| PREMIÈRE PARTIE 
        : LES PRODUCTIONS VÉGÉTALES
 IV. 
        - Les fruits, les légumes, les primeurs ------Les hivers 
        doux et humides des régions voisines du littoral algérien 
        sont éminemment favorables à la production hâtive 
        des fruits et des légumes qui, arrivés les premiers sur 
        les marchés de consommation, prennent de ce fait le nom de primeurs. 
        Culture rémunératrice, car les primeurs se vendent cher, 
        elle ne pouvait que tenter les colons algériens. Aussi devons-nous 
        nous attendre à la rencontrer en Algérie partout où 
        cela est possible.------Deux 
        facteurs président à l'établissement des cultures 
        de primeurs : le climat, qui doit être tiède et humide 
        en hiver ; l'écoulement facile des produits, par le moyen 
        de transports rapides vers les centres de consommation.
 ------Le 
        climat, dans toute la région littoralienne et en de nombreux 
        points de la dépression sublittorale, est nettement favorable.
 ------Voyons 
        la seconde condition. Pour que la culture des primeurs soit rémunératrice, 
        il importe que les produits puissent parvenir rapidement, en quelques 
        jours seulement, sur les lieux de consommation, afin de n'y être 
        pas concurrencés par d'autres produits arrivant en même temps. 
        Les lieux de vente sont toute l'Europe du Nord, depuis l'Angleterre jusqu'à 
        la Pologne, en passant par la France, la Belgique, la Hollande, l'Allemagne. 
        Arriver avant les produits de Provence, d'Espagne 
        ou d'Italie, tout est là, sans quoi les primeurs algériennes 
        perdraient la moitié de leur valeur
 ------Il faut 
        donc que les cultures se trouvent à proximité d'un port 
        d'embarquement ; que, de ce port, partent fréquemment, à 
        destination de l'Europe, des paquebots rapides; que, depuis le port européen 
        de débarquement, l'acheminement vers les centres de consommation 
        soit effectué aussi rapidement que possible.
 ------Voilà, 
        en somme, qui réduit sérieusement les zones où la 
        culture des primeurs est économiquement possible. En Algérie, 
        les conditions ne sont entièrement remplies qu'aux abords immédiats 
        des grands ports : Alger, que des services rapides presque quotidiens 
        relient à la France; Oran, puis
 Philippeville et Bône. C'est à proximité de ces villes 
        que nous trouverons les cultures les plus importantes, et en particulier 
        les cultures de légumes ; plus loin, mais s'en écartant 
        assez peu, se rencontreront les cultures fruitières, dont les produits 
        moins fragiles peuvent supporter des transports plus longs.
 ------Au nombre 
        des légumes produits en Algérie il faut citer, par ordre 
        d'importance : les pommes de terre nouvelles, les tomates, les artichauts, 
        les haricots verts, les carottes, les petits pois, les fèves, les 
        courgettes, le fenouil, etc... Parmi les fruits : les agrumes (oranges, 
        mandarines, citrons, cédrats, etc...), les figues, les raisins 
        de table, les prunes. les abricots, les amandes, etc... Bien que les dattes 
        soient généralement classées au nombre des fruits, 
        c'est à dessein que nous ne les mentionnons pas dans cette liste 
        : d'abord parce qu'elles ne proviennent pas du Tell, mais sont une production 
        saharienne ; ensuite parce qu'elles ne sont pas des fruits de primeur 
        et que leur valeur intrinsèque est indépendante de l'époque 
        de leur production; elles feront tout à l'heure, après les 
        fruits et légumes du Tell, l'objet
 d'une rubrique spéciale.
 ------Les 
        agrumes. - On donne le nom générique 
        d'agrumes aux arbres appartenant au genre botanique des citrus. Cette 
        appellation commode, d'origine . italienne, permet de dénommer, 
        sans confusion possible, toute une catégorie d'arbres, et au surplus 
        leurs fruits. A cette catégorie appartiennent les orangers, les 
        mandariniers, les citronniers les cédratiers, les pamplemoussiers, 
        etc...------La culture 
        des agrumes est délicate, car elle exige une température 
        moyenne élevée et des sols frais ou facilement irrigables, 
        mais s'accommode mal du voisinage immédiat de la mer. C'est donc 
        dans les vallées abritées et dans les plaines de la dépression 
        sublittorale, où le sol est humide, ou, qui présentent des 
        possibilités d'irrigation, que nous rencontrerons les principales 
        plantations : les plaines d'Oran, du Sig et de l'Habra, la vallée 
        de la Mina, dans le département d'Oran, la plaine du Chéliff 
        aux environs d'Orléansville, et la Mitidja dans le département 
        d'Alger, les plaines de Bône et de Philippeville dans le département 
        de Constantine.
 ------Culture 
        d'importation très ancienne, elle s'est vite implantée en 
        Algérie. Limitée toutefois, avant l'occupation française, 
        à quelques vergers, elle a pris un essor 
        remarquable du fait de notre colonisation. ------Cela 
        n'a pas été sans à-coup, d'ailleurs, car la concurrence 
        des agrumes espagnoles et italiennes, sur tous les marchés européens, 
        est sérieuse. Mais les plantations n'en couvrent pas moins de 8.000 
        hectares, dont plus de la moitié se trouve dans le département 
        d'Alger, et plus particulièrement dans toute la bordure méridionale 
        de la Mitidja. C'est là que se trouvent les plus anciennes orangeries 
        de la colonie.; les agrumes y sont à tel point répandues 
        que les rues de Blida sont bordées d'orangers, comme à Paris 
        on orne les boulevards de marronniers ou de platanes. Les cultures plus 
        récentes des départements d'Oran et de Constantine occupent, 
        chacune, 2 000 hectares, et sont en progression constante : en moins de 
        dix années elles se sont accrues de 5 à 600 hectares.
 ------La production 
        moyenne des agrumes algériennes peut être évaluée 
        à 800.000 quintaux de fruits ; assez variable d'ailleurs, elle 
        oscille entre 600.000 et 1 million de quintaux. La plus forte production 
        moyenne est celle du département d'Alger, dont les plantations, 
        anciennes, donnent 500.000 quintaux ; dans le reste de la colonie, les 
        plantations plus récentes, dont une partie n'est pas encore en 
        pleine production, fournissent un rendement moindre : 125.000 en Oranie, 
        140.000 dans le département de Constantine.
 ------L'oranger 
        est, de toutes les agrumes, le plus répandu ; plus de 4.000 hectares 
        lui sont cônsacrés et produisent, bon an mal an, 350.000 
        quintaux de fruits rigoureusement sélectionnés et fort appréciés 
        sur les marchés de France et de l'étranger; les oranges 
        algériennes, dont les variétés sont nombreuses, sont 
        souvent classées parmi les qualités 
        de luxe, et celles de Blida ou de Bougie font prime sur le marché 
        londonien.
 ------Le 
        mandarinier n'est pas beaucoup moins important que l'oranger. 
        Plus de 3.000 hectares ont une production voisine de 400.000 quintaux. 
        La mandarine d'Algérie est goûtée du consommateur 
        européen ; la première venue sur les marchés extérieurs, 
        où elle fut longtemps la seule, elle a su y conserver, par sa qualité, 
        sa saveur, son bel aspect, une place prépondérante, malgré 
        la concurrence des mandarines espagnoles. Une mention spéciale, 
        parmi les mandarines, doit être faite à la clémentine 
        : très précoce, elle paraît avant les autres agrumes 
        et, de ce fait, se vend à des prix élevés; bien qu'elle 
        soit d'introduction toute récente, elle a été aussitôt 
        adoptée par le consommateur de Paris ou de la province ; un bel 
        avenir lui est réservé en Algérie.
 ------Une 
        place bien moins importante est donnée aux autres agrumes : citrons, 
        cédrats, kumquats, chinois, pamplemousses, etc... 700 hectares 
        à peine produisent 40 à 50.000 quintaux de fruits, consommés 
        en grande partie sur place.
 ------Cette 
        consommation locale, on s'en doute, est importante ; ces fruits de choix 
        trouvent facilement preneurs dans le pays. Il ne reste libre, pour l'exportation, 
        que le quart environ de la récolte ; cela représente un 
        peu plus de 200.000 quintaux de fruits, chiffre qui n'est pas négligeable. 
        Les mandarines et les clémentines constituent la majeure partie 
        des exportations, 150.000 quintaux ; les expéditions d'oranges 
        portent sur 50.000 quintaux ; les envois de citrons 3 000 quintaux) sont 
        négligeables. Ces exportations valent 25 millions de francs.
 ------C'est 
        la Métropole qui en absorbe la plus grande quantité; mais 
        l'Algérie trouve à l'étranger d'intéressants 
        débouchés, notamment pour ses mandarines : Angleterre, Suisse, 
        Hollande, Belgique, Allemagne, Danemark, etc... sont autant de clients 
        de plus en plus importants.
 ------Les 
        raisins de table. - L'Algérie produisait, dès avant 
        a conquête, des raisins de table pour la consommation locale; ceux 
        de Kabylie, par exemple, étaient fort appréciés.
 ------Mais 
        la production en était assez peu importante et n'avait aucun rapport 
        avec celle d'aujourd'hui.
 ------C'est 
        vers la production de fruits précoces, et principalement du chasselas 
        de Fontainebleau, introduit en 1860, que s'est nettement tournée 
        la culture du raisin de table. En certains points du littoral particulièrement 
        bien exposés, on rencontre de ces cultures, petites parcelles entourées 
        de haies artificielles, de roseaux ou de lentisques qui protègent 
        les vignes contre le siroco et les vents marins : le chasselas de Guyotville, 
        près d'Alger, est renommé ; tout le littoral algérois 
        se prête à cette culture; celui de Mostaganem et d'Arzew, 
        de Bône et de Philippeville aussi.
 ------La date 
        précoce à laquelle mûrit le chasselas en Algérie 
        (dès les premiers jours de juillet) et son excellente qualité 
        permettent de l'écouler facilement, longtemps avant celui du midi 
        de la France, sur les marchés de consommation. Aussi fait-il l'objet 
        d'une importante exportation 50.000 quintaux, valant une dizaine de millions, 
        sont chaque année expédiés en France (d'où 
        ils sont souvent réexportés) et à l'étranger.
 ------Les 
        prunes. - Aux premiers jours de mai, on voit apparaître 
        sur les marchés de Paris et de Londres les premières prunes 
        algériennes. Elles arrivent de la Mitidja, des plaines du Sig et 
        de l'Habra, des environs de Bône et de Philippeville, de la région 
        de Miliana. Les arrivages se succèdent, de plus en plus importants; 
        et jusqu'à la fin de l'été les marchés reçoivent 
        des prunes d'Algérie. Plus d'un million de kilogs sont ainsi expédiés 
        de la colonie, qui consacre à cette culture des superficies croissantes. 
        ------On compte 
        que, dans peu d'armés, lorsque les nouvelles plantations seront 
        en plein rapport, le chiffre des exportations sera décuplé.
 ------La culture 
        de la prune est surtout destinée au commerce d'exportation. Les 
        variétés cultivées sont en effet spécialement 
        choisies pour répondre au goût de la clientèle extérieure 
        il faut mentionner tout spécialement la prune japonaise, qui prend 
        une réelle importance parmi les primeurs d'Algérie; c'est 
        un beau fruit de choix fort goûté du consommateur anglais 
        ; sa précocité - il mûrit dès le début 
        de juin - lui donne une grande valeur, et sa maturité qui se prolonge 
        jusqu'en août lui permet d'alimenter longtemps ies marchés. 
        On fonde beaucoup d'espoirs sur cette culture.
 ------Les 
        figues sèches. - La figue ne devrait pas être classée 
        parmi les primeurs d'Algérie, car ce n'est pas en tant que primeur 
        qu'elle occupe sa véritable place dans l'économie algérienne, 
        à part un très petit commerce de figues fraîches, 
        qui trouvent surtout des débouchés dans la consommation 
        locale ; c'est en effet le fruit séché qui intéresse 
        l'exportation. Mais le figuier est un arbre du Tell; à ce titre, 
        il semble nécessaire de le citer avec les cultures arbustives de 
        cette région.
 ------Ce n'est 
        pas un arbre d'introduction récente; de tout temps l'indigène 
        l'a cultivé avec soin et a tiré de la figue sèche 
        un des principaux éléments de son alimentation. C'est en 
        Kabylie surtout que le figuier est l'objet des préoccupations du 
        cultivateur, car on estime à 700 kilos la quantité de figues 
        sèches consommées annuellement par une famille kabyle de 
        six personnes : dans ces populations très prolifiques, qui s'accroissent 
        chaque année, il importe que l'une des sources de leur alimentation 
        s'accroisse proportionnellement ; aussi le nombre des figuiers augmente-t-il 
        sans cesse. On en compte actuellement, dans toute l'Algérie. 5 
        à 6 millions.
 ------La consommation 
        locale, avons-nous dit, n'est pas le seul débouché des figues 
        sèches d'Algérie. L'exportation absorbe en effet plus de 
        cent mille quintaux, expédiés par les ports d'Alger et de 
        Bougie. La majorité est destinée à la consommation 
        de table, et concurrence heureusement les produits smyrniotes, espagnols 
        et italiens. Mais une certaine quantité est destinée à 
        des usages industriels dont l'un des plus curieux est la fabrication du 
        café de figues. La consommation de ce succédané du 
        café est importante en Europe Centrale, et surtout en Autriche 
        et en Tchécoslovaquie, où existent plusieurs usines qui 
        se livrent à la torréfaction des figues de qualité 
        inférieure. C'est un débouché sérieux pour 
        quelques produits d'Algérie. On utilise aussi les figues pour la 
        fabrication de l'alcool.
 ------Il y 
        aurait beaucoup à faire, semble-t-il, pour améliorer en 
        Algérie les procédés de séchage des figues. 
        L'indigène, en effet, se contente d'étaler les fruits au 
        soleil pendant quelques jours. Survienne un été pluvieux, 
        c'est toute la récolte qui, faute de séchage, se trouve 
        compromise. Peut-être serait-il avantageux d'installer dans les 
        principaux centres de production des fours spéciaux : le supplément 
        de dépense serait facilement compensé, et au-delà, 
        par l' augmentation certaine du, prix de vente.
 ------Autres 
        fruits. - D'autres cultures fruitières existent en Algérie, 
        mais dans de moindres proportions : pêches, brugnons, abricots, 
        nèfles, amandes mûrissent quinze jours avant leurs similaires 
        de la Métropole; ces fruits s'écoulent facilement, tant 
        sur place que sur les marchés français. La fraise, qui paraît 
        dès le mois de février, trouverait certainement une vente 
        facile à l'extérieur, mais sa fragilité en interdit 
        presque entièrement l'exportation.
 ------Certains 
        de ces fruits, après séchage, alimentent un certain commerce 
        d'exportation: c'est le cas des amandes, produites principalement 
        dans les régions de Miliana, de Médéa, de Cherchell 
        et d'Aïn-Bessem, et de l'abricot, dont les vergers 
        de l'Aurès ournissent de grandes quantités.
 ------Les 
        pommes de terre nouvelles. - La pomme de terre nouvelle est, des 
        cultures de primeur d'Algérie, la plus importante peut-être. 
        Les hivers exceptionnellement doux du littoral sont en effet éminemment 
        favorables à son extension, qui est remarquable. Aussi couvre-t-elle 
        chaque année, dans les environs immédiats des grands ports 
        d'exportation, une superficie moyenne de 10.000 hectares, dont plus de 
        la moitié à proximité d'Alger, dans le Sahel Algérois 
        et la Mitidja.
 ------Les 
        premières expéditions peuvent se faire dès novembre; 
        elles arrivent sur les marchés européens bien avant les 
        envois d'Espagne, longtemps avant ceux de Bretagne.
 ------Mais 
        cette culture à contre-saison - les semis ont lieu en août 
        et septembre - ne donne que de très faibles rendements : il faut 
        un quintal de semence pour récolter 2, 3, plus rarement 4 ou 5 
        quintaux. On le voit, la pomme de terre nouvelle d'Algérie n'acquiert 
        sa réelle valeur que dans son extrême précocité.
 ------Bon 
        an- mal an, cependant, la production algérienne atteint 400.000 
        quintaux, exportés pour la plus grande part, et rapportant de ce 
        fait une cinquantaine de millions de francs.
 ------Les 
        semences, toutefois, dégénèrent en Algérie; 
        il faut les renouveler souvent et acheter en Bretagne, en Angleterre, 
        en Hollande, des pommes de terre destinées à la plantation.
 ------Les 
        tomates, -- On distingue en Algérie trois périodes 
        d'exportation de la tomate : la première va de novembre à 
        janvier, la seconde a lieu au printemps, la troisième s'étend 
        de mai à juillet et août.
 ------Plus 
        de 100.000 quintaux, valant une dizaine de millions, sont expédiés 
        chaque année dans différents pays. Mais la consommation 
        locale absorbe de grandes quantités. D'importantes usines, établies 
        dans les centres de production, et principalement à Bône, 
        utilisent les fruits tardifs pour la fabrication de purées et de 
        concentrés ; c'est là une industrie prospère en Algérie, 
        qui est assurée de trouver des débouchés étendus.
 ------Autres 
        légumes. - D'autres légumes sont également 
        cultivés en Algérie comme primeurs ; nous nous contenterons 
        de les citer, en indiquant, pour les principaux, le volume des exportations 
        auxquelles donnent lieu ces cultures les artichauts 
        : 70 à 80.000 quintaux valant 10 millions, les 
        haricots verts : 40.000 quintaux, valant 12 millions, les 
        petits pois : 15 à 20.000 
        quintaux, valant 2 à 3 millions, les carottes 
        : 30.000 quintaux, valant 1 à 2 millions, les courgettes, 
        le fenouil, les navets, les patates, l'ail, etc...
 
 ------Les 
        Dattes. - A un double point de vue la datte joue en Algérie 
        un rôle considérable : rôle intérieur, parce 
        qu'elle est presque l'unique ressource du Sahara et qu'elle constitue 
        l'aliment principal de ses habitants ; rôle extérieur, car 
        elle fournit à l'exportation un contingent d'une soixantaine de 
        millions de francs.
 ------Arbre d'importation très ancienne, 
        le palmier-dattier représente pour les oasis du Sahara une richesse 
        inestimable que l'on pourrait chiffrer par milliards de francs. Grâce 
        à sa grande résistance aux écarts de température 
        du désert, il est par excellence l'arbre du Sahara, qu'il a permis 
        de vivifier en bien des points. " La tête 
        dans le feu et les pieds dans l'eau ", dit le proverbe 
        arabe; ce dicton énumère en quelques mots ses exigences 
        : de la chaleur, du soleil, et beaucoup d'humidité.
 ------De la chaleur, on en trouve partout 
        dans le Sahara, qui est, pourrait-on dire, le fils du soleil. Mais de 
        l'eau, cela est plus rare. Il existe toutefois, à des profondeurs 
        variables dans le sous-sol, des nappes d'eau plus ou moins importantes. 
        Ce sont quelquefois, comme dans le M'Zab, de véritables rivières 
        souterraines coulant à quelques mètres de profondeur : il 
        suffit, pour arroser les palmiers, de creuser des puits et de puiser l'eau. 
        Ou bien, comme dans le Souf, l'eau affleure ; en établissant les 
        jardins à quelques mètres plus bas que le niveau du sol, 
        dans des sortes de cuvettes, le palmier trempe ses racines dans un terrain 
        gorgé d'eau. Mais, le plus souvent, la nappe d'eau se trouve à 
        cent mètres, plusieurs centaines de mètres de profondeur, 
        et le puits à creuser devient une oeuvre de géant; l'eau, 
        sous pression, jaillit à gros débit. Si l'eau est rare et 
        n'est pas assemblée en une nappe unique, il faut, une fois le puits 
        foncé, creuser des galeries souterraines, 
        longues souvent de plusieurs kilomètres, qui captent l'eau éparse 
        dans le sous-sol. Grâce à ces pénibles travaux, effectués 
        souvent encore à mains d'hommes, les populations sédentaires 
        des oasis peuvent arroser leurs palmiers et les cultures qu'ils abritent. 
        Mais de plus en plus le travail humain fait place à la sonde moderne 
        : dans le Sud Algérien, plusieurs ateliers militaires, munis d'instruments 
        perfectionnés, foncent à de grandes profondeurs, en quelques 
        semaines, parfois en quelques jours, des puits artésiens qui donnent 
        aux indigènes la possibilité de revivifier des palmeraies 
        dépérissantes et d'étendre leurs plantations.
 ------Les bienfaits 
        de la colonisation française n'ont pas seulement consisté 
        en ces travaux hydrauliques ; elle a aussi perfectionné 
        la culture du dattier et fait connaître à l'indigène 
        des méthodes de plantation, d'entretien, de cueillette plus modernes 
        et plus rémunératrices.
 ------Tant et si bien qu'à l'heure 
        actuelle les palmeraies du Sud Algérien non seulement procurent 
        une abondante nourriture aux populations sahariennes et à leurs 
        animaux - on alimente en partie les chameaux avec des noyaux de dattes 
        - mais donnent lieu à un commerce d'échanges très 
        important avec l'Algérie du Nord (Tell et HautsPlateaux) et fournissent 
        à l'exportation des quantités appréciables de dattes.
 ------On estime à 4 à 700,000 
        quintaux la quantité utilisée pour l'alimentation des Sahariens, 
        2 à 300 000 sont expédiés dans le Nord, le plus souvent 
        ar l'intermédiaire des tribus nomades qui vont estiver dans des 
        régions moins arides et qui, au retour, rapportent aux Sahariens 
        les céréales du Tell. Quant à l'exportation, elle 
        représente plus de cent mille quintaux.
 ------L'extension des palmeraies algériennes 
        mérite d'être signalée : depuis 1913, le nombre de 
        palmiers s'est en effet accru de plus de 2 millions d'unités : 
        c'est, en une uinzaine d'années, une augmentation supérieure 
        à 40 %. On compte actuellement près de 7 millions de dattiers. 
        Les huit dixièmes environ sont en plein rapport et produisent 1 
        million et demi de quintaux de dattes ; le reste est constitué 
        par des arbres nouvellement plantés qui ne produiront que dans 
        quelques années. Lorsque les 7 millions de palmiers existant seront 
        en plein rapport, on pourra compter sur une production annuelle de 2 millions 
        de quintaux de fruits.
 ------On distingue trois variétés 
        de dattes
 ------1°/Les 
        deglet-nour,les meilleures et les plus fines, très sucrées 
        ; leur transparence leur a fait donner ce nom de "déglet-nour", 
        ou deglet-en-nour, qui signifie doigt de lumière.
 ------On ne compte qu'un million à 
        peine de dattiers deglet-nour; ce nombre augmentera encore - il a doublé 
        en quelques années - au détriment des autres variétés,, 
        de valeur moindre, car le produit très recherché, dans le 
        monde entier alimente presqu'entièrement l'exportation et, de ce 
        fait, est d'une grande valeur. La production des deglet-nour atteint actuellement 
        300.000 quintaux de fruits.
 ------2°/ Les 
        ghars, très molles, à chair très sucrée 
        gorgée d'un sirop très fluide. On place les fruits en tas 
        ; on recueille le sirop ou miel de dattes ; les fruits, dégorgés, 
        sont entassés ensuite dans des sacs en poils de chameaux ou des 
        peaux de chèvres pour former le pain de dattes, aliment principal 
        des caravanes, qui se conserve très longtemps. 3 millions et demi 
        de palmiers ghars produisent 600.000 quintaux de dattes. Le mot ghars, 
        ajoutons-nous, signifie robuste ; il vient de la rusticité du palmier 
        appartenant à cette variété.
 ------3 ° Les 
        degla-beïda sont des dattes sèches, c'est-à-dire 
        ne contenant pas, comme les précédentes, un miel sirupeux. 
        Leur couleur blanchâtre leur a fait donner le nom de degla-beïda 
        qui signifie doigt blanc. 2 millions 
        et demi de palmiers degla-beïda fournissent un peu plus de 600.000 
        quintaux de fruits.
 ------Commercialement, on distingue deux 
        sortes de dattes : les dattes fines, qui sont les deglet-nour, 
        et les dattes communes, qui sont les ghars et les degla-beïda.
 ------Ces dernières, jusqu'à 
        présent, n'intéressent guère l'exportation; quelques 
        milliers de quintaux, tout au plus, sont expédiés au Sénégal, 
        pour la consommation des indigènes, et en Espagne, qui les utilise 
        pour la fabrication de l'alcool.
 ------Cent kilos de dattes fournissent en 
        effet 25 litres d'une très bonne eau-de-vie. La presque totalité 
        des dattes communes est consommée par la population indigène.
 ------Bien plus intéressantes sont 
        les dattes fines. L'Algérie est à peu près le seul 
        pays à en produire de grandes quantités. Cent à cent 
        cinquante mille quintaux sont exportés chaque année, à 
        destination de Marseille principalement ; là existent de puissantes 
        maisons, disposant d'importants débouchés, qui procèdent 
        au triage des fruits, à leur mise en boîtes et à leur 
        réexpédition dans le monde entier.
 |  | ------Mais 
      en présence d'une production accrue dans des proportions considérables, 
      il importe que les expéditeurs algériens étendent encore 
      leurs débouchés. Ils s'y emploient d'ailleurs activement et 
      s'efforcent de nouer, avec les marchés extérieurs, des relations 
      directes; ils ont déjà obtenu de bons résultats, car 
      les exportations vers l'étranger. qui étaient de 3.000 quintaux 
      en 1913, sont passées, en, 1928, à plus de 11.000 quintaux 
      : la Tunisie, le Maroc, l'Angleterre achètent à l'Algérie 
      des quantités croissantes de dattes. -
 -----Conserves 
      de fruits et de légumes. Confitures.
 ------On ne saurait parler de la culture, des fruits 
      et des légumes en Algérie sans dire quelques mots d'une industrie 
      qui en est la conséquence et qui utilise une partie de la production 
      la confiturerie et la fabrication des conserves.
 ------Une telle extension des cultures fruitières 
      et maraîchères et une aussi grande variété de 
      produits devaient avoir en effet pour corollaire immédiat la création, 
      dans les grands centres de production, de cette industrie de transformation. 
      Tout en permettant d'accroître la récolte en lui assurant une 
      vente constante, elle a l'avantage d'utiliser des fruits ou des légumes 
      qui, sans être de mauvaise qualité, sont impropres à 
      la vente pour l'exportation, soit parce qu'ils sont trop mûrs ou qu'ils 
      n'ont pas bel aspect ou qu'ils sont d'une maturité trop tardive; 
      en cas de mévente, enfin, ou de récolte trop abondante, elle 
      procure un débouché presqu'illimité pour les produits 
      dont on ne trouve pas le placement.
 ------Son rôle économique est 
      indéniable : bien des produits inexportables, que l'on jetait autrefois, 
      sont maintenant transformés, et le cultivateur y trouve un surcroît 
      de bénéfices. Cet intérêt, d'ailleurs, n'a pas 
      échappé aux producteurs eux-mêmes, et l'on peut citer 
      tel groupement agricole de la Mitidja qui a installé une importante 
      usine de confitures où il utilise les produits de ses adhérents 
      qu'il ne peut exporter.
 ------Les usines sont nombreuses; avec l'accroissement 
      de la production, leur nombre s'accroîtra encore : il en existe à 
      Alger, à Oran, à Orléansville, à Perrégaux, 
      à Relizane, à Bône, à Bougie, à Constantine, 
      à Boufarik. Elles produisent toutes sortes de confitures de fruits, 
      des fruits confits, des conserves de légumes (petits pois, haricots, 
      artichauts, etc...), des purées et des concentrés de tomates. 
      Une grande partie de la consommation locale est assurée par ces fabriques 
      qui sont à même de répondre à tous les goûts 
      de la clientèle. Elles peuvent même exporter des quantités 
      de confitures et de conserves qui s'accroissent tous les ans : 10 à 
      15.000 quintaux de conserves de légumes, 2 à 3.000 de confitures, 
      2 à 300 de fruits confits, pour une valeur totale d'une dizaine de 
      millions de francs.
 V. 
        -- Productions alimentaires secondaires
  ------Nous avons indiqué 
        quelle était l'orientation générale de l'agriculture 
        algérienne; qu'au premier rang venait la culture des céréales, 
        qui reste encore la plus importante, malgré la concurrence que 
        lui fait depuis trente ou quarante ans la vigne ; que l'olivier et la 
        production fruitière et maraîchère sont deux autres 
        richesses d'une grande valeur. Mais notre nomenclature ne serait pas complète 
        si nous passions sous silence les autres productions alimentaires.------Elles couvrent chaque année 
        plus de cent mille hectares, et fournissent huit à neuf cent mille 
        quintaux de produits, dont une grosse partie est consommée sur 
        place et dont le tiers environ est livré à l'exportation. 
        Prises en bloc, elles représentent un capital en puissance de plus 
        d'un milliard de francs; aussi ne faut-il pas les négliger.
 ------Les légumes secs doivent être 
        cités en premier. Peutêtre aurait-on pu en parler avec les 
        céréales, car leur culture en est en quelque sorte la complémentaire. 
        C'est en effet sur les terres à céréales que sont 
        semés les légumes secs, soit qu'ils occupent le sol dans 
        le courant de la jachère, soit que, si le temps est favorable, 
        leur culture soit entreprise sur des terres qui, destinées primitivement 
        à une céréale, n'ont pu être ensemencées 
        à l'automne ou au début de l'hiver.
 ------Ils couvrent chaque année 90.000 
        hectares et produisent entre 4 et 500.000 quintaux de graines.
 ------C'est l'Oranie qui leur consacre les 
        plus grandes superficies, qui représentent la moitié au 
        moins de celles complantées en légumes secs dans toute l'Algérie; 
        les cultures, en développement constant, y sont d'ailleurs particulièrment 
        bien soignées, car on y récolte à peu près 
        les six dixièmes de la production totale. Les cultures canstantinoises 
        et algéroises sont beaucoup moins développées et 
        restent à peu près stationnaires.
 ------Les fèves 
        et les fèveroles sont, pour 
        l'Algérien, européen ou indigène, le légume 
        sec de prédilection ; c'est avec la semoule, un des principaux 
        éléments entrant dans la composition du couscous ; un plat 
        de fèves est un aliment complet qui pour les populations pauvres, 
        remplace la viande à bon compte. La consommation locale en absorbe 
        environ 150.000 quintaux. Aussi ces plantes occupent-elles chaque année 
        une trentaine de mille hectares, qui produisent 200.000 quintaux en moyenne. 
        L'exportation porte sur 70.000 quintaux. Ce qui manque, 15.000 quintaux 
        environ, est importe.
 ------A peu près autant que les fèves, 
        les pois chiches ou pois pointus, sont l'objet d'une grosse consommation. 
        On compte 26 à 27.000 hectares produisant plus de 130.000 quintaux, 
        dont cent mille sont exportés, 15 à 20.000 hectares sont 
        cultivés en pois secs et produisent 100.000 quintaux. 
        Les gesses couvrent 4 à 5.000 hectares et leur production 
        atteint en moyenne 20.000 quintaux. Quant aux haricots 
        et aux lentilles, ils n'occupent respectivement 
        que 1.000 et 1.500 hectares; la production ne dépasse guère, 
        pour chacune de ces cultures, 5 000 quintaux de graines.L'exportation 
        des pois, des gesses,des haricots et des lentilles est un peu supérieure 
        à 100.000 quintaux.
 ------Notons enfin que l'exportation des 
        légumes secs fait entrer chaque année en Algérie 
        une soixantaine de millions de francs.
 ------Nous avons déjà parlé, 
        à propos des primeurs ; de la pomme de terre. Il s'agissait là 
        d'une culture effectuée uniquement pour la production de tubercules 
        hâtifs destinés en majeure partie à l'exportation.
 ------Mais, pour les besoins de la consommation 
        locale, il faut cultiver les pommes de terre à gros rendement, 
        moins exigeantes, au point de vue du sol et du climat, et, partant d'un 
        prix de revient moindre. La culture est surtout localisée dans 
        la région de Perrégaux, dans la Mitidja et sur les hauts-Plateaux 
        Constantinois, au Sud de Constantine, depuis Ain-M'Lila jusqu'à 
        Batna. Elle a lieu aux mêmes époques qu'en France, c'est-à-dire 
        que les tubercules, plantés au printemps, sont récoltés 
        en été. Les superficies
 complantées atteignent 10.000 hectares environ, dont près 
        de la moitié se trouve dans le département d'Alger, les 
        cultures des départements d'Oran et de Constantine étant 
        à peu près égales.
 ------La production dépasse 400.000 
        quintaux. Mais elle n'est pas suffisante pour satisfaire aux besoins de 
        la population algérienne ; aussi est-il fait appel, pour une quantité 
        moindre, à l'importation.
 
 VI. 
        - Les cultures industrielles  ------Le 
        Tabac. - Le tabac est, de toutes les cultures industrielles, 
        la plus importante en Algérie. Les autres (coton, lin, ricin, plantes 
        aromatiques) n'occupent guère qu'une surface égale au tiers 
        de celle qui lui est consacrée.------A ce titre seulement, le tabac mériterait 
        une mention spéciale. Mais il joue, dans la colonie, un rôle 
        économique de premier plan. C'est en effet par vingtaines de mille, 
        par trentaines de mille que l'on peut estimer le nombre de personnes qu'il 
        fait vivre, tant du fait de sa culture que de son industrialisation. Et 
        la valeur seule des exportations de tabacs brut et fabriqué approche 
        deux cents millions de francs, soit environ le vingtième des exportations 
        totales d'Algérie.
 ------La liberté de culture et de 
        fabrication dont le tabac bénéficie en Algérie n'a 
        pas été pour peu de chose dans le développement qu'il 
        a pris depuis une trentaine d'années et particulièrement 
        depuis la guerre. Aucune entrave en effet n'est apportée par l'Administration; 
        quiconque. veut utiliser du tabac, ou se livrer à son industrialisation, 
        est autorisé à le faire ; il lui suffit de faire une déclaration 
        et de laisser contrôler par des agents de l'Etat sa culture et sa 
        fabrication.
 ------Il résulte de cette liberté 
        une concurrence intense dans la vente des produits fabriqués, par 
        voie de conséquence des prix excessivement bas qui ne peuvent qu'être 
        favorables au développement de la consommation. Celle-ci est en 
        Algérie considérable; on peut l'estimer à près 
        de 100.000 quintaux par an.
 ------Une autre cause de l'extension de la 
        culture du tabac réside dans les hauts cours pratiqués dès 
        le début de la guerre, qui ne pouvaient qu'inciter les cultivateurs 
        à consacrer à cette plante, dans toutes les régions 
        où cela était possible, des surfaces de plus en plus grandes. 
        Celles-ci, depuis 1913, ont en effet plus que doublé ; elles se 
        maintiennent actuellement entre 25 et 30.000 hectares.
 ------Il ne serait pas exact de dire que 
        le tabac est une plante d'introduction française. Longtemps avant 
        la conquête, plus de cent ans avant, on signalait en Afrique du 
        Nord clés cultures de grand tabac, ou tabac â fumer, et de 
        petit tabac, ou tabac â priser. Peut-être doit-on aux Turcs 
        l'introduction en Afrique de cette plante américaine.
 ------C'est à la bonne venue et à 
        l'excellente qualité des tabacs provenant des cultures indigènes 
        qu'il faut attribuer en grande partie l'établissement de plantations 
        par les premiers colons français. Une aide précieuse leur 
        fut apportée par la Régie Française, qui leur acheta 
        la récolte à un bon prix. Ils cultivaient 169 hectares en 
        1849, plus de 2.000 quatre ans plus tard.
 ------En même temps que l'on continuait 
        à cultiver les variétés indigènes, d'autres 
        variétés, à plus grand rendement, étaient 
        introduites. La culture se développait. 6.000 hectares étaient 
        cultivés en 1872 et produisaient 50.000 quintaux de feuilles.
 ------Si bien que, la progression continuant, 
        on comptait avant la guerre une dizaine de mille hectares cultivés 
        par 12.000 planteurs.
 ------Actuellement, avons-nous dit, c'est 
        sur 25 à 30.000 hectares que se fait la culture du tabac; plus 
        de 15.000 agriculteurs s'y livrent chaque année et récoltent 
        en moyenne 250.000 quintaux de feuilles.
 ------Les régions de production sont 
        principalement la Kabylie, la plaine des Issers, la Mitidja, le versant 
        Sud du Sahel d'Alger, la plaine et les environs de Bône, où 
        sont produits dés tabacs à fumer ; les tabacs à priser 
        proviennent des régions de Tlemcen et de Mascara, des Babor et 
        des oasis du Souf.
 ------Les deux tiers environ de la récolte 
        sont produits dans le département d'Alger, (Kabylie, Issers, Mitidja, 
        Sahel), qui consacre une quinzaine de mille hectares à la culture 
        du tabac à fumer. Dans le département de Constantine, on 
        compte 10 à 15.000 hectares, qui produisent 100.000 quintaux environ 
        de tabac à fumer et 2 à 3.000 de tabac à priser. 
        Les cultures oranaises sont peu étendues : 50 à 100 hectares 
        produisant un millier de quintaux.
 ------Les tabacs d'Algérie sont de 
        diverses qualités, dont beaucoup répondent aux besoins des 
        manufactures : tabacs bruns, tabacs blonds, toute une gamme très 
        variée se rencontre dans les cultures qui d'ailleurs sont spécialisées 
        suivant les régions. Et l'on parle d'entreprendre la culture des 
        tabacs fins d'Orient.
 ------Pour cette production de 250.000 quintaux, 
        l'Algérie trouve facilement des débouchés. Dans l'industrie 
        locale d'abord.
 ------L'extension de l'industrie du tabac 
        est la conséquence, d'une part du développement de la culture, 
        d'autre part de la liberté de fabrication. On compte actuellement 
        cinquante manufactures, situées pour la plupart à Alger, 
        à Oran, à Blida, à Constantine et à Bône, 
        et qui occupent un personnel de 5.000 ouvriers. Leur production de tabac 
        manufacturé peut être évaluée à 150.000 
        quintaux par an. Elles sont dotées d'un matériel très 
        perfectionné qui fait de quelques unes des établissements 
        de premier ordre.
 ------Elles ne se contentent pas de mettre 
        en ouvre les tabacs algériens. Pour les produits très variés 
        qu'elle fabrique, produits qui peuvent répondre à tous les 
        goûts de la clientèle du monde entier, il lui est nécessaire 
        de faire venir d'Orient, d'Extrême-Orient, d'Amérique, 40 
        à 50.000 quintaux de tabacs en feuilles.
 ------Elle satisfait ainsi presqu'entiérement 
        aux besoins de la consommation locale et peut même exporter des 
        quantités importantes de tabacs de toutes sortes : 10 à 
        20 millions de cigares; 30 à 40.000 quintaux de cigarettes, 10.000 
        quintaux de tabacs fabriqués autres. Elle expédie une partie 
        de sa production en France; quelques pays étrangers lui en achètent 
        une proportion assez considérable; mais les colonies, et surtout 
        l'Indochine et le Maroc, constituent sa plus sérieuse clientèle.
 ------Mais, une fois satisfaits les besoins 
        de l'industrie locale, il reste disponible sur la récolte 150 à 
        200.000 quintaux. Ils sont exportés et la Régie française, 
        qui possède en Algérie d'importants magasins, en achète 
        des quantités très fortes (25.000 quintaux au minimum pour 
        la seule région de Bône).
 ------Avant de terminer, nous signalerons 
        que, dans les principales régions productrices, les planteurs se 
        sont groupés pour la création de magasins qui reçoivent 
        leur production, procèdent au triage et au séchage et assurent 
        l'écoulement aux meilleurs prix. Il n'est pas douteux que ce mouvement 
        coopératif, qui a été encouragé par l'Administration, 
        a eu les plus heureux effets sur l'extension de la culture du tabac en 
        Algérie.
 ------Le 
        coton, les plantes à parfum, le lin, le ricin, l'alfa------
 Les autres cultures industrielles n'occupent qu'une place assez 
        peu importante dans l'agriculture algérienne. Lorsqu'on a cité 
        le coton, les plantes à parfum, le lin et le ricin, on en a épuisé 
        la liste.
 ------L'essor du coton, depuis la guerre, 
        a été remarquable , mais, ramené dans son plan véritable, 
        il ne parait pas devoir, en l'état actuel des choses, se développer 
        beaucoup plus. Peut-être, lorsque les travaux hydrauliques actuellement 
        en cours d'exécution seront achevés et permettront l'irrigation 
        de vastes espaces, assisterons-nous à une nouvelle extension de 
        sa culture.
 ------C'est une plante exigeante, en effet, 
        qui trouve sa place beaucoup plus dans les régions tropicales, 
        car elle demande un printemps chaud, exempt de gelées tardives 
        (malheureusement fréquentes en Algérie), beaucoup d'eau 
        et de chaleur en été, et un automne sec au moment de la 
        récolte.
 ------Quoi qu'il en soit, le coton trouve 
        ces conditions réalisées en grande partie dans certaines 
        régions bien abritées de la dépression sublittorale, 
        et quelques plaines et vallées littoraliennes : plaines d'Oran, 
        du Sig et de l'Habra, vallée du Chélif, Mitidja, plaines 
        de Philippeville et de Bône ; soit que les irrigations y soient 
        possibles , soit que le sol soit profond et frais. Les pluies d'automne 
        y sont pourtant une gêne pour la récolte.
 ------Depuis longtemps, le coton était 
        cultivé en Algérie, mais, au moment de la prise d'Alger, 
        la culture était en régression très sérieuse 
        et se trouvait cantonnée dans quelques oasis sahariennes. Des essais 
        furent effectués par les colons français ; on assista, vers 
        1860, au moment de la guerre de Sécession des Etats-Unis, par suite 
        de la hausse des cours, à une véritable fièvre du 
        coton, qu'encourageait un système de primes à la culture 
        mal appliqué : en 1866; on récoltait 9.000 quintaux. Mais, 
        dès 1875, les primes étant supprimées, la culture 
        était abandonnée. Elle reprenait seulement au début 
        de ce siècle, sur 300 hectares situés autour d'Orléansville.
 ------Les prix élevés d'après-guerre 
        eurent pour conséquence de lui donner un nouvel essor : actuellement 
        5 à 6.000 hectares lui sont consacrés. La production est 
        d'environ 50.000 quintaux de coton brut, qui donnent, à l'égrenage, 
        une quinzaine de mille quintaux de fibres.
 ------Le coton d'Algérie est d'excellente 
        qualité; il est très comparable au coton égyptien 
        longue-soie qu'il peut remplacer dans tous ses usages.
 ------Les planteurs ont créé, 
        dans les centres de production, des coopératives qui effectuent 
        le triage et l'égrenage de la récolte et livrent la fibre 
        et la graine à l'exportation. La France, et particulièrement 
        l'industrie textile de l'Est, est la principale cliente de l'Algérie 
        pour les fibres de coton. Par contre, les exportations de graines (25 
        à 30.000 quintaux) sont dirigées en presque totalité 
        sur les huileries anglaises.
 ------La valeur des exportations de fibres 
        et de graines de coton dépasse 25 millions de francs.
 ------Au moins aussi importante, au point 
        de vue des exportations, est la culture des plantes à parfums : 
        c'est en effet 25 à 30 millions que leur vente à l'extérieur 
        rapporte à l'Algérie.
 ------Au premier rang, nous devons placer 
        le géranium-rosat, qui couvre environ 
        4.000 hectares.
 ------Cette culture d'origine française 
        a été implantée en Algérie par des colons 
        originaires de Grasse. La plante, qui est de la famille du géranium 
        cultivé dans les jardins pour l'ornement, a ceci de particulier 
        que sa feuille contient une huile essentielle, le géraniol, 
        dont l'odeur rappelle celle de la rose. Il suffit donc de distiller la 
        plante pour obtenir cette essence très recherchée par la 
        parfumerie, qui l'utilise non seulement pour fabriquer des essences de 
        rose à bon marché, mais encore des parfums de fleurs très 
        variés (violette, oeillet, etc.... etc...). L'emploi de l'essence 
        de géranium est de plus en plus répandu, et la demande de 
        la parfumerie est active. La culture du géranium est localisée 
        dans la Mitidja; on ne rencontre, dans le département de Constantine, 
        que 2 à 300 hectares. La production dépasse, en année 
        moyenne, 60.000 kilos d'essence, qui sont presqu'entièrement exportés, 
        pour près de la moitié en France, le reste à destination 
        de l'étranger, et plus particulièrement des EtatsUnis, qui 
        en font une forte consommation,
 ------Les autres plantes à parfum 
        (rosier, bigaradier, cassie, verveine, citronnelle, etc...) ne couvrent 
        qu'une cinquantainé d'hectares, situés en presque totalité 
        dans la Mitidja. La production est comprise entre 2 et 300 kilos d'essence.
 ------On ne citera le 
        lin que pour mémoire; sa culture est en régression 
        constante et n'occupe plus qu'une centaine d'hectares. Il est cultivé 
        pour la graine, dont il produit environ 500 quintaux. Il donne une filasse 
        abondante mais grossière, qui n'est utilisée que pour la 
        fabricatixrni de 'l'étoupe. Sans doute pourrait-on cultiver le 
        lin pour la production de filasses; mais, jusqu'à présent, 
        on s'est heurté à des difficultés de rouissage en 
        rivière insurmontables, dues au manque d'eau. Des procédés 
        nouveaux, exigeant de bien moindres quantités d'eau, pourraient 
        sans doute être utilisés ; des usines fonctionnent en Tunisie 
        et au Maroc pour leur exploitation. Mais, jusqu'à présent, 
        la culture du lin ne semble pas appelée à un grand développement 
        en Algérie.
 ------Plus intéressant est 
        le ricin. Sa graine fournit une huile très employée 
        actuellement dans le graissage des moteurs à explosion, ceux de 
        l'aviation en particulier. On a beaucoup préconisé sa culture 
        en Algérie dans les dernières années, car la France 
        est tributaire de l'Extrême-Orient pour le ricin qui lui est nécessaire. 
        A la fin de la guerre, à la demande de l'Administration, des superficies 
        importantes furent consacrées au ricin; mais, faute de débouchés, 
        la culture fut abandonnée. Elle a été reprise l'année 
        dernière, dans le département d'Oran. Actuellement le Service 
        des Poudres achète toute la production algérienne. Les résultats 
        obtenus ont été très satisfaisants et ne pourront 
        qu'encourager le développement de cette culture intéressante 
        au plus haut chef pour la défense nationale.
 
   CHAPITRE IILes productions végétales naturelles
 C'est à la colonisation française que revient 
        le mérite de l'exploitation et de la mise en valeur des richesses 
        naturelles produites par le sol algérien. On peut dire qu'elles 
        ont largement contribué au développement économique 
        de l'Algérie: alfa, crin végétal, liège sont 
        des productions essentiellement algériennes ; leur récolte 
        et leur industrialisation sont une source de revenus considérable 
        pour des populations entières, pour des milliers d'individus. Leurrôle économique et social a, dans la vie de l'Algérie, 
        une
 importance considérable ; pour s'en faire une idée, il
 suffira de savoir que la valeur de leurs exportations dépasse
 225 millions de francs, plus du vingtième des exportations
 totales.
 I. - L'alfa L'.alfa, plante de la steppe, nous conduit sur les HautsPlateaux.A perte de vue, des espaces plats ou à peine vallonnés m'étendent 
        devant nous, couverts d'une herbe verte au printemps, grisâtre en 
        été, qui ondule sans arrêt sous les rafales de vent. 
        On dirait d'une mer agitée par la brise c'est la mer d'alfa.
 Elle couvre 4 millions d'hectares sur les Hauts-Plateaux,
 de la frontière marocaine à la frontière tunisienne; 
        à l'ouest, elle déborde jusque dans le Tell, atteignant 
        le littoral ; au
 centre, elle couvre quelques milliers d'hectares dans le
 Sahara.
 
 
 
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