| L'Action scientifique 
        et sociale du Service de Santé militaire en Algérie  Il ne reste rien des uvres de Rhazes 
        ou d'Avicenne quand les officiers de Santé débarquent avec 
        l'armée française sur les plages de Sidi-Ferruch, le 14 
        juin 1830.
 Oublieuse de sa civilisation passée, la majorité de la population 
        a repris, dans ses coutumes, un caractère primitif.
 
 La tâche s'avère, dès le début, écrasante 
        et diverse :
 -------- Tâche militaire d'abord : les quelques 300 chirurgiens 
        qui accompagnent les colonnes pendant la période guerrière 
        de la conquête (1830-1844) doivent réaliser des prodiges 
        d'initiative et de dévouement ;
 -------- Tâche scientifique ensuite : elle est entreprise 
        dès le premier jour, en même temps que la précédente 
        : observations chirurgicales, observations médicales, épidémiologiques, 
        études climatologiques et hydrologiques, immédiatement mises 
        à profit pour la santé et le bien-être du soldat et 
        des populations autochtones ;
 -------- Tâche sociale enfin, profondément humaine 
        et qui fait de nos médecins - comme dans toutes les opérations 
        coloniales - le meilleur auxiliaire du commandement, pour obtenir la soumission, 
        gagner l'estime des populations et, plus tard, leur amitié.
 ACTION SCIENTIFIQUE HISTORIQUE.
 A peine arrivés sur le sol d'Afrique, les médecins et les 
        pharmaciens du corps de débarquement accumulent de nombreuses observations 
        dont, la plupart furent publiées, dès 1831, dans le " 
        Recueil des mémoires de médecine, de Chirurgie et de Pharmacie 
        militaires ".
 
 Tesniers, chirurgien major au 20' Régiment de ligne, étudie 
        le climat, le terrain et la flore du littoral Bayre, confirmant les observations 
        de Baudens, signale la différence de réaction des Européens 
        et des Indigènes à l'égard des blessures et ces infections 
        ; Mauricheau Beaupré étudie les eaux de Blida, le terrain 
        et la flore de l'Atlas, jusqu'à Médéa, Baudens enfin, 
        dès les premiers jours, fait des observations précises sur 
        les vents régnants, leur action sur l'atmosphère, l'humidité 
        des nuits, et ,n tire des déductions immédiates utiles à 
        l'hygiène de la troupe. On peut citer encore les communications 
        de Scoutteten sur le " choléra morbus " en 1835 à 
        Alger, de Broussais et de nombreux autres, sur les abcès du foie 
        de Bertheraud (essai médical sur la région de Blida), de 
        Tripier, pharmacien major qui analyse les eaux minérales d'Hammam-MesImutine, 
        de Neter sur la typhoïde, et de Fortier, pharmacien major qui analyse 
        un échantillon de sel gemme de Djelfa ( D'après 
        l'article du Médecin Lieutenant Colonel Talabere dans l'oeuvre 
        du service de Santé Militaire en Algérie 1830-1930 Chapitre 
        1"). Cette énumération est, certes, bien 
        incomplète ; elle ne concerne, d'autre part, que les premières 
        années de l'occupation. Mais deux hommes de premier plan dominent 
        la pléiade des travailleurs et des chercheurs de cette époque, 
        deux nommes dent le nom ne s'effacera pas : Baudens et Maillot.
 
 L'uvre 
        de Baudens
 Baudens, homme de guerre, suit les colonnes, donne des soins sur les lieux 
        mêmes du combat, prend une arme pour défendre ses blessés. 
        Ce magnifique soldat se double d'un savant
 
 Dans les premières batailles, " Baudens voit défiler 
        toute la série des besoins devant lesquels peut se trouver en présence 
        un chirurgien d'ambulance : blessures des parties molles, des membres, 
        des articulations, du bassin, du thorax, de l'abdomen, etc... Avec son 
        oeil d'anatomiste doublé d'un clinicien déjà averti, 
        il observe, note, étudie et recueille les premiers éléments 
        d'une documentation qui ne cessera de s'enrichir jusqu'au jour de son 
        retour t n France, et l'on peut dire jusqu'à la fin de sa vie, 
        fauchée prématurément.- Déjà se fixent 
        et se précisent les règles générales de sa 
        conduite et de son action chirurgicale. " (Talabère).
 
 Et l'une de ses uvres, " Clinique des plaies d'armes à 
        feu ", parait à Paris en 1836. C'est à l'hôpital 
        Caratine, puis à l'hôpital du Dey, organisé, sur sa 
        demande, en hôpital d'instruction, que Baudens édifie ce 
        travail, basé sur son expérience des ambulances. La discussion 
        de sa doctrine n'a pas sa place ici ; mais il apparaît, pour les 
        plaies des vis ères, comme " un précurseur des tendances 
        actuelles (Delorme) et ses appareils à fracture, minutieusement 
        décrits, où l'extension, la contre-extension et la coaptation 
        permanente sont des modèles de science et d'ingéniosité.
 A côté du chirurgien, on trouve dans la personnalité 
        de Baudens un remarquable hygiéniste ; il lutte, comme les autres 
        médecins, contra les épidémies meurtrières, 
        il intervient contre la mauvaise nourriture des soldats et l'abus désastreux 
        que ceux-ci font de l'alcool ; c'est lui qui, plus tard, au sujet des 
        épidémies qui survinrent en Crimée, indiquait au 
        Commandement, comme un des meilleurs moyens préventif, d'exiger 
        des jeunes Saint-Cyriens l'étude de l'hygiène en douze leçons.
 
 Rentré en France en 1837, Baudens professe à Lille et au 
        Val-de-Grâce, et meurt à 53 ans.
 
 Un de ses camarades de combat, Sédillot, qui a participé 
        dans une ambulance voisine à la prise de Constantine, honore également 
        le médecin militaire de l'armée d'Afrique. Devenu professeur 
        au Val-de- Grâce, il y donne un enseignement remarquable qui lui 
        vaut d'être admis à l'Académie des Sciences et à 
        l'Académie de Médecine.
 
        ***
       L'oeuvre 
        de Maillot.C'est en 1836 également que parait une autre uvre capitale, 
        conçue à l'armée d'Afrique : " Le traitement 
        des fièvres intermittentes de Maillot ".
 
 Cet ouvrage fait suite et complète la communication de Maillot 
        à l'Académie de Médecine en 1835. Maillot y étudie 
        les fièvres intermittentes, rémittentes et pseudo-continues 
        ; il différencie, d'An:, cette multitude de fièvres, ce 
        qui revient à la typhoïde, à la dysenterie et au paludisme 
        pernicieux ; enfin, il préconise le sulfate de quinine à 
        haute dose dans le traitement de celui-ci ; la meilleure arme dont on 
        puisse encore disposer aujourd'hui contre le paludisme vient d'être 
        mise au point.
 
 Et plus tard, au Congrès d'Alger de 1881, on pourra dire : " 
        C'est par Maillot que I Algérie a pu devenir terre française 
        ; c'est lui qui a fermé et scellé pour jamais le tombeau 
        des chrétiens." ( D'après 
        le Médecin Général Rieux, Professeur au Val-de-Grâce, 
        dans 1' " Oeuvre du Service de santé en Algérie, 1830-1930 
        " chapitre IV.).
 
 Quand, en février 1834, à Bône (où nos troupes 
        se sont installées définitivement en 183. après deux 
        séjours suivis de retraite en 30 et en 31), la situation sanitaire 
        de la garnison est lamentable : 4.000 hospitalisés en 1832 pour 
        un effectif de 3 à 5.003 hommes, et 449 décès ; en 
        1833, pour des effectifs semblables, 6.700 hospitalisations et 1.526 décès 
        : un mort sur trois sortants et demi.
 
 Fort de l'expérience acquise au cours des années précédentes 
        en Corse et à Alger, et mettant à profit ses notes de clinique, 
        Maillot traite ses malades suivant sa conception personnelle ; le résultat 
        s'affirme d'emblée : en 1834, il n'y a plus qu'un décès 
        sur 27 sortants.
 
 Malade et surmené, Maillot doit rentrer en France en 1835, où 
        ses communications et ses travaux eurent un retentissement considérable. 
        Admiré des uns, critiqué par les autres, il passe sa longue 
        vie à défendre sa doctrine. Professeur au Val-de-Grâce, 
        puis président du Conseil de Santé des. armées, il 
        a, en 1881, la satisfaction de voir officiellement consacrer son uvre 
        au Congrès d'Alger.
 
 L'éclat que le nom de Maillot a pris en Algérie, lors des 
        premières années de la conquête, persiste, toujours 
        intact, dans le monde scientifique d'aujourd'hui.
 
 On ne doit avoir garde d'oublier, à côté de ceux de 
        Baudens et de Maillot, les travaux de Boudin, qui, chirurgien de l'armée 
        d'Afrique en 1937 et en 1938, étudie aussi les maladies endémiques 
        et publie en 1842 un " Traité des fièvres intermittentes, 
        rémittentes et continues D. Il associe, en particulier, l'arse 
        nic à la quinine pour le traitement du paludisme, et cette méthode 
        a ses adeptes encore aujourd'hui.
 
 La découverte 
        de Laveran.
 La longue période de pacification et d'organisation qui succède 
        à celle de la conquête, est également féconde 
        en travaux et en réalisation scientifique. Le nom de quelques médecins 
        de l'armée d'Afrique vient encore s'imposer au monde médical 
        tout entier.
 
 Au premier rang d'entre eux, il faut citer Laveran qui, en découvrant 
        en 1880, à l'hôpital militaire de Constantine, l'hématozoaire 
        du paludisme, éclaire d'une façon définitive la pathogénie, 
        alors bien obscure, de ce fléau.
 
 Tout a été dit et écrit - et par Laveran lui-même 
        - (communications à l'Académie de Médecine en 1880 
        et 1882, éditions successives du " Traité du Paludisme 
        ", conférence Nobel en 1907 à l'Académie des 
        Sciences de Stockholm, etc...) sur les circonstances et les modalités 
        de cette découverte. Les fêtes du Centenaire de l'Algérie, 
        les Congrès médicaux interalliés de ses dernières 
        années en Afrique du Nord et des cérémonies commémoratives 
        ont suscité, d'autre part, de multiples études sur la vie 
        et l'oeuvre de Laveran. (En particulier, fêtes du Centenaire de 
        Laveran à Constantine en juillet 1945, présidées 
        par le Médecin Général Inspecteur Vincent et le Médecin 
        Général Debenedetti). Laveran, qui est déjà 
        professeur au Val-de-Grâce lorsqu'il arrive en Algérie en 
        1878, sert à Bône, puis à Biskra, avant d'être 
        affecté à l'hôpital de Constantine (1879-1883). Il 
        quitte volontairement l'armée en 1896, à l'âge de 
        51 ans, et entre à l'Institut Pasteur de Paris, où il continue 
        ses travaux jusqu'à sa mort en 1922.
 
 La gloire de Laveran ne doit pas faire négliger le mérite 
        de nombreux autres médecins qui, sur la terre d'Afrique, avant 
        ou après lui, servirent la Science en même temps que la Patrie.
 
 L'action 
        de Bertherand.
 Parmi eux se trouve le Médecin Principal A. Bertherand, ancien 
        élève de Baudens, Directeur de l'École opératoire 
        de Médecine et de Pharmacie, fondée en 1857, " il est 
        un des hommes qui contribuent le plus, tact par leurs oeuvres que par 
        leur action personnelle, au développement de la Médecine 
        française en Algérie " ( Médecin 
        Commandant Legler - uvre du Service de Santé en Algérie 
        1830-1930 - Chapitre IX.). Le journal qu'il publie, " 
        La Gazette Médicale de l'Algérie ", est une revue scientifique 
        de haute tenue, que l'on prend encore intérêt et plaisir 
        à lire dans les bibliothèques de nos vieux hôpitaux 
        militaires. Son " Traité des maladies vénériennes 
        ", publié en 1852, est un travail remarquable de logique et 
        d'observation.
 
 Traitée seulement par des prières de marabouts et par des 
        tisanes sudorifiques, la syphilis fait, en effet, à cette époque, 
        d'énormes ravages chez les aborigènes ; elle se caractérise 
        par " d'horribles lésions cutanées et par des mutilations 
        effroyables ". On la désigne sous le nom de " lèpre 
        kabyle " et les premières descriptions, cependant exactes, 
        que les médecins envoient en France, sont traitées de " 
        mensongères " dans la Métropole.
 
 Bertherand s'attache, quoique chirurgien, à étudier cette 
        question ; il préconise la thérapeutique par l'iodure de 
        potassium et les sels de mercure, malgré l'opposition de certains 
        syphiligraphes français; les résultats son remarquables 
        et les succès colportés de douars en douars amènent 
        aux consultations de tous nos médecins une foule étonnée 
        mais de plus en plus confiante.
 
 Professeur de clinique chirurgicale à l'Ecole d'Alger, Bertherand 
        reste pendant tout son séjour en Algérie le guide et le 
        conseiller des jeunes praticiens civils et militaires.
 
 Travaux divers.
 Un autre militaire, le Médecin aide-major de lie classe Vincent, 
        travaille pendant cinq ans (de 1891 à 1896) dans les laboratoires 
        de l'hôpital du Dey (  Médecin 
        Général Rieux. - OEuvre du Service de Santé en Algérie 
        1830-1930 - Chapitre V) ; et celui à qui le destin réserve 
        la gloire de vaincre, plus tard, les fières typhoïdes, commence, 
        dans ces modestes locaux, ses recherches et ses observations 
        ; en 1896, il publie dans les " Annales de l'Institut Pasteur ses 
        premiers travaux sur l'association fuso-spirillaire qui caractérise 
        ce que nous appelons aujourd'hui l'angine Vincent.
 
 A la gangrène hospitalière il oppose avec succès 
        la poudre d'hypochlorite de chaux mélangée à l'acide 
        borique, qui trouve sa place dans nos formulaires sous le nom de " 
        poudre de Vincent ".
 
 Il étudie les diverses associations du bacille thyphique avec l'hématozoaire 
        (typho-malaria), avec le streptocoque, le staphylocoque, le bacille coli, 
        etc...
 Les travaux sont innombrables et tous ses confrères se groupent 
        autour de lui (hommage rare !) pour bénéficier de ses leçons.
 Quand le Médecin aide-major Vincent quitte l'Afrique du Nord, en 
        1896, il a déjà obtenu des résultats convaincants, 
        mais encore inédits, au sujet de l'immunisation active contre la 
        fièvre typhoïde.
 
 Entouré de la vénération de tous les membres du Service 
        de Santé militaire, le Médecin Général Inspecteur 
        Vincent, professeur au Collège de France, est parvenu aujourd'hui 
        au faite des honneurs.
 
 Enfin, comme le rappelle une plaque de marbre scellée dans les 
        murs de l'hôpital Maillot, " en inaugurant ici, en 1907, ses 
        travaux d'électroradiologie, poursuivis de 1913 à 1925 à 
        Paris, au Val-de-Grâce, le Médecin major de 2è classe 
        Hirtz a ouvert à ses collègues, à ses élèves, 
        ses émules, un champ de recherches et de réalisations charitables, 
        originales et fécondes. "
 
 De très nombreux pharmaciens militaires ont apporté leur 
        contribution à la tâche scientifique du Corps de Santé 
        en Algérie. C'est en particulier à eux que l'on doit l'étude 
        de la plupart des eaux minérales d'Algérie ; ils ont une 
        grande paru dans la classification de la flore locale.
 
 Citons seulement le chirurgien aide major Millon qui, laissant la chirurgie, 
        devient pharmacien et professeur agrégé de chimie au Val-de-Grâce. 
        Envoyé en 1850 en Algérie pour des raisons politiques, il 
        étudie la conservation et la sélection ces blés (durs 
        et tendres), l'aménagement des silos, la fabrication des parfums, 
        la vinification, etc... Son enseignement est très écouté 
        ; ses conseils sont suivis par de nombreux colons et l'Algérie 
        lui doit sans doute, une part de sa prospérité agricole
 ***
 UVRE ACTUELLE.
 Dans les 
        territoires du Sud.
 La pacification du pays et son assainissement, la mise en valeur d'excellentes 
        terres de culture, ne tardent pas à attirer sur le sol d'Algérie 
        de nombreux émigrants français, espagnols, italiens, maltais, 
        etc...
 
 La " relève " des médecins dé l'armée 
        par des confrères civils - bien souvent anciens militaires démissionnaires 
        ou retraités - s'effectue progressivement depuis 1850.
 
 Mais cette relève n'a jamais été totale : les médecins 
        militaires assurent encore aujourd'hui la presque totalité du service 
        médical clins les Territoires du Sud ; d'autre part, la collaboration 
        amicale des médecins civils et militaires, dans les trois départements 
        algériens, a toujours associé le Service de Santé 
        à la tâche commune, humanitaire et scientifique.
 
 L'oeuvre des médecins militaires dans les Territoires du Sud est 
        considérable, et c'est une erreur (assez répandue d'ailleurs) 
        de croire qu'ils se bornent à une oeuvre d'assistance et de charité. 
        Au point de vue scientifique, les médecins du Sud ont toujours 
        mis à profit les sources d'observation jaillies de leur vaste champ 
        d'activité. De nombreux travaux de pathologie locale (ophtalmologie, 
        paludisme, typhus, syphilis, tuberculose) et de très intéressantes 
        monographies ont paru dans des revues médicales de France et d'Algérie 
        (en particulier dans les Archives de Médecine et de Pharmacie militaires, 
        et surtout dans les Archives de l'Institut Pasteur d'Algérie).
 
 Grâce à leur compréhension et à leur développement 
        et grâce à l'aide précieuse des Soeurs Blanches, ils 
        attirent dans leurs infirmeries et dans les " biout el ainin " 
        (salle de consultations ophtalmologiques) une population de plus en plus 
        nombreuse, de nature pourtant méfiante et farouche.
 En 1918, le nombre de leurs consultations est de : 128.600. En 1945, le 
        nombre est de : 1.962.819.
 
 Les épidémies deviennent plus rares grâce aux vaccinations 
        ; les enfants naissent sains grâce aux soins préventif aux 
        mères, et il naît plus d'enfants grâce aux sages-femmes 
        françaises qui remplacent les matrones ; enfin, la cécité 
        des jeunes tend à disparaître parce que les affections oculaires, 
        et, en particulier, le trachôme, sont énergiquement combattues.
 
 Dans le Nord.
 Dans les départements du Nord, la collaboration scientifique militaire 
        et civile ne peut être mieux symbolisée que par l'action 
        commune des médecins dans les établissements d'instruction 
        et dans les Instituts de recherche scientifique tels que l'Institut Pasteur.
 
 L'accroissement de la population civile crée, dès 1850, 
        la nécessité d'organiser sur place le recrutement et la 
        formation de médecins, de pharmaciens et de sages-femmes.
 
 Ce n'est qu'en 1852 que le Maréchal Randon décide la création 
        d'une Ecole préparatoire de Médecine et de Pharmacie, et 
        ce n'est qu'en 1859 que cette école est inaugurée. Le médecin 
        principal A. Bertheraud est nommé directeur ; deux autres officiers 
        du Service de Santé, le Médecin principal Marit et le Pharmacien 
        aide-major Bourlier y exercent, à côté de quatre professeurs 
        civils. Les cours ont lieu à l'école même, et les 
        leçons de clinique chirurgicale de Bertheraud sont données 
        à l'hôpital civil de Mustapha.
 
 En 1889, l'Ecole préparatoire est transformée en Ecole de 
        plein exercice ; les anciens médecins militaires Treille, Brault 
        et Gange y donnent un enseignement apprécié.
 
 En 1909, enfin, l'école est transformée en Faculté, 
        où quatre anciens médecins de l'armée (Gange, Raynaud, 
        Giraud et Tournade) professaient encore en 1925.
 
 Le Service de Santé militaire a toujours travaillé en liaison 
        étroite avec l'Institut Pasteur d'Algérie ; l'ancien Médecin 
        principal Foley, premier Directeur du Service de Santé des Territoires 
        du Sud, chargé des laboratoires sahariens à cet institut, 
        guide toujours le travail des jeunes médecins militaires affectés 
        dans le Sud. Ses nombreuses publications scientifiques sur la fièvre 
        récurrente (spiro-choeta Berbera, de Sergent et Foley), sur le 
        trachôme, le paludisme, la prémunition anti-tuberculeuse, 
        etc..., etc..., seul ou en collaboration avec Sergent et Parrot, en font 
        un des meilleurs ouvriers de l'oeuvre médicomilitaire et scientifique 
        en Afrique du Nord.
 ACTION SOCIALE Dès le premier jour de leur arrivée 
        à Alger, les médecins du corps expéditionnaire entreprennent 
        une action sociale, qu'ils ne sépareront jamais (fort justement 
        d'ailleurs) de leur tâche médicale.
 Bagre, chirurgien aide-major du 8' Régiment de Chasseurs à 
        cheval, raconte, dans ses " Observations de chirurgie recueillies 
        à l'hôpital turc à Alger ", comment il prit en 
        mains dès son entrée dans la ville, le 6 juillet 1930, les 
        soins aux blessés et aux malades, janissaires, jeunes Maures, jcunes 
        enfants.
 
 Combien d'autres, depuis, ont " fait " du Service médico-social, 
        sans l'écrire ! Car ici, rien ne brille, chacun dans sa petite 
        sphère, travaille silencieusement, de toute son âme" 
        à soulager des souffrances ou à les prévenir ; aucun 
        nom n'est à citer parce qu'ils le seraient tous. Une épidémie 
        est évitée par un isolement préventif et judicieux 
        ; une famille syphilitique est amenée aux soins grâce à 
        :a confiance acquise ; des enfants naissent sains qui seraient mort-nés 
        ou aveugles : tous ces faits ne laissent aucune trace immédiate 
        et officielle.
 
 Et pendant cent ans, des médecins militaires accomplissent cette 
        tâche obscure auprès des populations indigènes, au 
        début excitées pur la haine et le fanatisme, et toujours 
        tentées, par leur fanatisme, de se refuser à un effort préventif.
 
 Lors des premières années de l'occupation, le Commandement 
        constate que chaque poste où travaille un médecin - et où 
        celui-ci peut rayonner jusqu'aux tribus parfois insoumises - devient un 
        centre précieux d'attraction médicale et politique. Aussi, 
        lorsqu'en 1844 les " bureaux arabes " sont constitués, 
        les médecins font partie du personnel de direction et, en 1867, 
        un médecin aide-major de 2° classe est attaché à 
        chaque bureau.
 
 L'OEUVRE ACTUELLE.
 
 Dans le Nord.
 Actuellement, les Services civils de ]a Santé publique ont pris 
        à leur charge, dans le Nord, les uvres médico-sociales 
        pour les civils européens et musulmans.
 
 La collaboration militaire leur est acquise dans cette branche comme dans 
        toutes les autres. L'armée organise pour elle-même un Service 
        médico-social très étendu.
 
 Des centres médico-sociaux accueillent dans presque toutes les 
        garnisons les familles des militaires de carrière et du personnel 
        civil du Ministère de la Guerre ; les consultations pour les nourrissons, 
        les visites pré et postnatales y tiennent une grande place ; des 
        séances de vaccinations et de dépistage radioscopique y 
        sont pratiquées réguliêrement ; des visites à 
        domicile par des assistantes médico-sociales sont prévues 
        ; des fiches sanitaires sont rédigées ; des écoles 
        de plein air, des préventorium, des sanatoriums, sont ouverts malades 
        des ramilles bénéficiaires. Des maternités, enfin, 
        son' créées dans chaque division territoriale.
 
 En outre, les Dar-el-Askri reçoivent les familles de tous les anciens 
        soldats indigènes ; des chefs militaires soutiennent de leur haute 
        autorité les initiatives privées (Maison du blessé 
        musulman, dispensaires de la Croix-Rouge, etc...) Dans toutes les garnisons, 
        nos vieux hôpitaux militaires ont des salles réservées 
        pour accueillir les malades ou les accidentés civils, et leur clientèle 
        musulmane reste nombreuse.
 
 Dans le Sud.
 D'autre part, dans le Sud, les médecins militaires gardent la charge 
        de toute l'action sociale : créations d'infirmeries et de dispensaires, 
        assistance médicale gratuite, vaccinations préventives massives 
        contre les grandes épidémies, visites des mères et 
        des nourrissons, surveillance médicale des écoles.
 Ils y jouissent d'un incontestable prestige et restent, comme l'écrivait 
        Talabère : " les toubibs... ces personnages quasi maraboutiques 
        et presque sacrés... "
 *** En 1330, il y avait en Algérie 3 millions 
        d'habitants ; il y en a 8 millions cent àns après, dont 
        7 millions d'autochtones. L'action du Service de Santé en Algérie 
        se résume en ces quelques chiffres. *** Rome, pendant des siècles, avait construit 
        sur ce sol d'Afrique de magnifiques cités ; ses écrivains 
        avaient magnifié le pays, ses laboureurs en avaient fait " 
        le grenier ".
 Il ne restait cependant plus rien de leur passage : des arcs payens de 
        Timgad à l'émouvant baptistère de Djemila, des ruines 
        de Césarée à celles de Madaure, tout était 
        perdu, brisé, enterré. Les oeuvres écrites et les 
        discours - même ceux de Saint -Augustin, évêque d'Hippone 
        - étaient passés sans laisser la moindre trace sur les populations 
        indigènes.
 
 Car tout n'est pas dans la pierre, tout n'est pas dans les armes, tout 
        n'est pas dans les écrits.
 
 Mais il n'est pas possible que tout s'efface, demain, de ce que les médecins 
        militaires français ont gravé dans le cur et l'âme 
        des Musulmans d'Algérie.
 
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