l'Agha - Alger
Les étudiants ont enfin leur maison.
bd Baudin
Afrique illustrée du 5-5-1934 - Transmis par Francis Rambert

Il y a quelques années, j'avais eu l'occasion de m'entretenir de cette fameuse question avec le sympathique Bartibas, alors président de l'A.G. et je me souviens que celui-ci m'avait déclaré d'un ton presque mélancolique : l'aurons-nous jamais notre maison ?

Ces paroles étaient d'autant plus émouvantes qu'on entendait, tout près, dans, un local voisin, le " messieurs, faites vos jeux " d'un croupier à la solde de certain cercle où l'humanité décadente venait journellement déverser sur le tapis vert le contenu de ses portefeuilles engraissés de billets et de chèques.

Ce qui semblait une éventualité irréalisable immédiatement est devenu une réalité grâce aux concours anonymes et surtout, grâce à l'appui, combien précieux, des, Pouvoirs publics.

Ainsi donc, après tant d'années d'attente et d'espoir, les étudiants ont enfin leur maison, et quelle maison ! Imaginez-vous un petit palais ouvert sur l'une de nos plus belles artères algéroises, peut-être la plus belle : le boulevard Baudin. Cinq étages où tout a été prévu pour assurer au travailleur exilé un confort largement suffisant, depuis une bibliothèque fort bien garnie, des salles de lectures amplement approvisionnées, un théâtre, jusqu'à l'inévitable bar américain, le restaurant et même une immense salle de culture physique où nos universitaires, dont on connaît la valeur athlétique et les succès sportifs, pourront, tout à leur aise, s'entraîner et préparer les compétitions futures. Les bureaux de l'A.G. et ceux, non moins bien compris, de notre jeune et si actif confrère Alger-Etudiant, occupent également une place très importante dans ce building élégant. Je dirai même qu'ils relèvent d'un souci d'anticipation assez original puisqu'on y découvre des postes de T.S.F. susceptibles d'apporter rapidement les nouvelles fraîches.


N.B : CTRL + molette souris = page plus ou moins grande
TEXTE COMPLET SOUS L'IMAGE.


juin 2021

450 Ko
retour
 

Les étudiants ont enfin leur maison.

Les étudiants ont enfin leur maison.

Il y a quelques années, j'avais eu l'occasion de m'entretenir de cette fameuse question avec le sympathique Bartibas, alors président de l'A.G. et je me souviens que celui-ci m'avait déclaré d'un ton presque mélancolique : l'aurons-nous jamais notre maison ?

Ces paroles étaient d'autant plus émouvantes qu'on entendait, tout près, dans, un local voisin, le " messieurs, faites vos jeux " d'un croupier à la solde de certain cercle où l'humanité décadente venait journellement déverser sur le tapis vert le contenu de ses portefeuilles engraissés de billets et de chèques.

Ce qui semblait une éventualité irréalisable immédiatement est devenu une réalité grâce aux concours anonymes et surtout, grâce à l'appui, combien précieux, des, Pouvoirs publics.

Ainsi donc, après tant d'années d'attente et d'espoir, les étudiants ont enfin leur maison, et quelle maison ! Imaginez-vous un petit palais ouvert sur l'une de nos plus belles artères algéroises, peut-être la plus belle : le boulevard Baudin. Cinq étages où tout a été prévu pour assurer au travailleur exilé un confort largement suffisant, depuis une bibliothèque fort bien garnie, des salles de lectures amplement approvisionnées, un théâtre, jusqu'à l'inévitable bar américain, le restaurant et même une immense salle de culture physique où nos universitaires, dont on connaît la valeur athlétique et les succès sportifs, pourront, tout à leur aise, s'entraîner et préparer les compétitions futures. Les bureaux de l'A.G. et ceux, non moins bien compris, de notre jeune et si actif confrère Alger-Etudiant, occupent également une place très importante dans ce building élégant. Je dirai même qu'ils relèvent d'un souci d'anticipation assez original puisqu'on y découvre des postes de T.S.F. susceptibles d'apporter rapidement les nouvelles fraîches.

Une telle organisation méritait une consécration officielle. Elle l'a reçue vendredi dernier et M. le Gouverneur Général Carde, l'un des artisans de cette grande et belle œuvre, avait tenu par sa présence, à manifester une fois de plus à la jeunesse universitaire, tout l'intérêt qu'il lui porte. M. le recteur Hardy et bon nombre de personnalités marquantes s'étaient joints au chef de la Colonie et ce fut là l'occasion d'une manifestation dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle fut parfaitement réussie.
A l'heure des toasts, M. Richier, l'actuel président de l'A.G. remercia M. Carde de sa collaboration précieuse et sincère.
- " Cette maison, dans laquelle nous vous accueillons, dit-il notamment, je crois que les étudiants d'Alger, y ont toujours pensé, et c'est pourquoi nous avons trouvé auprès de nos anciens, devenus hauts fonctionnaires, délégués financiers, conseillers généraux, cette aide précieuse qui en a permis l'édification. Ils ont voulu aider leurs cadets à réaliser ce qu'ils n'avaient pu faire au moment de leurs vingt ans. Ils se sont employés à favoriser ceux qui reprenaient leur vieux rêve, et voilà comment le rêve a cessé d'être un rêve, comment s'est élevée cette maison qui fait de tous les étudiants passés et à venir des propriétaires indivis et c'est le pire, des bourgeois par voie de conséquence directe. "

M. Hardy lui succéda et c'est avec son aisance coutumière, sa finesse toute littéraire, qu'il prononça son allocution.
- " La voilà donc, cette Maison des Étudiants d'Alger. Si quelque écolier des anciens temps, si Villon revenait, il n'en croirait pas ses yeux, et sans doute s'imaginerait-il transporté au Pays des Merveilles. Qui sait d'ailleurs si, parmi les hommes qui nous entourent, il ne se trouve personne pour murmurer " de mon temps " et pour estimer que cette belle demeure, ample, lumineuse, coquette au meilleur goût de l'époque, pêche par excès de luxe ?

Prévenons le reproche. Notons avant tout que cette maison est neuve et que sa fraîcheur si l'on y prend garde, est son principal ornement : le temps, se chargera bien assez tôt d'y mettre sa patine et ses griffes, - à supposer même - mais quelle diabolique pensée me vient là ! - à supposer dis-je, que le temps ne trouve pas d'actifs auxiliaires chez les occupants. "
Ce fut, enfin, au tour de M. Carde, de louer les mérites du " home " estudiantin.
- " Plus favorisée que les autres colonies françaises, dit-il, en terminant, l'Algérie possède son Université. C'est près d'elle, à Alger, que votre initiative est née, qu'elle a pu aboutir, grâce - et j'en suis particulièrement heureux - à l'aide du budget colonial.
Sous peine de perdre la direction spirituelle d'un monde de plus en plus instruit, a-t-on dit, notre pays devra restaurer le culte de l'intelligence. Je me félicite, Messieurs, de constater, une fois, de plus, qu'en Algérie, où voisinent deux élites également avides de s'instruire, on a su réaliser cet accord de la pensée et de l'action. "

La fête eut son épilogue, le soir, dans les salons du Casino municipal où, jusqu'aux premières lueurs de l'aube, les " terpsichoriens " s'en donnèrent à cœur joie dans, une atmosphère de camaraderie spontanée et d'heureux optimisme.