| L'état de guerre amène la disette et la 
        disette engendre les épidémies. Une recrudescence des maladies 
        pestilentielles était d'autant plus à craindre en Algérie 
        que les récoltes furent très déficitaires de 1943 
        à 1945, par suite d'une sécheresse sans exemple depuis 90 
        ans et du départ pour les Armées de 15 % des colons et de 
        1,5 % des indigènes. Depuis Pasteur, les armes principales contre 
        les maladies infectieuses sont les vaccins et les sérums ; c'est 
        pourquoi, pendant la deuxième guerre mondiale, l'Institut Pasteur 
        d'Algérie, sans abandonner sa tâche essentielle, la recherche 
        scientifique, a porté principalement son effort sur la, production 
        des vaccins et sérums.
 Pour l'assurer, il a fallu surmonter d'abord les difficultés provenant 
        du manque de produits fabriqués dont l'Algérie, pays agricole, 
        dépourvu de grandes industries, eut à souffrir lorsqu'elle 
        fut coupée de la Métropole en fin 1942. A cet égard, 
        l'Institut Pasteur fut puissamment aidé par l'aide matérielle 
        très généreuse que lui apporta la Croix Rouge Américaine, 
        sous l'impulsion de Norman Davis et de R.F. Allen.
 
 Le typhus exanthématique sévissait avec violence 
        en 1942. Divers vaccins antityphiques avaient été inventés. 
        En 1937, E. Sergent, chargé par la Société des Nations 
        de comparer leur valeur respective, avait conclu à la supériorité 
        des vaccins non vivants. La préparation du vaccin non-vivant inventé 
        récemment par Paul Durand, de l'Institut Pasteur de Tunis, fut 
        en conséquence organisée à Alger suivant la méthode 
        Durand-Giroud, en 1942. A la souris et au lapin, utilisés jusque-là 
        pour obtenir ce vaccin, l'Institut Pasteur d'Algérie adjoignit 
        bientôt le mouton et la chèvre qui permirent d'obtenir un 
        rendement bien plus considérable. On délivra : 176.000 doses 
        en 1942, - 661.000 en 1943, - 987.000 en 1944, - 1.136.000 en 1945. Sur 
        ce nombre total de 2.966.000 doses, Loi i.000 furent délivrées 
        à l'Armée britannique,
 
 La vaccination représente la principale arme de combat contre le 
        typhus. Une seconde arme est l'épouillage, qui détruit l'insecte 
        propagateur du virus, le pou. En janvier 1943, à la demande que 
        lui fit G. K. Strode, Directeur de l'International Health Division de 
        la Fondation Rockefeller, l'Institut Pasteur d'Algérie institua 
        avec plein succès des expériences, les premières 
        dans le bassin méditerranéen, sur l'épouillage par 
        la poudre D.D.T. inventée par Geigy en Suisse. C'est à 
        l'Institut Pasteur d'Alger qu'a été conçu 
        le procédé du poudrage par insufflation sous les vêtements, 
        qui a assuré le succès de cette méthode de désinsectisation 
        dans les milieux musulmans.
 
 La lutte contre la fièvre récurrente, dont 
        une violente épidémie suivit celle de typhus exanthématique, 
        a bénéficié de la connaissance de l'action des arsénobenzènes, 
        dont la première application a été faite en 1911 
        à l'Institut Pasteur d'Algérie, et du poudrage sous les 
        vêtements.
 
 Quelques cas de peste bubonique s'étant déclarés 
        à Alger au cours de l'été 1944, le Directeur de l'Institut 
        Pasteur d'Algérie, après des essais sur des volontaires, 
        proposa au Gouvernement Général, qui accepta, un vaccin 
        qui n'avait pas encore été employé en Afrique du 
        Nord : le vaccin vivant E. V., inventé, par Girard et Robic, à 
        l'Institut Pasteur de Tananarive. 118.2o0 doses furent délivrées 
        en 1944, et 3.900 doses en 1945.
 
 Une recrudescence de variole, la grande maladie pestilentielle 
        des pays de civilisation attardée, était menaçante. 
        On augmenta la production de vaccin antivariolique. 
        De 1932à 1942, le laboratoire avait délivré, par 
        an, en moyenne, 1.200.000 doses. Il en délivra : 3.000.00o en 1943, 
        - 4.300.000 en 1944, - 2.200.000 en 1945. Sur le total de 9.500.000 doses 
        produites de 1943 à fin 1945, plus de 3.500.000 ont été 
        délivrées à l'Armée britannique.
 
 La rage est pandémique en Algérie, comme la 
        variole. Furent traitées : en 1943, 3.6o9 personnes, mordues - 
        en 1944, 3.718, - en 1945, 3.086. Parmi elles, plus de 1.000 militaires 
        britanniques ou américains. On envoya même du vaccin phéniqué 
        , à des F.F.I. du Midi de la France, où il fut clandestinement 
        parachuté.
 
 La solution du problème de la rage réside dans la vaccination 
        des chiens avant morsure. Furent distribués : en 1943, 67 litres 
        de vaccin formolé pour les chiens, --- en 1944, 143 litres, - en 
        1945, 183 litres.
 
 Contre une autre grande pandémie de l'Afrique du Nord, le paludisme, 
        les Armées alliées, pour protéger leurs troupes, 
        instaurèrent des campagnes énergiques, avec des rnoyens 
        financiers inconnus dans ce pays, dont les populations autochtones profitèrent. 
        L'Institut Pasteur d'Algérie continua ses expériences méthodiques 
        de mise au point de la prophylaxie médicamenteuse dans les milieux 
        ruraux.
 
 La tuberculose s'étend en Algérie. L'Institut 
        Pasteur d'Algérie a mis au point la vaccination collective de la 
        population rurale par le vaccin antituberculeux B.C.G., inoculé 
        par scarification, sans cuti-réactions préalables, aux enfants 
        au-dessous de 15 ans. Ainsi le B.C.G., découverte 
        française, apporte à l'Algérie la solution 
        qu'aucune nation n'avait trouvée, du difficile problème 
        de la protection contre la tuberculose de populations peu évoluées, 
        pauvres et ignorantes.
 
 L'Institut Pasteur d'Algérie a, d'autre part, pu assurer, depuis 
        l'Armistice jusqu'à la Libération, la vaccination des nouveau-nés 
        de la France non-occupée, qui ne pouvait plus recevoir le B.C.G. 
        de Paris. Entre le 23 septembre 1940 et le 6 novembre 1942, 49.945 doses, 
        demandées par télégramme, ont été envoyées 
        en France par avion.
 
 Le sérum antiscorpionique, inventé 
        à Alger, efficace dans 95 % des cas d'envenimement considérés 
        comme très alarmants par les médecins traitants, sauve chaque 
        année plusieurs dizaines de personnes, presque toutes des Indigènes. 
        51 litres en 1942, - 68 en 1943, - 51 en 1944, - 64 en 1945, -- 70 en 
        1946 (ter semestre), furent délivrés, jusqu'en Arabie.
 
 Parmi les maladies des animaux domestiques, si funestes au ravitaillement, 
        la peste porcine est particulièrement grave. C'est 
        pourquoi le sérum antisuipestique, utilise surtout pour la vaccination 
        par séro-inoculation, est réclamé de plus en plus 
        par les éleveurs de l'Afrique du Nord et de la Métropole. 
        Au cours de 10 années 1932-1942, il avait été produit 
        en moyenne 442 litres par an. Il en fut délivré : 882 litres 
        en 1943,
 778 en 1944, - 1.041 en 1945.
 
 Contre les sauterelles, autre fléau 
        de l'Algérie, a été mise au point la méthode 
        efficace, inventée à l'Institut Pasteur 
        d'Algérie, de l'extrait de Mélia pulvérisé 
        sur les cultures riches : maraîchères, fruitières, 
        etc.
 En résumé, durant les trois dernières années 
        de la guerre, un grave danger d'épidémies menaçait 
        l'Algérie. On a créé contre ces épidémies 
        des armes nouvelles, amélioré les anciennes, augmenté 
        la production des sérums et des vaccins et ainsi pu enrayer ou 
        empêcher l'extension de maladies particulièrement redoutables.
 Edmond SERGENT, Membre de l'Institut. 
        
          |  AMPOULES DE FLINGOLEiNE* PRÉPARÉES 
              A ALGER
 * note du site : rie trouvé à ce sujet. La flingoléïne? 
              Pour éviter de se faire flinguer?
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