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        CHAPITRE II    LE MARÉCHAL 
          CLAUZEL -------La Révolution de juillet 
          1830, en substituant la monarchie constitutionnelle à la monarchie 
          absolue, modifia la composition de l'armée d'Afrique. Non seulement 
          Bourmont, peu soucieux de s'exposer en France à des rancunes 
          politiques, s'embarqua à Alger directement pour l'Espagne sur 
          un bateau marchand; mais de nombreux officiers légitimistes quittèrent 
          l'armée. Par contre, les anciens soldats de l'Empire qui étaient 
          restés au service sous le drapeau blanc virent avec joie réapparaître 
          le drapeau tricolore, et beaucoup de leurs camarades qui étaient 
          dans leurs foyers, parmi lesquels Bugeaud, rentrèrent dans les 
          rangs de l'armée.
 -------Le général Clauzel 
          avait pris parti pour Napoléon pendant les Cent jours, quoique 
          ayant été nommé inspecteur général 
          de l'infanterie par Louis XVIII; il avait de ce fait été 
          traqué au retour des Bourbons, avait dû émigrer 
          aux États-Unis, n'était revenu en France qu'en juillet 
          1820, et avait été nommé en 1827 député 
          de Rethel. Il était qualifié par ses campagnes antérieures 
          pour le commandement de l'armée d'Afrique : général 
          de brigade en 1799 à 26 ans, il avait acquis une expérience 
          particulière en 1804 à Saint-Domingue, en 1809 en Illyrie, 
          et surtout de 1810 à 1813 dans les guerres d'Espagne où 
          il avait joué un grand rôle; il n'avait encore que 58 ans.
 Le gouvernement de Louis-Philippe était inquiet de la situation 
          morale de l'armée d'Afrique et incertain sur la politique à 
          suivre dans la colonie. Clauzel, qui était plein d'ardeur, d'idées 
          et de courage, calma ses inquiétudes et se mit à la besogne 
          avec la volonté d'aboutir à un résultat pratique. 
          Il reprit l'uvre commencée par Bourmont, réalisa 
          la création des zouaves, occupa Blida, poussa jusqu'à 
          Médéa, et envoya le général de Damrémont 
          réoccuper Mers-el-Kebir et Oran.
 -------Comme le Gouvernement français 
          ne voulait consacrer à l'Algérie ni des effectifs ni des 
          capitaux suffisants pour en faire la conquête, Clauzel imagina 
          un moyen de dominer le pays sans envois de troupes ni dépenses 
          de fonds. Il offrit au bey de Tunis, au cours de négociations 
          menées par M. de Lesseps, consul de France à Tunis, de 
          nommer beys d'Oran et de Constantine deux princes de sa Maison, moyennant 
          des contributions annuelles à verser à la France . C'était 
          en somme établir le protectorat français sur toute l'ancienne 
          Régence d'Alger par l'intermédiaire de Tunisiens musulmans.
 -------Clauzel passa rapidement à 
          l'exécution de ce projet, puisque dès le 4 février 
          1831, il nomma bey d'Oran le prince Achmet, moyennant une contribution 
          de un million, et que 200 hommes de troupes tunisiennes vinrent à 
          Oran amorcer la relève des troupes françaises; il décida 
          la destitution du bey de Constantine, pour faire place à un bey 
          tunisien. En même temps, il continua à améliorer 
          l'administration dont Bourmont avait jeté les bases, en réglementant 
          les impôts, la justice, la propriété, la police, 
          les douanes.
 -------Son initiative et son activité 
          impressionnèrent le Gouvernement, qui prêta peut-être 
          aussi l'oreille à une odieuse campagne de dénigrement, 
          allant jusqu'à insinuer qu'il avait reçu de l'argent pour 
          traiter avec Tunis. Malgré son dévouement désintéressé 
          à la tâche qu'il avait entreprise, Clauzel fut remplacé 
          par Berthezène; il reçut du moins, quelque temps après 
          cette mesure imméritée, la dignité de maréchal 
          de France.
 -------Les généraux qui se 
          succédèrent pendant quelques années à Alger 
          n'eurent ni personnalité bien accusée, ni programme bien 
          défini. D'ailleurs, que pouvaient-ils entreprendre, alors que 
          le Gouvernement désirait avant tout ne pas être entraîné 
          trop loin dans l'occupation du pays, et par suite dans l'augmentation 
          des effectifs, et que l'abandon d'Alger était même discuté 
          à la Chambre et dans la presse ?
 Le lieutenant-général Berthezène, choisi pour remplacer 
          Clauzel, avait été un très bon commandant de division, 
          aussi bien à la vieille Garde impériale que dans l'expédition 
          d'Alger; il fut un médiocre commandant en chef, pendant l'année 
          qu'il exerça ses fonctions.
 -------Le lieutenant-général 
          Savary, duc de Rovigo, ancien ministre 
          de la police impériale, qui lui succéda, employa avec 
          les Indigènes une dureté maladroite qui, au lieu de développer 
          l'influence française, la fit reculer; il comprit du moins l'importance 
          des routes et en fit exécuter ; il avait acquis dans la guerre 
          d'Espagne une expérience qui eût pu lui être utile, 
          mais il dut rentrer en France pour maladie.
 ------ Le 
          lieutenant-général Voirol exerça le commandement 
          par intérim d'avril 1833 à septembre 1834, et montra plus 
          d'équité envers les populations; il put imposer un caïd 
          aux Hadjoutes, qui troublaient la banlieue d'Alger, et faire occuper 
          Bougie par Trézel. Mais, dans la province d'Oran, le général 
          Desmichels, abusé par Abd el Kader dont la puissance commençait 
          à grandir, signa avec lui le traité du 26 février 
          1834, qui mettait en quelque sorte le " Commandeur des Croyants 
          " sur un pied d'égalité avec le Roi des Français! 
          Voirol repoussa du moins avec une courtoise fermeté les avances 
          du jeune marabout, grisé par ce succès.
 -------Cependant la Commission d'enquête, 
          envoyée en Algérie en 1833, ayant conclu au maintien de 
          l'occupation, l'ordonnance du 22 juillet 1834 institua un gouverneur 
          général des possessions françaises de l'Afrique 
          du Nord. Le général Drouët d'Erlon, qui vint prendre 
          le poste en septembre, était trop vieux pour exercer ces fonctions 
          après avoir montré quelque fermeté vis-à-vis 
          de l'émir Abd el Kader, il évolua si bien sous diverses 
          influences qu'il finit par le traiter avec des égards prudents. 
          Le général Trézel, qui avait remplacé Desmichels 
          à Oran, s'étant fait battre à la Macta par Abd 
          el Kader, fut disgracié. Quant à d'Erlon, qui restait 
          humble et inactif vis-à-vis de l'Émir victorieux, tergiversant 
          et hésitant dans l'espoir d'arrangements avec lui, il fut remplacé 
          par le maréchal Clauzel.
 
           
            | Bertrand, comte CLAUZELNé à Mirepoix (Ariège) le 12 décembre 
                1772
 Grand croix de la Légion d'honneur le 14 février 
                1815
 Pair de France le 2 juin 1815
 Député des Ardennes du 26 juin 1829 au 21 avril 
                1842
 Commandant en chef l'armée expéditionnaire d'Afrique 
                du 12 août 1830 au 21 février 1831
 Maréchal de France le 27 juillet 1831
 Gouverneur général des possessions françaises 
                dans le nord de l'Afrique du 8 juillet 1835 au 12 janvier 1837
 Décédé à Secourieu (Haute-Garonne) 
                le 21 avril 1842
 |  -------Le Gouvernement français 
          n'avait pas l'intention, en nommant Clauzel gouverneur, d'ouvrir une 
          ère de luttes il lui avait même formellement prescrit de 
          ne pas entreprendre, contre les tribus, d'expéditions comme il 
          y en avait eu quelques-unes, sans motifs et sans résultats. Mais 
          l'opinion publique française entendait que l'affront de La Macta 
          fût vengé, et amena le Gouvernement à décider 
          une expédition contre Mascara, capitale d'Abd el Kader.
 Clauzel, arrivé à Alger le 10 août 1835, en pleine 
          épidémie de choléra, crut bon de retarder l'expédition 
          et de faire venir des renforts indispensables La colonne de 10.000 hommes 
          sous ses ordres, que le duc d'Orléans était venu rejoindre, 
          quitta le camp du Tlelat le 29 novembre ; elle comprenait dans son effectif 
          600 cavaliers indigènes, 300 fantassins turcs, quatre compagnies 
          de zouaves de La Moricière, et 800 chameaux destinés à 
          remplacer éventuellement les voitures pour le transport des vivres 
          et des blessés, éléments qui constituaient une 
          innovation.
 -------Clauzel entra le 6 décembre 
          dans Mascara, pillée et dévastée par les indigènes; 
          mais il la quitta dès le 9 décembre, pour rentrer à 
          Mostaganem et Oran, abandonnant ainsi le bénéfice de l'expédition.
 Comme Mustapha ben Ismaël, allié des Français, était 
          assiégé dans Tlemcen avec les Koulouglis par des partisans 
          d'Abd-el-Kader, Clauzel résolut d'aller les délivrer. 
          Parti d'Oran le 8 janvier 1836 avec 7 500 hommes, il arriva devant Tlemcen 
          en 5 jours et demi, sans tirer un coup de fusil, Abd- el -Kader ayant 
          refusé le combat. Le 15 janvier, il envoya le général 
          Perrégaux cerner le camp de l'Émir; Abd-el-Kader, personnellement 
          poursuivi dans une course effrénée par le commandant Yusuf 
          et des cavaliers indigènes dé la colonne française, 
          faillit être pris, et n'échappa que grâce à 
          la qualité de son cheval. Tlemcen ne fut pas abandonnée 
          comme Mascara; Clauzel y laissa avec les Koulouglis 500 hommes commandés 
          par le capitaine Cavaignac, et regagna Oran. Mais n'ayant pas de fonds 
          pour payer les frais de son occupation, il fut obligé de lever, 
          sur ses alliés de Tlemcen eux-mêmes, un impôt dont 
          la perception produisit le plus déplorable effet.
 -------Des tournées de pacification 
          effectuées par le général 
          Perrégaux dans la vallée du Chélif et par 
          Clauzel à Médéa restèrent sans résultats 
          pratiques, parce qu'aucune garnison ne fut laissée, fauté 
          d'effectifs, dans les régions traversées. Le malheureux 
          bey pompeusement installé à Médéa fut pris 
          par les partisans d'Abd el Kader, envoyé au Maroc, où, 
          après six mois de tortures et d'exposition publique, il fut pendu 
          comme ami des Chrétiens.
 -------Dans la province d'Oran, Clauzel 
          n'avait pas réussi, lors de son occupation de Tlemcen, à 
          relier cette ville avec le petit îlot de Rachgoun, à l'embouchure 
          de la Tafna, par où il espérait ravitailler cette ville. 
          Il chargea le général d'Arlanges, commandant à 
          Oran, d'atteindre Rachgoun par terre avec 3 500 hommes; d'Arlanges arriva 
          au mois d'avril 1836 à l'embouchure de la Tafna, mais y fut cerné. 
          C'est alors que le ministre de la Guerre envoya de France Bugeaud, avec 
          trois régiments, débloquer le camp. Bugeaud débarqua 
          à la Tafna avec les renforts, rétablit les communications 
          avec Tlemcen et Oran et battit complètement à la Sikkak 
          Abd-el-Kader, le mettant pour quelque temps hors de cause.
 |  | -------Le maréchal 
        Clauzel avait l'intention d'occuper toutes les villes importantes du Tell 
        et de les relier à la mer, puis de créer dans chaque province 
        un camp central, d'où les colonnes mobiles rayonneraient pour pacifier 
        le pays. Il estimait le moment venu de prendre Constantine Le Gouvernement 
        envisageant plutôt des réductions d'effectifs que des augmentations. 
        Clauzel décida néanmoins, avec sa confiance habituelle, 
        de tenter l'opération.-------Poussé 
        par le commandant Yusuf, qui, nommé par lui bey de Constantine, 
        avait hâte de prendre ses fonctions, il entreprit l'expédition 
        sans préparation suffisante, avec des moyens trop faibles et surtout 
        à une époque trop tardive. La colonne, forte de 8.000 hommes 
        environ, fit route sous une pluie incessante, arriva le 20 novembre devant 
        Constantine, y établit ses bivouacs dans la boue, sans feu, et 
        échoua dans ses assauts, faute d'une préparation d'artillerie 
        suffisante. A bout de munitions, elle dut se replier sur Bône dans 
        des conditions lamentables, poursuivie par les indigènes que le 
        commandant Changarnier contenait héroïquement avec son bataillon 
        à l'arrière-garde. Elle rentra le 1er décembre à 
        Bône, où plusieurs milliers d'hommes tombèrent malades 
        des fatigues subies, beaucoup pour ne plus se relever.
 -------Cet échec, dû surtout 
        à l'imprévoyance, fit en France un déplorable effet, 
        et amena le remplacement de Clauzel par le lieutenant-général 
        de Damrémont, le 12 février 1837.
 -------Si 
        le maréchal Clauzel n'a pas obtenu, en Algérie, la réussite 
        qu'il méritait, c'est beaucoup en raison des hésitations 
        et des craintes du Gouvernement. Il a exprimé presque toutes les 
        grandes idées qui ont triomphé par la suite, formulé 
        presque tous les projets qui ont été réalisés; 
        mais il n'a pas eu les moyens de mener à bien ce qu'il avait conçu.
 -------La 
        création des zouaves, première ébauche de notre armée 
        indigène nord-africaine, lui parut un moyen de pouvoir rendre à 
        la France des effectifs métropolitains, mais aussi un moyen d'arriver 
        à un résultat d'ordre plus général, le rapprochement 
        des Français et des Indigènes. La colonisation le préoccupa 
        dès son arrivée. Il voulait commencer par la Mitidja, qu'il 
        considérait comme " un point central, 
        à proximité du Gouvernement, des magasins et du port, où 
        tout peut être reçu, chargé, vendu ou expédié 
        ".
 -------Il 
        pensait surtout aux moyens d'établir des Européens dans 
        le pays : " Cela dépend entièrement 
        du Gouvernement, écrivait-il. S'il prend de bonnes dispositions, 
        il inspirera confiance, et l'on verra lés hommes et les capitaux 
        qui se portent annuellement en Amérique, aller chercher à 
        Alger des établissements moins éloignés de l'Europe, 
        sur ce sol fertile et bien protégé. S'il adopte des mesures 
        équivoques, empreintes d'indécision ou de timidité, 
        l'émigration européenne continuera son mouvement vers le 
        Nouveau-monde, et la France dépensera beaucoup d'argent sans autre 
        résultat que la vaine gloire d'avoir une province d'Afrique ".
 -------Il avait formulé, 
        bien avant son gouvernement de 1835 un projet de colonisation militaire 
        : " Nos armées, écrivait-il 
        en 1833, comptent beaucoup plus de prolétaires que de propriétaires; 
        et il est permis de croire que, sur 3.000 hommes qui reviennent d'Afrique 
        chaque année, les soldats prolétaires préféreraient 
        pour la plupart rester avec la perspective d'acquérir une petite 
        propriété, que de retourner en France pour n'y rien posséder. 
        On verrait ainsi la colonie s'augmenter, tous les ans, d'un certain nombre 
        de colons militaires, auxquels on n'aurait à donner que de la terre 
        (environ 6 arpents par homme), quelques instruments pour la travailler, 
        et six mois de vivres. Le Trésor serait bientôt couvert de 
        cette faible dépense par l'élévation du produit des 
        droits de tout genre qui résulterait de l'augmentation du nombre 
        des colons ".
 -------Il 
        définissait les divers moyens de fournir de la terre aux colons, 
        soit en leur accordant " une concession 
        gratuite ", comme il l'avait vu faire en Amérique, 
        soit en achetant des propriétés aux Indigènes : " 
        Ainsi la difficulté de coloniser, concluait-il, 
        ne vient pas de la difficulté de se procurer des colons, des capitaux; 
        elle vient tout entière du silence que le Gouvernement s'obstine 
        à garder sur ce grave sujet, et du peu de cas qu'il a paru faire 
        de la colonie. Elle renferme cependant un immense avenir pour la France, 
        sous le triple rapport de l'utilité sociale, de la puissance politique 
        et de la richesse commerciale. "
 -------On 
        s'aperçoit, en lisant ces lignes, combien est grande l'injustice 
        qui n'a retenu, du commandement de Clauzel en Algérie, que l'échec 
        de Constantine. Il est vrai que, dès cette époque, la terre 
        d'Afrique a fait naître, contre ceux qui y servaient la France, 
        des inimitiés, et même des haines que leur éloignement 
        ne pouvait pas toujours leur permettre de combattre. Clauzel a été 
        le premier des grands soldats qui ont été desservis et calomniés 
        à Paris, tandis qu'ils s'employaient tout entiers à leur 
        patriotique besogne. Avec un gouvernement lui faisant confiance et lui 
        accordant les moyens suffisants, quels résultats n'eût-il 
        pas obtenus ?
 -------S'il 
        avait voulu occuper Constantine, après avoir occupé Tlemcen, 
        c'est parce qu'il comprenait l'importance primordiale de ces d'eux bastions 
        : " Tlemcen, écrivait-il, est la 
        porte par laquelle le Maroc vous enverra tous les ambitieux qui voudront 
        troubler votre possession; Constantine est celle par où passeront 
        toutes les tentatives de Tunis suscitées par nos rivaux. Si vous 
        n'occupez pas ces deux Gibraltar de la Régence d'Alger, vous n'en 
        serez jamais les maîtres. " En ce qui concerne l'expédition 
        de Constantine, il s'élevait contre l'accusation d'avoir " 
        perdu son armée " ; car, 
        disait-il, une perte de 454 hommes sur 7.000, c'est-à-dire un peu 
        moins d'un quinzième, " à 
        travers les pluies, les gelées et parmi des nuées d'Arabes 
        ", c'était une proportion inférieure à celle 
        de bien des escarmouches
 -------Ses 
        campagnes à travers l'Europe, son émigration en Amérique, 
        avaient élargi ses vues au delà de celles de la plupart 
        de ses contemporains, de ceux surtout qui préconisaient l'abandon 
        de l'Algérie, et auxquels il s'adressait en ces termes : " 
        Posséder en face de notre littoral européen 
        un littoral africain non moins étendu; être postés 
        sur les deux flancs de cette mer, de manière à la contenir 
        dans notre obéissance; pouvoir protéger notre commerce du 
        nord et du midi de cette vaste route où voyagent tant de richesses; 
        avoir, en cas de guerre, des ports et des arsenaux qui se regardent et 
        se secourent; être les maîtres de porter le combat à 
        droite ou à gauche; avoir, en cas de revers, des asiles devant 
        et derrière; c'était une position qui me semblait si belle, 
        si forte, si supérieure, que prévoir qu'on voudrait l'abandonner 
        m'eût semblé une injure au bon sens le plus grossier. "
 -------Il 
        fut, à son retour en France, en butte à d'odieuses attaques, 
        malgré ses 44 ans de glorieux services. Dans la brochure qu'il 
        publia pour se défendre, il s'exprimait en ces termes : " 
        Comprendre qu'une vie irréprochable ne me valait pas mieux qu'une 
        vie de trahison, qu'une pauvreté patente me comptait moins que 
        ne l'eût fait une fortune volée,... a été pour 
        moi une épouvantable désolation... On a laissé une 
        carrière de victoires trébucher sur un revers sans vouloir 
        lui laisser prendre un dernier laurier; on a pensé sans doute que 
        j'étais assez tombé pour m'empêcher de me relever. 
        Non, non, je me relève, moi. Je me relève pour rentrer la 
        tête haute dans mes foyers je me relève ! et sur le seuil 
        de cette maison paternelle où je retourne, je poserai entre moi 
        et la calomnie ma vieille épée de combat. Regardez-la bien; 
        elle n'a ni or ni diamants à sa monture; elle n'a que du sang sur 
        la lame : c'est le sang des ennemis de la France. "
 -------La 
        malchance de Clauzel a été de venir trop tôt, de former 
        des plans que les hommes au pouvoir ne pouvaient pas encore comprendre, 
        pour l'exécution desquels ils ne lui fournirent pas d'aide efficace, 
        et qui lui suscitèrent nombre d'ennemis et de détracteurs. 
        II voulait établir du premier coup l'autorité française 
        sur l'Algérie, en occupant les principaux centres, et en favorisant 
        par tous les moyens la colonisation; il avait entrevu la merveilleuse 
        destinée réservée à ce pays, et voulait en 
        hâter la réalisation. Guizot donnait la vraie raison de sa 
        disgrâce à la séance de la Chambre du 22 avril 1837 
        : " Le maréchal Clauzel, disait-il, 
        a été rappelé non parce qu'il a été 
        malheureux, mais parce qu'il était en Afrique le représentant 
        du système d'occupation universelle et guerroyante; occupation 
        militairement organisée sur tous les points importants de la Régence. 
        "
 -------L'histoire 
        rendra du moins justice à la hauteur de vues et à la clairvoyance 
        d'un des plus grands soldats de l'Algérie.
 
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