agriculture et arboriculture en Algérie avant 1962
Les orangers et les mandariniers d'Algérie

 

Afrique du nord illustrée du 27-9-1924 - Transmis par Francis Rambert
janvier 2021

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LES ORANGERS ET MANDARINIERS D'ALGÉRIE

LES ORANGERS ET MANDARINIERS D'ALGÉRIE

LES ORANGERS ET MANDARINIERS D'ALGÉRIE

Les orangers et les mandariniers, comme d'ailleurs, d'une façon générale, tous les arbres appartenant au groupe des " agrumes ", se développent admirablement en Algérie. Leurs plantations s'y multiplient, s'étalant surtout dans les terres saines et irrigables des plaines voisines du littoral, où ces arbres au feuillage vert sombre et aux fruits d'or font l'émerveillement du touriste.

Avant l'occupation française l'oranger était cultivé par les indigènes, ce n'était qu'une culture de luxe limitée à quelques jardins dans les villes ou à proximité des agglomérations urbaines. Comme nous sommes loin de cette culture d'agrément ! Les plantations d'orangers, en 1904, ne comprenaient pas moins de 900.000 individus, et celles des mandariniers approchaient de 600.000 arbres, couvrant ensemble une superficie de 3.000 hectares environ qui, depuis cette époque, a presque doublé, de sorte qu'on évalue actuellement entre 5 et 6.000 hectares la superficie plantée en orangers et mandariniers.

Ces résultats sont, en ce qui concerne le mandarinier, d'autant plus remarquables que l'introduction de cette essence fruitière - encore une curiosité botanique au début du XIX" siècle dans le bassin méditerranéen - est relativement récente. Propagée d'abord aux environs de Blida, la culture du mandarinier ne s'est réellement développée qu'à partir de 1875, après que BoréJy-la-Sapie eût prouvé que les aurantiacées pouvaient admirablement prospérer dans les terres assainies et dès lors extrêmement fertiles de la région de Boufarik. Depuis cette époque, cette culture s'est généralisée dans les trois départements algériens (centres de Boufarik - Perrégaux - Bône), et, actuellement le Maroc (centre de Rabat) semble vouloir rivaliser de zèle avec l'Algérie. Les orangers peuvent être francs de pieds ou greffés. " Les francs de pied, dit M. Victor Démontés, sont obtenus par semis direct des graines de fruits comestibles ; les indigènes qui pratiquaient beaucoup ce mode de multiplication avaient ainsi des arbres de belle venue et d'une vigueur remarquable, mais de qualité très variable. Aujourd'hui on sème des graines de bigaradiers (oranges amères) et on greffe sur les sujets obtenus particulièrement résistants, les variétés que l'on désire reproduire : les jeunes plants de bigaradiers sont mis en pépinière dès la seconde année ; on les greffe de bonne heure, et, quand ils sont forts on les plante à 5 ou 6 mètres d'intervalle. "

M. Edmond Vidaillet se livre à Boufarik, où il a installé la plus grande pépinière de toute l'Algérie, à la préparation des plants greffés avec les meilleures variétés que l'on possède. Et cette heureuse initiative répond à la vogue, à la prospérité- toujours croissante de l'oranger et du mandarinier, car si la colonie est déjà devenue le principal producteur de mandarines du monde et l'un des plus importants exportateurs d'oranges, bien des terres peuvent encore y être consacrées au développement de ces cultures. Le Docteur Trabut estime pour sa part, à 500.000 hectares la superficie des terrains susceptibles de recevoir des orangeries dans l'Afrique du Nord, et il ajoute qu'il serait possible d'y réaliser le jardin des Hespérides. La marge est encore grande !

Le commerce des fruits s'est évidemment ressenti des perturbations causées par la guerre, mais moins qu'on aurait pu le craindre et malgré la cherté et lés difficultés des transports, les expéditions algériennes portent, sur des quantités remarquables et sont de plus en plus rémunératrices.

Les exportations d'oranges ont subi une diminution de près de moitié en 1913, mais elles ont augmenté de manière notable en 1921. Quant aux exportations de mandarines, elles se sont approché de 30.000 quintaux en 1920 et elles ont maintenues entre 80.000 et 10.000 quintaux dans la période comprise entre 1910 et 1920.

Ces orangers et ces mandariniers d'Algérie sont de belle couleur, d'un parfum agréable et surtout fort douces dès le début, ce qui leur donne un avantage très marqué sur les fruits espagnols.

Aussi verra-t-on si l'effort de plantation actuellement commencé se poursuit dans la colonie, les expéditions doubleront ou même tripleront en quelques années. Elles se substitueront en France aux envois de l'étranger (en quoi nos compatriotes ne perdront rien au change) et, sur les marchés anglais et de l'Europe Centrale, viendront concurrencer avec bonheur l'Espagne et l'Italie. A cet égard, il y a lieu de faire une remarque assez piquante : " plus " l'Algérie produira, " mieux " elle sera " placée " et moins elle sera concurrencée par les marchés étrangers. Elle ne saurait, en effet, exiger des pouvoirs publics que les fruits espagnols et italiens soient frappés de droits prohibitifs tant qu'elle ne sera pas en état d'assurer par elle-même le chiffre à la consommation métropolitaine.

Ces droits prohibitifs ne pourront être justifiés et décrétés que le jour où la France pourra s'approvisionner exclusivement en Algérie. Il appartient donc aux Algériens de réaliser l'effort qu'on attend d'eux pour l'établissement de ce monopole.

Il nous reste encore à envisager une question importante. La faveur dont jouit la mandarine par rapport à l'orange ne doit pas, cependant, guider étroitement le planteur. En principe, d'ailleurs, la monoculture n'est jamais conseillée. La mandarine, comme on le sait, est précoce : c'est en quelque sorte une primeur qu'il convient de cueillir et d'expédier au plus tôt, car le fruit se boursoufle assez rapidement, devient spongieux et perd dès lors toute saveur. Par contre, l'orange mûrit lentement et sa suavité n'est appréciable qu'après la cueillette des mandarines. C'est ainsi qu'on peut dire que l'orange succède à la mandarine. En plantant simultanément orangers et mandariniers, le producteur opère sagement, car il permet aux acheteurs - aux exportateurs - de prolonger la durée de leurs expéditions.

La limitation du personnel et du matériel (chevaux, véhicules, caisses d'emballages, locaux) l'encombrement à bord des navires, et sur les voies ferrées incitent l'exportateur à " allonger sa saison ". Or, seule la maturation plus lente et plus tardive de l'orange permet un écoulement moins précipité, donc moins onéreux pour les raisons ci-dessus, des récoltes pendantes. Tous y ont le plus grand intérêt, depuis le consommateur jusqu'au producteur ou inversement.