| -----L'assassinat 
        du Chérif marocain modifia la stratégie des Espagnols qui 
        voulaient chasser les Turcs de toute la Berbérie avec l'aide des 
        Marocains alors que le chérif Mohammed Abdallah-el-Ghaleg b'Illah 
        venait de succéder à son père, Mohammed-el-Mehdi.-----Alors que Charles-Quint était 
        sur son lit de mort, le comte d'Alcaudète se rendait, par la voie 
        terrestre à la rencontre des troupes turques, kabyles et maures 
        commandées par Hassan Pacha. Les navires ravitailleurs partis d'Oran 
        furent interceptés par la flotte turque qui captura quatre brigantins 
        ou galères alors que le seul vaisseau de la flotte dut rebrousser 
        chemin pour échapper également à la capture. Le corps 
        expéditionnaire espagnol privé d'intendance, le comte d'Alcaudète 
        ordonna la retraite alors que son avant-garde était entrée 
        dans Mostaganem. Le décrochage ordonné dans la nuit se fit 
        en désordre car l'infanterie espagnole venait, dans la journée 
        d'être sérieusement battue par la cavalerie turque. C'est 
        une déroute qui va suivre, les blessés abandonnés 
        sont décapités par les Turcs sur le champ de bataille. Le 
        26 Août 1558, malgré les efforts du comte d'Alcaudète 
        et de son fils pour retenir les fuyards de leur troupe et aussi pour sauver 
        l'honneur castillan en tentant d'arrêter la déroute, celle-ci 
        est totale. Au milieu d'une terrible panique, le comte est blessé 
        à mort, écrasé par son cheval qui le renversa en 
        se cabrant. Son fils Don Martin qui commandait l'arrière-garde 
        est fait prisonnier devant Mazagran après avoir reçu une 
        balle d'une arquebuse. L'armée, composée d'une majorité 
        de jeunes recrues insuffisamment aguerries et épuisées, 
        capitule, ce qui entraîne l'égorgement d'environ huit cents 
        Espagnols et le reste enchaîné comme esclave. Hassan Pacha 
        garda prisonnier Don Martin mais rendit le corps de son père, le 
        Capitaine-Général comte d'Alcaudète qu'il échangea 
        contre 2 000 ducats après l'avoir fait escorter jusqu'à 
        Oran. Cette ville, habitée que par des vieillards, des femmes, 
        des enfants et quelques hommes jeunes mais malades ou blessés, 
        n'avait plus de défenseurs et aurait pu être prise sans coup 
        férir par Hassan Pacha qui décide de rentrer à Alger 
        pour préparer une nouvelle offensive sur la ville, les victoires 
        qu'il venait de remporter, l'artillerie prise aux Espagnols et le nombre 
        important de captifs qu'il ramenait, suffisaient à sa gloire.
 -----Don Alonzo de Cordoba, après 
        la mort de son père était devenu comte d'Alcaudète. 
        A ce titre il fut nommé Capitaine-Général des places 
        d'Oran et de Mers-el-Kébir après que celles-ci furent secourues 
        par le deuxième fils de Don Martin, Don Francisco de Cordoba commandant 
        de l'escadre d'Espagne.
 -----Les années qui suivent voient 
        Hassan Pacha et Abd-el-Aziz s'opposer, malgré leur amitié 
        initiale, dans des luttes incessantes. Ce dernier dont la puissance grandissait 
        alors que son territoire dominait la plaine de part et d'autre de la route 
        reliant Alger à Constantine. Hassan se méfiant de la puissance 
        de son ami, attaque les Béni-Abbès et prend les villes de 
        M'Sila, Bou-Arreridj et Zemmora. Il est harcelé dans son repli 
        par Abd-el-Aziz qui refuse ses offres de paix et reprend les fortins, 
        les garnisons turques de la Kabylie sont faites prisonnières. Mais 
        au cours d'un dernier combat Abd-el-Aziz est tué en protégeant 
        son camp retranché.
 -----Hassan Pacha épouse une fille 
        du sultan de Koukou, El-Haoussine qui met à sa disposition ses 
        combattants.
 -----En Méditerranée, à 
        Djerba, les Espagnols subissent également une cuisante défaite 
        après que le vice-roi de Sicile, duc Madina Celi, se soit emparé, 
        sur ordre de Philippe II, de l'île à l'entrée du golfe 
        de Gabès. Averti par le corsaire Dragut, Soliman y envoie une troupe 
        de débarquement composée de 86 galères qui couleront 
        16 galères et 14 bâtiments de transports espagnols, faisant 
        environ 5 000 prisonniers et massacrant la garnison dont les corps furent 
        empilés. Leurs ossements formaient une pyramide qui subsista, semble-t-il 
        jusqu'en 1886.
 Alors que Si Ahmed Amokran impose la paix à Alger après 
        avoir soumis le territoire de Koukou, il est reconnu comme Sultan dépendant 
        de Constantinople. Hassan Pacha prépare une nouvelle expédition 
        contre le Chérif du Maroc et constitue les premières "zouaouas" 
        avec des fantassins Kabyles de qui viendra, plus tard le nom de Zouave.
 -----Mais les janissaires se sentent humiliés 
        par les Berbères qui les contrecarrent. Jaloux des prérogatives 
        de Hassan Pacha qu'ils soupçonnent de vouloir, avec l'appui des 
        Berbères et des Arabes, créer un Etat indépendant, 
        ils s'emparent de sa personne et l'envoient au Sultan, à Constantinople, 
        enchaîné. Ils nomment deux de leurs agha, gouverneurs d'Alger 
        : Hassan, un homonyme et Coussa Mohammed. Tous deux, ramenés à 
        Constantinople par Hamet Pacha, cousin du Sultan, auront la tête 
        tranchée. Le Sultan, pour la troisième fois nomme Hassan 
        Pacha au pachalik d'Alger.
 Premiers comptoirs français -----Fin de l'an 
        1560, Soliman le Magnifique donne à la France la concession du 
        commerce de certains ports, places et havres de la côte méditerranéenne 
        en Afrique du Nord.-----C'est en 1561 que le premier établissement 
        français dans l'Afrique est créé par deux armateurs, 
        Linche et Didier, de la Compagnie Marseillaise du Corail qui avait reçu 
        du Sultan de Constantinople, Soliman, le droit d'exploitation du Cap Roux 
        à la Seybouse : les côtes de La Calle, de Collo, du Cap Rose 
        et de Bône.
 -----Le droit d'exploitation, des côtes 
        précitées, contre une redevance annuelle de 1500 écus 
        d'or à payer par ladite société marseillaise à 
        la Régence d'Alger, comportait, outre les comptoirs, la permission 
        d'y élever des forts, de mettre en place des pièces d'artillerie 
        et de pêcher le corail reconnaissance du privilège exclusif 
        à la France d'alors ; les armateurs provençaux possédaient 
        cette pêche depuis 1478, possession reconnue par Sélim en 
        1518 et confirmée par les Capitulations de 1535.
 Deuxième siège 
        d'Oran par les Turcs -----A la fin de 
        l'année 1561, Don Alonso de Cordoba, nouveau comte d'Alcaudète, 
        Capitaine Général des places d'Oran et Mers-el-Kébir, 
        rachète son frère, Don Martin, prisonnier des Turcs depuis 
        l558. Ce rachat dont le montant s'élevait à 23 333 ducats 
        se fit grâce au produit d'une razzia d'où il revint avec 
        de nombreux esclaves et butins repris aux Maures. En 1562, ces derniers, 
        notamment les Bent-Arax de l'ancienne province romaine Régioe, 
        royaume de Sidi-Soliman le long de l'oued Ilabra, devenu Arbal par la 
        suite, demandèrent aux Turcs d'Alger de venir assiéger les 
        villes de leur royaume et places tenues par les Espagnols et d'installer 
        des garnisons turques, particulièrement à Mascara. Ils les 
        assurèrent pour cela de la coopération de leurs gens. Si 
        Amokran s'appuya sur les Hacheur, tribu Hilalienne des environs de Mascara, 
        pour en faire sa garde personnelle. Il les installa au pied du djebel 
        Oum er Rissan et les exemptant d'impôts, s'en servit de tribu maghzen 
        pour agrandir son pouvoir sur la vallée de l'oued Rir, sur Touggourt 
        et sur le pays des Ouled Naïl, de Bou Saada à Djelfa.-----En février 1563, Hassan Pacha, 
        après avoir confié, par intérim, le gouvernement 
        d'Alger à Ali Chirivi, alla s'installer à Mostaganem et 
        à Mazagran. D'après le général L. Didier, 
        le chroniqueur Walsin Estherazy nous dit qu'à partir de ces villes, 
        il ne laissa, sans trêve ni relâche les Espagnols. Ceux-ci 
        étaient harcelés par d'incessantes incursions des cavaleries 
        turque, maure, kabyle et arabe. La flotte, turco-algéroise, commandée 
        par le capitan Pacha Cochupare (ou Cochupari) était composée 
        de 32 galères et de trois caravelles françaises. Après 
        avoir rallié Mostaganem et y avoir débarqué de l'artillerie, 
        des munitions et du matériel destinés aux sièges 
        des places fortes, la flotte rallie le port d'Arzew à partir duquel 
        le blocus, par mer, de Mers-el-Kébir et Oran sera mis en place.
 |  | -----Les contingents 
        dont disposait Hassan Pacha étaient formés de 1 000 Spahis 
        et de 15 000 janissaires Turcs, dont un grand nombre envoyé par 
        le sultan de Constantinople, et des renégats d'Alger. Mais ils 
        étaient en quantité insuffisante pour bouter les Espagnols 
        hors des places-fortes d'Oran et de Mers-el-Kébir. Ils furent donc 
        renforcés par 12 000 kabyles, Zouaouas et Béni-Abbès, 
        mis à la disposition d'Hassan Pacha par Ahmed ben el-Cadi, roi 
        de Koukou et Si Ahmed Amokran, chef des Béni-Abbés. Il avait 
        contracté avec tous deux une alliance contre les Espagnols. Ces 
        effectifs s'augmentèrent de ceux des tribus qui, par haine du chrétien, 
        s'enrôlèrent lors du passage, sur leur territoire, des troupes 
        qui, par voie terrestre, rejoignaient Mostaganem depuis A1ger.Le caïd 
        de Tlemcen est installé sur la Macta pour couper les liaisons des 
        Espagnols avec l'intérieur du pays et protéger les arrières 
        des troupes assiégeantes de Hassan Pacha.-----La stratégie d'Hassan Pacha consiste, 
        afin que la flotte turque puisse s'y réfugier, à attaquer 
        et conquérir, dans une première phase de l'opération, 
        Mers-el-Kébir, port-forteresse, dont le gouverneur était 
        Don Martin de Cordoba ; le chevalier Don Fernando de Carcamo, son ami 
        qui l'avait suivi en captivité, était gouverneuradjoint 
        et le remplaçait alors qu'il était absent, au début 
        du siège.
 -----Hassan s'installe avec ses forces en 
        amont de la source qui alimente Oran, à l'emplacement qui devint 
        le quartier d'Eckmühl, lance des assauts infructueux sur la Tour 
        des Saints, au Sud-Est de la porte de l'Alcazaba (porte de Tlemcen), à 
        mi-distance des chemins de Tlemcen et de Mostaganem. Ces échecs 
        le firent décider de transporter l'essentiel de ses forces à 
        l'Ouest de la colline d'Oran appelée "El Cerro Gordo" 
        par les Espagnols. La cavalerie poursuivra le blocus terrestre du sud.
 -----Bien que son artillerie ne fut pas encore 
        installée en raison du retard des navires qui la transportaient, 
        il lance une attaque contre le fort San Salvador (ou Saint-Michel suivant 
        certains historiens) de Mers-el-Kébir. attaque repoussée 
        par Don Francisco de Ribero qui dispose de 32 pièces d'artillerie 
        et de 200 hommes d'armes. Les Maures sont défaits à chacune 
        des attaques suivantes, au cours de ce mois d'Avril 1563.
 -----Des troupes de l'artillerie et des munitions 
        sont enfin débarquées, avec du retard sur les prévision 
        d'Ilassan en raison du mauvais temps, sur la plage des Aiguades, qui s'étend 
        des villages côtiers qui prirent le nom de "Trouville" 
        et "Aïn-el-Turk". Les galères s'embossent ensuite 
        autour de Mer-el-Kébir pour poursuivre le blocus. L'artillerie 
        maure se déchaîne alors avant une nouvelle et violente attaque 
        qui est à nouveau repoussée. Le fils du sultan de Koukou 
        est tué, Hassan blessé mais leurs troupes parviennent aux 
        pieds des murs de fortification, encerclant la garnison commandée 
        par Don Martin de Cordoba qui avait rejoint la place avec une compagnie 
        de renfort. Il refuse de se rendre, nonobstant la reconnaissance qu'il 
        avait envers Hassan Pacha qui l'avait bien traité lors de sa captivité 
        et qui avait fait rendre les honneurs au corps de son père, tué. 
        Il continua donc à repousser les assauts malgré les brèches 
        faites dans les murs par l'artillerie des assaillants. Du 15 mai au 7 
        juin les assauts successifs sont repoussés ; au cours du sanglant 
        dernier qui dura plus de cinq heures, Don Martin et son adjoint Don Fernando 
        de Carcamo sont blessés. Mais la garnison apprend que la flotte 
        espagnole commandée par Doria venait au secours des assiégés 
        ; la force de résistance de ceux-ci en est décuplée.
 -----Hassan écume de rage car lui 
        aussi apprend par ses espions que Doria arrive et que ses objectifs ne 
        seront plus atteints avant l'arrivée de la puissante flotte espagnole. 
        A l'issue de la dernière attaque, le 7 juin, alors que ses janissaires 
        se replient, il leur crie : "Comment chiens, 4 hommes vous arrêtent 
        devant une misérable bicoque".
 -----Un autre historien rapporte qu'il aurait 
        interpellé ses janissaires battus en criant : "O Musulmans 
        ! se peut-il que 4 coquins de chrétiens tiennent contre vous dans 
        un pareil chenil ?"
 -----Il s'élança alors à 
        leur tête, élevant son cimeterre en hurlant
 : "Je mourrai pour votre éternel déshonneur".
 -----Mais il est retenu par les siens et, 
        le 9 juin 1653, il ordonne la levée du siège, fait replier 
        ses troupes sur Mostaganem et rejoint Alger ; il aura perdu 4 000 hommes 
        et presque la totalité de son artillerie. Sa flotte ne perd que 
        quatre galères et les caravelles françaises de transport. 
        Le second siège d'Oran aura duré, affectivement, deux mois 
        et quatre jours.
 -----La reconstruction de la forteresse de 
        Mers-el--Kébir dont la garnison n'était plus que de 130 
        hommes à l'issue du siège, sera aussitôt entreprise 
        par les Espagnols. Don Martin de Cordoba eut sa bravoure récompensée 
        par l'institution d'une rente perpétuelle de 3 000 ducats.
 Création du Beylik 
        de Mazouna. -----Les Turcs s'installent fortement, à 
        Mascara où ils tiendront garnison avec de l'artillerie car Hassan 
        craint que l'influence espagnole ne s'étende dans l'arrière 
        pays après leur héroïque résistance dans la 
        défense d'Oran et Mers-el-Kébir.
 -----Mais les pouvoirs dans cette province 
        occidentale étaient partagés entre les gouverneurs de chacun 
        des trois grands caïdats qu'étaient ceux de Mostaganem, de 
        Ténès et de Mascara. Les effectifs turcs ne pouvaient à 
        eux seuls suffire pour tenir le pays sous la domination de Constantinople. 
        Hassan eut recours aux populations indigènes organisées, 
        par castes, en tribus éternellement divisées par des haines 
        qui attisaient les rivalités de leurs chefs. Il décida de 
        créer le Beylik de l'Ouest et nomma à sa tête Bou 
        Krédidja, un Turc de sa milice qui lui était tout dévoué, 
        homme d'entrain et d'intelligence dira de lui, Walsin Esterhazy. Le siège 
        devait être situé hors d'atteinte des Espagnols chrétiens, 
        toujours aussi honnis du renégat Corso, pacha d'Alger, et au centre 
        de gravité des territoires des trois caïdats afin d'agir sans 
        longs délais sur les populations, à l'intérieur du 
        pays. Mazouna, petite ville ruinée par les guerres entre les Béni 
        Zian et les Béni Mérün, fut choisie car elle était 
        située à égale distance de Mostaganem et de Ténès. 
        Ses habitants passaient pour de mauvais musulmans et la région 
        située sur les contreforts des montagnes du Dahra était 
        un foyer d' insurrection.
 -----Les caïds nommés par le 
        bey Bou Krédidja étaient Arabes ; responsables vis-à-vis 
        de lui des prélèvements sur leurs administrés, ils 
        étaient astreints à payer une redevance annuelle au bey 
        de province dont le montant était fixé proportionnellement 
        à la richesse connue des villes et villages. Les mahgzen qui sillonaient 
        la province et l'administration solidement fondée, établirent 
        la puissance turque dans cette province.
 -----Premier consulat de France à 
        Alger; premier incident diplomatique. A la demande pressante des marseillais, 
        Charles IX, roi de France, décide de créer un consulat à 
        Alger et nomme à cette charge, le 15 septembre 1564, Monsieur Bertholle 
        de Marseille. Bien qu'ayant prêté serment entre les mains 
        du Comte de Tende, gouverneur de Provence, notre premier Consul de France 
        à Alger ne prend pas possession de son poste car il n'est pas admis 
        par Alger.
 (à suivre)
 Gaston Bautista 
         
 
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