| PREFACE Sous le nom de Sciences anthropologiques, 
        on désigne actuellement trois disciplines dont l'avènement 
        ne remonte qu'au milieu du siècle dernier, et qui ont pour but 
        commun l'étude de l'Homme dans son évolution et dans celle 
        de ses civilisations.
 C'est d'abord l'Anthropologie, qui envisage 
        l'Homme en lui-même, tant les races de nos jours que celles qui 
        vivaient autrefois et ne nous sont plus connues que par leurs restes fossiles.
 C'est ensuite l'Ethnographie, qui s'occupe 
        des caractères culturels des groupes humains, c'est-à-dire 
        des civilisations : celles des peuples primitifs que l'histoire laisse 
        de côté et celles des peuples évolués dont 
        l'analyse laisse sou-vent reconnaître la persistance de maint élément 
        archaïque.
 C'est enfin la Préhistoire, science 
        des Hommes d'avant l'histoire, qui ne se révèlent à 
        nous que par les rares vestiges qui ont résisté à 
        l'usure des siècles.
 En Afrique du Nord, ces trois sciences prennent 
        un intérêt particulier. Séparés de l'Europe 
        par la Méditerranée, du reste du continent africain par 
        l'immensité du Sahara, les habitants de cette région ont 
        eu jusqu'à un certain point un développement autonome. Mais 
        leur isolement n'était pas absolu : dès 
        l'époque de la Pierre polie, l'Homme a sillonné la Méditerranée 
        ; peu auparavant, à l'époque mésolithique, et à 
        plusieurs reprises durant l'âge de la Pierre taillée qui 
        l'a précédée, le désert saharien avait fait 
        place à une contrée fertile où circulaient des hordes 
        de chasseurs et, plus tard, des pasteurs. L'Afrique septentrionale a ainsi 
        recru des apports du Nord et du Sud, tandis que par l'Est, le long de 
        la zone côtière, elle était en relation avec le delta 
        égyptien et, par l'intermédiaire de celui-ci, avec l'Asie. Ainsi se sont développés les 
        traits qui donnent à la préhistoire, à l'anthropologie 
        et à l'ethnographie de l'Algérie ses caractères particuliers. 
        Nous savons maintenant que, pendant une durée qu'il n'est pas exagéré 
        d'évaluer à 3 ou 400.000 ans, ce pays a vu prospérer 
        ces premières civilisations paléolithiques, Chelléen, 
        Acheuléen et Moustérien, que l'on retrouve dans une partie 
        de l'Europe, au Sahara et en Afrique orientale. La faune était 
        alors différente de celle d'aujourd'hui. Le climat aussi n'était 
        pas le même. L'Homme de ces périodes ne nous est pas encore 
        connu, mais les trouvailles faites au Maroc nous apprennent qu'ail Moustérien, 
        tout au moins, il était représenté par un type extraordinairement 
        primitif, l'Homo Neanderthalensis, dont l'équivalent se retrouve 
        en Europe. Après le Moustérien, l'âge 
        de la Pierre en Algérie prend un caractère spécial. 
        Plusieurs civilisations se succèdent, Atérien, Capsien, 
        Ibéro-maurusien, qui n'ont plus de rapport avec celles de l'Europe, 
        tandis qu'elles ont leur parallèle en Afrique orientale et méridionale. 
        A l'Homme de Néanderthal se substitue une nouvelle race, venue 
        sans doute du Proche-Orient et parente des Cro-Magnon d'Europe occidentale, 
        mais beaucoup plus brutale d'aspect, la race de Mechta, dont les grottes 
        et les escargotières du département de Constantine ont livré 
        de nombreux spécimens. Cette race a disparu à son tour, 
        mais à l'Est, elle avait envahi le Maroc et occupé les îles 
        Canaries où les Guanches, que les Espagnols combattirent au XVIe 
        siècle, en ont été sans doute les derniers survivants.
 Avec l'âge de la Pierre polie, on voit apparaître les Hommes 
        modernes, auteurs de gravures et de peintures sur rochers qui, de l'Algérie 
        méridionale, débordent sur une grande partie du Sahara alors 
        largement habité, Hoggar, Fezzan, Tassili, Tagant, et nous apportent 
        de précieux renseignements sur les meurs et le genre de vie de 
        leurs auteurs. Tous ces Hommes venaient probablement de l'Est ; ce sont 
        les ancêtres directs des Méditerranéens, la race de 
        base de la population actuelle. II n'est pas sans intérêt 
        de noter que les recherches anthropologiques ont montré qu'à 
        côté de cette race, deux autres contribuent essentiellement 
        à former cette population : la race alpine et la race nordi-que. 
        Avec des proportions différentes, ce sont les trois mêmes 
        types que l'on rencontre en Europe occidentale. Nord-Africains et Français 
        sont beaucoup moins distincts anthropologiquement, qu'on aurait pu le 
        supposer.
 Toutes ces données ne se sont que 
        progressivement dégagées de l'ignorance totale où 
        nous étions encore à ce su jet au début de ce siècle. 
        Ce sont les recherches et la persévérance admirables de 
        nombreux préhistoriens, en tout première ligne desquels 
        il faut citer M. Reygasse, les recherches aussi de divers anthropologistes, 
        en particulier MM. Bertholon et Chantre, qui ont permis d'édifier 
        une histoire nord-africaine qui n'est plus celle de tel ou tel peuple, 
        ou de telle ou telle nation mais, dans un sens autrement plus large, celle 
        de l'Homme. C'est à cette histoire qu'est consacré le Musée 
        du Bardo. Les remarquables collections archéologiques, qui y sont 
        réunies, révèlent le développement des civilisations 
        humaines en Algérie et au Sahara pendant l'immense espace de temps 
        qui s'est écoulé entre l'arrivée des premières 
        populations préhistoriques dans ces territoires et l'aube des périodes 
        historiques. Des collections anthropologiques encore en formation, mais 
        dont il faut espérer qu'elles pourront elles aussi être un 
        jour présentées au public, montrent la succession des races 
        dans ces mêmes contrées.
 Mais cet ensemble serait incomplet si les civilisations actuelles étaient 
        laissées de côté ; elles aussi sont envisagées. 
        L'ethnographie des populations urbaines avec tous les détails de 
        leur vie journalière est l'objet de remarquables reconstitutions, 
        tandis qu'une place spéciale est réservée aux grands 
        nomades sahariens :Touareg Hoggar en particulier, dont les éléments 
        culturels les plus caractéristiques en sont présentés 
        avec autant d'art que de science. Grâce à ces séries 
        dont MM. G. Marais et M. Reygasse ont été les infatigables 
        collecteurs, ces civilisations, si proches de nous mais déjà 
        en voie de désagrégation rapide, nous apparaissent dans 
        tous leurs traits essentiels.
 
 Ainsi conçu, le Musée du Bardo, magnifique création 
        du Gouvernement Général de l'Algérie, est une réalisation 
        dont on ne saurait trop souligner la valeur. Dans aucune autre contrée 
        de l'Afrique, on ne rencontre un tel ensemble, exposition systématique 
        de l'évolution des cultures et des Hommes, des temps les plus reculés 
        jusqu'à nos jours. Les collections préhistoriques de ce 
        Musée, ses séries de gravures et peintures rupestres sahariennes, 
        certaines de ses séries ethnographiques, sont des documents uniques. 
        De France et de l'étranger les spécialistes viennent les 
        consulter. Mais, pour l'Algérie, le Bardo est mieux encore que 
        cela : c'est le livre qui montre comment, sur ce coin de terre africaine, 
        lentement et péniblement, durant des siècles et des siècles, 
        l'Homme est parvenu à se dégager de l'emprise de la Nature 
        et à créer des civilisations qu'il n'a cessé, qu'il 
        ne cesse de perfectionner.
 H. V. VALLOIS.Directeur de l'Institut
 de Paléontologie Humaine de Paris
 LE 
        PASSE DU BARDO Sur le passé de cette belle villa 
        algéroise, sur l'homme de goût qui la bâtit vraisemblablement 
        au XVIIIe siècle et sur ses premiers occupants, nos renseignements 
        demeurent imprécis. Le nom de Bardo qu'elle porte, déformation 
        probable du " Prado " espagnol, nous fait penser au somptueux 
        palais que les sultans Hafcides possédaient dès le XVe siècle 
        dans la banlieue de Tunis. Telle est peut être l'origine de la tradition 
        qui concerne notre villa. Elle l'attribue comme résidence à 
        un doble tunisien exilé, que nous identifions volontiers avec l'énigmatique 
        prince Omar ( Ou Mustapha ben Omar, d'après la 
        légende d'un dessin du Capitaine Longuemare, daté de 1832 
        et représentant le " divan ", salle ouverte de la cour.) 
        mentionné par Henri Klein dans ses Feuillets d'El-Djezaïr.
 Acquis après 1830 par le général Exelmans, le Bardo 
        fit' retour en des mains musulmanes, celles de Ali Bey, agha de Biskra. 
        Celui-ci la revendit à un français, M. Joret, qui l'accommoda 
        à ses besoins, l'agrémenta de plantations et ajouta notablement 
        à la parure de ses salles et de ses cours. Ce propriétaire 
        était fort riche : il adjoignit à la partie basse de vastes 
        communs, écuries et remises, qui, à la faveur de larges 
        passages taillés dans les murs et de plafonds vitrés, purent 
        abriter les collections de préhistoire. Par surcroît, 
        ce propriétaire était artiste et passionné de musique 
        : le grand salon, où Camille Saint-Saëns se fit entendre, 
        est devenu la salle du Sahara et du Hoggar. Ces adjonctions laissaient 
        au reste intacte la partie proprement musulmane de la villa. Celle-ci 
        se présente comme un type heureusement conservé de ces maisons 
        des champs, où les citadins de la ville barbaresque aimaient à 
        se reposer avec leur famille durant les mois d'été.
 UNE 
        VILLA BARBARESQUE Au bout d'une voûte de grands arbres, 
        la demeure blanche apparaît, avec les cubes étagés 
        de ses murs et de ses terrasses. Un escalier plaqué de faïences 
        bleues accède au porche dont la porte massive, cloutée, 
        verrouillée et bardée de fer, s'ouvre (PL. 1) ; et, passant 
        sous la logette d'où un esclave de confiance surveillait les allées 
        et venues des étrangers comme des gens de la maison, on débouche 
        dans la cour pavée de marbre.
 L'eau chante au-dessus d'une vasque ; le grand rectangle d'un bassin reflète 
        les architectures et les bouquets de palmes ; un cyprès élève 
        vers le ciel son obélisque sombre. (PL. 2 et 3).
 Trois galeries encadrent la cour lumineuse 
        de leurs colonnades et de leurs arcs en fer à cheval. L'un de ces 
        portiques surélevé s'enfonce et se rétrécit 
        en mirador, qui domine les vergers et la campagne du Sahel (Pl. 4). On 
        imagine sans peine le maître de maison recevant ses amis dans l'agréable 
        pénombre de cette salle largement aérée et leur donnant 
        le plaisir d''une collation et d'un concert.Au bout d'une autre galerie, un pavillon fermé s'offre pour un 
        repos plus discret.
 
 Sous la troisième galerie s'ouvre une salle de réception. 
        Dans un renfoncement (" Qbou ") creusé en face de la 
        porte, des divans devaient accueillir les visiteurs.
 
 Suivant l'usage, cette partie antérieure de la maison était 
        en effet accessible aux étrangers. Elle servait aussi de passage, 
        et des salles basses à usage domestique, celliers et cuisines, 
        y prenaient jour. A l'opposé de l'entrée, un porche semblable 
        au premier donnait accès au jardin potager. Dans l'une des chambres 
        de service fut reconstitué - sans doute par le propriétaire 
        européen du Bardo - un intérieur de café maure (G) 
        pourvu ,de son foyer et de ses étagères.
 
 Par une porte cintrée, on pénêtre dans l'habitation 
        proprement dite. Du vestibule (" Sqifa ") orné de toute 
        une collection de faïences, l'étranger admis à entrer 
        gravissait un escalier étroit qui conduit au premier étage 
        ou plutôt au rez-de-chaussée de la maison ; car la déclivité 
        du terrain le met presque au niveau d'une seconde cour aujourd'hui rétrécie 
        par l'aménagement de la rue qui longe le Bardo.
 
 Une porte s'ouvre sur cette autre façade, elle donne entrée 
        à un second vestibule couvert d'une coupole et à un couloir 
        (PL. 5) en chicane conduisant au patio (A) qu'encadrent les chambres
 
         
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               Le 
              patio |  Cette cour intérieure est d'une ordonnance 
        architecturale fort remarquable (PL. 6) ; mais qui n'est. d'ailleurs pas 
        exceptionnelle dans les villas de la banlieue d'Alger. Les huit arcs sur 
        colonnes de pierre qui en circonscrivent les quatre côtés 
        - deux arcs sur chaque face - portent une grande coupole octogonale, qui 
        en fait plutôt un hall qu'un patio semblable aux cours centrales 
        des maisons de ville. Les deux chambres à coucher (B.C.) 
        qui le bordent en équerre diffèrent également de 
        celles des demeures urbaines. Sans doute y retrouve-t-on la même 
        proportion très large et peu profonde, que commande la portée 
        réduite des poutres ; sans doute présentent-elles ce renfoncement 
        médian, si caractéristique à Alger comme à 
        Tunis ; mais nous sommes ici à la campagne ; l'indiscrétion 
        des voisins n'est pas à craindre ; la vie du harem est moins secrète 
        et plus libre ; on ne peut se refuser de jouir de la vue du domaine et 
        de la clarté du ciel, celle-ci n étant plus assurée 
        par le patio. Les fenêtres trouent largement le mur du fond, voire 
        un des petits côtés.
 Ajoutons que la maison présente d'autres commodités fort 
        appréciables. Un escalier, montant de cet étage, conduit, 
        en même temps qu'à des chambres hautes, à un hammam 
        privé, ce bain de vapeur étant l'accessoire traditionnel 
        des riches intérieurs algérois. La petite salle carrée 
        à demi obscure est couverte d'une coupole qui conserve la chaleur. 
        Le foyer placé au dessous, qui en chauffe le réservoir et 
        le pavage, sert aussi de four pour cuire le pain.
 LE 
        MUSÉE D'ETHNOGRAPHIE URBAINE Tel est le cadre de la section d'ethnographie 
        urbaine. Il présentait par lui-même une caractère 
        local trop marqué et une valeur d'art trop réelle pour qu'on 
        ne s'efforçât de les conserver, tout au moins de ne pas en 
        compromettre le charme par un aménagement trop rigoureusement didactique 
        des collections.
 La plus belle chambre (B) donnant sur le patio (A) a résolument 
        été traitée comme une reconstitution d'intérieur 
        algérois, tel qu'il pouvait en exister vers 1830, tel celui qu'avait 
        pu voir Eugène Delacroix, qui nous en a laissé une admirable 
        et très véridique image. On s'est librement inspiré 
        de ce chef-d'oeuvre de la peinture française " Femmes d'Alger 
        dans leur intérieur ".
 
 Deux femmes de la riche bourgeoisie musulmane reçoivent une amie 
        et devisent avec la visiteuse autour du café et des friandises 
        qu'une négresse vient de servir (PL. 7).
 
 Les maîtresses de maison sont habillées de la veste longue 
        (ghlîla) largement decolletée sur la chemise (qmedja), qui 
        passe par dessus le haut du pantalon (sarwâl), et de la foûta 
        de soie nouée autour des reins. Elles sont coiffées du foulard 
        (mharma) qu'agrémentent le diadème 
        ('açaba) et les épingles trembleuses (wardat). L'étrangère 
        est vêtue du qaftan ; sur la tête elle porte la çarma, 
        sorte de hennin métallique. L'habillement de la négresse 
        consiste, outre la chemise, en une frimla, petit corsage serrant le haut 
        du torse, et en une foûta de toile rayée.
 Si les vieux vêtements authentiques 
        - maintenant hélas, démodés -, que portent les mannequins 
        du sculpteur Dideron, trahissent par leur coupe l'influence levantine, 
        les étoffes sont pour la plupart d'importation européenne. 
        Il en va de même du grand lit à colonnes, meuble italien 
        en usage à Tunis et à Alger, des coffres sculptés 
        également italiens, des soies et velours gênois ou lyonnais 
        qui, assemblés, composent les haïtis, tentures murales, des 
        brocarts qui couvrent les divans et les coussins, des glaces de Venise 
        et des verreries de Bohême. Quelques accessoires disséminés 
        dans la chambre disent les travaux et les loisirs de la vie du harem. 
        Un berceau somptueusement recouvert de damas bleu et or évoque 
        les soins attentifs de la mère de famille. Un métier à 
        broder est tendu, sur lequel traîne une vieille écharpe qui 
        servira de modèle. Un narghilé de cristal - analogue à 
        celui qui figure dans le tableau de Delacroix - se dresse dans l'embrasure 
        d'une fenêtre. Aux barreaux d'une autre fenêtre, une cage 
        se balance, un luth pend à l'étagère... Absent de cette réunion féminine, 
        le maître du logis n'est représenté que par son turban, 
        qui coiffe une patère voisine du grand lit.
 Dans le patio à coupole (A) sont exposés, 
        outre un grand brasero de fabrication européenne, des fontaines 
        et autres vases de cuivre, produits de la dinanderie algérienne 
        ou tunisienne, des lanternes dont on se servait dans la ville barbaresque, 
        des coffres et des étagères découpées dont 
        les artisans locaux n'ont pas perdu la tradition.
 La seconde chambre (C) est consacrée au costume et aux industries 
        qui s'y rapportent.
 
 Une grande vitrine groupe seize petits mannequins représentant 
        les types les plus caractéristiques de vêtements en usage 
        dans les trois départements algériens.
 
 Ces documents ethnôgraphiques, établis grâce à 
        la collaboration des ouvroirs ou écoles et de personnalités 
        musulmanes des différents centres, sont d'autant plus précieux 
        que les conditions nouvelles de la vie font rapidement évoluer 
        les modes dont ils fixent le sou-venir (PL. 8 à 21).
 
 Une série de photographies d'une femme d'Alger, permet d'étudier 
        le haïk, la grande draperie si comparable au peplos antique, et elle 
        montre les temps successifs de son ajustement.
 
 Une seconde vitrine haute renferme deux grandes figures représentant, 
        l'une la mariée de Tlemcen le jour de la noce, avec les tatouages 
        'et le costume rituel, l'autre la jeune épousée lors de 
        la réception donnée sept jours après. Des robes musulmanes 
        et juives d'un beau style archaïque, des vestes féminimes 
        et des cor-sages précieusement brodés complètent 
        la garniture de cette vitrine.
 
 Un mannequin fait connaître le vieux costume que les bourgeois tlemceniens 
        portaient encore il y a une quinzaine d'années : le qabboût, 
        veste courte à capuchon en grosse étoffe brune agrémentée 
        de motifs de couleurs, la veste de toile bleue, la ceinture de laine et 
        le pantalon de toile grenat. De même origine, une jellaba, grand 
        manteau fermé à capuchon et à manches courtes voisine 
        avec cette effigie du passé.
 
 Dans une vitrine basse ont été réunis les différents 
        types de chaussures, depuis les traditionnelles babouches sans quartier 
        ni talon, qui ne couvrent que le bout du pied, jusqu'aux souliers brodés, 
        dont la forme atteste l'intrusion des modes européennes. Des sandales 
        de bois (gabgâb) en usage dans la maison et au hammâm sont 
        présentées sur une étagère.
 
 Faisant pendant à cet ensemble, une vitrine et une étagère 
        semblables groupent divers types de coiffures : les chechia coniques que 
        portaient naguère les femmes de Tlemcen et de Constantine ; les 
        chechia tasse des jeunes filles, qui s'ornent parfois d'un motif décou 
        pé et d'un gland d'or ; les chéchia hémisphériques 
        des hommes et des enfants ; les beniqa, bonnets algérois en étoffe 
        brodée et les koûfiya de Constantine et de Tunis, de forme 
        analogue.
 
 Le mdhel, grand chapeau en sparterie, dont les Arabes surmontent la large 
        calotte du gannoûr, occupe le bas de la vitrine.
 
 La çârma, cette étrange tiare métallique d'origine 
        vraisemblablement syrienne, qu'Alger connût depuis la première 
        moitié du XVIII0 siècle jusqu'au milieu" du XIXe, est 
        représentée par divers échantillons et par un dessin 
        qui en montre l'ajustement.
 
 L'outillage des artisans du costume réuni dans cette salle, du 
        fabricant de belgha (pantoufles de cuir), du brodeur sur cuir ou sur velours, 
        de la brodeuse sur toile ou étamine, du passementier (notamment 
        un métier archaïque de tissage aux cartons) fournira aux ethnographes 
        des documents sur une activité industrielle périmée 
        ou en voie de disparition.
 Un placard contient quelques miroirs à main naguère en usage 
        chez les coiffeurs.
 
 La porte voisine donne entrée dans une petite salle (D) consacrée 
        à la Tunisie.
 
 Les costumes féminins y garnissent une vitrine haute. Autour d'un 
        buste de femme de Mandiya sont disposés les vestes et les énormes 
        pantalons lamés d'argent des Tunisiennes. Au sommet s'étend 
        un de ces voiles de soie au centre noir et aux deux bouts tissés 
        de jaune et rouge, travail des artisans de souche andalouse, dont les 
        femmes de Tunis se couvraient la tête, il y ,a de cela quelques- 
        années, et dont l'usage appartient .aujourd'hui au passé.
 La fabrication des chechia est aussi une 
        industrie apportée en Tunisie par les Musulmans chassés 
        de la péninsule ibérique. Une grande vitrine plate réunit 
        tout leur outillage, ainsi que des pièces en cours de fabrication, 
        depuis le bonnet tricoté jusqu'à son dernier état 
        après foulage, teinture et peignage. Les termes techniques uniquement 
        empruntés à l'espagnol attestent l'origine du métier 
        et de ceux qui le pratiquent encore (PL. 22).
 La salle voûtée (E) qui donne 
        sous un des portiques de la cour de marbre est consacrée à 
        diverses activités masculines. Dans le renfoncement médian, 
        c'est la vie guerrière : une panoplie groupe les longs fusils au 
        bois incrusté d'argent et orné de corail, les pistolets 
        et les sabres, les éperons et les ceintures à cartouchières. 
        Une selle brodée se dresse accostée d'étendards.
 La vie religieuse et intellectuelle ainsi que les rites populaires trouvent 
        place à gauche. On y voit une de ces cathèdres où 
        siègent les professeurs de mosquées. Au mur sont suspendus 
        un drapeau de confrérie et des enluminures représentant 
        le sanctuaire de la Mekke. Dans une vitrine sont exposés, outre 
        un gros turban, coiffure authentique d'un mufti d'Alger, un beau manuscrit 
        et des planchettes à Coran, des chapelets et des bougies, des boîtes 
        à talismans et une tasse entièrement gravée de formules 
        pieuses, dont l'effet bénéfique doit soulager les malades 
        qui y boivent.
 A droite, une seconde vitrine à deux étages contient une 
        collection à peu près complète des instruments de 
        musique nord-africains.
 
 En bas, c'est la musique bédouine : le hautbois (gnaïta, zorna) 
        et les flûtes de roseau (qoçba, zemmara), depuis la grande 
        flûte à la voix grave jusqu'au chalumeau ; et ceux qui marquent 
        le rythme : le gros tambour (tobal), les crotales de fer (qrâqeb), 
        dont les nègres accompagnent leur danse, et le grand tambourin 
        (gallal) creusé dans le bois, avec lequel les aèdes populaires 
        scandent leur mélopée et récoltent les offrandes.
 
 La partie supérieure renferme les instruments de l'orchestre citadin 
        ; d'abord les plus vénérables : le gânoûn (cithare), 
        le rbâb (rebec) à deux cordes avec son archet archaïque 
        et le 'oûd, ancêtre du luth qui en gardait le nom, éléments 
        sonores qu'ont générale-ment remplacés le violon 
        européen, le piano, voire la guitare hawaïenne ; puis les 
        instruments à percussion : les tambourins de poterie, la derbouka 
        algérien-ne et la tarija du Maroc, le tambour de basque (târ) 
        à plaques vibrantes et le tambourin carré (deff).
 
 Bien que satisfaisant à des besoins apparemment moins nobles, la 
        cuisine est un fait de civilisation que l'on ne saurait tenir pour négligeable 
        et qui, lui aussi, intéresse l'ethnographie. Les ustensiles dont 
        elle dispose sont réunis dans une petite chambre (F) contigüe 
        à celle que nous quittons. Récipients pour le transport, 
        la conservation et la cuisson des aliments y sont groupés, notamment 
        le grand plat de bois (guessa'a), le fourneau de terre, la marmite et 
        le vase au fond per-foré (keskes) utilisé pour la préparation 
        du couscous, mets quasi-national des Nord-africains (PL. 23).
 Enfin, on a reconstitué dans le cadre 
        architectural préparé à cet effet, l'intérieur 
        d'un café maure (G), qu'un peintre algérien a décoré 
        de naïves enluminures (PL. 24). Le foyer est pourvu de son récipient 
        où chauffe l'eau qui sera versée bouillante dans les cafetières 
        individuelles ou les petites théières. Des tasses pour le 
        café et des verres pour le thé s'alignent sur l'étagère, 
        et les clients pourront savourer le breuvage choisi en jouant aux dominos, 
        aux dames, au trictrac ou aux car-tes. Ces différents jeux trouvent 
        naturellement place dans cette dernière salle consacrée 
        .à l'ethnographie urbaine. LA 
        PREHISTOIRE Huit grandes salles sont consacrées 
        à la préhistoire . outillage lithique, oeuvres d'art, mobilier 
        funéraire. Dans les diverses salles du Musée, les collections 
        sont classées dans l'ordre chronologique. Le plan annexé, 
        planche 43, précise d'autre part la disposition des salles et des 
        vitrines. Enfin seules les pièces les plus caractéristiques 
        actuellement exposées seront signalées, indépendamment 
        de milliers d'autres classées dans les réserves et qui sont 
        surtout destinées aux recherches scientifiques. SALLE N° 1consacrée à la technique, à 
        l'historique
 des découvertes et à la morphologie comparée
 
 Cette salle est en cours de réorganisation et de modernisation. 
        Elle sera consacrée à la technique, à l'historique 
        des découvertes et à la morphologie comparée. Il 
        y sera présenté des vitrines de moulages d'oeuvres d'art 
        préhistoriques, de séries d'initiation telles que " 
        Les pierres taillées ", " L'évolution générale 
        des industries préhistoriques ", etc..., ainsi qu'une carte 
        (au 1/1.200.000e) de la distribution des industries préhistoriques 
        de l'Afrique du Nord et du Sahara jusqu'au Niger, établie par M. 
        Reygasse.
 
 SALLE N° II
 Paléolithique ancien
 
 Vitrine n° 1 : Collection César - Acheuléen - Sahara 
        occidental.
 n° 2 : Acheuléen - El Ma El Abiodh.
 n° 3 : Paléolithique ancien de la région de Tébessa.
 n° 4 : Acheuléen - El Ma El Abiodh.
 n° 5 : Découvertes paléolithiques et néolithiques 
        dans la région de Ouargla.
 n° 6 : Industries paléolithiques et néolithiques relevées 
        dans le Tidikelt.
 n° 7 : Paléolithique inférieur 
        de l'Oasis de Négrine (Sud Constantinois).
 n° 8 : Paléolithique inférieur 
        de S'baïkia (Sud Constantinois).
 n° 9 : Paléolithique inférieur d'Aoulef Chorfa Tidikelt.
 n° 10 : Paléolithique inférieur - Carrière de 
        Si Abderrahmane - Casablanca.
 : Paléolithique inférieur - Erg Tihodaïne.
 n° 11-12 : Acheuléen - El Ma El Abiodh (planche 25).
 n° 13 : Paléolithique inférieur - Erg Tihodaïne.
 n° 14 : Paléolithique spécial de l'Oued Mahrouguet (Sud 
        Constantinois).
 n° 15 : Paléolithique ancien du Lac Karar.
 
 NOTE. - Les objets et documents exposés proviennent 
        des collections découvertes au cours des fouilles de MM. Ayme, 
        Balout, Barbin, César, Flamand, Huguenot, Girod, Jean, Latapie, 
        de St Martin, Mellis, Meunier, Neuville, Pallary, Reygasse, Roffo, Ruhlmann, 
        Strahleim, Touchard.
 |  | L'examen des documents exposés dans cette salle, 
        permet d'avoir une idée très précise de l'évolution 
        du paléolithique inférieur dans l'Afrique du Nord.
 Les stations paléolithiques relevées au Nord de l'Atlas 
        donnent des formes absolument identiques à celles des niveaux classiques 
        d'Europe.
 
 Dans l'extrême Sud Saharien, au contraire, (fouilles César 
        pour le Sahara Occidental, et Reygasse pour le Sahara Oriental), la présence 
        de nombreux tranchets synchroniques des haches taillées doit être 
        au contraire rapprochée des industries de l'Afrique du Sud.
 
 Parmi les séries exposées, il en est une qui, par la splendeur 
        des formes et la richesse des spécimens, mérite de retenir 
        l'attention. Il s'agit de la technique acheuléenne d'El Ma El Abiodh 
        (vitrines 2, 4, 11, 12).
 SALLE N° III
 Vitrine n° 1 : Paléolithique moyen d'Aoulef Chorfa.
 n° 2 : Acheuléen - paléolithique moyen - Aïn-Fritissa 
        (Maroc).: Atérien du puits des Chaâchas.
 n° 3 : Atérien de l'Afrique du Nord.
 n° 4 : Moustérien de Bir El Ater (planche 26)
 n° : 5 Paléolithique inférieur et moyen de l'Afrique 
        du Nord.
 n° 6 : Paléolithique inférieur et moyen de l'Afrique 
        du Nord.
 n° 7 : Atérien de l'Oued Djebbana.
 n°8 : Atérien de l'Oasis de Négrine (Sud Constantinois).
 n° 9 : Techniques diverses du Tidikelt.
 n° 10-11 : Techniques particulières de S'Baïkia (Sud Constantinois).
 n° 12 : Moustérien de Bir El Ater. Moustérien de Hassaï 
        El Boul.
 n° 13 : Moustérien de Bir El Ater.
 n° 14 : Atérien d'Oum El Tine (Tunisie). Atérien de 
        l'Oued Djebbana. Atérien d'Aïn El Mansourah.
 n° 15 : Atérien de l'Oued Djebbana (pl. 27).
 
 Dans cette salle consacrée au paléolithique moyen, ont été 
        réunis des éléments extrêmement riches provenant 
        du Sud Constantinois et du Sahara Central.
 
 L'examen de ces séries permet de constater qu'il a existé 
        en Afrique du Nord une technique du paléolithique moyen absolument 
        identique aux séries européennes : le moustérien 
        classique.
 (Voir en particulier le moustérien de Bir El Ater, vitrines 4, 
        12, 13 et le moustérien d'Hassaï El Boul - Sud Constantinois 
        - Tébessa).
 
 Dans cette même salle, a été également rassemblée 
        une riche série de l'industrie du paléolithique moyen qui 
        avait toujours été considérée à tort 
        comme extrêmement récente, contemporaine de l'âge des 
        métaux. Il a été donné à cette industrie 
        le nom d'atérien. C'est à cette période que sont 
        apparues pour la première fois avec un outillage 
        moustérien, les premières for-mes d'armes de jet, pointes 
        de flèches pédonculées massives, outils divers présentant 
        un pédoncule, grattoirs, lames simples et lames à dos, burins, 
        qui offrent beau-coup d'analogie avec les formes du paléolithique 
        supérieur.
 
 Enfin, toujours dans la même salle n° 3, sont exposées 
        des pièces provenant du Sud Constantinois (S'Baïkia), pierres 
        taillées sur les deux faces qui donnent morpho-logiquement un terme 
        de passage très net entre les formes du paléolithique inférieur 
        (acheuléen) et les for-mes du paléolithique supérieur 
        (solutréen). Cette industrie porte le nom de S'Baïkien (vitrines 
        10 et 11).
 
 SALLE N° IV
 Vitrine n" 1 : Techniques diverses de Fort-Flatters.
 n° 2 : Capsien des Ouled Sidi Abid.
 n° 3 : Capsien de Chéria.
 n°4 : Découvertes diverses de l'Afrique du Nord.
 n°5 : Capsien de Saf-Saf (planche 28). n° 6 : Capsien de Bir Zérif 
        El Ouaar.
 n" 7 : Néolithique du Tidikelt (Nezia Hadj Ahmed).
 n° 8 : Néolithique d'Abd El Hadim.
 n° 9 : Capsien de Bir Zarif El Ouaar.
 n°10 : Capsien de Chéria.
 Capsien de l'Henchir Oued Melloul.
 n° 11 Riches séries de moulages provenant du Musée de 
        St-Germain, représentant des pièces classiques de l'Art 
        Aurignacien et Magdalénien d'Europe.
 n° 12 Industries diverses du Sahara Occidental.
 n°13 : Industries diverses de la région de Beni-Abbès.
 Cette salle est réservée aux industries 
        du paléolithique supérieur et aussi en partie au néolithique. 
        L'évolution du paléolithique supérieur dans l'Afrique 
        du Nord présente de grandes différences avec l'évolution 
        de ces industries en Europe.
 En effet, nous avons eu en Europe à cette période trois 
        civilisations bien connues : l'aurignacien, le solutréen, le magdalénien. 
        Dans l'Afrique du Nord; le paléolithique supérieur est caractérisé 
        par une indus-trie désignée sous le nom de capsien composé 
        d'un ensemble d'outils de pierre, très légers, harmonieux 
        de forme comprenant de nombreux couteaux, grattoirs, burins, poinçons 
        en os. Cette industrie de la pierre présente beaucoup d'analogies 
        avec l'aurignacien français. Ces techniques sont en particulier 
        bien représentées dans la région de Gafsa et de Tébessa, 
        tandis que sur le littoral, de Casablanca au Cap Bon paraît s'être 
        développée une civilisation littorale peut-être synchronique, 
        connue sous le nom d'ibéro-maurusien.
 
 Les éléments les plus caractéristiques du capsien 
        exposés proviennent de fouilles dans le Sud Constantinois : Chéria 
        (vitrines 3 et 10), Saf-Saf (vitrine n° 5), Bir Zérif el Ouaar 
        (vitrines 6 et 9) Henchir Oued Melloul (vitrine 10).
 
 L'Afrique du Nord n'ayant pas connu les civilisations solutréenne 
        et magdalénienne, pas plus que les for-mes d'art mobilier de l'aurignacien, 
        la vitrine n° 11, renferme à titre de comparaison, des moulages 
        des pièces les plus classiques de ces périodes provenant 
        du Musée de St-Germain.
 
 Trois vitrines sont enfin consacrées au néolithique saharien 
        :
 Vitrine n° 1 Fort Flatters.
 n° 7 Néolithique du Tidikelt (Nezia Hadj Ahmed).
 n° 8 Néolithique d'Abd El Adhim, Grand Erg occidental.
 A cette époque, apparaissent pour la première 
        fois des haches en pierre polie, de formes très pures, de minuscules 
        pointes de flèches, admirablement retouchées sur les deux 
        faces. L'homme connaît aussi la poterie et c'est de cette période 
        que date également la domestication des animaux ainsi que les premiers 
        rudiments de l'agriculture.
 SALLE N° V
 Vitrine n° 1 : Série de moulages de crânes :
 a) pithecantropus erectus (Trinil - Java).
 b) homo neanderthalensis (Spy - Belgique).
 c) homo neanderthalensis (La Chapelle aux Saints - Corrèze).
 d) homo sapiens fossilis (Cro Magnon - Dordogne).
 Reproductions de pièces européennes de l'âge de la 
        pierre polie, du bronze et du fer - Moulages du Musée de St-Germain).
 Statuettes néolithiques de Tabelbalat (Sahara Oriental).
 n° 2 : Tête de bélier, idole de Tamentit 
        (Gourara).nos 3-4 : Monolithes recouverts d'inscriptions tifinar (Hoggar).
 
 Riches séries de meules dormantes et de broyeurs néolithiques 
        sahariens de provenances diverses.
 n°: 5-6 : Statuettes néolithiques sahariennes diverses et pièces 
        de comparaison américaines.
 
 SALLE N° VI
 Vitrine n° 1 : Ibero-maurusien de la Mouillah (près de Marnia 
        - Oran).
 n°2 Technique tardenoisienne de Negrine - (Planche 29).
 : Néolithique du Damous El Ahmar (C.M. de Tébessa).
 n°3: Néolithique du Damous El Ahmar (C.M de Tébessa)
 n°4 : Néolithique saharien. (Sahara occidental)
 n° 5 : Néolithique saharien.
 n° 6 : Sahara Occidental.
 n° 7 : Monuments mégalithiques de Gastel.
 n° 8 Monuments mégalithiques de Castel. Monuments mégalithiques 
        divers.
 
 La vitrine n° 1 renferme des specimens très caractéristiques 
        de l'industrie ibero-maurusienne typique de la Mouillah (province d'Oran). 
        A côté on peut remarquer une série identique de la 
        province d'Alger.
 Dans la vitrine n° 2, est exposé un bel ensemble 
        de pièces de technique tardenoisienne relevé dans l'Oasis 
        de Négrine (Sud Constantinois). Cette industrie est absolument 
        identique aux formes les plus pures découvertes en Europe dans 
        les gisements tardenoisiensclassiques.
 
 Il y a lieu de signaler la remarquable industrie néolithique 
        du Damous El Ahmar (C.M. de Tébessa) - (vitrine n° 3). Cette 
        fouille a donné pour la première fois des oeufs d'autruche 
        complets ayant servi de récipients, de grands couteaux en silex 
        blond d'une finesse de taille et de dimension tout à fait exceptionnelle, 
        des haches polies, des molettes et broyeurs enduits d'ocre rouge, galets 
        gravés, gravures sur oeufs d'autruche, parures en oeufs d'autruche, 
        poteries ; etc... De très nombreux éléments de la civilisation 
        mégalithique sont réunis dans les vitrines 7 et 8. Ce mobilier 
        archéologique comprend quelques bijoux et de nombreuses poteries.
 Aucune sépulture préhistorique en pierres sèches 
        pouvant être attribuée à l'âge de la pierre, 
        n'a été découverte en Afrique du Nord. D'autre part 
        dans les divers monuments funéraires mis au jour, aucune arme ou 
        bijou pouvant être attribué à l'âge du cuivre 
        et aux divers stades de l'âge du bronze n'a été trouvé.
 Les principaux monuments funéraires qui ont livré 
        le mobilier exposé sont :a) les tumuli : kerkour ou redjem en arabe, bazina en berbère, 
        simples tas de pierres au-dessus du sol.
 b) les chouchets : monuments funéraires de forme cylindrique, leur 
        nom vient de leur ressemblance avec une chéchia.
 c) cercles de pierres.
 d) dolmens.
 
 Les tumuli et les chouchets sont spécifiquement 
        berbères ; on les rencontre dans toutes les régions colonisées 
        par eux. Gsell signale leur existence dans les Iles Canaries et divers 
        explorateurs en ont retrouvé jus-qu'au Soudan. Il a même 
        été signalé récemment l'existence de chouchets 
        berbères au Bornou et au Tibesti.
 Ces formes ont duré dans les diverses régions de l'Afrique 
        du Nord, jusqu'à la conquête musulmane.
 
 L'ère de distribution des dolmens est beaucoup plus restreinte, 
        on n'en connaît aucun dans le Sahara. Le mobilier archéologique 
        le plus archaïque relevé dans les dolmens ne paraît 
        pas antérieur au III° Siècle avant notre ère. 
        Les plus récents ne sont probablement pas postérieurs au 
        IIIe Siècle après J.-C.
 
 Il a été réuni dans les vitrines 7 et 8 une très 
        riche série de pièces archéologiques provenant, en 
        particulier, de la riche nécropole de Castel (Sud Constantinois) 
        (Planche 30). La plupart des poteries exposées sont des poteries 
        indigènes. Cependant on peut constater dans les diverses formes 
        des influences carthaginoises et gréco-romaines.
 
 SALLE N° VII
 Derniers documents provenant du Sahara Central, (Hoggar et Tassili des 
        Ajjers).
 
 Art Préhistorique
 Les reproductions les plus caractéristiques des 
        oeuvres d'art préhistoriques sont exposées sur les murs 
        des salles 2, 3, 4 et 5. Les statuettes néolithiques sont groupées 
        dans la salle n° 5.
 Les salles 2, 3, 4, renferment des reproductions de gravures rupestres 
        des Ksour du Sud Oranais.
 
 Les gravures et peintures des salles 4 et 5 ont été relevées 
        au cours de missions dans la Vallée de l'Oued Djerat en pays touareg 
        Ajjers.
 Les oeuvres étudiées dans cette vallée 
        peuvent être divisées, comme dans tout le Sahara d'ailleurs, 
        en deux grandes catégories :
 A) les gravures archaïques ou gravures rupestres proprement dites, 
        d'un réalisme parfait, reproduisent au début une faune bien 
        différente de celle actuelle et contemporaine d'un Sahara très 
        humide pouvant être comparé au régime actuel du Tchad 
        et du Zambèze.
 
 B) les gravures libyco-berbères, plus récentes, caractérisées 
        par une grande décadence et par l'apparition de nombreux animaux 
        domestiques et en particulier du chameau.
 Les oeuvres les plus anciennes sont caractérisées 
        par une patine très sombre souvent identique à celle de 
        la roche encaissante, le trait large, évidé est générale-ment 
        poli. Beaucoup d'animaux sont reproduits en grandeur naturelle. La faune 
        de ce premier groupe a des affinités nettement tropicales : Hippopotames, 
        Rhinocéros, Eléphants, Girafes, Bubales, Antilopes, Bovidés, 
        Autruches et Echassiers. L'homme de cette période est généralement 
        nu, armé de l'arc et masqué.39
 Ces oeuvres archaïques d'un style réaliste 
        remarquable, peuvent être comparées aux plus belles manifestations 
        de l'art préhistorique de l'Europe. A ces lointaines périodes 
        l'homme ne connaissait encore ni l'agriculture, ni la domestication des 
        animaux. Dans l'Afrique du Nord, comme chez tous les primitifs, l'art 
        avait à ces époques une valeur magique profonde. (Planches 
        31 et 32).
 Les oeuvres des premiers pasteurs apportent des éléments 
        nouveaux méditerranéens : animaux domestiques, chevaux, 
        bovidés, chèvres. Au début quelques éléments 
        de la faune ancienne subsistent encore : girafes, autruches. La technique 
        de ces oeuvres est encore remarquable par le fini de l'exécution, 
        l'observation des attitudes et le réalisme. Dans ce groupe, l'homme 
        est généralement armé du javelot et de l'arc. Le 
        costume présente des affinités avec l'Egypte, l'Espagne 
        orientale, et la Crête (Planche 33). Les reproductions de gravures 
        et de peintures représentant des chars attelés de chevaux 
        peuvent être attribuées au premier siècle avant notre 
        ère (Planche 34). Bien plus tard, vers le Ille Siècle, à 
        l'arrivée, en grand nombre, du chameau dans le Sahara, on retrouve 
        avec la reproduction d'une faune identique à celle de nos jours, 
        des personnages armés de la lance et du bouclier rond. Ces oeuvres 
        décadentes, accompagnées dans le Sahara Central de caractères 
        libyques actuellement utilisés par les Touareg, ne présentent 
        plus aucune valeur artistique. On verra dans la salle n° 5 plusieurs 
        reproductions de ces graffiti libyco-berbères,
 Statuettes néolithiques Dans la salle n° 5, est exposée la totalité 
        des statuettes néolithiques appartenant au Musée du Bardo. 
        A plusieurs reprises, des statuettes dénotant un art du polissage 
        de la pierre remarquable ont été découvertes dans 
        le Sahara Algérien. En 1905, le Commandant Touchart relevait dans 
        le Sahara Oriental, à Tabelbalet, entre In-Salah et Ghadamès, 
        six statuettes en pierre polie qui paraissaient entourer un tombeau (planche 
        35). Leur forme générale est comparable à un pain 
        de sucre surbaissé à base arrondie, dont la hauteur moyenne 
        est de 0,25 à 0,40. La partie supérieure représente 
        une tête humaine, la bouche fait toujours défaut, les yeux 
        sont parfois vaguement représentés. Au moment de leur découverte, 
        ces statuettes anthropomorphes étaient encore l'objet d'un culte 
        de la part des Touareg. Dans l'oasis de Tamentit, capitale historique du Touat, 
        une statuette néolithique représentant une tête de 
        bélier a été trouvée par M. Martin, officier 
        interprète. Ce document est déposé au Musée 
        du Bardo, salle n° 5. Une autre statuette représentant un bovidé, 
        trouvée à Silet près d'Abalessa a été 
        remise au Musée par le Capitaine Jean. Ces sculptures de bovidés 
        et d'ovins, de la période néolithique sont sans aucun doute 
        en relation avec les cultes zoomorphes déjà signalées 
        dans les gravures et peintures de l'Afrique du Nord. Ethnographie saharienne Dans la partie supérieure du Musée une grande 
        salle (H) donnant sur les jardins du Palais d'Eté a été 
        réservée à l'exposition d'objets provenant du Sahara 
        Central et en particulier du Hoggar. Beaucoup de ces objets sont aujourd'hui 
        devenus introuvables. Dans cette salle, l'armement est représenté 
        par des séries de lances, boucliers, et poignards. Tous les éléments 
        du harnachement, selles diverses de mehara, les bijoux, les bracelets 
        en pierre, bois gravé, cuir incisé, les costumes d'hommes 
        et de femmes, les jouets d'enfants y figurent en de très nombreux 
        exemplaires (Planche 36).
 Dans cette salle, est exposée la totalité des documents 
        recueillis à Abalessa dans le monument de Tin Hinan. D'après 
        la tradition, c'est dans ce monument qu'aurait été inhumée 
        la première reine du Hoggar. Les documents et les photographies 
        prises au cours des fouilles permettent d'établir que ce tumulus 
        de dimensions exceptionnelles, (26 m. 25 de grand axe, 23 m. 75 de petit 
        axe et 4 m. de hauteur moyenne) est un fort romain qui pourrait être 
        daté du IV° Siècle de notre ère. Une seule salle 
        aurait été utilisée pour servir de lieu d'inhumation 
        à Tin Hinan.
 
 Le mobilier archéologique recueilli dans la première salle 
        était d'une richesse exceptionnelle : sept splendides bracelets 
        d'or, huit bracelets en argent pur, grains et éléments de 
        colliers en or, pierres perforées et polies d'origine carthaginoise 
        qui se retrouvent jusque dans le golfe de Guinée. Une lampe romaine 
        au type de la victoire du III' Siècle, ainsi que des empreintes 
        de monnaies de Constantin ont permis de fixer la date de ce monument célèbre.
 Poteries Berbères Dans la partie supérieure du Musée du Bardo, 
        à gauche du grand patio, une salle (I) a été réservée 
        à l'exposition de poteries berbères (Planches 37 et 38).Les principaux centres de fabrication représentés sont
 ALGER 
        
          | Adelia Azzefoun
 Beni Douala
 Beni Ourlis
 Djendel
 Dra El Mizan
 Fort National
 Miliana
 Ouadhias
 Oumalou
 Palestro
 Port Gueydon
 Tablat
 Taourit Amokrane
 Ténès.
 |  ORAN CONSTANTINE 
        
          | Ait Ichen Arris (Aurès)
 Bouzina (Aurès)
 Cap Aokas
 Djidjelli
 Feraïa
 Négrine
 Oum el Bouaghi.
 |  
 Les décors de ces poteries rectilinéaires présentent 
        des ressemblances frappantes avec ceux des vases qui se fabriquaient dans 
        la Méditerranée Orientale aux premiers 
        âges du bronze (3e millénaire) et qui sont surtout connus 
        par des trouvailles faites dans l'île de Chypre.
 
 Dans cette salle, a été rassemblée une série 
        de bois sculptés, de boites à poudre, provenant du Sud Constantinois, 
        ainsi qu'une série d'instruments chirurgicaux encore utilisés 
        par les populations de l'Aurès pour la trépanation ; quelques 
        travaux de sparterie des populations berbères de l'Aurès 
        complètent ces collections
 LABORATOIRECENTRE DE RECHERCHES
 Le réaménagement du Musée du Bardo 
        a rendu possible l'installation d'un petit laboratoire d'Archéologie 
        et d'Anthropologie préhistoriques. Il occupe une salle indépendante 
        du musée mais contigüe aux collections de Préhistoire. 
        Il se complète d'un bureau occupé par le professeur de Préhistoire 
        à l'Université, chargé de mission au Bardo. On a 
        regroupé dans ce bureau la bibliothèque encore très 
        rudimentaire du musée.
 Bien qu'équipé rapidement, le laboratoire constitue dès 
        à présent un instrument de travail dont l'absence était 
        particulièrement regrettable.
 
 Sa création a répondu en effet à une triple préoccupation 
        :
 - Sur le plan pédagogique, donner aux étudiants le moyen 
        de faire les exercices pratiques indispensables à leur formation 
        technique.
 - Dans le domaine de la recherche, assurer la préparation et l'étude 
        des documents provenant des fouilles et entrant dans les collections, 
        en particulier des squelettes d'hommes préhistoriques, généralement 
        ex-humés à l'état fragmentaire et dont les os s'altèrent 
        et se désagrègent rapidement à l'air.
 - En exécution du plan de modernisation du 
        Musée, classer les objets à exposer, mettre au point leur 
        présentation avant mise en place dans les vitrines.
 
 En bref, on a voulu tirer les conclusions logiques dé-coulant des 
        décisions prises en 1948 par le Ministre Gouverneur Général 
        de l'Algérie : l'une mettant les collections du Bardo à 
        la disposition de la maîtrise de conférences d'Ethnographie 
        et Archéologie préhistorique de l'Afrique du Nord ; l'autre 
        chargeant M. L. Balout, titulaire de cet enseignement à l'Université, 
        de suivre les recherches préhistoriques effectuées en Algérie.
 
 Bien que n'ayant que quelques mois d'existence, le laboratoire semble 
        avoir pleinement justifié sa création. Une série 
        considérable de documents anthropologiques y a été 
        réunie et soumise à l'examen du Professeur Henri Vallois, 
        Directeur de l'Institut de Paléontologie humaine, en mission auprès 
        de la Direction des Antiquités de l'Algérie. Ces précieuses 
        reliques du passé font maintenant l'objet d'une restauration scientifique 
        propre à garantir leur conservation et à permettre leur 
        étude (Planches 39 à 42).
 
 D'autre part, la publication d'une série de " Travaux d'Anthropologie 
        préhistorique effectués au laboratoire du Bardo " a 
        été entreprise : les deux premiers numéros sont à 
        l'impression ; la préparation technique de plusieurs autres est 
        achevée.
 
 Ainsi étudiants et collaborateurs trouvent enfin au Bardo un organisme 
        moins préoccupé que le Musée proprement dit de la 
        seule conservation des objets anciennement recueillis, et plus orienté 
        vers les investigations et les techniques nouvelles. 
        C'est en ce sens que le laboratoire devient un centre de recherches ou-vert 
        à tous. Sur cette table un étudiant classe le produit de 
        fouilles dans la banlieue d'Alger ; cet autre s'initie à la technique 
        de préparation des ossements fossiles. Ici sont entreposés 
        avant dénombrement et étude, les résultats des fouilles 
        d'une mission étrangère, là se poursuit la restauration 
        de crânes humains vieux de milliers d'années.
 
 Appelé à recueillir des documents nombreux pour constituer 
        les séries indispensables aux méthodes de l'Anthropologie, 
        à étendre pour la même raison son activité 
        jusqu'aux temps historiques, à recevoir les spécialistes 
        venant travailler en Afrique du Nord, à centraliser les découvertes 
        des chercheurs français et des missions étrangères 
        autorisés à prospecter en Algérie, le petit laboratoire 
        du Bardo s'avère déjà trop exigu. Aussi son extension 
        et l'enrichissement de soi équipement technique sont-ils à 
        l'étude afin qu'il puis-se continuer à remplir son rôle 
        au rythme même des découvertes.
 
 
  
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