| CHAPITRE 
        VI ÉVOLUTION DU 
        COMMERCE L'Outillage -------On a parlé 
        de l'Algérie comme si elle avait poussé spontanément, 
        tumultueusement. Et c'est bien ce qu'elle a fait, en effet, comme tous 
        les êtres vivants et vivaces. -------Elle a poussé 
        comme un arbre. Mais il serait injuste d'oublier les soins du jardinier. -------On a déjà 
        signalé en passant combien les efforts du Gouvernement général 
        ont été somme toute efficaces en matière de colonisation 
        (système des villages de colonisation) ; c'est-à-dire un 
        point tout à fait essentiel. -------Dans le maniement 
        des indigènes le réalisme prudent du Gouvernement général 
        s'est parfaitement concilié avec une philanthropie active (uvres 
        d'assistance, uvre scolaire). -------À 
        la transformation économique de l'Algérie le Gouvernement 
        général a certainement pris sa part considérable. -------Sur le terrain 
        domanial il est intervenu directement. On a noté l'uvre efficace 
        du service forestier depuis 1892. Il faut noter le soin qu'a pris le service 
        de l'agriculture de préparer et d'éclairer le terrain avec 
        des organisations scolaires et scientifiques. -------Il a créé 
        l'École d'Agriculture de Maison-Carrée, qui rend 
        de grands services, en formant aux méthodes nécessairement 
        particulières de l'agriculture africaine des jeunes gens, futurs 
        colons, qui sont souvent de jeunes métropolitains fraîchement 
        immigrés. -------Il a parsemé 
        l'Algérie, surtout dans le sud, de jardins botaniques d'expérimentation, 
        qui fournissent aux colons une documentation sur les possibilités 
        de cultures nouvelles. -------La bergerie 
        modèle de Tadmyt, destinée à agir par l'exemple 
        sur l'élevage indigène, a pris une initiative scientifique 
        hardie et intelligente. Elle a fait appel aux méthodes et à 
        la personne du docteur Voronoff, pour améliorer la race ovine. -------Etc... il 
        est bien entendu que, dans tous les domaines, il serait absurde et injuste 
        de ne pas souligner l'action administrative.  Création 
        du Réseau des Chemins de Fer et des Routes -------Mais il y 
        a un domaine où elle est absolument prépondérante; 
        c'est l'État évidemment, l'État tout seul, qui a 
        constitué l'outillage général de la colonie. -------Là 
        aussi il y a création totale, en partant du néant. L'Algérie 
        turque n'avait pas une route, pas un pont, et à proprement parler 
        pas une voiture. Dans la mesure où on circulait on le faisait à 
        dos de bêtes, ou à pied, par de vagues sentiers, tracés 
        et entretenus par les sabots des chevaux et par le passage des piétons.-------L'Algérie 
        française a dû évidemment se donner un outillage de 
        circulation sans lequel la transformation économique aurait été 
        impossible.
 -------La circulation 
        de la vie entre le cur et les extrémités de l'organisme 
        suppose naturellement un réseau de voies de communications. Au 
        début de l'année 1925 les statistiques officielles comptent 
        4.724 kilomètres de chemins de fer, 5.351 kilomètres de 
        routes nationales. Publications officielles en main, on pourrait dénombrer 
        les routes départementales et les chemins vicinaux; distinguer 
        les chemins de fer d'intérêt général, d'intérêt 
        local, les tramways.. Cela revient à dire en une phrase que l'Algérie 
        a son outillage. Et naturellement elle l'a créé. -------On pourrait 
        exposer administrativement les étapes de cette création, 
        les études entreprises en 1850, le grand projet de 1857, la loi 
        du 20 juin 1860, l'inauguration d'Alger. Blida en 1862, d'Alger-Oran en 
        1871, etc... -------On craindrait 
        de fatiguer inutilement l'attention.On voudrait en revanche faire sentir la résistance des obstacles 
        surmontés dans ce pays très particulier qu'est l'Algérie. 
        C'est-à-dire permettre à l'imagination de mesurer la nature 
        et l'intensité de l'effort accompli.
 -------Nous retrouvons 
        ici, comme à propos de mines, un inconvénient de l'union 
        étroite entre l'Algérie et la métropole.-------Pour 
        le rendre sensible il faut jeter un coup d'il comparatif sur le 
        réseau des voies ferrées tunisiennes. En grande partie ce 
        réseau est composé de chemins de fer miniers.
 -------Par chemins 
        de fer miniers il ne faut pas entendre des chemins de fer construits par 
        le protectorat pour desservir des centres miniers, mais bien des voies 
        ferrées qui ont été construites aux frais des sociétés 
        concessionnaires de mines; et bien entendu ces sociétés 
        y trouvent leur compte : tracé, pentes, poids des rails, matériel, 
        tout a été combiné pour amener le minerai à 
        quai au meilleur marché possible. Politique intelligente qui a 
        donné satisfaction à des besoins multiples. La Tunisie est 
        desservie par des voies ferrées qui n'ont rien coûté 
        au contribuable. Et la vie minière a pris un grand essor. -------C'est que 
        la Tunisie est maîtresse chez elle. Quand elle prend la décision 
        de construire un chemin de fer, la signature du bey, c'est-à-dire 
        en pratique du Résident général, suffit à 
        déclencher l'exécution. -------L'Algérie 
        n'est pas du tout dans la même situation. Elle n'est pas maîtresse 
        de construire à sa guise les chemins de fer dont elle a besoin, 
        parce que les chemins de fer algériens sont des chemins de fer 
        français comme les autres. La puissance de cet obstacle est apparue 
        avec éclat dans l'affaire de l'Ouenza. -------Il fallait 
        que la Compagnie de l'Ouenza construisît un chemin de fer nouveau, 
        le sien. Parfait, mais l'Algérie c'est la France, et en territoire 
        français on ne peut pas construire un chemin de fer sans l'autorisation 
        du Parlement. C'est là que, en dernière analyse, fut livrée 
        la bataille. Au Parlement et autour de lui. Si la bataille de l'Ouenza 
        a duré dix ans, ce fut assurément parce que Paris décide 
        en matière de voies ferrées algériennes. Et en définitive, 
        le chemin de fer de l'Ouenza, qui aurait rendu d'immenses services généraux, 
        et qui aurait été construit sans bourse délier, ne 
        l'a pas été du tout. -------On cite l'exemple 
        de l'Ouenza parce qu'il a chance d'éveiller encore des souvenirs; 
        on pourrait en citer d'autres, aussi instructifs, mais obscurs. -------Inutile d'insister. 
        En matière de travaux publics, c'est évidemment un inconvénient 
        de ne pouvoir décider sur place, de dépendre d'un centre 
        comme Paris, lointain et nécessairement mal informé. -------La 
        construction des chemins de fer algériens s'est heurtée 
        à d'autres obstacles, encore plus profonds. -------Précisément 
        parce qu'il n'y avait rien, nous n'avons pas été 
        guidés par un réseau antique de chemins. La vie économique, 
        que nous faisions naître, n'obéissait pas toujours aux prévisions 
        précises de nos tracés nouveaux. On allait un peu à 
        l'aveuglette. -------Lors même 
        qu'il y aurait eu dans la distribution de la vie indigène des indices 
        précieux, nous n'avons pas toujours su les interpréter. 
        Nous n'avons pas d'ancêtres ici, nous ne sommes pas mis en garde 
        par nos traditions et nos instincts, nous ignorons des choses énormes. 
        Jamais nous n'aurions pu sur notre propre sol nous tromper aussi grossièrement 
        que nous l'avons fait quelquefois. -------Un excellent 
        exemple est l'antinomie entre le tracé dès crêtes 
        et celui des vallées.  -------Le sentier 
        indigène suit les crêtes, sans doute parce que le cavalier 
        ou le piéton se soucie peu de perdre la coté, au rebours 
        de l'ingénieur qui étudie un tracé. Mais l'indigène, 
        obscurément, sans qu'il puisse nous en rendre un compte explicite, 
        a une autre raison plus sérieuse. -------Les 
        rivières d'Algérie ne sont pas honnêtes rivières 
        de chez nous. Ce sont des oueds; leurs lits, 
        empanachés de beaux lauriers-rose, mais vibrants de moustiques, 
        sont fiévreux; dans leurs vallées torrentielles s'étalent 
        beaucoup plus de cailloux que de terre végétale : ils n'ont 
        pas d'eau en été, au moment précis où il en 
        faudrait, mais en hiver ils roulent des crues terribles qui emportent 
        tout. -------L'oued algérien 
        repousse la vie humaine autant que la rivière française 
        l'attire. Ce sont les crêtes qui groupent la vie indigène, 
        'et c'est entre les groupes humains que lés communications s'établissent. -------Il était 
        naturel que nos ingénieurs aient eu de la peine à s'assimiler 
        cette notion, en contradiction avec leur atavisme et leur entraînement. -------C'étaient 
        des techniciens âgés, formés en France. Le chemin 
        de fer P.-L.-M. suit le Rhône, puis la Saône, puis l'Yonne, 
        puis la Seine. Ces vieux messieurs, qui devaient ajouter une ramification 
        nouvelle au réseau algérien, avaient chacun, dans son cerveau 
        complexe et fixé depuis l'adolescence, une image de notre réseau 
        français, calqué sur le réseau de nos rivières. 
        Ils n'avaient rien de mieux à faire qu'à obéir à 
        l'influence inconsciente de leur éducation technique, qui était 
        leur raison d'être Le tracé qui suivait la vallée 
        était a priori celui qu'on pouvait s'attendre à leur voir 
        choisir. -------Ainsi est-il 
        arrivé qu'ils se sont trompés. Voici un cas où ils 
        l'avouent. Il s'agit du petit chemin de fer à voie étroite 
        long d'une centaine de kilomètres, qui réunit Tiaret à 
        Relizane (la moitié méridionale de la ligne Tiaret-Mostaganem). -------Ce chemin 
        de fer avait été construit en 1885, à la française, 
        dans la vallée même de l'oued Mina, gros affluent du Cheliff. 
        Vingt ans après, en 1908, dans l'exposé des motifs d'un 
        projet de loi, qui a été voté, les pouvoirs publics 
        déclarent « complètement 
        déçues... les espérances » qu'avait 
        fait concevoir le tracé par la Mina : il est désormais entendu 
        qu'une erreur a été commise dans le choix du tracé. -------À 
        partir de 1908, on a donc décidé la construction d'une nouvelle 
        ligne entre Tiaret et Relizane, passant par Zemmora et Mendès, 
        c'est-à-dire par les crêtes; elle suit les anciens sentiers 
        indigènes. -------La construction 
        de la ligne a été retardée par la guerre. En 1928, 
        elle vient d'être ouverte à la circulation de bout en bout. -------Ceci est 
        un cas intéressant parce qu'indéniable, officiellement admis; 
        l'erreur commise et sa rectification peuvent se lire sur la carte. -------Une erreur 
        analogue, mais de plus grande amplitude, n'est pas encore ouvertement 
        avouée, mais devra sans doute être corrigée. II ne 
        s'agit plus d'une petite ligne accessoire, mais de la grande voie de rocade 
        qui suit la mer de bout en bout, l'axe du Tell tout entier. Entre Alger 
        et Sétif, les constructeurs de ce chemin de fer ont naturellement 
        choisi, comme d'habitude, le tracé des vallées. La voie s'insinue par les gorges de Palestro, colle à l'oued Isser 
        et franchit enfin les Portes de Fer, illustrées par le passage 
        du duc d'Orléans. Le souvenir de ce nom auguste et de cette expédition 
        mémorable était une incitation supplémentaire à 
        choisir le tracé.
   -------La colonisation 
        n'a pas suivi. Entre les superbes vignobles de la Mitidja et les belles 
        terres à blé de Sétif, on ne voit guère autre 
        chose que la forêt, la brousse et le rocher. C'est une section pittoresque, 
        improductive et coûteuse. -------Au temps 
        des Turcs, et déjà des Romains, depuis deux millénaires, 
        depuis toujours avant notre venue, les communications entre la région 
        de Sétif et celle d'Alger ont toujours passé plus au sud, 
        par le chemin des crêtes, jalonné par Aumale et Médéa. -------Il faudra 
        y revenir, ce n'est déjà plus une simple hypothèse; 
        une rectification considérable sera apportée 
        là à la grande voie de rocade, axe du Tell. -------Ce sont là, 
        à tout prendre, des erreurs vénielles, parce qu'inévitables. 
        Aux prises avec une tâche pareille, il faut bien se résigner 
        à avoir essuyé des plâtres. -------Voici qui 
        est plus grave. -------Un grand 
        nombre de chemins de fer algériens sont de petits chemins de fer 
        à voie étroite, en particulier toutes les voies ferrées 
        de pénétration vers le Sud, sauf une seule (Constantine-Biskra). -------L'insuffisance 
        de ces chemins de fer apparaît aujourd'hui éclatante. -------Si l'Algérie 
        n'a jamais pu exploiter les phosphates du Djebel Onk, il est de notoriété 
        publique que la responsabilité en incombe, pour une large part, 
        à l'insuffisance du vieux petit chemin de fer Souk-Ahras-Tebessa. -------En un cas 
        au moins, l'insuffisance est officiellement avouée.-------Le 
        plus long des chemins de fer algériens à voie étroite 
        est celui qui unit Oran à Colomb-Béchar : ce n'est rien 
        moins que la voie de pénétration d'Oran au Sahara.
 -------Autour du 
        terminus saharien s'est révélée l'existence d'une 
        grande région minéralisée, qu'il est impossible de 
        mettre en valeur avec le chemin de fer actuel. En conséquence, 
        on vient officiellement de concéder la construction d'une ligne 
        nouvelle doublant l'ancienne. Ce sera un chemin de fer normal cette fois, 
        à voie large, allant de Bau-Arfa à Nemours. -------À 
        qui incombe la responsabilité de ce qu'il est bien permis d'appeler 
        une énorme malfaçon ? A personne et à tout le monde, 
        à nous tous, à l'esprit public. C'est parfaitement clair 
        et archiconnu. -------Voici comment 
        un ingénieur en chef, dans un document officiel de 1913, analyse 
        les conditions d'établissement d'un chemin de fer à voie 
        étroite. -------« 
        On y avait toléré, dit-il, des courbes d'un rayon très 
        court (100 mètres), des successions rapides d'inflexions en sens 
        contraire (à 40 mètres d'intervalle) » ; 
        ces détails techniques illustrent l'expression, courante en Algérie, 
        de « tortillard » ; on 
        l'applique à tous ces petits chemins de fer dédaigneux de 
        la ligne droite, plus court chemin d'un point à un autre. L'État 
        garantissait à la Compagnie l'intérêt du capital engagé, 
        bien entendu; et dans le calcul de ces intérêts on faisait 
        entrer le prorata de la somme totale des kilomètres. La Compagnie 
        a donc construit une ligne aussi longue que possible; dans les cas où 
        elle aurait pu, au moyen d'un travail d'art, tunnel ou pont, supprimer 
        un long détour, invariablement elle a choisi le détour; 
        bref, elle a « tortillé » de son mieux. -------Une phrase 
        de l'ingénieur en chef est à retenir: elle est précise 
        et modérée, dans le style d'un rapport officiel auquel elle 
        est empruntée: « les caractéristiques 
        rappelées « ci-dessus correspondent à une construction 
        économique, « elles ne se justifient, a priori, que pour 
        une ligne à très « faible trafic, dont la raison d'être 
        est plutôt politique et « militaire que commerciale ». 
        C'est parfaitement clair, et ça peut être généralisé. -------Tout le réseau 
        algérien est plus ou moins dans le même cas, les gens qui 
        l'ont projeté ne croyaient pas à son avenir. Personne n'a 
        jamais eu confiance dans l'avenir de l'Algérie. Je suppose que 
        cela est évident, et que cela n'est pas contesté. -------La France, 
        d'une façon générale, depuis un demi-siècle, 
        ne peut pas être soupçonnée d'avoir vu « kolossal 
        », même dans ses propres affaires. Et il est bien sûr 
        qu'elle a toujours eu de l'Algérie une opinion médiocre. -------Le réseau 
        de chemins de fer a été construit parce qu'on ne pouvait 
        pas décidément faire autrement, avec un haussement d'épaules 
        résigne, sous la réserve mentale : « 
        tâchons que cette bêtise inévitable ne nous coûte 
        pas trop cher ». Et naturellement, c'est précisément 
        cette disposition d'esprit-là qui a entraîné des dépenses 
        immenses. Rien n'est coûteux comme de suivre en gémissant. -------Ceci se laisserait 
        résumer en une phrase qui ne s'appliquerait pas seulement, hélas! 
        aux chemins de fer algériens. Au rebours des États-Unis, 
        la France est un pays où l'espoir n'a pas de marché. Le 
        Français n'ose pas escompter l'avenir. C'est une maladie nationale. -------Qu'on ne 
        se méprenne pas cependant sur l'intention et la portée de 
        ces critiques. On a souligné les erreurs commises parce qu'elles 
        font apparaître les difficultés de la tâche, et qu'elles 
        évoquent par conséquent l'énormité de la besogne 
        réalisée. -------Par-dessus 
        des obstacles beaucoup plus grands qu'en France, à travers des 
        ignorances, des hésitations, des tâtonnements, des reprises 
        ; avec une énergie confuse, parfois aveugle, mais obstinée 
        et puissante, l'Algérie s'est tout de même construit son 
        réseau, et elle continue à le construire.  -------Elle continue: 
        en matière de chemins de fer, comme en toutes les autres, la création 
        ne s'arrête pas, rien n'est fixé. Naturellement le réseau 
        des routes avait précédé celui des chemins de fer, 
        depuis la guerre l'énorme développement des services automobiles 
        a décuplé la vie de ce réseau, et compromis l'équilibre 
        budgétaire des chemins de fer. -------Mais ceci 
        n'est pas une question proprement algérienne. C'est une question 
        mondiale, et en particulier française.  Création 
        des Ports et des Capitales -------Une autre 
        partie essentielle de l'outillage, ce sont les ports. En Algérie, 
        l'étude de leur création ne peut pas être disjointe 
        de celle des capitales. -------On s'en aperçoit 
        à une comparaison sommaire des trois chefs-lieux des trois départements 
        algériens.-------Alger 
        est une ville de 215.000 habitants, dont 160,000 Européens et 55.000 
        Indigènes.
 -------Oran 
        a 150.000 habitants, dont 125.000 Européens et 25.000 Indigènes.
 -------Ce 
        sont des villes européennes.
 -------On a le droit 
        d'appeler Alger et Oran des villes monstres. Près de 300.000 Européens 
        agglomérés dans ces deux villes seules, sur un total inférieur 
        à 900.000 colons. Un tiers, c'est énorme. L'Algérie 
        est au régime des villes monstres. Ainsi s'extériorise la 
        constitution sociale du pays : une population rurale indigène encadrée 
        par une bourgeoisie européenne.Notez que la capitale du troisième département algérien, 
        Constantine, reste loin en arrière. 93.000 habitants, dont la moitié 
        Indigènes. La cause de ce retard est très évidente. 
        Constantine est à 80 kilomètres de la mer. Ses ports vivent 
        à part, Philippeville, et surtout Bône, la grande rivale 
        de Constantine. Les villes monstres ont poussé au bord de la mer.
   |  | -------En Oranie, 
        avant 1830, la vieille capitale était incontestablement Tlemcen, 
        qu'Oran a facilement et énormément surclassé parce 
        que Tlemcen n'était pas un port. -------Je suppose 
        que c'est normal. Dans les colonies et les anciennes colonies anglaises, 
        les capitales sont des ports : New-York, Le Cap, Sydney et Melbourne. 
        Ainsi reste marqué l'ombilic par lequel l'enfant se rattachait 
        à la mère. -------Aucune de 
        ces capitales n'est une création de toutes pièces, non pas 
        même Oran, qui était bien peu de chose en 1830, mais qui 
        conserve dans ses vieilles fortifications, blasonnées aux armes 
        d'Espagne, le souvenir d'un vieux passé.-------Il 
        est bien possible que nous nous soyons installés trop docilement 
        sur les emplacements urbains antérieurs.
 -------Le 
        port d'Oran eût été bien mieux placé à 
        Mers-el-Kébir. La bi-millénaire Constantine, juchée 
        sur un rocher, étouffe aujourd'hui entre sa falaise et son canyon.
 -------Les Anglais, 
        dans leurs colonies, avec leur mépris hautain des « natives 
        », se dégagent bien plus radicalement que nous des suggestions 
        du passé, lorsqu'ils jugent expédient de le faire. -------Au Maroc, 
        le maréchal Lyautey s'est bien gardé, dans sa sagesse, d'installer 
        sa capitale nouvelle à Fez ou à Marrakech. Il est certain 
        que sous les Turcs Alger était la capitale et qu'elle l'est restée. -------Après 
        tout, sur cette côte algérienne, uniformément très 
        mauvaise, il n'y avait pas un seul port naturel au profit duquel nous 
        aurions pu être tentés d'abandonner Alger.-------Nous 
        y sommes donc restés, et il est curieux de voir comment nous l'avons 
        transformé.
 -------Dans la ville 
        actuelle, en 1930, sur le terrain, et mieux encore peut-être sur 
        une photographie d'avion, l'Alger turc qui est toujours là, et 
        l'Alger français, se distinguent immédiatement.-------L'Alger 
        turc, c'est ce petit tas indistinct et saillant 
        de petites maisons blanches agglomérées en carapace.
 -------Indistinct 
        : parce que, à l'échelle de la photographie, on ne peut 
        pas distinguer le lacis enchevêtré des étroites ruelles, 
        venelles et impasses. Saillant : parce que tout ça monte à 
        l'assaut d'un éperon montagneux à pentes très raides; 
        dans les venelles en escaliers, les êtres humains ne circulent qu'à 
        pied, et les fardeaux à dos de bourricot. Au sommet de l'éperon 
        encroûté de minuscules cubes de pierres, se dresse hautement 
        une grande bâtisse quadrangulaire, c'est l'ancienne Kasbah des deys, 
        le château-fort. L'usage a étendu son nom à l'ensemble 
        de l'Alger turc qui était, en effet, tout entier une forteresse. -------Les limites 
        de l'Alger turc restent admirablement nettes ce sont tout simplement les 
        anciens fossés de l'Alger turc, à peine camouflés. 
        Contre ces fossés-là est venu se briser l'armée de 
        Charles-Quint. -------Tout l'ensemble 
        est pratiquement intact. -------Tout autour, 
        dans les deux sens, s'étend l'Alger français à perte 
        de vue, hors des limites de la photographie. On identifie au premier coup 
        d'il ce faisceau de quelques larges artères, très 
        longues, réunies par de courtes et larges rues à angles 
        droits. -------Il est clair 
        que ceci est une ville européenne. Il y a faisceau étroit, 
        on pourrait presque dire artère unique, parce que les tramways 
        ont le souci européen de ne pas perdre la côte et les collines 
        trop élevées ne se sont pas prêtées aisément 
        à l'établissement de funiculaires. L'Alger français, 
        au rebours de la Kasbah, colle à la côte. Entre les cornes 
        extrêmes du faisceau, il y a une douzaine de kilomètres. -------Si le lecteur 
        a eu la patience de suivre ce commentaire, avec les yeux fixés 
        sur la photographie, il aura l'impression, j'imagine, d'un pauvre vieux 
        petit cadavre, fossilisé et enkysté dans un grand organisme 
        vivant. -------Quelque chose 
        d'analogue à ce que serait, dit-on, une perle industrielle japonaise; 
        un petit corps étranger central, enrobé dans les cercles 
        concentriques de nacre. -------Si on descend 
        de l'avion pour se promener dans les venelles de la Kasbah, en compagnie 
        du guide excellent qu'est M. Lespès, auteur 
        d'un beau livre sur Alger, on constatera un phénomène 
        corrélatif. -------En 1830, 
        l'Alger turc était une ville bourgeoise peuplée de capitaines, 
        d'officiers, de fonctionnaires turcs, d'immigrés andalous riches 
        et cultivés. En 1930, on ne voit plus guère dans la Kasbah 
        que des Kabyles ; « la Kasbah, dit un Andalou 
        avec un sourire mélancolique, c'est Tizi-Ouzou » 
        ; on sait que la sous-préfecture de Tizi-Ouzou est la capitale 
        officielle de la Kabylie. -------Ces Kabyles, 
        en bloc, ne sont pas autre chose que la main-d'uvre ; l'Alger français 
        a fait de la Kasbah sa cité ouvrière; il ne l'a pas seulement 
        enkystée, il l'a digérée. -------C'est un 
        spectacle tragique : il y a là-dedans toute la férocité 
        de la vie. L'anéantissement complet serait plus miséricordieux. 
        La vie apparaît plus féroce quand elle conserve les formes 
        extérieures d'un passé dont elle a détruit l'âme. -------En revanche, 
        c'est un spectacle extrêmement intéressant. Il est curieux 
        d'embrasser d'un coup d'il toute une lutte d'un siècle, toute 
        la colonisation française, concrétisée en moellon. -------La photographie 
        ne donne pas seulement la ville; elle donne le port. On distingue très 
        nettement le vieux port turc, celui des corsaires. Il est tout au fond, 
        à l'abri des îlots rocheux, dont les petites falaises noires 
        l'encadrent : ce groupe d'îlots a donné son nom à 
        la ville : Alger est la déformation française d'El Diezair, 
        qui signifie : les îlots. C'est bien ce point exact qui est à 
        l'origine de tout. -------À 
        l'abri de l'îlot, on distingue très bien les limites précises 
        de l'ancien port turc; on y pénètre entre deux petits musoirs 
        blancs, qui vont à l'encontre l'un de l'autre. Le carré 
        d'eau ainsi délimité est minuscule, deux cents mètres 
        de côté peut-être. C'était ça le port 
        turc, qui a fait trembler la chrétienté, qui a été 
        bombardé vainement par les flottes de Duquesne et de Lord Exmouth. 
        Comme c'est curieux. Comme çà donne l'échelle de 
        grands événements historiques. -------Aujourd'hui 
        l'ancien port turc s'appelle la darse de l'Amirauté; 
        c'est quelque chose comme le bassin particulier de l'amiral, réservé 
        à ses vedettes. La vie générale s'y est éteinte. 
        En dehors de ce carré d'eau morte, de deux cents mètres 
        de côté, le port moderne, grouillant de vie, étend 
        ses quais et ses môles sur des kilomètres, par delà 
        les l'imites de la photographie. -------Qu'il s'agisse 
        du port ou de la ville la philosophie du spectacle est toujours la même; 
        le passé, à peine vieux d'un siècle, encore bien 
        reconnaissable dans ses cadres conservés, mais étouffé 
        et digéré par l'épanouissement prodigieux de la vie 
        moderne. -------Le port d'Alger, 
        comme celui d'Oran, comme tous les ports d'Algérie, petits ou grands, 
        est entièrement construit de main d'homme. Ils sont aussi artificiels 
        que les voies ferrées. -------Eux aussi 
        ont été établis avec la timidité française, 
        on n'a pas vu grand, sous la poussée de nécessités 
        ils sont en voie d'expansion continuelle.Tels qu'ils sont pourtant, c'est une uvre fort honorable, ils suffisent 
        à un gros trafic.
 -------Quand on 
        se promène sur les quais du port à Alger ou à Oran, 
        on voit de gros tas de charbon. C'est du charbon de Cardiff entreposé, 
        ou peut-être du charbon allemand. Les paquebots qui traversent la 
        Méditerranée, y compris les paquebots anglais, ont pris 
        l'habitude régulière de relâcher à Oran ou 
        à Alger et d'y faire le plein de leurs soutes. Ils pourraient aller 
        à Gibraltar ou à Malte; mais Gibraltar et Malte sont des 
        ports de guerre, le commerce n'aime pas les ports de guerre. -------Cette clientèle 
        étrangère de passage est d'un très gros rapport. -------Mais ce sont 
        naturellement les importations et les exportations du pays qui alimentent 
        l'activité des ports. Elles sont fonction de la vie économique 
        et générale. Barriques de vin, caissettes de primeurs, balles 
        d'alfa, ballots de liège, peaux et moutons sur pied encombrent 
        les quais, en compagnie des minerais. -------Alger est 
        un grand port de commerce, le second des ports français pour le 
        tonnage de jauge (près de 20 millions de tonnes en 1914) ; le cinquième 
        pour le tonnage métrique, derrière Rouen, Marseille, Le 
        Havre et Bordeaux (3 millions 600.000 tonnes en 1914). -------Il est rattaché 
        à Port-Vendres et surtout à Marseille par un service quotidien 
        de paquebots rapides, aménagés pour voyageurs. -------Oran suivait 
        Alger de près. Aux dernières statistiques il l'a nettement 
        dépassé. Depuis la conquête du Maroc sa proximité 
        de la frontière lui procure des avantages et aussi des excitations 
        commerciales. Les Oranais semblent montrer aujourd'hui plus d'initiative 
        que les Algérois. -------Les derniers 
        chiffres se rapportent au premier semestre 1929, et devraient être 
        par conséquent approximativement doublés. -------Dans ce premier 
        semestre et dans l'ensemble de l'Algérie « 
        le tonnage des marchandises embarquées et débarquées 
        a été de 5 millions 825.000 tonnes en 1929, contre 5 millions 
        240.000 tonnes en 1928. Augmentation 585.000 tonnes. -------« Le 
        port d'Oran y est représenté, en 1929, par 1 million 848.000 
        tonnes et celui d'Alger par 1.629.000 tonnes. « La différence 
        entre les deux ports est déjà sensible. Elle est écrasante 
        au titre de la navigation de relâche et de ravitaillement. Oran, 
        1.374 navires d'un tonnage de 3.235.000 tonnes; Alger, 599 navires avec 
        un tonnage de 1 million 513.000 tonnes. » -------Dans la concurrence 
        acharnée des deux grands ports, et par voie de conséquence 
        des deux grandes villes, verrons-nous Oran détrôner Alger 
        ? -------Dans ce pays 
        neuf, la vie évolue plus vite que chez nous. Pour comprendre que 
        dans un pays comme l'Algérie, les ports ont une importance toute 
        particulière, bien plus grande qu'ailleurs, il faut se rappeler 
        ceci :"-------Le 
        Maghreb tout entier s'étire sous la même latitude, à 
        la limite nord du Sahara. D'un bout à l'autre il a le même 
        ciel et les mêmes ressources de pays plus ou moins sec. Réduit 
        à lui-même il n'a pas à sa disposition la variété 
        de produits qu'on trouve dans une province française et qui suffit 
        à assurer la prospérité locale, sous cloche. En certaines 
        matières, très limitées, il a, ou il est susceptible 
        d'avoir, d'immenses ressources, bien supérieures à ses besoins; 
        vin, huile, laine, liège, alfa. Il est condamné à 
        des formes plus ou moins strictes de monoculture pour l'exportation. 
        Il dépend des marchés étrangers.
 -------Ce grand 
        fait économique a nécessairement un lien avec le grand fait 
        politique qui domine toute l'histoire maugrebine. Jamais depuis 2.000 
        ans, depuis toujours, le Maghreb ne s'est appartenu à soi-même 
        un seul instant. S'il n'a jamais eu l'indépendance politique, c'est 
        peut-être, entre autres raisons, parce qu'il n'a jamais eu de quoi 
        se la payer. Pour appuyer son autonomie politique il n'a pas la possibilité 
        de l'autonomie économique. -------Dans son 
        passé historique il n'a connu de grande prospérité 
        que lorsqu'il s'est trouvé appartenir à un empire prospère, 
        dont les marchés lui étaient ouverts, avec lequel il entretenait 
        une circulation de richesses. Ça été le cas de l'Afrique 
        Romaine. -------Et c'est 
        de nouveau le cas de l'Afrique Française. Dans un pays qui reste 
        aussi étroitement sous la dépendance de l'étranger, 
        le port est un organe aussi essentiel que le poumon dans l'organisme animal. 
        Aussi devient-il une capitale.  Commerce 
        Général  -------Il faut donner 
        quelques détails sur le total en chiffres des résultats 
        obtenus, c'est-à-dire sur le commerce général. Les 
        chiffres les plus récents concernent le premier semestre 1929 et 
        doivent être doublés par conséquent. -------Voici une 
        comparaison des premiers semestres dans les trois dernières années 
        1927, 1928 et 1929. -------« Le 
        total de nos échanges commerciaux, c'est-à-dire de nos importations 
        et de nos exportations, s'est élevé pendant le premier semestre, 
        savoir :-------En 
        1927 à 3 milliards 525 millions.
 -------En 
        1928 à 4 milliards 446 millions.
 -------En 
        1929 à 4 milliards 818 millions.
 -------Donc, en 
        deux bonds, l'Algérie de 1927 à 1929 a accru son commerce 
        de 1 milliard 297 millions. » -------Notez qu'en 
        1924 le total des exportations et importations était seulement 
        do 5 milliards 394 millions. 
 -------Sous réserve 
        des résultats qu'accusera le second semestre 1929, les chiffres 
        pour l'année seraient :
 -------En 
        1927 d'environ 7 milliards.
 -------En 
        1929 de 9 milliards et demi (1)
 .(1) En réalité, aux dernières nouvelles, ils restent 
        au-dessous de 8 milliards. Les exportations sont exactement ce qu'on pouvait 
        attendre d'après les détails qui ont été donnés 
        sur la transformation économique du pays. Chiffres du 1er semestre 
        1929.
 -------C'est évidemment 
        une progression intéressante.Les importations l'emportent régulièrement sur les exportations. 
        Voici les chiffres pour les premiers semestres des trois dernières 
        années.
 -------« 1927. 
        - Importations : 1 milliard 941 millions. Exportations: 1 milliard 579 
        millions. Différence : 362 millions. »-------« 
        1928. - Importations : 2 milliards 526 millions. 
        Exportations : 1 milliard 920 millions Différence : 605 millions. 
        »
 -------« 
        1929. - Importations : 2 milliards 821 millions. 
        Exportations : 1 milliard 996 millions. Différence : 825 millions. 
        »
 -------« 
        Soit, au total, dans les trois premiers semestres envisagés, un 
        gain de 1 milliard 793 millions au profit des importations. » Il 
        est bien entendu que l'Algérie, en transformation rapide, continue 
        à s'outiller. »
 -------Par conséquent 
        « cette balance commerciale n'est qu'en 
        apparence défavorable à l'Algérie. On observe, en 
        effet, que dans la masse de nos achats, des centaines de millions sont 
        consacrés à l'extension, à l'amélioration 
        et au perfectionnement de notre matériel, dépense que nous 
        amortissons assez promptement. C'est donc un enrichissement et non une 
        faiblesse comme on serait tenté de le croire en présence 
        des chiffres ci-dessus. » -------Voici en 
        effet, parmi les importations du premier semestre 1929, l'alinéa 
        le plus lourd : -------« Machines 
        agricoles ou d'industries 120 millions; outils, ouvrages, pièces 
        détachées, fils et câbles d'électricité 
        170 millions; voitures automobiles, 171 millions. »-------Lourd 
        aussi est l'alinéa des tissus. Il faut habiller 6 millions d'êtres 
        humains.
 -------« Tissus, 
        330 millions; draps, vêtements, lingerie, bonneterie, couvertures, 
        54 millions ».Le reste des importations se rapporte surtout au chapitre alimentaire, 
        charcuteries, beurres, fromages, huîtres, etc... et au chapitre 
        des denrées coloniales, sucre, café, chocolat.
 -------Ces importations 
        témoignent que l'Algérien mène une vie assez large, 
        il est probablement moins parcimonieux que le Français métropolitain. --------« 
        Brebis, béliers, moutons et agneaux, 55 millions; céréales, 
        112 millions; tabacs, 70 millions; huiles d'olives, 163 millions; liège, 
        38 millions; crin végétal, 32 millions; alfa, 45 millions; 
        pommes de terre, 42 millions; fruits frais ou secs, 42 millions; légumes 
        de primeurs, 22 millions. » --------« 
        Alcools de vin, eaux-de-vie et spiritueux, 77 millions; vins ordinaires, 
        788 millions; vins de liqueurs en fûts ou en bouteilles, 5 millions 
        » --------« 
        Le rendement de l'industrie minière se traduit par 147 millions, 
        dont 32 millions pour les phosphates et 67 millions pour le fer. » --------Ces quelques 
        chiffres tendent à évoquer d'un coup d'il l'ensemble 
        et les proportions du trafic, de la vie économique. Et ils rendent 
        sensible la progression depuis la guerre. --------Mais c'est 
        la progression d'ensemble, depuis 1830, qu'il faut rendre sensible à 
        l'imagination.Il suffit de considérer le point de départ et le point d'arrivée.
 --------Voici le 
        point de départ. --------D'après 
        les estimations de la Chambre de commerce de Marseille, en 1832, l'Alger 
        turc importait pour 6.500.000 fr. de marchandises européennes. 
        Il les payait apparemment avec les bénéfices de la piraterie, 
        puisqu'on estimait les exportations à 14 ou 15.000 francs. --------Dans l'Algérie 
        française, en 1924, le total des exportations et importations était 
        de 5 milliards 394 millions; ce total en 1929 atteindra probablement 8 
        milliards, en francs papier il est vrai. --------Il 
        faut songer que ces huit milliards de richesse sont une création 
        pure. Ils sont sortis intégralement du coup d'éventail du 
        dey.   
 
 
 
 
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