|  Extrait de " Poèmes des deux 
        rivages " suivi de " Au gré des flots "
 Médaille d'Argent des Arts et Lettres de France.
 Baraki
 Ma grand-mère Virginie SOLARINO et mon grand-père Charles-Antoine 
        BERTRAND
 dans leur jardin à Baraki, petit village de mon enfance, à 
        une vingtaine de kilomètres
 d'Alger, en mai 1962, un mois avant notre départ sur les routes 
        de l'exil.
 Comme vous pouvez le constater, leur maison, construite tout au long d'une 
        vie, est
 bien modeste, ils n'étaient pas des " gros colons " ! 
        Mon grand-père était cheminot.
 Après leur départ précipité, ils sont partis 
        en une demi-heure car le village avait été
 investi par le FLN, ils égorgeaient tous les européens. 
        Une vieille voisine musulmane est
 venue les prévenir en hurlant : " Sauve-toi Lalla ! Sauve-toi 
        ".
 Ils étaient âgés tous les deux, à notre arrivée 
        en France, ils se sont retrouvés dans un
 petit studio et mon grand-père s'est laissé mourir de chagrin. 
        Il regardait la mer, aussi
 bleue que ses yeux et il pleurait. Il est décédé 
        trois mois après notre arrivée.
 Poème dédié à 
        mes grands-parents et à tous nos grands-parents.
 " Ma maison ".le poème " Ma maison " 
        a été sélectionné au Printemps des Poètes 
        en mars 2012
 J'ai suivi la longue alléequi mène à ma maison.
 Les palmes des palmiers
 sont sèchent et se défont.
 Au détour du chemin, le puits les grands arbres et la maison.
 Elle est là assoupie,
 de ronces envahie.
 Les volets clos
 comme des yeux fermés,
 pendent décrochés.
 Nul bruit dans l'air chaud qui frissonne.Au fond du jardin je crois voir
 mon grand-père cueillant ses oranges.
 Où est la maison de mon enfance ?
 de ses grands yeux, fenêtres ouvertes
 riante et accueillante avec son rosier
 dont les roses pompon
 envahissaient l'entrée.
 
 Ses parterres de fleurs, fierté de ma grand-mère :
 jasmin, rosiers, dahlias, bégonias, lys embaumaient
 et leur parfum suave dans la nuit chaude se dissolvait.
 Sur un tapis de feuilles séchéesmes pas sont feutrés.
 Le puits est à sec
 et les eucalyptus ont grandi.
 Mon cur, soudain, bat plus fort car je viens d'apercevoir
 le grenadier, arbre sacré,
 par ma grand-mère vénéré.
 " Tu planteras un grenadier sur ma tombe " disait-elle toujours.
 Car le prophète énonce :
 " Que tes mérites soient aussi nombreux que les grains de 
        la grenade. "
 Cet arbre est magnifique couvert de fleurs d'un rouge éclatant,
 ses petits fruits rouges sont comme des poings fermés
 et ses fleurs fripées semblent sortir du sommeil.
 Bourdonnent des nuées d'abeilles.
 Sur la pointe des pieds, craignant de réveiller,
 tout ce monde endormi,
 je repars le cur serré. "
 Jocelyne MAS
 Poète-Ecrivain- ConférencièreMembre le Société des Poètes Français
 http://www.jocelynemas.com
 
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