| Jardin du DeyHôpital militaire
 ( Les premiers établissements 
        de cette catégorie furent d'abord sous des tentes, en des villas, 
        des mosquées, des casernes, des forts. Les pharmacies furent à 
        la caserne Kherratine, à la mosquée Ali Bitchnin, en d'autres 
        mosquées.)
 Dar-el-Baroud (Salpêtrière)
 La ravissante campagne de ce nom, et une 
        partie des bâtiments qui y furent élevés, ont été 
        créés par Baba-Hassen, dont le règne dura de 1791 
        à 1799 (Hassan-Pacha).
 Sous le pachalik de Mustapha, elle passa aux mains des héritiers 
        de l'ancien souverain.
 
 Le Dey Ahmed, en 1805, confisqua la propriété qui demeura 
        bien du Beylik jusqu'en 1830, époque à laquelle l'Administration 
        des Domaines en prit elle-même possession.
 
 Le 8 mars 1831, la campagne fut louée au prix annuel de 3.000 francs, 
        avec bail pour trois, six et neuf ans, à MM. Crevelli et Saint 
        Hippolyte, officiers d'État-Major. Une clause du contrat imposait 
        aux locataires la fourniture quotidienne au Général en chef, 
        qui était alors le Général Berthezène, des 
        légumes et des fruits nécessaires à la table de celui-ci.
 
 Séduit par le charme du jardin du Dey (on l'a vu précédemment), 
        le Général Rovigo eut l'idée d'y établir sa 
        résidence d'été et fit connaître bientôt 
        son intention d'occuper l'un des pavillons du milieu.
 
 Les deux officiers, que la perspective du partage de ce domaine contrariait, 
        offrirent alors, le 10 février 1832, de résilier leur bail, 
        demandant en compensation des dépenses qu'ils avaient faites là, 
        la somme de 5.000 francs. L'État acquiesça à cette 
        proposition.
 
 Un inventaire des plus détaillés de cette propriété 
        fut dressé au moment de la résiliation.
 
 Il apprend que le jardin fruitier comprenait : 161 orangers, 81 citronniers, 
        167 figuiers, 20 abricotiers, 190 poiriers, 5 amandiers, 10 cerisiers, 
        3 caroubiers, 77 grenadiers, 2 pêchers, 14 oliviers, 6 cognassiers, 
        21 pruniers, 6 merisiers, enfin 12 arbres inconnus.
 
 Il fait connaître encore qu'il s'y trouvait 819 pieds de vigne en 
        treille, couvrant une surface de 18.960 mètres carrés. Les 
        pampres étaient soutenus par des centaines de piliers en maçonnerie.
 
 Bolle dit, à ce sujet : " De la voûte d'entrée 
        près de laquelle se trouvaient les écuries, allait, jusqu'au 
        palais, un superbe berceau de vignes sur double rangée de colonnes 
        formant un délicieux abri d'ombre et de fraicheur. La Casbah, 
        observe-t-il, était, elle aussi, parée de treilles luxuriantes 
        dont les troncs centenaires servirent malheureusement, en 1830, à 
        chauffer la marmite du soldat.»
 
 D'autres détails, à ce propos, s'évoquent :
 
 Des treilles non moins remarquables se voyaient dans la plupart des villas 
        de la banlieue. En outre, des vignes plantées par les premiers 
        Maures venus d'Espagne, ajoutaient un peu partout, au charme du décor 
        champêtre, s'élevant jusqu'au sommet des arbres et s'enlaçant 
        de là, à ceux du voisinage. A ces Maures d'Espagne, Blidah 
        dut ses jardins; Bône, ses plantations; Coléah, 
        sa soie; Mostaganem, son coton et Alger, ses eaux.
 
 Mais poursuivons l'inventaire. Nous voyons à sa lecture, que le 
        jardin potager fut trouvé dans le plus mauvais état de culture 
        et que des cours d'eau, abandonnés à eux- mêmes, inondaient 
        la propriété dans tous les sens.
 
 L'état descriptif de ce jardin énumère ensuite très 
        minutieusement les différentes sortes de légumes qui étaient 
        cultivés en ce lieu et qui occupaient "une superficie de 
        29.973 mètres carrés".
 
 Cependant, mû par un sentiment d'humanité, - ainsi qu'il 
        a été rappelé - le duc de Rovigo abandonna son projet 
        de villégiature en cet endroit et se proposa de faire attribuer 
        ce domaine à l'armée pour ses malades.
 
 Souscrivant à ce voeu, M. Pichon, conseiller d'Etat et intendant 
        civil de la Régence, autorisa M. Girardin, directeur des Domaines, 
        à céder le Jardin du Dey au Corps d'occupation.
 
 L'acte de donation stipula de façon formelle, que si cette campagne 
        et ses dépendances étaient affectées à un 
        service autre que celui d'un Hôpital militaire, l'Administration 
        des Domaines rentrerait dans ses premiers droits.
 
 Quinze cents malades purent être installés dans le nouvel 
        établissement ainsi créé, lequel devint dans la suite 
        l'un des plus beaux de cette catégorie que possédât 
        la France.
 
 La jolie villa du centre, où, comme par le passé, chantaient 
        des jets d'eau parmi les fleurs et les marbres, fut réservée 
        aux officiers en traitement et au Médecin-Major, Directeur.
 
 Lorsqu'en 1835, l'État dégageant du séquestre le 
        Palais d'Hiver, paya la location de cet immeuble aux héritiers 
        de Baba-Hassen (  La princesse N'fiça 
        et le prince El-Hadj Omar, enfants d'Hussein, gendre de Baba-Hassen.), 
        qui étaient revenus à Alger, l'année précédente, 
        ceux-ci demandèrent qu'il fût procédé de même 
        en leur faveur pour le Jardin du Dey. Peu après, le 18 juillet 
        1835, sans attendre la décision de l'Etat, ces héritiers 
        louèrent, pour 1.000 boudjous (1.800 francs), cette campagne à 
        un sieur Gantois qui lui-même, transmit ses droits à un sieur 
        Caussidon. Celui-ci, en 1839, demanda à l'État la restitution 
        de ce domaine et le paiement de son loyer depuis 1835. L'État répondit 
        par un refus catégorique. Un procès fut engagé alors, 
        qui dura fort longtemps.
 
 Le 24 juillet 1848, le Conseil d'État appelé à statuer 
        sur cette affaire, rejeta la demande du sieur Caussidon, établissant 
        que cette campagne ne pouvait être vendue, attendu qu'elle faisait 
        partie des biens du Beylik et qu'elle n'aurait pu l'être, non plus, 
        comme propriété privée, car les arrêtés 
        de septembre 1830 et de juin 1831, relatifs au séquestre des immeubles 
        des émigrés, l'eussent rendue inaliénable.
 
 A son tour, en octobre 1845, le caïd Ismaël-Agha, époux 
        et mandataire de la princesse N'fiça, avait adressé au Gouvernement 
        une requête dans le même sens, qui éprouva le même 
        échec.
 
 L'État, au cours de ce procès, fit procéder à 
        une enquête minutieuse tendant à confirmer ses droits sur 
        cette propriété.
 
 On avait déclaré que Baba-Hassen, ayant constitué 
        en habous une partie de ce bien, la confiscation d'Ahmed était 
        de ce fait, illégale. Mais il fut objecté que cette mesure 
        eut des précédents : d'autres immeubles, en effet, tels 
        ceux de l'Intendance, du Consulat d'Angleterre (devenu le Conseil Général), 
        avaient été séquestrés par les Deys, quoique 
        habousés. On affirma en outre que les héritiers touchaient 
        une rente pour cette campagne que leur servaient les Deys. A quoi il fut 
        répondu que si cette rente avait été servie, elle 
        ne représentait pas un loyer, mais bien une charité, faite 
        à ces héritiers.
 
 Le Tribunal, le Midjelès ( Invités 
        à donner leur avis sur cette affaire, les juges du Midjelès 
        déclarèrent que le Dey Ahmed n'avait nullement le droit 
        de confisquer un bien habousé. Priés de reproduire par écrit 
        cette réponse, les juges s'y refusèrent.) fut 
        invité, à ce propos, le 10 juillet 1835, à interroger 
        certains personnages qu'on savait posséder des renseignements sur 
        la question. Trois seulement furent entendus, les juges estimant qu'il 
        serait superflu de convoquer les autres.
 
 Le Sid Mohammed, Khasnadji de la Régence, déclara que le 
        Jardin du Dey avait toujours été la propriété 
        du Beylik.
 
 Le Sid Mustapha, Saïdji du Palais (payeur), affirma que, durant son 
        ministère, il ne servit jamais de rentes aux héritiers.
 
 Mâalem Ahmed, amin des maçons, fit connaître que le 
        grand bâtiment du jardin fut édifié, en 1820, par 
        le Dey Hussein; que les écuries situées à gauche 
        de l'entrée, furent construites par le dernier Khasnadji, Braham, 
        "avec l'argent, les matériaux et les mules du Beylik" 
        (sic) que celui-ci fit également creuser le puits "voisin 
        du pavillon du Général Berthezène", établir 
        les *différentes conduites d'irrigation et installer un jet d'eau 
        à bassin de marbre, qu'il prit au jardin Bakri, contigu à 
        la campagne du Dey.
 
 L'amin déclara enfin, qu'une partie des fruits, des légumes 
        et des fleurs, était portée chez le Dey. Le reste était 
        vendu au profit du Trésor. La campagne appartenait donc bien au 
        Beylik. Le premier jardinier de la propriété qu'on interrogea, 
        d'autre part, fit savoir qu'avant l'arrivée de Lord Exmouth (1816), 
        le jardin était cultivé par des esclaves chrétiens 
        que nourrissait l'État, et qu'il le fut, après, par des 
        ouvriers maures, rétribués sur la caisse publique.
 
 Il déclara aussi que le grand mur de clôture était 
        l'oeuvre du Dey Hussein et qu'une partie des moutons élevés 
        dans cette enceinte (il y en avait 500) était réservée 
        à celui-ci et à sa suite.
 
 Il dit encore que, de 1820 à 1830, la propriété fut 
        administrée par les Khodjetel-Kheil qui étaient les administrateurs 
        des domaines ruraux du Beylik.
 
 On apprit, en outre, que les gens du Hamma et de Bouzaréah étaient 
        chaque année réquisitionnés officiellement pour le 
        service de la récolte du domaine extérieur à l'enclos.
 
 Ces divers témoignages, qui établissaient que le Jardin 
        du Dey, était bien une pro- priété du Beylik en 1830, 
        confirmèrent définitivement les droits de l'État 
        sur ce domaine.
 
 Cependant, le nouvel hôpital qu'on installa bientôt là, 
        n'occupa tout d'abord qu'une partie de la propriété dont 
        la superficie était de huit hectares.
 
 Le jardin potager mentionné plus haut fut loué jusqu'en 
        1840, à un sieur Carrel, pour la somme de 3.010 francs. Un rapport 
        nous apprend que la valeur des diverses cultures de ce jardin était 
        à cette époque, de 17.403 francs 85.
 Une portion du domaine, extérieure au mur d'enceinte, fut louée 
        aussi en mai 1834 à un sieur Wittersheim, pour la somme de 2.550 
        francs.
 
 En 1837, dans la partie Ouest, qui était employée à 
        la culture de la cochenille, vingt ares furent mis à la disposition 
        du Service de Santé pour la création d'un Jardin Botanique. 
        Ce jardin, agrandi dans la suite, acquit en 1848 une surface de deux hectares. 
        Il fut affermé, à cette époque, pour la somme de 
        1.000 francs par an, à un particulier qui, en même temps, 
        loua pour 1.500 francs deux hectares de jardin dépendant de la 
        Salpêtrière.
 
 Au mois de février de l'année 1857, la dame Goussem, chargée 
        des intérêts de la princesse N'fiça, fille d'Hussein, 
        obtint du Gouverneur que des fouilles fussent effectuées dans l'ancien 
        jardin du Dey. Ces fouilles demeurèrent infructueuses.
 
 Le Jardin du Dey n'était pas habité par Hussein en 1830. 
        Il était, à cette époque, loué au Ministre 
        des Finances. La maison étant trop vaste pour être occupée 
        en entier, plusieurs chambres du corps de logis avaient été 
        transformées en magasins de laines; d'autres pièces avaient 
        reçu un dépôt considérable de couscous, de 
        blé et d'orge. Dans les chambres voisines des cuisines, on retrouva 
        de grandes jarres remplies d'huile d'olive et de beurre fondu, des pots 
        pleins de viande de mouton, cuite et conservée dans de la graisse.
 
 Le Jardin du Dey, qui comprenait deux grands bâtiments à 
        l'entrée et deux pavillons, fut habité au début de 
        la conquête par le Général Berthezène et par 
        le Général Clauzel ( Le 
        célèbre Baudens, nous l'avons rappelé ailleurs, exerça 
        en cet hôpital. En 1917, le nom du préconisateur de la quininè 
        contre les fièvres, Maillot, fut donné à cet établissement. 
        En 1934, une plaque 
        de marbre commémora, dans les jardins, les membres du 
        service sanitaire, morts victimes de leur dévouement.).
 
 Un seul pavillon (celui des officiers), subsiste aujourd'hui. L'autre, 
        érigé à l'Ouest de celui-ci, disparut en 1850. Bien 
        avant, avaient déjà disparu de remarquables bosquets et 
        vergers. En 1835 était mentionnée comme intacte encore, 
        une superbe orangerie que sillonnaient des allées "pavées 
        de mosaïque".
 
        
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               pavillon des 
              officiers 
              Coll. B.Venis |  Le beau pavillon des officiers se signale 
        par de magnifiques salles voûtées que soutiennent des colonnes 
        de marbre groupées par deux ou par trois, ce qui est assez rare 
        - par des salons parés de fresques de Raynaud, de Cauvy - d'un 
        tableau également, de Taïb, reproduisant Larrey devant Lannes 
        blessé à mort - par des couloirs plaqués de faïences, 
        de bandeaux d'émail où l'épigraphie musulmane dit 
        par exemple : "La précipitation donne des regrets" 
        - "La patience est le salut" - par des cours dans la 
        verdure desquelles chantent des jets d'eau et dont l'une s'originalise 
        de piliers étonnamment trapus.
 L'hôpital fut visité, en 1842, par Larrey; en 1846, par le 
        Ministre Salvandy; en 1865, par Napoléon III; en 1900, par le Général 
        André, Ministre de la Guerre; en 1922, par Mme Millerand; en 1925, 
        par les Ministres Borel et Antériou.
 
 Comme il a été dit aux articles : Casernes et Mosquées 
        occupées, Alger eut également au début un hôpital 
        civil.
 
 L'hôpital civil fut, en 1832, rue des Consuls, en l'ancienne mosquée 
        El-Kechach, devenue école des Beaux-Arts. En 1838, rue Bab-Azoun, 
        en la caserne turque Kherratine.
 
 Le dirigea le docteur Bauwen*, ancien médecin 
        du Consulat d'Angleterre, membre du collège royal d'Edimbourg et 
        de Londres, nommé le 30 mars 1832. Ses appointements lurent de 
        3.000 francs. L'une de ses filles épousa le Consul de Suède 
        Schultz. En 1852, l'hôpital fut à Mustapha-Inférieur 
        où il est encore.
 *note du 
        site: ainsi écrit dans l'édition
 
 Les Turcs avaient, rue de l'Aigle, un asile primitif pour les soldats 
        devenus impotents. Un Allemand, étudiant en médecine, Pfeiffer, 
        organisa en 1830 un hôpital pour les blessés ramenés 
        de Staouêli. 
        A cela se réduisit le Service sanitaire turc. Pour le passé, 
        cependant, est à mentionner l'hôpital militaire que fit construire, 
        en 1550, le Pacha Hassan.
 Dar-el-Baroud (Salpêtrière) 
         
         
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               Dar-el-Baroud 
              (Salpêtrière) 
              Coll. B.Venis |  Au Jardin du Dey ont été annexés 
        les bâtiments voisins de la Salpêtrière 
        qui datent du commencement du XIXème siècle et que termina 
        en 1815 M. Schultz ( Ancien officier 
        du Génie.), précité, Consul de Suède 
        à Alger. Un hôpital pour 700 malades y fut créé.
 Ces bâtiments, desquels dépendaient un grand jardin et un 
        champ de quatre hectares, comprenaient une villa et une construction appelée 
        Dar-el-Baroud ( Une inscription qui 
        se trouvait autrefois à Dar-el-Baroud figure aujourd'hui à 
        l'entrée de la caserne de la Casbah. titre pour la traduction).), 
        la maison de la poudre (d'où le nom de Salpêtrière).
 
 Cette partie a été transformée en caserne pour les 
        infirmiers de l'hôpital.
 
 Auprès de la Salpêtrière se trouvait le Marabout de 
        Sidi-Yacoub ( Le quartier de Sidi-Yacoub 
        était appelé : Fas-el-Djenaïn (Banlieue des Jardins).), 
        dont la dotation se composait "d'une boutique, d'un jardin potager 
        et d'un champ".
 
 Cet édifice religieux fut occupé par la troupe dès 
        la Conquête. En face de ce marabout, sur le bord de la mer, se trouvait 
        une petite mosquée que fit construire Ahmed-Pacha, à la 
        fin du XVIIème siècle. Elle fut démolie au début 
        de l'occupation.
 
        
          |  
              Gener et Bayot.- Entrée de la darse et Porte de France 
              (entre pages 224 et 225) |  |