|   ---------Et pourtant, 
        lorsque sous les ordres du Maréchal de Bourmont, ministre de la 
        Guerre du Roi Charles X, les troupes françaises débarquaient 
        à Sidi-Ferruch, le 14 juin 1830, notre cher village n'existait 
        pas : il sera construit de toute pièce dans le sang et la sueur, 
        le travail acharné, les fièvres, le désespoir des 
        colons implantés, contre toute apparente logique, sur un site des 
        plus ingrats.---------Aucune 
        population sur le territoire de la future commune, entre le massif aride 
        de la Bouzaréah aux broussailles brûlées par le soleil, 
        les rochers déchiquetés battus par les vagues soulevées 
        par les vents violents de nord-ouest, sans abri naturel, et les marais 
        pestilentiels de la future Trappe, sinon, dans le ravin de l'oued Beni-Messous, 
        à la limite avec l'actuelle commune de Chéragas, une tribu 
        de 300 âmes vivant de l'élevage.
 ---------C'est 
        un plateau aride, apparemment infertile, couvert de broussailles, de lentisques, 
        chênes-kermes, arbousiers et palmiers nains, qui s'incline à 
        partir des escarpements du mont chauve de la Bouzaréah culminant 
        à 407 mètres, en pente douce vers l'Ouest, " le plateau 
        ", dont l'altitude oscille entre cent et deux cents mètres, 
        en versant plus abrupt vers le bord de mer, à partir du Grand Rocher, 
        dominant la mer d'une quinzaine de mètres, mais s'estompant progressivement 
        vers I'llôt, avec un dernier rehaussement à la Ras-Acrata.
 ---------L'accès 
        n'est possible que par 
        El-Biar, 
        Dély-Ibrahim et Chéragas, 
        par un sentier à peine tracé, accidenté de fondrières. 
        Toute communication est impossible avec Alger par le bord de mer, les 
        dernières villas d'avant la conquête se blotissant derrière 
        l'éperon rocheux de la Pointe-Pescade, le Grand-Rocher formant 
        un deuxième barrage infranchissable.
 ---------Entre 
        le ravin de 
        l'oued Béni-Messous descendant de la Bouzaréah 
        jusqu'aux dunes (qui délimitera plus tard la commune) et le bord 
        de mer, pas un arbre, pas une source visible, pour les premiers explorateurs.
 ---------Cependant, 
        l'allure désertique de la région n'est qu'apparence : les 
        recherches archéologiques démontrent que l'endroit est connu 
        et habité depuis des temps immémoriaux.
 ---------Les 
        dolmens de Béni-Messous, découverts en 1840, par Berbrugger, 
        sur la rive droite de l'oued, en sont une preuve. Ces dolmens, dont on 
        estimait que le nombre primitif excédait 250, ont vu leur nombre 
        diminuer par leur destruction progressive : trente debouts en 1870, une 
        vingtaine en 1927. En 1953 vingt-trois dolmens, entiers ou en ruines, 
        sont relevés par Gabriel CAMPS, dont 22 sur la rive droite de l'Oued, 
        propriété de Mr SAUNE, puis KUSTER, EBERT enfin, et un seulement 
        sur la rive gauche, dite d'EL'KALAA, sur la Commune de CHERAGAS. La nécropole 
        n'a été fouillée que cinq fois, par le Dr BERTHERAND 
        en 1868, Mr KUSTER vers 1883, Mr GOUX (1899-1904), le Dr MARCHAND (1931), 
        Gabriel CAMPS enfin en 1953.
 ***** ---------Monuments 
        mégalithiques, ces dolmens ont la double particularité, 
        par rapport à leurs homologues bretons, d'être des sépultures 
        encore riches de leur contenu et d'avoir une taille moins imposante. Ce 
        sont " des cases rectangulaires, longues 
        de 2 mètres en moyenne, larges de 1 mètre, formées 
        de quatre pierres brutes plantées verticalement mesurant 1,20 à 
        1,50 mètre de haut. La dalle de couverture dépasse rarement 
        2,20 mètres de longueur ". Chaque case funéraire 
        contient 5 à 8 ossements d'individus d'âge et de sexe différents, 
        " aux crânes dolichocéphales 
        longs et étroits identiques à ceux des Berbères de 
        nos jours " (Dr Kobelt). Outre ces ossements, de nombreux 
        objets, poteries en terre cuite, cruches et écuelles à dessins 
        géométriques comparables à ceux des objets que fabriquent 
        les Berbères de nos jours, des bronzes (bracelets, fibules, bagues), 
        des flèches et pointes de silex, des hâches polies, tous 
        objets transférés au musée du Bardo à Alger, 
        ainsi d'ailleurs qu'un dolmen offert par M. Ebert. En outre, la découverte 
        d'une lampe punique (laentlque a celles trouvées dans la nécropole 
        Sainte-Monique à Carthage) et d'une fibule, dite campanienne (comparable 
        à celles rencontrées en Italie), fait penser à Gsell 
        que ces deux objets, importés par des commerçants carthaginois, 
        pourrait faire remonter l'âge des dolmens à seulement trois 
        siècles avant notre ère.
 |  | ---------Gabriel 
        CAMPS émet une autre hypothèse, à la suite de l'étude 
        des trops rares vestiges des fouilles effectuées : cette nécropole 
        pourrait être bien antérieure aux établissements puniques. 
        C'est peut- être vers l'Ouest, du côté du Maroc, où 
        est démontrée l'existence d'une civilisation du bronze bien 
        antérieure au 3ème siècle avant J.C, et non vers 
        l'Est, du côté des colonies phéniciennes qu'il faut 
        chercher l'origine des bronzes de Béni-Messous ; la similitude 
        avec certaines céramiques marocaines et ibériques corroborerait 
        cette hypothèse
 ---------Mis à 
        part les dolmens, toute une série de grottes témoigne de 
        l'existence d'une population troglodyte fort ancienne---------- 
        grottes de la Pointe-Pescade, au-dessus du 
        " port au mouches ", découvertes en 1868, en ouvrant 
        la carrière Melcion et en creusant le tunnel pour le passage de 
        la ligne de chemin de fer,
 ---------- 
        grotte des Bains-Romains, découverte 
        en 1900 en exo ploitant une carrière,
 ---------- 
        grotte du Cap-Caxine (Dr Bertherand en 1869) 
        avec 3( à 40 squelettes aux crânes de type berbère,
 ---------- 
        grotte du Grand-Rocher, découverte en 1869 par IE Dr Bourjot 
        : on y pénétrait par un couloir de hauteur d'homme donnant 
        dans une salle d'environ 20 mètres sur 4 à 5 mètres 
        un soupirail naturel l'éclairant au zénith. Les parois sont 
        de calcaire, le sol de sable. Pour visiter cette grotte, il fallait prendre 
        la clef au petit café du Cap-Caxine, à l'angle de l'allée 
        menant au phare,
 ---------- 
        grottes des carrières Anglade et Sintès, à 
        500 mètres l'est du village.
 ---------Toutes 
        ces grottes contiennent des ossements de type berbère, en général 
        mêlés à des ossements animaux divers rhinocéros, 
        zèbres, phacocères, antilopes, gazelles, cerfs, hyènes, 
        panthères, ours, chacals, moufflons, ânes et chevaux, ains 
        que des rongeurs, des reptiles, des oiseaux, faune tout à la fois 
        paléo et néolithique et contemporaine. Elles décèlent 
        aussi des hâches polies, des silex taillés, des grattoirs 
        de silex, des aiguilles et poinçons en os, des fragments de poteries 
        à dessins en losanges et chevrons.
 ---------Enfin, 
        de nombreux vestiges de la civilisation latine persistent dans les limites 
        actuelles de la commune
 ---------- 
        au Ras-Djerba (ou cap Caxine) : ruines étendues 
        de murs et de citernes,
 ---------- 
        à Aïn-Bénian, sur la route 
        est de Chéragas : source retenue dans un bassin et vestiges de 
        quelques maisons l'entourant,
 ---------- 
        au Ras-el-Conater (cap des arcades en arabe, 
        déformé en Ras-Acrata) : vestiges des arcades d'un aqueduc, 
        puits et citernes, quelques tombeaux, quelques grosses pierres taillées
 ---------Ainsi, 
        malgré les apparences, il est admis aujourd'hui que Guyotville 
        et ses environs sont parmi les régions les plus anciennement peuplées 
        de l'Algérie et, sans doute, d'une façon presque ininterrompue.
 
 
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