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        A l'Est, à l'extrémité 
          de la rue Bab Azoun, finissait autrefois la ville turque. A cet endroit 
          s'ouvrait dans la muraille la porte Azoun (El bab Azoun).  
 -----La cité 
        barbaresque était entourée de murailles très épaisses 
        pour supporter un chemin de ronde en permettant la circulation de patrouilles. 
        Elles étaient bordées de créneaux et de meurtrières 
        destinés à la défense d'Alger. Certaines lithographies 
        nous montrent l'aspect de ces murailles dans lesquelles les Turcs avaient 
        percé des portes d'accès ; à l'Est, la porte Bab 
        Azoun et à l'Ouest, la porte Bab el Oued. Mais c'est la porte Azoun, 
        pour des raisons historiques qui retiendra notre attention dans ce récit.
 ------Cette porte, appelée aussi vulgairement 
        "La porte Babazon", était un arc de plein centre, assez 
        haut pour permettre le passage d'un chameau chargé ; elle était 
        surmontée d'un fronton triangulaire d'aspect gréco - romain, 
        provenant sans doute de quelque ruine antique. De chaque côté 
        de la porte étaient fichés dans la muraille de grands hameçons 
        de fer, à la pointe aiguisée sur lesquels, du haut des remparts, 
        on précipitait les criminels ou les esclaves qui essayaient de 
        s'insurger. La légende dit que les suppliciés mettaient 
        plusieurs jours à mourir dans cette position atroce ; les habitants 
        de la cité barbaresque venaient prendre plaisir à assister 
        à leur lente agonie. C'est contre cette porte Azoun qui vinrent 
        échouer, en 1541, les avants - gardes de l'expédition de 
        Charles-quint.
 
 -----A la tête de la flotte turque, 
        forte de plus de 80 navires ou galères, se trouvait l'Agha Hassan 
        qui fit prendre à la piraterie en Méditerranée un 
        nouvel essor. Les dévastations commises le long des côtes 
        d'Espagne et sur les îles Baléares par ses pirates furent 
        considérables à tel point que Charles-quint exaspéré 
        voulut conduire en personne une expédition contre Alger. L'Empereur, 
        au comble de la fureur, avait proclamé : 
        "Je veux, une fois pour toutes, exterminer les Turcs de Barbarie 
        !". Mais l'Empereur voulait se venger également 
        de Barberousse qui accumulait les victoires sur les navires espagnols. 
        Il mit sur pied une armada composée de 65 galères et 460 
        navires de commerce affrétés pour le transport de troupes. 
        Ce fut André Doria, le grand amiral génois qui commanda 
        la flotte. Charles-quint, lui - même, prit le commandement des 25.000 
        soldats que transportaient les vaisseaux.A leur bord se trouvaient les 
        meilleures troupes d'Espagne, d'Italie et d'Allemagne. ------
 -----L'Ordre de Malte était représenté par 
        150 chevaliers et 400 hommes d'armes dont plusieurs Français. Fernand 
        Cortes, le conquistador d'Amérique du Sud, le Duc d'Albe et Don 
        Fernando de Gonzague faisaient partie de l'expédition. Sur la galère 
        impériale, de nobles dames en costumes d'apparat avaient pris passage 
        pour assister, comme à une fête, à l'assaut d'Alger.
 
 ------ Effectivement, le débarquement 
        se fait presque sans coup férir, le 23 octobre 1541. Il a lieu 
        sur la rive gauche de l'oued Harrach, entre l'embouchure et la plage du 
        Jardin d'essais. L'Agha Hassan, fils adoptif du célèbre 
        et funeste Barberousse, se mit à la tête des troupes Maures. 
        Pendant la nuit du 23 au 24, il harcela les Espagnols mais ceux - ci remportèrent 
        plusieurs succès et s'emparèrent des hauteurs voisines de 
        la cité, en particulier de la colline où fut édifiée, 
        plus tard, le fort l'Empereur, en souvenir de l'endroit où Charles-quint 
        a planté sa tente.
 
 
 
 ------De ce magnifique 
        point de vue où l'on découvre toute la baie d'Alger, l'Empereur 
        peut croire que la partie est gagnée. Mais il n'a pas compté 
        sur le mauvais temps. Le ciel qui était fort beau la veille, se 
        couvrit soudain de gros nuages pendant la journée du 24. Le vent 
        se leva, annonciateur d'une tempête comme seule la Méditerranée 
        sait en affliger. La flotte fut dispersée, des navires sombrèrent, 
        le débarquement des hommes, du matériel et des tentes de 
        protection ne put se faire. Comble d'infortune, une pluie diluvienne s'abattit 
        et détrempa rapidement tous les chemins. "Dieu est avec nous 
        !" (Allah Manha !) s'écrient les Turcs et les Maures qui reprennent 
        courage. La légende dit que le Marabout Sidi Retika, protecteur 
        de la ville, frappait la mer à tour de bras pour soulever la tempête. 
        Le lendemain, avec Hassan à leur tête, Maures et Turcs firent 
        une sortie et remportèrent sur les troupes fatiguées une 
        facile victoire. Seuls, les Chevaliers de Malte résistèrent 
        et arrêtèrent l'assaut. Tandis que l'armée impériale, 
        démoralisée, regagnait en débandade la côte, 
        les Chevaliers de Malte couvrent la retraite, arrivant même, un 
        instant, à repousser leurs assaillants jusqu'aux murailles de la 
        cité. ------C'est alors que le Français Pons de Balaguer dit Savignac, 
        porte - étendard des Chevaliers de Malte, vint, sous une grêle 
        de traits, planter sa dague dans la porte Bab Azoun en criant "Nous 
        reviendrons !". Prophétie qui va se réaliser 
        289 années plus tard... Charles-quint, sous une pluie battante, 
        reconduisit les restes de son armée vers le Cap Matifou où 
        les navires d'André Doria qui n'avaient pas été jetés 
        sur la côte, trouvèrent un refuge précaire. Privés 
        de nourriture et de sommeil les soldats se couchaient dans la boue ; ils 
        étaient sans force pour résister aux assauts des Turcs qui 
        harcelaient sans cesse les arrières gardes. Pour rejoindre les 
        navires, il fallut au retour franchir l'Oued Harrach démesurément 
        grossi par la pluie. La retraite fut lamentable dans les terres défoncées 
        et gorgées d'eau. Enfin, le 3 novembre 1541, les débris 
        de cette expédition qui devait anéantir la puissance barbaresque 
        d'Alger, se retrouvaient à bord des vaisseaux. L'Empereur avait 
        perdu dans cette affaire environ 8.000 hommes et 150 navires. La retraite 
        avait duré trois jours !
 
 ------ André Doria, accablé, 
        eût ces propos légendaires devant ses lieutenants, atterrés 
        par le désastre "N'avais ? je 
        pas raison de dire à l'Empereur que la saison n'était pas 
        favorable ? L'Afrique n'a que trois bons mois, juin, juillet et août. 
        Pourquoi avoir choisi ce maudit mois d'octobre !".
 
 ------Le porche de l'ancienne porte Azoun 
        fut démoli en 1846. Ses pierres ont ensuite servi à la construction 
        de la maison du Caïd "El Bab", ancien gouverneur des portes 
        d'Alger ; cette demeure se trouvait à Birkadem.
 ------Avant la deuxième guerre mondiale, 
        la municipalité d'Alger fit apposer une plaque commémorative, 
        près de l'endroit où existait l'ex-porte Azoun,( 
        note de l'auteur du site: 
        je n'ai jamais cherché à remarqer cette plaque vu que je 
        n'en connaissais pas l'existence!) en souvenir du Chevalier 
        Pons de Balaguer, ce Français qui périt non loin de là, 
        victime de sa fougue et de sa témérité.
 
 Tudury Guy 
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