| -----Quelles que 
        soient les différences qui apparaîtront dans le comportement 
        des uns et des autres, qu'ils soient civils ou militaires avec ou sans 
        grade, quelles que soient leurs idées politiques, tous hormis quelques 
        exceptions qui confirment la règle, tous attendent avec impatience 
        de reprendre et de participer à la lutte contre les forces italo-allemandes 
        et pour ce faire l'aide américaine qui ne peut que se concrétiser 
        par un débarquement.-----Les accrochages, 
        les affrontements, les batailles qui se produiront ne pourront être 
        que le fait d'erreurs d'appréciation, de communication ou encore 
        de surestimation des moyens et de la confiance accordée mais aussi 
        et surtout de positions stratégiques sur le plan général 
        prises pour une diversion de camouflage d'un débarquement plus 
        important. Qui alors, aurait pu certifier le contraire ?
 -----A Alger 
        dans la nuit du 7 au 8 novembre 1942, les "conjurés" 
        quelques centaines pourtant pris à contre-pied par les américains 
        qui débarquent une quinzaine de jours avant la date prévue, 
        n'en déploient pas moins leur dispositif qui consiste à 
        isoler les postes de commandement et de communications. Même si 
        cela apparaît surprenant, à Alger ils y parviennent dans 
        un ordre parfait, à deux heures, heure prévue pour le débarquement, 
        tout est en place, mais les imprévus qui auront de graves répercussions 
        à Oran, au Maroc et bien plus en Tunisie, tombent en cascades : 
        le Général Mast, adjoint au général Giraud 
        est introuvable
 ------ le 
        Général Giraud que Lemaigre-Dubreuil attend à l'aéroport 
        de Blida n'arrivera que le 9 novembre dans l'après-midi après 
        avoir adressé au maréchal Pétain le message suivant 
        : "Je vous demande de bien vouloir me garder 
        votre estime et me considérer toujours comme un de vos plus dévoués 
        et plus respectueux subordonnés".
 ------ les 
        anglo-saxons qui devaient débarquer à deux heures ne débarqueront 
        qu'à 6 heures.
 
 -----Pour la petite histoire, à l'est d'Alger 
        sur les plages d'Aïn-Taya-Surcouf, 
        la mer est démontée et plusieurs barges de débarquement 
        chavirent. Les habitants de ces agglomérations se jettent à 
        l'eau pour sauver les occupants de la noyade, d'autres leur passent des 
        couvertures et leur servent des rasades de cognac. L'un d'eux Marcel Cazeaux 
        sera décoré pour ses actions.
 -----C'est 
        une preuve parmi tant d'autres, que les populations désiraient 
        ce débarquement qui serait le premier, suivi par d'autres pour 
        la reprise des combats et la libération de la France. Au cours 
        de cette nuit, à l'heure prévue mais avec quatre heures 
        d'avance dues au retard du débarquement, l'Amiral Darlan et le 
        général Juin sont prisonniers cernés dans leur résidence 
        par des groupes des chantiers de jeunesse aux ordres du colonel Van-Heck 
        mais, fait cocasse, qui retiennent en otage le délégué 
        général américain Murphy venu les informer du débarquement. 
        Ils manifestent énergiquement mais sagement et intelligemment leur 
        désapprobation pour éviter des combats que personne ne souhaite.
 TOUT RENTRE DANS L'ORDRE---- -----Comme par hasard, 
        en fin de soirée du 7 novembre, le capitaine Dorange chef du Cabinet 
        du Général juin, qui rejoint ses pénates assez tard, 
        se rend compte qu'il se passe des choses anormales dans la ville.-----S'approchant 
        de la résidence de Juin, il constate qu'elle est cernée 
        par les "conjurés".
 Non sans difficultés il se rend à la caserne de la garde 
        mobile aux Tagarins. Peu après les gardes partent pour procéder 
        à la libération de l'amiral Darlan et du général 
        juin. Puis aidés par d'autres unités ils libéreront 
        sans grande résistance les services et les postes occupés 
        au contrôle par les "conjurés" évitant tous 
        contacts violents et inutiles conformément aux ordres reçus. 
        Malgré de nombreuses péripéties désagréables 
        et d'autres carnavalesques, un cessez-le-feu intervint en fin d'après-midi. 
        Ce qui ne fut pas le cas à Oran où l'absence d'informations 
        précises en provenance d'Alger laissaient planer une incertitude 
        quant à la position très nette à prendre pour ou 
        contre cette opération, ce qui provoqua des échanges qui 
        firent de nombreuses victimes de part et d'autre avant le cessez-le-feu 
        le 10 au matin.
 LE MAROC -----Au Maroc l'opération 
        montée par le général Bethouard du groupe des "cinq" 
        pour isoler le résident Général Noguès tourne 
        court. A l'origine de cet échec de nombreuses erreurs dont la plus 
        importante fut une bévue inqualifiable : En juin 1940 le résident 
        général au Maroc Noguès avait été le 
        dernier des généraux à accepter l'armistice. Il avait 
        manifesté sa ferme intention de l'ignorer et de continuer la guerre 
        en Afrique du Nord. Ce n'est qu'en faisant l'inventaire des moyens, des 
        difficultés de ravitaillement et des aides extérieures éventuelles 
        qu'il avait dû se rendre à l'évidence. Il avait alors 
        dès le premier jour, organisé ses moyens et camouflé 
        dans les forêts de l'Atlas des unités armées et équipées 
        qui interviendraient dès que la situation le permettrait. Or cette 
        situation se présentait et alors que résistant de la première 
        heure il aurait dû être l'un des premiers à être 
        informé qu'il aurait à apporter une aide précieuse 
        non seulement au Maroc mais aussi en Afrique du Nord, non seulement il 
        avait été tenu dans l'ignorance la plus totale de cette 
        opération mais on avait tenté d'en faire un prisonnier.-----Ce fut 
        une erreur monumentale que l'on peut mettre incontestablement au crédit 
        de Murphy mais aussi sur celui du groupe des "cinq" vraisemblablement 
        pour des raisons politiques.
 -
 |  |   -----Cette information 
        laisse supposer un coup de force prémédité. Noguès 
        adresse un télégramme au général juin à 
        Alger "vous demande quelle attitude adopter dans l'hypothèse 
        d'un débarquement U.S. annoncé ?" Comment ? Pourquoi 
        ? Ce télégramme destiné au Maréchal juin arrive 
        à Laval qui répond "s'opposer au débarquement".-----Noguès 
        prend alors des mesures pour s'opposer au débarquement américain, 
        fait arrêter Bethouard et ses collaborateurs. Il en résultera 
        des affrontements regrettables qui feront quelques centaines de morts 
        autant de blessés et des pertes matérielles considérables.
 -----Finalement, 
        l'amiral Darlan investi de tous les pouvoirs par le maréchal Pétain 
        ordonne le cessez-le-feu le 11 novembre, le général Patton 
        rencontre le général Noguès et le "cessez les 
        combats" est ordonné. Le général Patton demande 
        alors à Noguès de surseoir aux mesures prises contre le 
        général Bethouard qui risque la peine de mort pour désobéissance 
        armée.
 -----Il demande 
        en outre aide et assistance pour la capture des agents nazis du Maroc.
 -----La réponse 
        de Noguès est nette et précise "nous 
        en avons supprimé beaucoup et nous vous aiderons à supprimer 
        les autres". Cette réponse confirme l'état 
        d'esprit du général Noguès et l'erreur de ne pas 
        l'avoir mis "dans le coup" dès le début. Saurons-nous 
        pourquoi ? Les raisons sortiront-elles un jour ? Il est certain que les 
        opérations de débarquement ne pouvaient se faire sans casse 
        sans causer de graves répercussions de la part des allemands. Ce 
        qu'il fallait retarder aussi bien dans l'ensemble de la France métropolitaine 
        qu'en Afrique du Nord où dès le lendemain Alger était 
        bombardé, où des contre-offensives allemandes pouvaient 
        intervenir.
 LA TUNISIE -----Nous savons 
        que la décision d'un débarquement avait été 
        prise à la demande de Churchill et de Staline tous deux en sérieuses 
        difficultés.-----Cette 
        dernière incitait Montgomery à passer à une vitesse 
        supérieure en procédant à une attaque qui fit reculer 
        l'Afrika-Korps de Rommel.
 Il est donc incontestable qu'un débarquement en Tunisie eut été 
        sur le plan stratégique une opération désastreuse 
        pour les forces de l'axe, prises en tenaille et sérieusement coupées 
        de leurs bases de ravitaillement.
 -----Prévenu, 
        l'amiral Derrien commandant la marine en Tunisie l'attendait prêt 
        à l'appuyer conformément à ses idées et à 
        ses engagements. Sans nouvelles, sans ordres, complètement dans 
        le cirage, du débarquement il ne vit que les forces allemandes.
 -----Pour 
        quelles raisons la Tunisie n'a t-elle pas été comprise dans 
        le débarquement en Afrique du Nord ? Par manque de moyens ? Pourquoi 
        pas puisque sur les 500 000 hommes prévus en octobre 1942 à 
        Cherchell, ils ne furent que 100 000 à débarquer au Maroc 
        et en Algérie. N'eut-il pas été préférable 
        d'en prélever une certaine partie pour débarquer et s'assurer 
        une position beaucoup plus importante sur le plan stratégique ? 
        Nous ne le savons pas. Ce que nous pouvons dire, c'est que pour reconquérir 
        ce territoire il fallut six mois de guerre avec ses pertes en hommes et 
        en matériels de guerre et le retard qui en est résulté 
        pour la préparation et les débarquements qui devaient suivre. 
        Il est vrai aussi que les forces Italoallemandes eurent des pertes extrêmement 
        importantes que nous ne retrouverions pas dans les batailles successives. 
        La Tunisie conformément aux conventions d'armistice ne disposait 
        que de 13 000 hommes mal armés et mal équipés que 
        pouvait-elle faire contre les forces italo-allemandes ? Sans l'appui attendu 
        et sans aucune nouvelle permettant d'espérer une intervention alliée 
        à bref délai. Les forces de l'Axe débarquent par 
        air et par mer sans rencontrer de résistance et peuvent ainsi occuper 
        et s'implanter tout au long de la côte de Bizerte jusqu'à 
        la frontière de la Tripolitaine.
 -----L'amiral 
        Esteva résident général qui n'avait rien fait pour 
        s'y opposer-l'aurait-il pu ? donnera tout de même l'ordre de libérer 
        les prisonniers politiques protégeant leur évasion ainsi 
        que celle du personnel officiel américain et d'évacuer vers 
        l'Algérie par des moyens de fortune tout le matériel militaire 
        de guerre possible. Les amiraux Esteva et Derrien furent jugés 
        et finirent leurs jours en prison. Seul le général Barré, 
        surpris dans un premier temps, réussit à regrouper ses troupes 
        sur les points stratégiques des Dorsales afin d'enrayer l'avance 
        des troupes allemandes, en attendant des renforts, ce sera l'entrée 
        en guerre de l'Armée d'Afrique que nous verrons dans notre prochain 
        numéro.
 Roger d'Hostie
 
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