           
            |  Notre Dame d'Afrique
 | 
        
        Dans les derniers mois de 1867, les 
          colons de Maison-Carrée organisaient une manifestation religieuse, 
          où devaient être bénies de toutes nouvelles charrues 
          défonceuses à vapeur. L'archevêque d'Alger prenait 
          la parole en présence des autorités dont le gouverneur 
          général, le maréchal de Mac Mahon : " ...Depuis 
          que je vous vois, que j'étudie ce pays que vous avez fait ce 
          qu'il est, les uns par leur épée, les autres par leurs 
          bras, tous par leur coeur, je ne forme pour lui que trois voeux: à 
          la France, je demande pour l'Algérie des libertés plus 
          larges, des libertés civiles, religieuses, agricoles, commerciales 
          qui nous manquent encore. A vous, je vous demande l'esprit d'initiative, 
          de libre association pour toutes les branches ouvertes à votre 
          activité, pour tout ce qui est utile, fécond, chrètien. 
          A Dieu... je demande de vous bénir en proportion de vos efforts 
          et de votre courage, et de vous préparer parmi les nations une 
          place d'autant plus glorieuse que vous aurez vous-même mieux répondu 
          aux bénédictions d'en haut " ( 
          Le cardinal Lavigerie, op. cit.).
          
          Les fonctionnaires étaient atterrés tandis que les colons 
          acclamaient leur jeune archevêque. En critiquant la politique 
          suivie en Algérie, en défendant la cause des colons, Mgr 
          Lavigerie s'attaquait directement au gouverneur général. 
          Le " royaume arabe " inspiré par Ismaël Urbain 
          était basé sur la conception d'un islam modernisé 
          mais sans aucun rapprochement des deux communautés. Elles vivaient 
          sur le même sol, sans partage de valeurs spirituelles, avec d'un 
          côté les colons français et de l'autre les Arabes 
          qui conservaient la pratique de leur religion et leurs coutumes ancestrales. 
          Mgr Lavigerie ne pouvait accepter que les aumôniers militaires, 
          trop peu nombreux, n'aient pour mission que d'assister les catholiques 
          et que l'approche des musulmans leur soit interdite. Il condamnait avec 
          force l'excès de zèle des militaires qui allaient jusqu'à 
          mettre des plantons armés à la porte des églises 
          afin d'en interdire l'entrée aux musulmans.
          
        
          
          Dans les derniers mois de l'année 1868 et après la fin 
          des épidémies, l'archevêque d'Alger était 
          sommé par le maréchal de Mac Mahon de renvoyer ses orphelins 
          dans leurs tribus d'origine quand ils y avaient encore des membres de 
          leurs familles. Mgr Lavigerie refusait, ces enfants étaient les 
          siens, il les avait sauvés alors que le gouvernement s'en désintéressait. 
          Ils étaient baptisés, instruits et initiés aux 
          travaux des champs. Il en profitait pour exprimer clairement sa vision 
          missionnaire en Algérie: " Il faut christianiser ces 
          orphelins et leur donner un métier, le salut de notre présence 
          en dépend. Leur salut éternel également " 
          (La fabuleuse épopée 
          de l'Afrique française, ouvrage cité.), et 
          il se déclarait prêt à apporter son concours à 
          toute politique qui réduirait l'organisation tribale et la forme 
          figée de la société indigène. De son côté 
          le gouverneur général accusait l'archevêque de s'occuper 
          d'affaires qui n'étaient pas de son ressort et Napoléon 
          III lui-même intervenait: " Vous avez une grande tâche 
          à accomplir, celle de moraliser les 200000 catholiques qui sont 
          en Algérie. Quant aux Arabes laissez au gouverneur général 
          le soin de les discipliner et de les habituer à notre domination 
          " ( Le cardinal Lavigerie, 
          op. cit.). 
        
           
            |  Monastère 
                des Missions Africaines.(à 
                Maison Carrée)
 
 | 
        
        L'écho de ce conflit avait traversé 
          la mer et agitait l'opinion publique. En Algérie, toute la population 
          soutenait son archevêque et le Pape à Rome lui apportait 
          son appui. Mgr Lavigerie se rendait à Paris, puis à Biarritz 
          où il rencontrait l'Empereur auprès duquel il se plaignait: 
          " La croix est humiliée par le croissant ". Quelque 
          temps plus tard, de retour à Alger, il recevait une lettre de 
          Napoléon III: " Croyez, Monseigneur, que le gouvernement 
          n'a jamais eu l'intention de restreindre vos droits d'évêque, 
          et que toute latitude vous sera laissée pour étendre et 
          améliorer les asiles, où vous aimiez à prodiguer 
          aux enfants abandonnés, aux veuves et aux vieillards, les secours 
          de la charité chrétienne "( 
          Le cardinal Lavigerie, op. cit.). Mgr Lavigerie se rendait 
          alors à Rome où Pie IX l'encourageait à créer 
          une mission catholique au Sahara et le nommait délégué 
          apostolique, du désert au Soudan.
          
          Conforté dans sa vocation d'évangélisation, l'archevêque 
          s'en prenait alors directement à la conception de la colonisation 
          de l'Algérie et à la mise à l'écart de ses 
          habitants naturels: " Il faut relever ce peuple, il faut renoncer 
          aux erreurs du passé, il faut cesser de le parquer dans le Coran 
          comme on l'a fait trop longtemps, par tous les moyens possibles. Il 
          faut lui inspirer, dans ses enfants du moins, d'autres sentiments, d'autres 
          principes. Il faut que la France lui donne, je me trompe, lui laisse 
          donner l'Evangile, ou qu'elle le chasse dans les déserts, loin 
          du monde civilisé " ( 
          Le cardinal Lavigerie, op. cit.).).
          
          Cette déclaration largement reprise par la presse et, mal interprétée 
          par le gouvernement général, était considérée 
          comme une déclaration de guerre. L'opinion publique comprenait 
          les subtilités de la pensée de l'archevêque qui, 
          bien entendu, n'envisageait pas le refoulement des Arabes mais la seule 
          nécessité de leur christianisation pour en faire des Français.
          
          Cette idée d'assimilation remettait en cause la politique du 
          royaume arabe qui " cantonnait " les indigènes sur 
          leurs terres collectives, tribales et religieuses. Elle préconisait 
          l'abandon de " l'indivision forcée et du communisme de 
          la tribu et de la famille " ( 
          Histoire de l'Algérie contemporaine, Ch. R. Ageron.).
          
          Elle ouvrait pour les colons des perspectives nouvelles, telles que 
          des possibilités d'extension ou d'installation qui, jusqu'alors, 
          leur avaient été refusées. L'individualisation 
          de la propriété permettait en effet aux Arabes de céder 
          à la tentation de l'argent. Telle n'était pas la pensée 
          de l'archevêque qui n'avait fait cette déclaration que 
          pour apporter son concours à toute politique qui désagrègerait 
          la structure tribale renfermée, et les formes traditionnelles 
          figées de la société indigène. Comme l'écrivait 
          le journal algérois l'Akhbar, Mgr Lavigerie devenait " le 
          premier colon d'Algérie ".
          
          Beaucoup de choses avaient été faites depuis son arrivée, 
          d'autres étaient en cours ou en projet. L'archevêque faisait 
          poursuivre la construction de la basilique de Notre-Dame d'Afrique, 
          commencée par Mgr Pavy en 1858 (17). En 1868, il fondait l'ordre 
          des Pères Blancs pour répondre à son désir 
          secret d'évangélisation de l'Afrique. L'année suivante 
          il créait l'ordre des Soeurs Blanches de Notre-Dame d'Afrique 
          afin que soient approchées sans heurts les femmes de la société 
          musulmane. Il ouvrait aussi à Maison-Carrée le monastère 
          des Missions Africaines qui regroupait à la fois ses orphelins, 
          ses missionnaires et ses séminaristes, et un second orphelinat 
          à Saint-Charles de 
          Kouba, près d'Alger. Toujours animé par son 
          zèle à vouloir " ramener les Berbères à 
          notre civilisation qui était celle de leurs pères " 
          et à vouloir les tirer de " leur paresse et de leur fatalisme 
          " ( Histoire de l'Algérie 
          contemporaine, ouvrage cité.), il s'efforçait 
          de lier leur cause à celle des colons français et à 
          la dissocier de celle des Arabes.
          Soutenu par le maréchal Niel, ministre de la Guerre, qui l'autorisait 
          à fonder des établissements de charité là 
          où les populations le demandaient, il envoyait ses prêtres 
          quêter en Europe et au Canada, afin de pouvoir établir 
          des missions en Kabylie: " La France nous a établis sur 
          cette terre d'Afrique pour une fois de plus nous faire les missionnaires 
          de la foi chrétienne " ( La 
          fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. cit.). 
          Ainsi commençait à prendre forme son projet d'évangélisation 
          de l'Afrique par le Sahara.
          
          Ayant perçu en Algérie même le ralliement à 
          sa personne d'une grande partie de la communauté européenne, 
          favorable à la diminution, voire à la disparition des 
          bureaux arabes, Mgr Lavigerie multipliait les cérémonies 
          religieuses : offices solennels, processions, bénédictions, 
          grandes fêtes chrétiennes. La foule y était nombreuse 
          et fidèle. Des musulmans, des israélites de plus en plus 
          souvent s'y mêlaient. La presse commentait les cérémonies. 
          De vieux Algérois s'exprimaient: " Dieu est grand, et 
          l'archevêque est son prophète " ( La 
          fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. cit.).
          
          En 1869, s'ouvrait à Rome le concile du Vatican qui devait se 
          prononcer sur le dogme de l'infaillibilité du Pape. Elle était 
          votée en 1870 alors que les Prussiens envahissaient la France. 
          L'archevêque regagnait Alger et se mettait à la disposition 
          de son pays. Il proposait de faire fondre les cloches de sa cathédrale 
          et des églises d'Algérie pour couler des canons. Trop 
          vite le Second Empire s'effondrait et la Ille République lui 
          succédait. Les élections de 1871 donnaient la majorité 
          aux monarchistes et aux modérés, mais l'insurrection de 
          la Commune annonçait la guerre civile.
          
          En Algérie, Mgr Lavigerie, malgré les troubles qui agitaient 
          les grandes villes de la côte, s'efforçait de reprendre 
          avec plus de force et avec l'appui du vice-amiral de Gueydon, nouveau 
          gouverneur général, sa politique de conversion des Kabyles.
          
          Par le même temps la publication du décret " Crémieux 
          " ( 24 octobre 1871.) 
          qui naturalisait en bloc les israélites du pays, poussait à 
          la dissidence le bachaga El Mokrani qui soulevait la Kabylie en proclamant: 
          " Je consens à obéir à un soldat, je n'obéirai 
          jamais à un juif ni à un marchand " 1 
          La fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. 
          cit). Bientôt la révolte se transformait en 
          guerre sainte et les tribus montagnardes, entre Alger et Collo se soulevaient, 
          attaquaient les villages et massacraient les colons.
          
          Pour Mgr Lavigerie la faute en incombait à l'obstination de l'administration 
          et des bureaux arabes à favoriser l'islam : " Nous avons 
          fondé avec l'argent de la France des écoles musulmanes, 
          on a interdit à nos prêtres la prédication de l'Evangile, 
          à nos soeurs l'exercice même de la charité. Eh bien, 
          voici que ce fanatisme protégé, fomenté par nous, 
          éclate maintenant au grand jour dans l'incendie des villages 
          et le massacre des populations " (La 
          fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. cit.).
          
          Aux incertitudes de l'Empire faisait suite une politique active de répression 
          de l'insurrection mais aussi de relance de la colonisation de peuplement 
          avec, en parallèle, un gros effort d'équipement. L'archevêque 
          d'Alger était parmi les premiers à proposer aux Alsaciens-Lorrains 
          qui avaient perdu leur province, de venir s'installer en Algérie. 
          Son appel était largement répercuté en France. 
          C'est ainsi qu'après les " mendiants " de la République 
          de 1848, les " transportés " de l'Empire en 1851, débarquaient 
          les " déracinés " d'Alsace et de Lorraine. Sous 
          les gouverneurs généraux, le vice-amiral de Gueydon et, 
          après lui le général Chanzy, le peuplement rural 
          de l'Algérie devenait l'idée massive de nouveaux immigrants, 
          catholiques pour la plupart, chassés une fois encore d'Europe 
          par la guerre et la misère. Pour répondre à leur 
          attente, l'administration mettait à leur disposition des lots 
          de colonisation provenant du séquestre des terres touchées 
          par la révolte, mais aussi de l'expropriation et d'achats à 
          l'amiable désormais possibles. De nouveaux centres étaient 
          créés, non seulement en Kabylie, mais encore dans la vallée 
          du Chélif, au pied de l'Ouarsenis, sur le plateau de Mascara 
          et dans la plaine de Bel-Abbès. Les militaires apportaient leur 
          concours pour les travaux d'infrastructure et Mgr Lavigerie envoyait 
          ses prêtres soutenir les volontés vacillantes et ses missionnaires 
          pour évangéliser les âmes.
          
          Toujours préoccupé par le sort de ses orphelins convertis, 
          grandis et devenus des " m'tournis ", des renégats, 
          aux yeux des Arabes, il achetait des terres et construisait deux villages, 
          Sainte-Monique et Saint-Cyprien des Attafs dans la vallée du 
          Chélif, et, l'année suivante, deux autres aux Ouadhias 
          et aux Arifs en Kabylie. Quelques maisons fort modestes construites 
          autour d'une église accueillaient de jeunes couples nouvellement 
          mariés, et d'autres, des Pères Blancs chargés de 
          l'approche prudente des tribus voisines, que l'archevêque considérait 
          toujours comme superfi-ciellement islamisées.
          
          Sa profession de foi devenait plus ardente: " Afrique chrétienne, 
          sors du tombeau ! Réunis tes débris épars sur tes 
          monts et dans tes déserts ! Reprends ta place au soleil des nations, 
          tes soeurs dans la civilisation et dans la foi ! Que tes enfants, apprenant 
          de nouveau ton histoire, sachent que nous ne venons à eux que 
          pour leur rendre la lumière, la grandeur, l'honneur du passé 
          " ( La fabuleuse épopée 
          de l'Afrique française, op. cit.).
          
          Il accompagnait dans les douars et les tribus, ses Jésuites et 
          ses Pères Blancs, vêtu comme eux d'une djellaba, d'un burnous 
          blanc, coiffé d'une chéchia et portant une longue barbe, 
          afin qu'ils deviennent " Africains avec les Africains ". Il 
          leur conseillait la prudence et leur demandait de pratiquer la charité, 
          de soigner les malades, de nourrir les affamés, d'instruire les 
          ignorants avant de tenter de les convertir.
          
          En 1873, malade et épuisé, contraint de prendre quelque 
          repos, il regagnait la France et partait en cure thermale à Carlsbad, 
          en Autriche. Dans un village proche, à Marienbad, il rencontrait 
          le comte de Chambord, prétendant au trône de France 4(Prétendant 
          légitimiste, sous le nom de Henri V, depuis l'abdication de Charles 
          X en 1830.). Royaliste sincère, Mgr Lavigerie s'efforçait 
          de le convaincre de reprendre le pouvoir. Sans y parvenir, le comte 
          ne voulant renoncer à aucune de ses exigences préalables, 
          notamment celle de rétablir le drapeau blanc.
          
          De retour en Algérie, 'l'archevêque d'Alger reprenait et 
          accélérait son oeuvre missionnaire vers l'Afrique et les 
          grands lacs. Il retrouvait contre lui le maréchal de Mac Mahon, 
          devenu président de la République, et qui ne lui avait 
          pas pardonné leurs divergences du temps du royaume arabe. Il 
          ne baissait cependant pas les bras et poursuivait son combat contre 
          l'accumulation de ses dettes et contre les obstacles que dressait devant 
          lui le gouvernement anticlérical des partis de gauche. " 
          Donnez-leur des hôpitaux et des écoles, c'est par là 
          que les Indigènes viendront à nous " ( 
          Histoire de l'Algérie contemporaine, op. cit.) disait-il 
          en présentant ses nombreux chantiers : écoles, séminaires, 
          hôpitaux non seulement en Algérie mais encore à 
          Carthage près de Tunis.
          
          En 1878 Léon XIII succédait au Pape Pie IX. En France 
          la population dans sa grande majorité était catholique 
          et royaliste, mais divisée entre légitimistes et orléanistes. 
          Elle souhaitait le retour de la monarchie et en appelait à l'Église 
          dont certains dignitaires, appuyés par la papauté, se 
          faisaient les porte-parole d'un parti royaliste qui, concrètement, 
          n'existait pas. Léon XIII pensait qu'un accord était indispensable 
          entre l'état républicain et les partis catholiques afin 
          d'éviter toute rupture. Il demandait donc aux fidèles 
          et aux évêques français de se préoccuper 
          de la seule pratique religieuse et d'abandonner le combat politique. 
          Le maréchal de Mac Mahon, toujours rancunier et qui durant son 
          mandat avait accumulé les obstacles devant les projets de Mgr 
          Lavigerie, démissionnait en 1879 en butte à l'hostilité 
          des républicains. Jules Grévy le remplaçait et 
          faisait voter une série de mesures anticléricales et en 
          particulier des lois sur la laïcité et la gratuité 
          de l'enseignement. C'était un rude coup porté aux oeuvres 
          de l'archevêque d'Alger qui envisageait dans un premier temps 
          de rejoindre le pape à Rome, et finalement résistait et 
          décidait de s'immiscer dans la politique française.
          
          Il n'en poursuivait pas moins son oeuvre pastorale en Afrique du Nord 
          avec toujours une foi et une volonté inébranlables. Après 
          avoir entrepris en 1881 la construction de la basilique Saint-Augustin 
          à Bône et obtenu peu après celle de Tunis, il était 
          élevé l'année suivante à la dignité 
          de cardinal.
          
          
        
           
            | 
  Basilique Saint-Augustin,(coll.Jarrige.)
 | 
        
        
          Il recevait, en 1884, le titre d'archevêque de Carthage et de 
          primat d'Afrique, tout en conservant par dérogation spéciale 
          l'archevêché d'Alger.
          
          Sa grande préoccupation devenait alors l'installation et la pérennité 
          de la présence française en Tunisie. Comme en Algérie 
          il multipliait les dispensaires et les écoles avec l'assentiment 
          des autorités tunisiennes sur lesquelles son influence était 
          très grande: " Sa présence à Tunis vaut 
          à la France une armée " ( 
          La fabuleuse épopée de l'Afrique française, op. 
          cit.). Le gouvernement français, ulcéré 
          par les honneurs adressés au primat d'Afrique, réagissait 
          en suspendant tous les crédits destinés à la pratique 
          du culte en Afrique. Mgr Lavigerie, vieilli et fatigué, reprenait 
          son bâton de pèlerin et parcourait une fois encore les 
          grandes villes de France comme un mendiant, implorant la charité 
          pour ses oeuvres. Le succès à nouveau était considérable, 
          relayé et amplifié par la presse catholique, des associations 
          de bienfaisance et des hommes politiques, obligeant le Pape à 
          intervenir: la popularité du cardinal devenait un affront pour 
          les gouvernants de la République française, avec lesquels 
          il souhaitait entretenir de bonnes relations. Mais Mgr Lavigerie, sur 
          un autre plan, celui de l'Evangélisation au " siècle 
          des Missions ", connaissait de sérieux revers (Le 
          " siècle des Missions " avait commencé au milieu 
          du )axE siècle avec René Caillé en 1827-1928, la 
          conquête de l'Algérie en 1830-1847, la pénétration 
          au Sénégal 1854-1965, puis en Afrique centrale et australe 
          1850-77, l'ouverture du canal de Suez 1869- etc.). Si son 
          ordre des Pères Blancs atteignait maintenant plus de 200 membres 
          et si ses séminaires recrutaient toujours, les missions envoyées 
          en Afrique étaient décimées par les assassinats 
          et les maladies. Le projet d'évangélisation du Sahara 
          piétinait, avec à son bilan de nombreux martyrs : le désert 
          demeurant un obstacle infranchissable. Malgré les difficultés, 
          politiques et financières, en dépit des persécutions, 
          et atteint lui-même par la maladie, le cardinal Lavigerie s'obstinait.
          
          Fin 1884 le Pape lui proposait de s'occuper de la lutte anti-esclavagiste, 
          qui, à cette époque concernait plus de 400000 esclaves 
          noirs. L'" ivoire noir " était " traité 
          " par des rabatteurs du centre du continent, au profit de négriers 
          arabes, vers des marchés essentiellement situés sur la 
          côte orientale. La traite d'Afrique était devenue un " 
          mal nécessaire " depuis la disparition de la piraterie et 
          des esclaves blancs en Méditerranée. Très informé, 
          Mgr Lavigerie écrivait au souverain pontife en 1888: " La 
          destruction de l'esclavage est le coup le plus terrible que l'on puisse 
          porter au mahométisme. La société musulmane telle 
          qu'elle est organisée, ne peut en effet vivre sans esclaves " 
          ( La fabuleuse épopée 
          de l'Afrique française, op. cit.) et il en témoignait 
          en présentant à Léon XIII des enfants noirs et 
          des enfants arabes que ses Pères Blancs avaient rachetés 
          et convertis.
          
          Avec toujours autant de vigueur malgré son âge, le primat 
          d'Afrique entreprenait la croisade qui lui était demandée 
          à travers l'Europe. Elle déclenchait une fois encore un 
          enthousiasme général et entraînait un peu partout 
          la formation de nombreux comités anti-esclavagistes. Une conférence 
          internationale, tenue à Bruxelles, s'efforçait de mettre 
          en place en Afrique, avec le concours des grandes nations européennes, 
          des postes de surveillance militaire sur les grands axes du trafic.
          
          Devant les obstacles soulevés pour la coordination et l'acheminement 
          des moyens, Mgr Lavigerie proposait la création d'un corps de 
          moines armés qui, par leur présence, ramèneraient 
          la sécurité ( Sur les 
          Frères armés du Sahara, voir l'algérianiste n° 
          116, décembre 2006, Mgr Hacquard... de J.- P. Duhard.). 
          Cette idée d'armer des civils, de surcroît religieux, déclenchait 
          une vague de protestations et d'opposition en Europe. Seule la France, 
          qui avait abrogé l'esclavage en 1848, militairement présente 
          au Dahomey depuis 1881, acceptait d'intervenir: la traite locale organisée 
          par Behanzin ( Dernier roi du royaume 
          d'Ahomey.) pesant trop lourdement sur l'économie du 
          Protectorat.
          
          Désillusionné mais ne renonçant pas, le cardinal 
          Lavigerie continuait de se préoccuper de ses missions. Il gérait 
          les fonds récoltés par les donations privées, il 
          prodiguait ses conseils et donnait des consignes. La maladie qui s'aggravait 
          freinait et limitait ses activités. L'une des dernières 
          qui le marquait profondément était, en 1890, la consécration 
          de la cathédrale Saint-Louis à Carthage, l'aboutissement 
          d'une longue oeuvre chrétienne.
          
          A Rome, Léon XIII appelait toujours les catholiques français 
          à se rallier à la République qui, légitimement, 
          avait droit à la reconnaissance de tous, le rejet du régime 
          les privant par ailleurs de toute influence. Une partie seulement de 
          la droite catholique le suivait mais une minorité demeurait fidèle 
          à l'héritage légitimiste. Le Pape demandait aux 
          évêques de prendre position sans équivoque. Il souhaitait 
          que le dialogue reprenne avec le gouvernement français. Mgr Lavigerie 
          était réticent. Il disait que les catholiques, traditionnalistes 
          ou royalistes, qui l'avaient soutenu dans son action évangélique, 
          en donnant leurs enfants, leurs terrains, leur argent, ne pouvaient 
          se réconcilier avec ceux qui persécutaient l'Eglise et 
          refusaient la religion. Le Pape ne voulait pas l'entendre. Avec l'appui 
          des évêques il demandait au cardinal de faire un geste 
          politique par obéissance chrétienne.
          
          L'occasion se présentait le mercredi 12 novembre 1890. C'était 
          le " toast d'Alger ", son dernier sacrifice.
          
          Mgr Lavigerie décédait à Alger le 27 novembre 1892. 
          Selon sa volonté son coeur y demeurait, mais son corps était 
          transporté et enterré à Carthage le 8 décembre 
          1892 (Après l'indépendance, 
          les restes du cardinal ont été transférés 
          à la Maison des Pères Blancs, via Aurelia à Rome.).