13 mai 1958
: le coup d'état gaulliste avec les 13 complots du 13 mai et la
prise du Gouvernement général par les Européens à
Alger.
" Le 13 mai, avec ses tenants et aboutissants, est un dédale
de complots et d'intrigues.
" Le 13 mai commence avec une grève générale
décrét&e par les Anciens Combattants.
" Les causes de cette révolution sont nombreuses, variées,
géographiquement distantes les unes des autres, certaines institutionnelles,
d'autres accidentelles, mais toutes proviennent de la même source
: la désagrégation de l'Etat.
" Pour certains, le 13 mai voit la victoire politique de l'Algérie
Française. L'alliance des patriotes et de l'armée va entraîner
les Musulmans puis imposer sa loi à la Métropole.
" Léon Delbecque arrive au petit matin à Alger, ainsi
qu'Alain de Sérigny.
" A Alger, le colonel Yves Godard met immédiatement en alerte
le 3e R.P.C., le 1er R.C.P. et le 9e Zouaves qui s'occupera de la Ca
" Paul Teitgen alerte Paris ; il ne recueille que des sarcasme
" A Bône, les Européens commencent à s'agiter
; à 5 heures du matin, le général Paul Vanuxem donne
l'ordre au 3e R.E.I. de partir sur Bône pour maintenir l'ordre.
" Avant son départ, le ministre résident Robert Lacoste
a interdit la manifestation ; le superpréfet d'Alger, Serge Barret,
l'autorise ; le général Raoul Salan à son tour accepte
un défilé d'hommage aux trois victimes du F.L.N. Il ira
lui-même déposer une gerbe dédiée à
leur sacrifice au monument aux Morts, à 18 heures. La cérémonie
sera digne et silencieuses.
" A Alger, le bled déferle sur la ville ; les colons arrivent
de cent kilomètres à la ronde, leurs voitures pavoisées
de drapeaux ; les transports publics sont arrêtés ; dès
13 heures, une fourmilière trottine sur les trottoirs des grandes
artères ; Alger s'est mis en marche vers le boulevard Laferrière
; la foule algéroise, qui s'est réunie ce mardi sur l'initiative
du Comité des sept* pour rendre hommage aux trois soldats français
exécutés par le F.L.N. le 30 avril à Souk-el-Arba,
envahit le Forum avec à sa tête Pierre Lagaillarde* , le
président des étudiants d'Alger, ancien lieutenant para,
en tenue camouflée, et Jacques Roseau, le leader des lycéens
; sont là les poujadistes Robert Goutailler* , propriétaire
de l'établissement Le Relais, et le docteur Bernard Lefèvre*
, jeune médecin homéopathe, 1er adjoint de la commune de
Birmandreïs, Robert Martel* et son adjoint Maurice Crespin* avec
les hommes de la Mitidja, Maître Baille* et Georges Kerdavid et
les hommes de Joseph Ortiz* ; les radicaux socialistes sont là
autour de Zittel et Fiel, le M.R.P. avec Coppa, les indépendants
avec Burkhardt ; les Anciens Combattants avec Auguste Arnould et Martin,
sont là, avec le Comité de Vigilance dont les sept font
partie ; les généraux Raoul Salan et Jacques Massu avec
leurs colonels, follement applaudis, tentent de maîtriser la situation
au Gouvernement Général ; l'armée est l'ultime recours
pour la foule.
" A Alger, le sac des services d'information U.S. illustre la montée
de l'anti-américanisme.
" A Paris, commence au début de l'après-midi le débat
sur l'investiture de Pierre Pflimlin.
" A Oran, un imposant défilé est conduit par le préfet
Pierre Lambert et le maire Henri Fouques-Duparc. Il n'y a pas de débordements.
" A Bône, sur l'ordre de l'E.M. de la région, le 3e
R.E.I. s'arrête à quelques kilomètres de la ville
; les officiers écoutent les nouvelles de Radio-Alger.
" A Alger, deux hommes rendent possible la suite de l'action : le
lieutenant-colonel Roger Trinquier, qui assure la couverture militaire,
et Léon Delbecque, le civil qui ramène le filet vers la
rive gaulliste.
" A Alger, à 18 heures 30, la marée humaine s'ébranle
à l'assaut du système symbolisé par le bâtiment
gigantesque du Gouvernement Général ; les paras du 3e R.P.C.
tenus en réserve dans les lacets du Telemny interviennent pour
remplacer les gardes mobiles qui reçoivent l'ordre de s'éclipser
: mais les parachutistes n'ont nulle envie de se heurter aux manifestants
désemparés qui hurlent leur attachement à la France
et ils restent passifs devant la foule qui les acclame, qui les embrasse
; les paras laissent les émeutiers utiliser un camion militaire
" A Alger, sous l'influence du lieutenant-colonel
Roger Trinquier du 3e R.P.C. et de deux gaullistes Léon Delbecque
et Lucien Neuwirth, des Comités de Salut Public, C.S.P., sont créés.
Les premiers membres du C.S.P. sont choisis, au hasard, par le général
Jacques Massu, encadré par les capitaines Marion et Engels, parmi
les manifestants : Pierre Lagaillarde, Armand Perroud, Gabriel Montigny,
Rodolphe Parachini, Paul Moreau, André Baudier, Joseph Jolivet,
les colonels Jean Thomazo, Ducasse et Roger Trinquier, et, bien entendu,
lui-même qui en assure la présidence. Avec la deuxième
vague proposée par Léon Delbecque au général
Jacques Massu, entrent dans le C.S.P. les gaullistes, Léon Delbecque,
Antoine Arnould et Jacques Mouchan des A.C., Alain de Sérigny tout
nouveau gaulliste, L'Hostis, Lucien Neuwirth et René Vinciguerra.
" Le colonel Charles Lacheroy, directeur du S.I.A.P., est nommé
porte-parole du C.S.P. d'Alger par le général Raoul Salan.
" Le 2e R.P.C. du lieutenant-colonel Le Mire, le 1er R.C.P. du lieutenant-colonel
Henri Coustaux et le 6e R.P.C. du lieutenant-colonel Jacques Romain-Desfossés
apportent leur soutien au général Jacques Massu, ainsi que
les Unités Territoriales du colonel Jean Thomazo dit Nez de Cuir.
Le lieutenant-colonel Pierre Jeanpierre, chef de corps du 1er R.E.P.,
engagé sur la frontière tunisienne, fait savoir qu'il lui
est impossible de rentrer sur Alger mais que le 1er R.E.P. est de tout
cur avec les autres unités. Toute la 10e D.P., sans se poser
de questions, fait bloc et reste aux ordres du général Jacques
Massu dans ces
" Le chef de bataillon Robert Moulié, commandant en second
du 3e R.P.C., reste dans ses fonctions strictement militaires au niveau
du Régiment.
" A Alger, le capitaine Raymond Chabanne, sur instructions du général
André Petit de l'E.M.A., et le commandant Jean Pouget, de l'antenne
du ministère de la Défense Nationale, se retrouvent dans
le bureau de Gabriel Peccoud, directeur de la Sûreté Nationale
à Alger, pour surveiller les coffres secrets.
" A Alger, au journal Le Bled, le colonel Michel Goussault interdit
à Léon Delbecque, qui a occupé avec son état-major
gaulliste l'immeuble mauresque, d'utiliser les haut-parleurs. André
Rosfelder, avec quelques étudiants, a pris le contrôle de
Radio-Alger, sous l'autorité du colonel Charles Lacheroy ; ses
consignes se basent sur quatre piliers : la France éternelle, l'Algérie
nouvelle et française, le Christ pour la charité et Charles
De Gaulle pour l'honneur et la fidélité ; et pour tactique,
la vérité. Les gaullistes regagnent l'antenne de la Défense
nationale à El-Biar. Zittel du parti radical et Burkhard des Indépendants
sortent dignement du Comité de Vigilance.
" A 20 heures 50, le général Raoul Salan téléphone
au général Paul Ely : ''Prévenez le président
Félix Gaillard que la population demande à tout prix la
formation d'un gouvernement de Salut Public !''
" A Paris, ni le président du Conseil
démissionnaire Félix Gaillard, ni le ministre de la Défense
nationale, Jacques Chaban-Delmas, ni le ministre de l'Intérieur,
Maurice Bourgès-Maunoury, ni le Gouverneur Général,
Robert Lacoste, ne donnent l'ordre de tirer sur les manifestants d'Alger.
" A 21 heures 30, Félix Gaillard donne officiellement les
pleins pouvoirs civils et militaires au général Raoul Salan
avec possibilité de subdéléguer au général
Jacques Massu. Il autorise Pierre Maisonneuve à déléguer
ses pouvoirs civils au général Raoul Salan.
" A Paris, autour de l'Arc de Triomphe, vers 18 heures, une manifestation
rassemble 2 000 personnes autour des députés poujadistes,
Jean-Marie Le Pen et Jean-Maurice Demarquet, dans l'indifférence
générale ; des incidents se nouent aux abords de La Madeleine
; ils se soldent par quelques horions et 44 arrestations.
" A Paris, le ministre de l'Algérie, Robert Lacoste, téléphone
au général Jacques Massu pour lui dire que la création
d'un C.S.P. est inconcevable ; au même moment, à Alger, le
général Raoul Salan reçoit par télégramme
secret la confirmation des pouvoirs civils donnée par Félix
Gaillard, après consultation avec Pierre Pflimlin.
" A Alger, dans la soirée, les conjurés craignent,
sur ordre de Paris, l'intervention de la 7e D.M.R. rameutée de
Kabylie en même temps que des unités d'Oranie. Mais le général
Raoul Salan refuse de signer les ordres préparés par le
colonel Paul Ducournau. Pierre Lagaillarde conseille au colonel Jean Thomazo
de rappeler l'U.T.B. - Unité Territoriale Blindée - Vers
23 heures, le capitaine Paul-Alain Léger et le lieutenant Kerdavid
arrivent avec l'U.T.B. de retour d'opérations dans la région
de Rivet ; ils s'installent au G.G.
" A 20 heures 50, le général Raoul Salan téléphone
au général Paul Ely, chef d'état-major de la Défense
nationale : ''Nous nous trouvons devant une réaction contre l'abandon
; cette réaction a pris la forme d'un véritable désespoir.
La population demande à tout prix la formation d'un gouvernement
de Salut Public autour du général De Gaulle''.
" A 21 heures, Léon Delbecque joue sa partition dans le bureau
du général Raoul Salan tandis que le commandant Jean Pouget
joue la sienne dans le bureau du général Jacques Massu.
" A 22 heures, au Forum, Léon Delbecque lance sa bombe : il
se présente comme le représentant de Jacques Soustelle dont
il attend la venue d'une minute à l'autre ; Alger revient au Forum
et se prépare à une kermesse héroïque.
" A Alger, Gabriel Montigny et Armand Perroud, du C.S.P., avec quelques
paras, prennent Radio-Alger ; le directeur Merlet et son rédacteur
en chef Godiveau laissent la place.
" Vers 23 heures, le général André Petit revient
de Paris à Alger, sans Jacques Soustelle ce qui mécontente
le général Jacques Allard mais ne perturbe pas le général
Jacques Massu ; mais il apporte à Léon Delbecque le soutien
de l'armée, le soutien du général Paul Ely, le C.E.MA.
" A 23 heures 45, le général Jacques Massu annonce
l'envoi d'un télégramme, rédigé par Léon
Delbecque et envoyé par le C.S.P., approuvé par le général
Raoul Salan, au général De Gaulle ; le colonel Yves Godard
ne s'est pas trompé : c'est la rébellion ouvertement proclamée
contre Paris ; le commandant Jean Pouget sourit à ses copains,
capitaines parachutistes.
" A Paris, Félix Gaillard met un terme aux communications
entre Alger et Paris : il interdit tout trafic aérien et déroute
les bateaux en partance de Marseille ; seuls les préfets de Constantine,
Tizi-Ouzou et Oran sont encore en liaison constante avec Paris.
" A Paris, le ministre de l'Intérieur, Maurice Bourgès-Maunoury,
donne l'ordre d'appréhender les émeutiers ; 22 arrestations
nominatives sont décidées ; quatre arrestations nominatives
seront exécutées par la police réticente.
" Le 13 mai donne l'envol à l'espérance.
" A Djelfa, le général Gaston Parlange rencontre le
général Mohamed Bellounis ; mais que peut-on décider
en ces jours de confusion ?
" En Espagne, tous les chefs de wilayas disponibles tiennent conclave
en Espagne en présence d'Omar Boudaoud, chef de la Fédération
de France du F.L.N. et, pour la première fois, de Francis Jeanson,
chef du réseau de soutien ; désormais, Francis Jeanson assistera
aux réunions.
Dans la nuit du 13 au 14 mai 1958 : à 2 H
45, dans une ambiance de crise aiguë, l'Assemblée Nationale
vote l'investiture de Pierre Pflimlin du M.R.P., qui reçoit le
soutien des socialistes, par 274 voix contre 129 et 137 abstentions. Mais
ce dernier ne cache pas sa volonté de trouver une solution négociée.
Sa nomination suscite l'inquiétude et la colère à
Alger.
" A Paris, Pierre Pflimlin fait entrer dans son gouvernement Guy
Mollet, en qualité de vice-président, et Jules Moch en tant
que ministre de l'Intérieur ; quatre Indépendants entrent,
à titre personnel, dans le gouvernement : Boscary-Monservin, Garet,
Mutter et Ribeyre.
" A 6 heures, Pierre Pflimlin téléphone au général
Raoul Salan pour lui confirmer les pleins pouvoirs accordés par
Félix Gaillard. Au cours de la conversation, ils se mettent d'accord
: André Mutter, le successeur de Robert Lacoste, doit rester à
Paris et le général Raoul Salan reçoit confirmation
des pleins pouvoirs. Le colonel Feaugeas accompagne à Paris deux
secrétaires généraux de la Préfecture d'Alger,
MM. Bozzi et Bollotte, nommés aux cabinets du président
du Conseil et du nouveau ministre de la Défense, Pierre de Chevigné.
" A 10 heures, le haut commandement fait officiellement sa soumission
au président Pierre Pflimlin tout en rejetant son programme incompatible
avec l'honneur de l'Armée.
Un coup d'état militaire, qui réussit, n'est plus un coup
d'état.
************************************
?Après une chaude journée, (celle du 13 mai),
deux parties d'échecs commencent,
l'une à Paris, l'autre à Alger.
Récit heure par heure de
la journée du 14 mai.
14 mai 1958 : à Alger,
avec le jour, les Algérois découvrent sur les murs de leur
ville des affiches posées par ordre du général Raoul
Salan, qui oublie le télégramme restrictif : le général
assume tous les pouvoirs ; il prend ''provisoirement en main les destinées
de l'Algérie française'' tandis qu'un certain nombre de
hauts fonctionnaires quittent leur poste ; un C.S.P. est constitué
avec des civils et des militaires ; et les rouages de l'administration
sont remis en route ; la population doit conserver son calme.
" A 8 heures, les membres du C.S.P. lancent des estafettes dans Alger
; de petits commandos se répandent dans les quartiers ; la grève
reprend. Tous au Forum.
" Pierre Lagaillarde réagit à
l'entrée des gaullistes dans le C.S.P. ; une troisième vague
de civils entre à sa demande au C.S.P. avec les extrémistes
de l'Algérie Française, Robert Martel, Joseph Ortiz, Robert
Goutailler, le docteur Bernard Lefebvre, Jacques Laquière et Jacques
Merlo.
" A Alger, le général Jacques Massu, président
du C.S.P., appelle l'ancien Chef de la France libre, Charles De Gaulle,
à rompre le silence.
" A Alger, les paras et les ultras sont les maîtres de la ville
; le 3e R.P.C. du lieutenant Roger Trinquier et le 6e R.P.C. du lieutenant-colonel
Ducasse patrouillent en ville ; le 1er R.C.P. fait mouvement vers Alger
comme le 2e R.P.C. du lieutenant-colonel Olivier Le Mire.
" A 11 heures, l'U.T.B. arrive de Rivet ; une section de ces territoriaux
de choc en treillis à écussons tricolores monte pendre la
garde à la porte du Comité de Salut Public, face aux paras.
Le général Jacques Allard prend très mal ce retour
d'opération ; il signe un ordre démobilisant cette Unité
le jour même ; l'U.T.B. refuse d'obéir. A midi, un deuxième
ordre de démobilisation pour le 15 au matin. Dans l'après-midi,
intervient un troisième ordre maintenant l'unité en service
jusqu'à nouvel ordre. Le Comité garde sa garde prétorienne.
" A Alger, le lieutenant-colonel Ducasse assume les fonctions de
chef d'état-major et s'occupe des liaisons avec la Métropole
; le lieutenant-colonel Roger Trinquier devient adjoint du général
Jacques Massu et reprend en mains le D.P.U. dont tous les chefs d'îlots
sont déjà rameutés au Forum ; le colonel Yves Godard
assume les fonctions de directeur de la Sûreté nationale
en Algérie ; le capitaine Jacques de la Bourdonnaye est son adjoint.
" Le colonel Lacheroy devient le porte-parole de l'Etat-Major.
" A Oran, l'intervention des U.T. est déterminante pour la
suite des évènements. Le super-préfet Pierre Lambert
est molesté. M. Fouques-Duparc, maire de la ville, met hâtivement
sur pied un Comité de Salut public, patriote et bon enfant, canalisant
provisoirement la manifestation.
" A Paris, le gouvernement de Pierre Pflimlin, affolé, accumule
bourde sur bourde en tentant de briser l'unité algérienne
; il coupe toutes les relations maritimes et aériennes avec Alger
; le ministre de l'Algérie, André Mutter, approuvé
par Pierre de Chevigné, ministre de la Défense, parle de
venir ''remettre de l'ordre à Alger'' ; il met sur pied un projet
dément de réduit en Kabylie, autour de Tizi-Ouzou. Il adresse
une circulaire aux préfets d'Afrique du Nord : ''Ne suivez que
les instructions de Paris'' ; Pierre de Chevigné fait téléphoner
au général Réthoré, commandant le C.A. d'Oran,
et au général Gilles, commandant le C.A. de Constantine
: ''N'acceptez d'ordres que du ministre de la Défense nationale''.
Mais toutes les communications passent par le poste de Fort-de-l'Eau qui
tient informé le général Raoul Salan.
" A Alger, le général Raoul Salan
reçoit un télégramme réduisant ses pouvoirs
au département d'Alger. En jouant un double jeu, le président
Pierre Pflimlin vient de perdre la situation.
" A Alger, Pierre Chaussade quitte le G.G. par le tunnel de secours
et choisit de gagner Tizi-Ouzou où le préfet Vignon ne cesse
d'affirmer sa fidélité à la République ; Paul
Teitgen se réfugie en ville et va se planquer chez sa secrétaire
; Pierre Maisonneuve décide de rentrer à Paris ; Jean Peccoud
ne se montre plus.
" Au camp d'Aïn-Taya, où s'entraînent les commandos
du G.L.I., commando ultra-secret du 11e Choc, sous le commandement du
capitaine Jacques de La Bourdonnaye, sont rapidement enfermés les
préfets Chevrier d'Orléansville, Vignon de Tizi-Ouzou, Chapel
de Constantine, l'avocate Gisèle Halimi, le journaliste du Monde
Eugène Mannoni.
" A Paris, dans ses bureaux de la rue de Solférino, Charles
De Gaulle s'entretient avec Jacques Foccart, Olivier Guichard et Pierre
Clostermann. Georges Bidault, Roger Duchet, André Morice et Jacques
Soustelle signent une déclaration : ''l'Algérie est et restera
française ; aucun cessez-le-feu n'est admissible ; l'armée
d'Algérie est le bouclier et l'honneur de la nation''. Georges
Bidault adjure Charles De Gaulle de jeter dans la balance le poids de
son nom. Pierre Pflimlin déclare solennellement que le gouvernement
n'admettra jamais que soient rompus les liens qui unissent l'Algérie
à la France.
" A Constantine, les capitaines parachutistes Jean Graziani et Lamouliatte,
arrivés d'Alger, bousculent le super-préfet Chapel et obtiennent
le ralliement du général Jean Gilles.
" En Métropole, le Gouvernement fait
procéder à l'arrestation de nombreux patriotes et dépose
un projet de loi étendant l'état d'urgence à la Métropole.
" A Paris, Yves Gignac de l'A.C.U.F. se retrouve à la Santé
ainsi que le commandant d'active Pugat ; le général Lionel
Chassin juge prudent de s'éclipser.
" Au Sahara, les postes de Fort-Flatters, d'In-Salah, d'Edjelé
et de Tamanrasset adhèrent au mouvement.
" A Paris, le Président René
Coty adresse aux troupes d'Algérie le message suivant : ''Gardien
de l'unité nationale, je fais appel à votre patriotisme
et à votre bon sens pour ne pas ajouter aux épreuves de
la PATRIE, celle d'une division des Français en face de l'ennemi.
Tout manquement à la discipline ne peut profiter qu'à ceux
qui nous combattent. Chef des Armées, en vertu de l'article 33
de la Constitution, je vous donne l'ordre de rester dans le devoir, sous
l'Autorité du Gouvernement de la République Française''.
" Les chasseurs parachutistes métropolitains reçoivent
l'ordre de changer leur traditionnel béret bleu pour le béret
rouge des parachutistes coloniaux ; les parachutistes de la Légion
Etrangère conservent leur béret vert.
" Au cours d'une opération dans la région du Bou-Hiffen
avec l'E.C.S. et les 2e & 4e escadrons du 13e R.D.P., le bilan est
de 4 prisonniers et 5 armes récupérées.
"
Du 14 au 16 mai 1958 : L'Ecole Polytechnique est consignée dans
ses quartiers, comme les autres unités de l'Armée française.
*******************************************
Suite des récits,
heure par heure, des 5 journées du 15 au 19 mai 1958. (Algérie,
Métropole).
Des C.S.P. se créent au niveau
des zones, des départements.
Le 16, c'est la grande journée
de fraternisation sur le Forum d'Alger.
Entre 40 000 Européens et
30 000 Musulmans unis dans une grande chaîne fraternelle.
Le 17, arrivée de Jacques Soustelle à Alger.
Le dimanche 18, nombreuses manifestations dans toute l'Algérie.
Le 19, le Maréchal Alphonse Juin rencontre le Président
de la République, René Coty.
Pendant ce temps des officiers préparent
l'opération Résurrection.
Un grand désordre politique
semble régner en Métropole.
15 mai 1958 : ''Vive De
Gaulle'' lancé par le général Raoul Salan à
Alger.
" A Alger, le général Raoul Salan, après avoir
terminé son discours sur le Forum par un ''Vive l'Algérie
Française'' fait un pas en arrière pour se retirer puis,
poussé par des officiers, par Léon Delbecque et Lucien Neuwirth,
docile, lance du balcon du G.G. un ''Vive De Gaulle'' à la foule
rassemblée sur le forum ; en jouant à son tour double jeu,
il vient de franchir le Rubicon ; le cri est repris timidement par une
foule incrédule.
" A Paris, sur le plan gouvernemental, les socialistes entrent au
gouvernement. Guy Mollet est vice-président du Conseil.
" Une quatrième vague entre au C.S.P.
d'Alger avec notamment quatre F.S.N.A. : Mahmoud Saïd Madani, contremaître,
le commandant (C.R.) Saci Mahdi, M. Chikh Taieb agriculteur, et Mohamed
Berkani.
" Six heures seulement après le discours du général
Raoul Salan, Charles De Gaulle sort de son silence ; le communiqué
de l'ancien Chef de la France libre, Charles De Gaulle, sur la désintégration
de l'Etat, est publié de Colombey-les-deux-Eglises ; c'est un texte
soigneusement élaboré qui se termine par : ''je me tiens
prêt à assumer les pouvoirs de la République''. Dès
lors, tout va basculer.
" Après 48 heures de garde dans le bureau de Gabriel Peccoud,
directeur de la sûreté nationale à Alger, le commandant
Jean Pouget et le capitaine Raymond Chabanne voient l'ouverture des coffres
secrets ; ils contiennent de l'argent des fonds spéciaux et des
documents très intéressants ; ils regrettent de ne pas pouvoir
les photocopier.
" A Pau, le commandant parachutiste Vitasse et le capitaine Lamouliatte
arrivent clandestinement d'Alger en Métropole, chargés de
mission par les généraux d'Alger pour l'opération
Résurrection. Le commandant Vitasse prend contact, au siège
de la rue Solférino, avec les gaullistes Christian de la Malène
et Jacques Foccart.
" Le 1er R.C.P. garde les aérodromes de la région d'Alger.
Deux sections de la 3e compagnie, aux ordres du lieutenant Jacques Priot
s'installent à Maison-Blanche.
" A Paris, le ministre de la Défense, Pierre de Chevigné,
envoie le général Maurice Challe, adjoint du général
Paul Ely, à Brest aux ordres du préfet maritime, puis le
général André Martin, sous l'escorte d'un colonel
de gendarmerie, à Metz.
" A Paris, le ministre de la Défense, Pierre de Chevigné,
reçoit vertement le colonel Juille envoyé par le général
Raoul Salan pour donner les explications sur les évènements
d'Alger. Bien que toujours opposé au 13 mai, le colonel Juille
se fait traiter de factieux.
" En permission à Solurac dans le Lot, le général
Léon Dulac, chef d'état-major du général Raoul
Salan, se rend à Paris où il est reçu par le colonel
Juille ; il passe la journée à piétiner dans les
couloirs de la rue Dominique.
" Des associations patriotiques sont dissoutes, quelques chefs militaires
sont placés en résidence surveillée ; l'isolement
de l'Algérie est maintenu et la défense de la légalité
républicaine devient la grande affaire des communistes, épaulés
par MM Mendès-France, François Mitterrand et André
Le Troquer.
" Le mouvement Jeune Nation est dissous.
" Les fonctionnaires loyaux à Paris sont facilement remplacés
; le blocus est plus gênant ; le directeur de la Banque d'Algérie
a besoin de 9 milliards ; deux pétroliers, qui arrivaient à
Alger, ont viré cap au nord ; mais l'amiral Auboyneau les a fait
rattraper par ses torpilleurs.
" Les vivres et les munitions vont manquer rapidement ; le consul
d'Allemagne d'un côté, les consuls d'Italie et d'Espagne
d'un autre côté, viennent officieusement offrir au commandement
et au C.S.P. l'aide des fournisseurs de leur pays pour les produits de
première urgence dont l'Algérie pourrait avoir besoin.
" A Paris, le président Pierre Pflimlin comprend les dangers
du double-jeu vis-à-vis du général en chef ; son
Ministre des travaux publics, M. Bonnefous, décide de faire une
discrimination dans l'embargo ; seuls les bateaux de munitions et les
bateaux de vivre pourront appareiller de Marseille ; cette décision
s'avère inapplicable. Pierre Pflimlin renonce finalement au blocus.
Mais il a perdu plusieurs jours à changer de politique et il a
perdu le contact avec le général en chef, Raoul Salan.
" A Alger, des femmes musulmanes brûlent leurs voiles sur les
dalles du Forum.
***************************************
16 mai 1958 : à Oran, le lieutenant-colonel Roger Trinquier, le
commandant musulman (C.R.) Saci Mahdi et le capitaine Paul-Alain Léger
sont envoyés dans l'après-midi par le général
Raoul Salan pour créer un C.S.P. : en effet, le général
Rethoré, chef du C.A. d'Oran, venu à Alger avec M. Fouques-Duparc,
maire d'Oran plutôt pessimiste, dans la matinée, reste hésitant
et prudent ; le général Emile Cantarel, son adjoint, est
plus enthousiaste pour le coup d'état mais respecte la hiérarchie
et refuse la présidence du C.S.P. ; le général de
Winter, patron du secteur d'Oran, est constipé ; le commandant
Carlin est nommé président du C.S.P. d'Oran et le colonel
musulman (C.R.) Sebane en accepte la vice-présidence.
" A Paris, le général Léon Dulac passe une deuxième
journée à piétiner dans les couloirs de la rue Dominique
pendant que le ministre négocie son troc contre Paul Teitgen, haut
fonctionnaire cher au M.R.P.
" L'armée d'Algérie pousse à la création
de cent trente comités de salut public en Algérie, composés
d'Européens, de Musulmans et de quelques officiers : la paix semble
acquise.
" Garants du nouvel esprit de l'Algérie française,
les C.S.P. où siègent civils et militaires prônent
ce qui reste la politique officielle de la France : l'intégration.
" Mais l'unité de l'Armée ne se réalise que
prudemment ; dans certains secteurs, les colonels refusent la formation
des C.S.P. ; dans certaines zones, les généraux prennent
la même position.
" Constantine et Bône se rallient finalement au mouvement.
" C'est l'Algérie toute entière qui entre, peu à
peu, en état de sécession avec la création des C.S.P.
eu niveau des zones, au niveau des départements.
" Grâce aux efforts de M. Watteau, gouverneur de la Banque
d'Algérie et de la Tunisie, à Alger du 13 au 20 mai, et
de M. Delahaye, sous-gouverneur, en accord avec M. Tixier, directeur général
des Finances, et M. Lacombe, trésorier général de
l'Algérie, les contacts avec le ministère des Finances sont
maintenus et le compte du Trésor Public n'est pas bloqué.
Plus de neuf milliards seront versés entre le 20 et 31 mai, après
une visite de M. Watteau à Paris le 20.
" Dans un ordre du jour aux troupes d'Algérie, le général
Raoul Salan précise : ''J'ai reçu mission d'assurer provisoirement
les pouvoirs civils et militaires. Je les emploierai à maintenir
l'ordre et à poursuivre sans désemparer la lutte contre
les rebelles. Seul à être informé de la situation,
je suis seul à même de prendre les décisions qui s'imposent
pour remplir ma mission. Je vous maintiendrai sur le chemin de l'honneur,
du loyalisme et de la fidélité aux institutions que la Patrie
s'est donnée.
" A Alger, les Musulmans se joignent aux manifestants européens
sur le Forum.
" Ils sont plus de 30 000, encadrés par les bleus de chauffe
du capitaine Paul-Alain Léger, à descendre de La Casbah
vers le Forum, plus de 100 000 à déferler des coteaux du
Sahel ; c'est le travail en profondeur du colonel Yves Godard, des capitaines
Sirvent du 9e Zouaves et Paul-Alain Léger du G.R.E., des officiers
des S.A.S. & S.A.U., le commandant Roulleau, le capitaine Pfirrmann,
le lieutenant Di Martino, le sergent-major Histre, le sergent-chef Casamayor
; des femmes musulmanes déchirent leurs haïks sur le Forum.
Au balcon du Forum, se succèdent Azem Ouali, au nom des maires
kabyles (il se réfugiera en Métropole), Mahmoud Saïd
Madani, au nom des syndicats (père de sept enfants, contremaître
à la Société des Produits Chimiques et Engrais de
Maison-Carrée, il sera assassiné par le F.L.N.), le commandant
Saci Mahdi, au nom des Anciens Combattants musulmans (il sera assassiné
par le F.L.N. en décembre 1960), et le colonel Si Chérif,
de son vrai nom Chérif Ben Saïdi, ancien sous-officier des
spahis, ancien rebelle rallié en mai 1957 (il se réfugiera
en Métropole en juin 1962, mais ses hommes seront massacrés
par le F.L.N. dans la région d'Aïn-Boucif et d'Aumale en mai
1962). C'est un brassage, Européens & Musulmans, chaleureux
et spontané, sur le Forum : union bouleversante de deux communautés,
plus que recouvrée, avivée par les épreuves subies
de part et d'autre ; du balcon tombe une formule qui soulève une
formidable tempête ''il y a 55 millions de Français de Dunkerque
à Tamanrasset''. Quarante mille Pieds-noirs et trente mille Musulmans
chantent la même Marseillaise ; dans la magie du Forum, une chaîne
d'amitié se forme.
" Les Yaouleds d'Alger, jeunes protégés de madame Massu,
forment leur petit C.S.P.
" Les appelés, massés en protection, ont du mal à
croire ce qu'ils voient.
" Désormais les appelés ne considèrent plus
les Musulmans avec le même regard : ils ne tolèrent plus
qu'on les accable de vexations.
" Le colonel Lallemand, patron du S.D.E.C.E. à Alger, et ses
deux chefs d'antenne sont expulsés de leur P.C. dans l'immeuble
du Coq Hardi vers la Métropole.
" Les hauts fonctionnaires Pierre Chaussade, ramené de Tizi-Ouzou
par des U.T., et Paul-Henri Teitgen sont révoqués. Ils sont
remplacés par André Regard et le préfet Serge Barret
; la libération de Paul Teitgen, menacé par les activistes,
est échangée par le général Raoul Salan contre
le retour à Alger du général Léon Dulac qui
se trouve en permission en Métropole.
" A Alger, Roger Frey, ancien secrétaire général
du R.P.F., débarque d'un rafiot contrebandier anglais ; Alain Griotteray
et Maître Jean-Baptiste Biaggi arrivent de Madrid avec un avion
taxi espagnol ; ils réclament un avion pour Jacques Soustelle ;
ils sont mis au secret par les paras puis Alain Griotteray est renvoyé
d'où il vient tandis que Jean-Baptiste Biaggi est emmené
à Alger par le capitaine Charles Paoli avant d'être expulsé
le lendemain par le général Jacques Massu puis expédié
à Adrar pour quatre jours.
" Roger Frey est désigné pour rédiger les messages
secrets que commence à émettre Radio-Alger qui n'ont aucune
signification et participent à l'intoxication entreprise par Alger
pour donner à Paris le sentiment du danger.
" A Paris, Jacques Soustelle quitte l'immeuble de la rue Henri-Martin,
recroquevillé à l'arrière de la Dauphine de Monique
Dufour, propriétaire de l'immeuble ; il gagne, de là, la
voiture de son ami Geoffroy de la Tour du Pin, puis celle du général
Pierre Guillain de Bénouville, Compagnon de la Libération,
qui l'emmène à la frontière suisse.
" En Métropole, le général Chassin s'assigne
la France comme théâtre d'opérations ; avec le général
Vésine de la Rue et le commandant Lassauzet, il lance le Mouvement
Populaire du 13 mai pour instituer un Comité de Salut Public dans
chaque commune de France. Sa mission est l'intoxication du gouvernement
et du parlement par le bluff.
" A Paris, le général Paul Ely,
chef d'état-major des forces armées, qui vient d'apprendre
l'arrestation de ses deux collaborateurs, remet sa démission au
ministre de la Défense, Pierre de Chevigné, et le fait savoir
à l'Armée française. Les généraux Blanc,
C.E.M.A.T. en 1955, et Michel Gouraud refusent de lui succéder.
Le général Henri Lorillot, C.E.M.A.T. accepte le poste mais
il télégraphie aussitôt au général Raoul
Salan pour l'assurer qu'il ne prend ces fonctions que dans le seul but
d'apporter un maximum de soutien à l'Armée d'Algérie.
" Son ordre du jour est interdit de diffusion par M. Gazier qui inaugure
la censure ; mais ce document a un retentissement considérable
dans l'armée. Il sauve son unité.
" Lors d'une opération du 1er R.E.P.
dans le douar Meddouda, 12 H.L.L. sont tués.
" A Paris, dans la soirée, le président Pierre Pflimlin
reçoit enfin le général Léon Dulac et lui
dit beaucoup de bien sur le général Raoul Salan qu'il espère
voir rapidement à Paris.
Dans la nuit du 16 au 17 mai 1958 : à Paris,
dans un tumulte croissant, après une première lecture, suivie
par un vote du Conseil de la République, l'Assemblée Nationale
adopte définitivement le texte sur l'état d'urgence, mesure
prévue dans une loi du 03.04.1955, et les pouvoirs réclamés
par le président du Conseil, Pierre Pflimlin par 462 voix contre
112.
" Mais au cours de la séance, Guy Mollet a répondu
à M. Triboulet, président des Républicains Sociaux
: ''Nous sommes nombreux ici à garder au général
De Gaulle une grande estime et une grande admiration, mais nous aimerions
qu'il complétât un texte très insuffisant''. Tout
en restant ministre du gouvernement de Pierre Pflimlin, Guy Mollet s'apprête
à jouer double jeu.
*******************************************
17 mai
1958 : à
Alger, le général Raoul Salan écrit aux préfets
et secrétaires généraux ''pour que l'ordre soit maintenu
dans le respect de la légalité républicaine'' ; il
nomme le général de brigade Jarrot préfet de Constantine
par intérim.
" A Paris, l'état d'urgence est instauré en Métropole.
" A Paris, le général Léon Dulac, sur le départ
vers Villacoublay, son échange étant conclu, est appelé
chez son ministre Pierre de Chevigné dont la politique vis-à-vis
des généraux consiste désormais à faire semblant
de croire à leur loyalisme pour les amener à y revenir.
Son ministre lui précise que Jacques Soustelle est enfermé
dans son domicile. Après une dernière escale à Matignon,
où il rencontre Michel Poniatowski, le général arrive
à Alger.
" Arrivée de Jacques Soustelle à Alger.
" Ce samedi, arrive à 13 heures 29 à Alger, via la
Suisse, le gaulliste Jacques Soustelle, très populaire à
Alger. Dans un avion Genève - Paris, affrété par
le général Pierre Guillain de Bénouville, Compagnon
de la Libération et patron de Jours de France aux frais de l'avionneur
Marcel Dassault, se trouvent Jacques Soustelle, René Dumont de
l'U.S.R.A.F., Charles Béraudier maire-adjoint de Lyon et Pierre
Piccard, un ancien collaborateur de Jacques Soustelle à Alger.
Ils sont gardés, pendant quelques heures au salon d'honneur de
Maison-Blanche où les généraux d'Alger et le général
André Petit viennent discuter avec Jacques Soustelle. De l'aérodrome,
les généraux Raoul Salan et Edmond Jouhaud téléphonent
à Pierre Pflimlin ; il est évident que le président
du Conseil n'est pas prêt à démissionner. A Alger,
la nouvelle du retour de Jacques Soustelle se répand vite ; Léon
Delbecque fait hurler son nom par la foule massée au Forum ; l'Unité
Territoriale Blindée est alertée et file vers l'aérodrome
; Alain de Sérigny pénètre dans le salon d'honneur
pour féliciter Jacques Soustelle.
" En Métropole, les généraux Roger Miquel à
Toulouse et Desjours à Lyon sont ralliés aux généraux
d'Alger ; ils sont en contact avec le général de Widerspach-Thor
à Dijon ; les généraux Lecoq et Constant à
Bordeaux se rallient avec plus de retenue ; à Toulon, l'amiral
Barjot fait savoir au général Roger Miquel qu'en cas de
clash il rallierait sa flotte aux insurgés ; les gaullistes comptent
sur le général Manceaux-Desmiaux, ancien commandant du C.A.
d'Alger, à Rennes ; mais ils sont déçus par le général
Gillot à Marseille ; les autres commandants de Région sont
réservés ; le général Jacques Faure est en
Allemagne et soutient le mouvement d'Alger tandis que son patron le général
Jacquot, dont il est l'adjoint à l'état-major des troupes
françaises d'occupation, demeure fidèle au gouvernement
; le ministre de la Défense cherche un chef pour l'Armée
qui ne peut être le général Morlière, gouverneur
de la Place de Paris, ni le général Noiret, commandant la
Ière R.M. ; le Maréchal Alphonse Juin ne se manifeste pas,
pas plus que le général Jean Lecomte, directeur de L'Ecole
de guerre, et le général René Cogny. Le général
Henri Lorillot accepte la succession du général Paul Ely
; des officiers supérieurs ne lui pardonnent pas ; il a du mal
à expliquer sa position.
" A Alger, sur le Forum, à 18 heures, Lucien Neuwirth, officier
de réserve qui s'est mis en tenue camouflée, présente
Jacques Soustelle au Forum d'Alger à une foule en délire.
Jacques Soustelle paraît au balcon du Forum à Alger devant
une foule de 60 000 personnes déchaînée, vibrante
d'enthousiasme ; il lance ''J'ai choisi la liberté et la patrie''
et il termine son discours par : ''Vive la République ! Vive l'Algérie
Française ! Vive la France ! Vive De Gaulle !'' Les dizaines de
milliers de poitrines reprennent inlassablement ces mots d'ordre.
" Puis arrivent les délégations de l'Est de la Mitidja
: Rovigo, Fort de l'Eau, l'Arba, Maison-Blanche, le Corso et Aïn-Taya.
" A 21 heures, sur le Forum, des flammes s'élèvent
soudain devant le perron du G.G. : des Musulmanes se dévoilent
et brûlent symboliquement leurs haïks. Trois jeunes femmes,
une en haïk bleu, une en haïk blanc et la troisième en
haïk rouge, font de leurs voiles un drapeau qu'elles offrent à
Jacques Soustelle.
" A Alger, un peu plus tard, après un bref entretien au Q.G.
de la rue d'Isly, un accord entre le général Raoul Salan
et Jacques Soustelle fait de ce dernier, le conseiller politique du général.
Jacques Soustelle et son équipe s'installent à la villa
des Oliviers à Alger ; il n'a aucune fonction officielle.
" A Oran, après le succès de la manifestation des Musulmans
au Forum d'Alger, le C.S.P. est constitué avec plus de facilité
; la mission des trois officiers rentre sur Alger.
Du 17 au 20 mai 1958 : combats sur le djebel Bou-Djellal.
" Au cours d'une opération dans le djebel Bou-Djellal et à
l'ouest du djebel M'Zouzia, le bilan du 8e R.P.C. est de 14 H.L.L. tués
et de 11 armes récupérées dont une mitrailleuse.
Le groupe mobile du 8e R.P.C. met hors de combat un total de 23 rebelles.
" Le 3e R.P.C., sous les ordres du commandant Robert Moulié,
adjoint du lieutenant-colonel Roger Trinquier, chef de corps, envoyé
vers le sud où une autre pénétration du F.L.N. se
produit, détruit deux compagnies de rebelles dans la région
de Négrine.
*************
18
mai 1958 : à Alger, le général Raoul Salan
fait revenir du bled le Commando d'Extrême-Orient, qu'il installe
dans une caserne d'Hussein-Dey, et deux compagnies de légionnaires
du 2e R.E.P. et du 5e R.E.I. qu'il garde sur le pied de guerre dans la
caserne du 5e R.C.A. à Maison-Carrée, dans la banlieue est
d'Alger ; il se réserve de rameuter cette garde prétorienne
sur Alger en cas de coup de force de jeunes officiers parachutistes.
" A Alger, en ce dimanche, à 11 heures, Jacques Soustelle
dépose une gerbe au monument aux morts ; il y retrouve les généraux
Raoul Salan, Edmond Jouhaud et Jacques Allard ; c'est l'occasion d'une
nouvelle et exaltante manifestation pour les Algérois.
" Pierre Guillain de Bénouville rentre en Suisse d'où,
par le truchement de Jean Richemond, un haut fonctionnaire du Quai d'Orsay
et ancien de la France Libre, il fait parvenir à l'état-major
gaulliste de Paris son rapport sur les événements d'Alger.
" A Pau, deux officiers parachutistes, le commandant Vitasse et le
capitaine Lamouliatte, partis dans la nuit du 17 au 18, mandatés
par le général Jacques Massu, rencontrent le général
Roger Miquel ; ils rencontrent également le colonel Pierre Château-Jobert
et le colonel Albert Brothier ; puis ils préparent avec les capitaines
Bonfils et Vailly la marche sur Paris.
" A Paris, Pierre Lagaillarde est venu lui aussi dans l'intention
de mettre sur pied des comités de salut public dans toute la France.
Le renfort des Algérois bouscule la routine des apprentis sorciers
parisiens.
" Le 14e R.C.P. fait mouvement d'Aïn-Beïda sur Constantine.
" A Alger, à 18 heures, les généraux Raoul Salan,
Edmond Jouhaud, Jacques Allard, Jean Gilles et Jean Gracieux, accompagnés
par les membres du C.S.P., du docteur Sid Cara et de Jacques Soustelle,
apparaissent sur le balcon du Forum devant une foule immense où
sont remarquées les délégations de la Mitidja avec
des Musulmans venus en masse de Castiglione, Chiffalo, Bou-Haroun, Ménerville,
Birkadem, Hussein-Dey et les différents quartiers d'Alger.
" A Philippeville, cinquante mille personnes dont vingt mille personnes
acclament les noms de Charles De Gaulle et Jacques Soustelle.
" A Bône, Européens et Musulmans ovationnent le général
Paul Vanuxem lorsqu'il s'écrie : ''France, je te jure que nous
ici, tous rassemblés, nous ne vivons que pour Toi''.
" A Orléansville, trente mille Français, dont deux
tiers de Musulmans, clament leur attachement à la France.
" Médéa et Miliana connaissent de semblables rassemblements.
" A Guyotville, la foule se rassemble autour de Rabah Attia, vice-président
du C.S.P. local.
" A Tizi-Ouzou, le capitaine Abrègue du C.S.P. précise
: ''C'est tous ensemble, avec l'Armée, que nous pourrons constituer
le bloc derrière Jacques Soustelle et le général
Raoul Salan qui appellent le général De Gaulle. Nous forcerons
la Métropole à nous entendre''.
" A Sétif, sont rassemblées les délégations
de Pascal, Aïn-Tagrout, Colbert, Saint-Arnaud, Ampère, Bordj-Bou-Arreridj,
Aïn-Roua, Lafayette, Ouled-Djellal : des milliers de Musulmans acclament
le général Paul Gandoët et la France.
" A Oran, les unités territoriales défilent devant
le colonel Roger Trinquie
" A Paris, le général Paul Ely entre dans la clandestinité
; avec son ancien collaborateur, le général de Beaufort,
il entreprend de reprendre l'armée en mains ; il suit les démarches
des officiers parachutistes d'Alger, le pronunciamiento secret des chefs
de Régions Militaires, les initiatives des colonels parachutistes
de Pau, du colonel Gribius, des colonels de l'Ecole Militaire, des généraux
de l'Etat-Major Général.
" En une semaine, 46 militaires français
sont tués et 447 rebelles du F.L.N. sont tués dans les différents
secteurs opérationnels.
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19 mai
1958 : à Paris, Pierre
Pflimlin tarde à démissionner et les militaires, le général
Roger Miquel en tête, décident de mettre en uvre le
plan Résurrection.
" A 8 heures, Boufarik est la première des villes d'Algérie
qui reçoit la visite de Jacques Soustelle. Sur la place du Marché
des Quinconces, se rassemblent des délégations de Birtouta,
Douadoua, Fouka, Birkadem, Bouinan, Montebello, Desaix, Beni-Mered, Chiffalo,
Tefeschoun. Sans l'assistance, de nombreuses Musulmanes dont les plus
jeunes sont dévoilées. Le général Desjours
accueille Jacques Soustelle et le docteur Sid Cara en présence
d'Azem Ouali, président de la Fédération des maires
de Grande Kabylie. Jacques Soustelle rend hommage à Amédée
Froger et Ali Chekkal, deux élus assassinés par le F.L.N.
" A Paris, à 15 heures, au Palais d'Orsay, Charles De Gaulle,
qui veut revenir au pouvoir, tient sa première conférence
de presse, loupée ; au premier rang de l'assistance, se tiennent
les fidèles de toujours : Michel Debré, Jacques Chaban-Delmas,
Edmond Michelet, le général Pierre Koenig et les écrivains
François Mauriac et Joseph Kessel ; le Tout Paris de la politique
et du monde est là.
" A Paris, Pierre Pflimlin fait voter à
l'unanimité une motion de reconnaissance à l'armée
! Un comble !
" A Paris, la manifestation de soutien organisée par les activistes
gaullistes et l'ordre de grève générale lancé
par la C.G.T. pour contrer la manifestation, sont deux échecs.
" Les activistes préparent un coup d'état à
Paris : les anciens d'Indochine avec le commandant Lassauzet ; auxquels
se joignent des formations variées d'activistes, les membres du
C.A.N.A.C. avec le colonel Paillole, président des anciens des
services spéciaux. Michel Poniatowski convainc le colonel Paillole
que le Chef de la France Libre ne veut arriver au pouvoir que dans la
légalité ; les activistes gaullistes suivent le colonel
Bourgoin du C.A.N.A.C. et ne s'associent plus au coup d'état ;
le commandant Lassauzet ne désire pas mêler de façon
trop étroite l'action de son groupe à celle de l'état-major
gaulliste ; il se met à la disposition de l'armée. Enfin
la manifestation prévue, loin des 20 000 manifestants annoncés,
se heurte à un rassemblement de forces monumental, organisé
par le ministre de l'Intérieur, Jules Moch
" La grève est un fiasco ; le métro s'arrête
faute de courant mais les bus roulent ; chez Renault, 1 200 ouvriers sur
35 000 arrêtent le travail ; il n'y a pas de grévistes à
Saint-Nazaire ; 800 mineurs sur 300 000 obéissent à la C.G.T.
" En Métropole, quelques agitateurs activés par les
généraux Lionel Chassin et Paul Cherrière, tentent
de créer le Mouvement Populaire du 13 Mai afin d'instaurer dans
chaque commune de métropole un Comité de Salut Public. Le
général Lionel Chassin lance deux cents activistes contre
la préfecture de Saint-Etienne ; l'officier général
échappe de justesse à l'arrestation qui est réservée
à une trentaine de ses hommes.
" A Lyon, le commandant Vitasse rencontre le général
Desjours, commandant la 8e R.M. ; ils conviennent que 2 compagnies parachutistes
seraient posées à Lyon-Bron. Il rend compte par télégramme
à Alger.
" A Paris, Yves Alquier et Porteu de la Morandière, dirigeants
de l'Union des Anciens Combattants d'Algérie, sont arrêtés.
" A Paris, à l'Assemblée Nationale,
le nouveau ministre de l'Intérieur, Jules Moch, propose de faire
condamner à mort par contumace les généraux d'Alger
; les députés communistes applaudissent.
" A Paris, le Maréchal Alphonse Juin, pour calmer les esprits,
demande à être reçu par le Président René
Coty ; lui expliquant que les officiers d'Alger sont loin d'être
des fascistes, il conseille la démission de Pierre Pflimlin et
l'appel à Charles De Gaulle ; le Président de la République
l'approuve sans préjuger de ce que décidera Pierre Pflimlin.
" A Alger, Azem Ouali, président des maires de Kabylie, vient
au balcon du Forum s'adresser aux innombrables délégations
descendues comme un fleuve de leurs montagnes.
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Suite des récits,
heure par heure, des 3 journées du 29 au 31 mai 1958. (Algérie,
Métropole).
Le 29, le Président de la
République René Coty fait appel à Charles De Gaulle.
Le général Raoul Salan met l'opération Résurrection
en sommeil jusqu'au 3 juin.
Dans la soirée, les Anciens combattants organisent sur le Forum
une manifestation inoubliable.
Le 30, Guelma rend un dernier hommage au lieutenant-colonel Pierre Jeanpierre.
Le 31, Charles De Gaulle informe le Président René Coty
qu'il est prêt à former un gouvernement.
29 mai 1958 : à Paris, à 15 heures,
un message du Président de la République est lu dans les
deux Chambres : '' J'ai décidé de faire appel au plus illustre
des Français''. Charles De Gaulle est appelé par le Président
René Coty.
" (S24-80) (S25-83) (S36-12) (S45-268) (S49-421) (S56-55) (S85-N°2672)
(S105-114) (S106-415 à 417) (S108-111 à 117) (S135-24) (S136-28).
" Les dernières tractations et manuvres
en tous genres se multiplient à l'Assemblée nationale.
" A 15 heures, des avions décollent de la Région Parisienne
vers le Sud-Ouest pour y chercher les paras de la région, après
que le général Gelée ait donné le top au général
Edmond Jouhaud.
" Immédiatement l'annonce de la rencontre entre le Président
de la République, René Coty, et l'ancien Chef de la France
Libre, Charles De Gaulle, connue, le général Raoul Salan
adresse un ordre au commandant Vitasse d'annuler l'opération Résurrection
et de laisser le plan en sommeil jusqu'au 3 juin.
" Les avions en vol sont rappelés et font demi-tour.
" A Toulouse, le général Roger Miquel reçoit
le radio suivant : ''Action prévue pour le 30 annulée. Mais
on envisage de la reprendre en fin se semaine en cas de difficulté''.
" A Alger, au Forum, la foule accueille les délégations
venues du Titteri ; le général Jacques Allard salue le colonel
Si Chérif et ses hommes.
" Charles De Gaulle se rend de Colombey-les-Deux-Eglises à
l'Elysée où il est reçu par le Président de
la République, René Coty, de 19 heures 15 à 20 heures
45. Puis il rentre à Colombey-les-Deux-Eglises.
" Charles De Gaulle, président du Conseil pressenti, demande
au général Raoul Salan de reporter le lancement de l'opération
Résurrection. L'action du vendredi 30 est reportée au samedi
31 ou au dimanche soir, le 1er juin.
" Charles De Gaulle, président du Conseil
pressenti, arrive au pouvoir avec l'armée et les partisans de l'Algérie
Française pour préparer en fait l'indépendance de
l'Algérie, car ses propos privés sont à l'opposé
de ses propos publics. Il a très vite perçu la planche d'appel
que représente pour lui la Guerre d'Algérie. Le comportement
de Charles De Gaulle de 1958 à 1962 est d'une éblouissante
clarté, a posteriori, car il sait que l'opinion demeure encore
largement favorable à l'Algérie Française et il connaît
le poids d'une armée, seul corps homogène, engagée
dans une guerre devant assurer la permanence de la présence française.
" Il reste logique avec le Fil de l'épée écrit
entre les deux guerres : ''La perfection évangélique ne
conduit pas à l'empire. L'homme d'action ne se conçoit guère
sans une forte dose d'égoïsme, d'orgueil, de dureté,
de ruse''.
" Lors de l'opération du 2e R.E.P. dans
le secteur de Guelma, 6 H.L.L. sont tués et 4 armes sont récupérées.
" Le colonel Si Chérif, rallié depuis quelques mois,
lance sur le Forum à ses anciens amis du maquis : ''Venez à
la France qui vous pardonne. Retournez à vos foyers, remettez vos
armes à l'Armée''.
30 mai 1958 : Charles De Gaulle, président
du Conseil pressenti, reçoit à Colombey-les-Deux-Eglises
Vincent Auriol, puis Guy Mollet accompagné du président
du groupe parlementaire socialiste, Maurice Deixonne, qui lui annonce
le soutien du parti socialiste ; le Maréchal Alphonse Juin vient
lui annoncer que l'armée est, dans son ensemble, décidée
à le suivre.
" Dans son éditorial du Courrier de la Colère,
Michel Debré écrit : ''Qui peut douter désormais
dans le monde de la volonté de l'Algérie de demeurer française
? ''.
" Le tribunal militaire de Dijon juge onze tueurs du F.L.N. ; l'un
est condamné à mort, cinq sont acquittés, les cinq
autres doivent subir de cinq à vingt ans de prison. Le tribunal
militaire de Paris condamne deux Algériens à mort et un
troisième à la prison à perpétuité.
" A Alger, au Forum, c'est le tour du personnel des Entreprises de
Recherche.
" La nuit tombée, c'est l'apothéose ; les Associations
d'Anciens Combattants animent une prodigieuse manifestation, un grandiose
spectacle ''Son et lumière'' devant plus de trois cent mille personnes,
Européens et Musulmans une fois de plus unis ; tous les grands
chefs militaires sont présents ; une immense Croix de Lorraine
est dessinée par des torches que les sapeurs-pompiers tiennent
à bout de bras.
" Le cadavre d'un Algérien, ligoté
et étranglé, est repêché dans la Seine à
Villeneuve-Saint-Georges.
31 mai 1958 : Charles De Gaulle, président
du Conseil pressenti, installé à l'hôtel La Pérouse,
dans le quartier de l'Etoile, reçoit Pierre Pflimlin et lui propose
un portefeuille de ministre d'état ; 26 responsables de groupes
politiques, sauf les communistes, l'écoutent ensuite exposer ses
intentions libérales ; le seul souci des parlementaires est leur
réélection. Les participants de la table ronde repartent
ravis. De Gaulle est un magicien. Il a escamoté la difficulté.
Il a promis que l'Assemblée nationale aurait le choix de son mode
d'élection.
" A 18 heures, encadrés par le comité directeur et
les sénateurs, les députés socialistes votent par
77 voix contre 74 le principe de l'investiture.
" A 18 heures 30, Charles de Gaulle annonce au Président René
Coty qu'il est prêt à présenter son cabinet à
l'Assemblée Nationale avec Guy Mollet à la vice-présidence
du Conseil.
" La B.A. 145 de Tindouf perd un appareil ;
sept aviateurs, dont le lieutenant-colonel Pierre Blasés, sont
tués.
" A Montreux, Ferhat Abbas dit à l'envoyé
spécial de France-Observateur : ''le nom du général
De Gaulle devient de jour en jour davantage un symbole de ralliement pour
les ultras et les colonialistes. Il y a là une rencontre qui nous
remplit d'inquiétude''.
" En Métropole, les syndicats libres démobilisent ;
la base fait échouer la manuvre P.C.F.-S.N.I. et refuse la
grève. Le nombre de grévistes régresse. La C.G.T.
est en perte de vitesse.
" A Toulouse, le général Roger Miquel ne lance pas
l'opération Résurrection ; cette décision soulève
une véritable colère parmi certains conjurés.
" A Guelma, toute la population assiste aux obsèques du lieutenant-colonel
Pierre Jeanpierre, ''héros au cur pur, honneur de l'armée,
exemple garant de son avenir, entré de plain-pied dans la légende
glorieuse de la Légion Etrangère et des troupes aéroportées''
: les femmes portent des fleurs ; des hommes pleurent ; personne ne prête
attention aux généraux et aux autorités civiles.
Un suprême hommage est rendu au lieutenant-colonel Pierre-Paul Jeanpierre,
en présence du général Raoul Salan, devant tous les
chefs de corps de la Légion et des chefs des unités parachutistes
; devant le cercueil du chef de corps du 1er R.E.P., qui reçoit
à titre posthume la plaque de Grand Officier de la Légion
d'Honneur et la Croix de la Valeur Militaire avec palme, le général
Jacques Massu, patron de la 10e D.P., promet : ''mon colonel, nous vous
le jurons, nous mourrons plutôt que d'abandonner l'Algérie
française''. Les légionnaires du 1er R.E.P. écoutent
ce serment : parmi eux le lieutenant Roger Degueldre et le sergent Albert
Dovecar. La foule admire le 1er R.E.P. qui avance, au son de la Marche
consulaire, drapeau en tête ; dans leurs tenues camouflées,
déteintes par le soleil, la sueur et la pluie, les légionnaires
défilent, raidis et graves ; ils portent tête haute ; leurs
visages sont tendus ; des rangées de médailles brillent
sur leurs poitrines ; chacun se surpasse en l'honneur de son colonel.
Jamais le Régiment n'a été aussi beau, aussi puissant,
aussi majestueux.
" En fin d'après-midi, à El Allia, en présence
des Chefs militaires et des membres du Comité du 13 Mai, un dernier
hommage est rendu au lieutenant-colonel Pierre-Paul Jeanpierre.
" A 19 heures, Charles De Gaulle, président du Conseil pressenti,
adresse un télégramme au général Raoul Salan
: ''Ce que l'armée a fait, elle l'a bien fait. Dites mon salut
aux Algériens. Dites-leur que, tous unis, nous aurons le succès''.
" A Alger, la journée a été occupée par
la parade navale organisée par le C.S.P. des services portuaires,
une manifestation à Kouba, et le défilé de nombreuses
délégations au Forum, parmi lesquelles celle du personnel
des Etablissements Hospitaliers de la région algéroise.
Fin mai 1958 : à la suite des événements du 13 mai,
le colonel Yves Godard prend la direction de la Sûreté générale
à Alger, entraînant à sa suite le capitaine Jacques
de la Bourdonnaye ; le commandement du secteur Alger-Sahel est confié
au colonel de gendarmerie Crozafon ; son chef du 2e Bureau est le colonel
Roland Vaudrey ; les méthodes utilisées par le capitaine
Paul-Alain Léger ne sont plus acceptées : le capitaine doit
rédiger de multiples rapports.
" Le général Raoul Salan, recevant Monseigneur Léon
Duval, évoque les fraternisations du Forum ; le prélat,
favorable à une indépendance négociée avec
le F.L.N., lui répond : ''Je ne crois pas aux miracles''.
" Le général Mohamed Bellounis voit d'un mauvais il
la fraternisation entre Chrétiens et Musulmans sous l'égide
des C.S.P. Après avoir réclamé l'extension de sa
zone à tout le pays, le commandement de tous les mouvements semblables
au sien, il voit 250 combattants de l'A.L.N. se rallier aux troupes françaises
dans la région de Bou-Saâda ; de plus, dans la mintaka 8
de la wilaya V, dans le djebel Amour et les monts des Ksours, sous le
commandement d'un nouveau chef nommé Abdelghani, le F.L.N. entreprend
de détruire l'organisation mise sur pied par l'A.N.P.A. C'est une
lutte sans fin et le général ne sait plus sur quel pied
danser. Mais il résiste à la concentration de l'A.L.N. qui
aligne 4 à 500 hommes et qui essaye de s'infiltrer. Il investit
Aflou et la région de Géryville.
Mai 1958 : l'assaut d'un piton bien défendu
est désormais une exclusivité parachutiste ; chacun sa partie
: la leur est de mourir sur la piste.
***********************
Récit,
heure par heure, des journées de juin 1958. (Algérie, Métropole).
Le président du Conseil,
Charles De Gaulle, effectue une tournée triomphale en Algérie,
Avec des discours inoubliables
sur le Forum d'Alger, le 4 juin,
Devant les Musulmans à
Bône le 5 juin,
Et l'apothéose à
Mostaganem le 6 juin.
Pour la première fois,
Charles De Gaulle lance vers la foule ''Vive l'Algérie Française''
C'est aussi la dernière
fois.
De retour à Paris,
Charles De Gaulle réorganise les relations entre Paris et Alger.
1er juin 1958 : Charles De Gaulle, chef du gouvernement français.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, forme son gouvernement
; en ce dimanche ensoleillé, François Mitterrand risque
un inutile baroud d'honneur ; à 15 heures, après une déclaration
d'investiture lue d'un ton morne et plat, en terminant par ''Ce que je
fais, c'est pour que la République continue !'' le président
Charles De Gaulle quitte l'hémicycle pour ne pas participer aux
débats ; Charles De Gaulle obtient l'investiture par 329 voix contre
224 : les communistes et la moitié des socialistes et des radicaux
ont voté contre. Dans le gouvernement, il y a quatre ministres
d'Etat Guy Mollet, Pierre Pflimlin, Félix Houphouët-Boigny
et Louis Jacquinot ; Michel Debré est nommé Garde des Sceaux
; l'ambassadeur Maurice Couve de Murville est le ministre des Affaires
étrangères ; le préfet de la Seine, Emile Pelletier,
devient ministre de l'Intérieur ; Pierre Guillaumat qui préside
le B.R.P., devient ministre des Armées ; André Malraux,
Compagnon de la Libération, est ministre des Affaires Culturelles
; Antoine Pinay reçoit les Finances, Jean Berthoin l'Education
Nationale et Paul Bacon le Travail ; Bernard Cornut-Gentille et Max Lejeune
font aussi partie du gouvernement. L'état d'urgence déclaré
le 17.05.1958 pour la Métropole n'est plus applicable.
" Les paras de la 10e D.P. savourent les résultats de leur
sage engagement du 13 mai. Jamais leur aura ne fut si lumineuse.
" Pour réussir son coup d'état démocratique,
Charles De Gaulle a appliqué trois principes :
" crédibilité de la menace accompagnée d'une
pression sur le pouvoir en place ;
" respect de la constitution à la lettre ;
" viol de la constitution dans l'esprit.
" Bien entendu, la thèse gaulliste est simple : Charles De
Gaulle a manuvré de façon magistrale ; il a exhorté
l'armée à ne pas sortir de la légalité car
il entendait respecter strictement les règles démocratiques
; l'intervention de l'armée ne pouvait que compromettre les chances
de son retour. Alain Peyrefitte raconte que, dans une émission
télévisée à laquelle il assiste le 8 juin
1962, Charles De Gaulle résume ainsi sa version : ''Je n'étais
pour rien dans cette affaire
J'ai déjoué une entreprise
d'usurpation venue d'Alger et j'ai maté le putsch''.
" L'opposition de gauche maintient l'appellation de coup d'Etat du
13 mai 1958.
" En Métropole, le secrétaire général
du P.C.F., Maurice Thorez, décide d'arrêter les consignes
relatives au refus de servir en Algérie ; il prescrit le retour
à la lutte politique traditionnelle au sein de l'armée,
selon les principes du léninisme.
" El-Biar accueille les grands chefs militaires et Jacques Soustelle.
" A Rouïba, des délégations venues de Maison-Carrée,
Fort de l'Eau, Cap Matifou, Aïn-Taya, Saint-Pierre-Saint-Paul, Maison-Blanche
et le Fondouk accueillent les généraux Jacques Allard et
Jacques Massu, accompagnés de Jacques Soustelle.
" Après avoir crié sa joie, Alger commence à
grincer des dents à la lecture de la liste des membres du gouvernement
de Charles De Gaulle, avec les pourris que l'on voulait balayer.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, aura désormais,
à l'égard de la question algérienne, une politique
éminemment fluctuante.
" Dans les djebels, peut-être plus encore que leurs chefs,
les appelés attendent beaucoup du président Charles De Gaulle
; la perspective d'une solution de paix qui les renverrait dans leurs
foyers, que ne pourrait qu'encourager Charles De Gaulle, hante les soldats
du bled.
" Combats au col de Tizi-Nouhris.
" Au col de Tizi-Nouhris par Aïn-Guidel, deux pelotons du 4e
escadron de 1er R.S., commandés par le sous-lieutenant Blouin et
l'adjudant Tabournel, et un peloton du 9e R.C.A. accrochent une bande
; 18 H.L.L. sont tués et 12 faits prisonniers.
" Le 14e R.C.P. fait mouvement sur Khenchela.
" Le 2e R.E.P. opère dans le djebel
Faroum, non loin de Khenchela ; majestueux, il domine la steppe orientale
du haut de ses 2093 mètres ; la haute futaie protège un
peu du soleil ; le 2e R.E.P. ratisse les sous-bois. Le feu se déclenche
sans préavis devant la compagnie portée du capitaine Bourgin.
6 H.L.L. sont tués et 7 armes saisies. Trois morts à la
C.P. dont le sergent-chef Nikolaus Montag de la section de commandement.
" Les Troupes aéroportées représentent 34 830
hommes ; en haut de la hiérarchie se trouve le général
Jean Gilles, commandant les T.A.P. à Paris, remplaçant le
général Chavatte, commandant p.i. ; une antenne des T.A.P.
est à Alger, disposant de la 114e Compagnie de Q.G. et d'un département
de transmissions ; les deux commandos de R.G., le Commando d'Extrême-Orient
et le Commando Guillaume, sont rattachés à la 114e C.Q.G.
2 juin 1958 : après des discussions ardues
à l'Assemblée Nationale, le président du Conseil,
Charles De Gaulle, obtient les pleins pouvoirs pour six mois, défendus
par le ministre d'Etat, Pierre Pflimlin, au Palais Bourbon, par 322 voix
contre 232.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, est ensuite
contraint de revenir devant l'Assemblée Nationale pour la loi constitutionnelle
qui est acquise par 351 voix contre 161 et 3 abstentions, 75 députés
ne prenant pas part au vote.
" A Alger, le C.S.P. se réunit ; le veto mis par le président
Charles De Gaulle à l'entrée de Jacques Soustelle dans le
gouvernement, exaspère : Jacques Soustelle insiste pour que le
C.S.P. crie : ''Vive De Gaulle !''. Il ne sera pas suivi et Charles De
Gaulle en sera mécontent.
" Radio-Algérie doit diffuser un appel du général
Raoul Salan annonçant l'arrivée du général
Charles De Gaulle. De son côté, Jacques Soustelle s'efforce
de calmer les esprits.
" A Saint-Eugène, devant trois mille personnes, le général
Jacques Allard demande de ne pas écouter les fausses nouvelles
et que le Ministre de l'Algérie n'est pas encore désigné''.
" Le 4e escadron du 1er R.S., un escadron du
8e Hussards, un peloton du 9e R.C.A. et un escadron de la II/8e Légion
de G.M. établissent un bouclage de la face est du Chentgouma, face
à Djamfa ; le 2e R.E.P. nettoie le coin.
3 juin 1958 : A Paris, le président du Conseil, Charles De Gaulle,
reçoit, pour se renseigner sur l'état de l'Algérie,
Léon Delbecque, puis les généraux Raoul Salan, Edmond
Jouhaud et Léon Dulac. En fait le président du Conseil,
Charles De Gaulle, connaît fort mal la situation ; il considère
les Pieds-Noirs comme de perpétuels agités ; homme du Nord,
il comprend mal ces gens aussi prompts à l'enthousiasme qu'au découragement
; il vient de la brume et du froid ; eux ont besoin de leur soleil pour
vivre.
" L'audience terminée, Charles De Gaulle rend la main à
Léon Delbecque : ''Bravo, Delbecque, vous avez bien joué
''
et, après un court silence : ''
mais avouez que j'ai bien
joué aussi !''.
" A Alger, le C.S.P. se réunit à huis clos, sous la
présidence du docteur Ahmed Sid Cara, pour entendre un exposé
de Roger Frey qui vient de rentrer de Paris ; Roger Frey est préoccupé
car il a pu mesurer à quel point l'atmosphère à Paris
est différente de celle d'Alger.
" A Paris, le président Charles De Gaulle indique son intention
de régler le problème algérien dans un cadre franco-maghrébin
en adressant des télégrammes au Roi du Maroc et au Président
tunisien, Habib Bourguiba ; ceci provoque une nouvelle grimace de ses
supporters en Algérie.
" Au cours d'une opération contre une
bande de fellagha, le commando Guillaume obtient un vif succès
: 26 tués sont dénombrés.
4 juin 1958 : ''Je vous ai compris'' lancé
par le président Charles De Gaulle à Alger.
" A Alger, une Caravelle dépose le président du Conseil,
Charles De Gaulle, à l'aéroport de Maison-Blanche où
les appelés de l'E.R. du 1er R.C.P., impressionnés, lui
rendent les honneurs avec d'autres unités.
" En cette journée, la capitale de la France a nom Alger.
" Le cortège officiel atteint difficilement le monument aux
morts, accueilli par une foule immense d'Européens et de Musulmans,
qui attendent depuis des heures, contenue par des centaines d'appelés
de toutes armes, arc-boutés.
" Après le dépôt des gerbes, la minute de silence
et une Marseillaise dont les échos montent à l'assaut des
hauteurs de la ville ensoleillée, le président du Conseil,
Charles De Gaulle, en tenue de général, se retourne lentement
vers la foule et, bras levés et poings fermés, il demeure
un instant figé, comme pour s'offrir en dévotion.
" Après le repas pris avec quelques-unes des personnalités
les plus en vue du 13 Mai, le président du Conseil, Charles De
Gaulle, se fait présenter par le général Jacques
Massu les membres du C.S.P.A.S., constitué avec les 46 membres
du Comité du 13 Mai et 32 autres représentants des différents
territoires, à commencer par son vice-président, le docteur
Ahmed Sid-Cara. Il se crispe légèrement lors du speech du
général qui l'informe du vu des membres du C.S.P.
de le voir se ''prononcer sur l'intégration de tous les habitants
de l'Algérie et du Sahara à la nation française,
dans l'égalité pour chacun des droits et des devoirs''.
Dans sa réponse, Charles De Gaulle leur dit qu'ils ont été
''le torrent et la digue. Torrent et digue sont une source d'énergie.
Et d'énergie disciplinée''. Il laisse sur leur faim tous
ceux qui auraient aimé en entendre plus.
" Dans l'après-midi, le président du Conseil, Charles
De Gaulle, visite le croiseur De Grasse, briqué à neuf sous
son grand pavois ; à l'attention des amiraux qui lui font une escorte
étoilée, il leur confie ''je serai le symbole et peut-être
l'artisan de la rénovation nationale''.
" Au Forum d'Alger, noir de monde, devant une
foule d'Algérois maintenus au large par la masse compacte de quatre
unités de paras, de gendarmes mobiles, de zouaves et de territoriaux,
alignés sur sept rangs, le président du Conseil, Charles
De Gaulle, en tenue de général, les bras en V au dessus
d'un buisson de micros, lance ''Je vous ai compris !'', ''il n'y a plus
ici que dix millions de Français à part entière,
avec les mêmes droits et les mêmes devoirs'' et ''Jamais plus
qu'ici, et jamais plus que ce soir, je n'ai compris combien c'est beau,
combien c'est grand, combien c'est généreux la France !''
; il est acclamé à Alger, dans toute l'Algérie.
" Dès lors, l'ère du Forum est close.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, sur le balcon,
n'est flanqué que de Jacques Soustelle et de quelques membres du
C.S.P.A.S., car les officiers paras ont pris la précaution d'enfermer
dans un bureau voisin, les ministres Louis Jacquinot et Max Lejeune, fous
de rage, afin de les empêcher de représenter le système
à la grand-messe du renouveau.
" Le bachaga Saïd Boualam souligne la joie des Musulmans à
l'écoute de ce discours ; c'est la fin des cauchemars ; cela sent
bon la paix.
" Jacques Soustelle remarque que l'obstination, avec laquelle la
foule répète son nom, déplaît fortement au
président du Conseil, Charles De Gaulle, et il se demande si celui-ci
n'est pas en train de confondre dans une même hostilité Jacques
Soustelle et la foule.
5 juin 1958 : ''Venez à la France ; elle
ne vous trahira pas''.
" Après Constantine, le président du Conseil, Charles
de Gaulle, évoque ''les dix millions de Français qui vivent
en Algérie''.
" A Bône, le président Charles De Gaulle, accueilli
par le général Paul Vanuxem, commandant la 2e D.I.M., s'adresse
aux Musulmans ''Venez à la France ; elle ne vous trahira pas'',
''il ne peut y avoir pour tous qu'un seul droit et un seul devoir''.
" Le sous-préfet Mahdi Belhaddad est présenté
au président Charles De Gaulle.
" Le maire d'Ameur-el-Aïn, Louis Marquaire, écrit au
général Jacques Massu pour lui faire part de son inquiétude.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, se rend ensuite
à Touggourt.
" Léon Delbecque, qui s'est dépensé sans compter
pour le retour de Charles De Gaulle au pouvoir, éprouve une immense
déception et fait état de ses inquiétudes sur les
princes du système ; il se rend compte que le président
Charles De Gaulle va mettre à profit le dévouement de ses
partisans, mais qu'il ne prend aucun engagement à l'égard
de l'Algérie ; il lance un message sur Radio-Alger et il reçoit
une avalanche de coups de téléphone.
" A Tassala, dans le Nord-Constantinois, le
capitaine Raymond Bouchemal, chef de la S.A.S., et vingt-cinq hommes tombent
dans une embuscade au cours d'une opération de contrôle à
10 kilomètres au nord de Rouached, dans le secteur de Mila. Quatre
harkis sont tués. Le capitaine et quatre harkis ainsi qu'un gendarme
sont portés disparus.
Du 5 au 7 juin 1958 : combats dans le Chélia.
" Dans l'Aurès, une opération se déroule dans
le secteur de Khenchela , dans le Chélia, dans le Kef Bou-Anouane
aux ordres de la 21e D.I., commandée par le général
Daillier ; les 14e du lieutenant-colonel Paul Ollion & 18e R.C.P.
du lieutenant-colonel Jean-Marie de Sarrazin accrochent une katiba ; la
3e compagnie du 14e R.C.P., commandée par le capitaine Scot, garde
le contact toute la nuit ; sur sa demande, le lieutenant Guicherd, de
la C.A., règle un excellent tir de mortiers de 120 mm ; les combats
durent deux jours ; lors du ratissage, le chasseur Roger Xavier est tué
à bout portant ; le bilan du 14e R.C.P. est de 12 H.L.L. tués
et de 7 armes récupérées ; le bilan du 18e R.C.P.
est de 13 H.L.L. tués, de 16 prisonniers, de 15 armes récupérées
; le bilan total est de 89 H.L.L. tués, 34 prisonniers et de 56
armes récupérées.
6 juin 1958 : ''Vive l'Algérie Française''.
" En se rendant à Maison-Blanche pour s'envoler vers Oran,
le président du conseil, Charles De Gaulle, fait arrêter
sa voiture devant le cimetière municipal d'El-Alia, et, accompagné
du général Raoul Salan, va se recueillir longuement devant
la tombe provisoire du colonel Pierre Jeanpierre, à laquelle un
détachement des légionnaires du 1er R.E.P. rend les honneurs.
" A Oran, le président du Conseil, Charles
De Gaulle, accueilli par le général Réthoré,
l'amiral Geli et M. Fouques Duparc, maire de la ville, refuse de voir
les membres du C.S.P. ; mais le docteur Chérif Sid Cara reçoit
un accueil particulièrement chaleureux de la foule ; Charles De
Gaulle mate une bronca de la foule qui réclame Jacques Soustelle,
puis il précise ''l'Algérie est organiquement une terre
française, aujourd'hui et pour toujours''. ''Oui ! Oui ! Oui !
la France est ici avec sa vocation. Elle est ici pour toujours. Vive Oran,
ville que j'aime et que je salue ! Bonne terre française !''.
" (S36-89) (S74-N°68) (S88-N°46) (S105-155).
" A Mostaganem, le président du Conseil est accueilli par
le maire Pierre Puech-Sanson, un vieux para, Compagnon de la Libération,
devenu industriel et par le général Dudognon, commandant
la 5e D.B. ; le voyage s'achève en apothéose quand le président
Charles De Gaulle déclare, devant une foule en majorité
musulmane, ''il n'y a plus ici, je le proclame au nom de la France et
je vous en donne ma parole que des Français à part entière,
des compatriotes, des frères qui marcheront désormais dans
la vie en se tenant par la main,'' puis, dans un grand élan final,
lance un ''Vive Mostaganem ! Vive l'Algérie Française !
Vive la République ! Vive la France !'' pour la première
et dernière fois.
" Dans un ordre du jour, dès son arrivée à Paris,
Charles De Gaulle, président du Conseil, félicite les forces
terrestres, navales et aériennes en Algérie, pour l'uvre
accomplie ''avec un courage et une discipline exemplaires pour garder
l'Algérie à la France et pour la garder française''
et leur renouvelle ''l'expression de sa confiance entière et résolue''.
" Quel Musulman, pour qui De Gaulle symbolise l'honneur retrouvé
de la France, et sa parole, celle de l'honneur et de la loyauté,
peut imaginer que le premier des Français va renier ses engagements,
les trahir et les abandonner ?
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, ordonne à
Léon Delbecque de rentrer en Métropole.
" Les appelés ont vécu le périple algérien
du président du Conseil, Charles De Gaulle, dans la même
fièvre que les Pieds-Noirs ; les parachutistes, enfants chéris
de la foule algéroise, ont vibré pendant les heures folles
des discours au Forum d'Alger ; les tringlots, qui les ont transporté,
ont pris leur part de la liesse ; les hommes des postes, les sakos de
la frontière marocaine, les Alpins de Kabylie, les chasseurs de
l'Ouarsenis, les sapeurs du Génie veillant aux barrages, les hommes
des S.A.S., groupés autour des postes de radio, l'ont vécu
par procuration.
9 juin 1958 : le président
du Conseil, Charles De Gaulle, nomme le général Raoul Salan,
Le général Raoul Salan choisit pour secrétaire général
de la Délégation Générale le préfet
d'Alger, Serge Barret.
" Le président du Conseil, Charles De Gaulle, accepte la démission
du général Henri Lorillot, chef d'état-major des
Armées nommé par le président du Conseil, Pierre
Pflimlin, pendant le coup d'état du 13 mai 1968 et rend ce poste
au général Paul Ely.
" Le président Charles De Gaulle crée le poste de secrétaire
général pour les affaires algériennes, rattaché
à la présidence du Conseil ; le diplomate René Brouillet,
un des responsables de l'installation d'Habib Bourguiba à la tête
de la Tunisie, en est le premier titulaire.
" Le général Jacques Massu met les C.S.P. en régime
de croisière : plus de drapeaux sur le Forum d'Alger, plus de foule,
plus de discours.
11 juin 1958 : à Alger, le C.S.P.
d'Alger adopte une motion péremptoire que le général
Raoul Salan transmet à Paris ; l'incident est qualifié officiellement
de ''fâcheux et intempestif'' ; c'est le premier coup de semonce.
12 juin 1958 : le président
Charles De Gaulle transfère à la présidence du Conseil
les attributions du ministre de l'Algérie. Il propose à
Abderrahmane Farès d'être ministre d'Etat afin de ''participer
aux mesures relatives au destin de l'Algérie'' ; Abderrahmane Farès
réserve sa réponse ; il se rend en Suisse pour consulter
ses amis de la rébellion et, la mort dans l'âme, il doit
se résoudre à refuser la perche tendue et à annoncer
au président Charles De Gaulle qu'il décline sa proposition.
18 juin 1958 : le président
du Conseil, Charles De Gaulle, ordonne au ministre des Armées de
faire cesser les contacts entre les états-majors de Métropole
et les comités d'Algérie.
19 juin 1958 : le président du Conseil, Charles De Gaulle, prévient
par lettre le général Raoul Salan, au sujet de l'exercice
par l'autorité militaire des pouvoirs civils, que ''cette situation
ne saurait évidemment durer, car elle n'est pas conforme à
la répartition normale des pouvoirs et, en outre, risque de détourner
les officiers de leur fonction naturelle, qui est l'exercice du commandement
dans l'armée''.
24 juin 1958 : le président
du Conseil, Charles De Gaulle, fait remarquer à Alain de Sérigny
qu'il ne prononce jamais le mot intégration parce qu'il doute qu'il
exprime le vu profond des masses musulmanes. Ce scepticisme interdit
de croire que Charles De Gaulle ait voulu ''jouer loyalement la petite
chance'' qui restait à une politique d'intégration.
28 juin 1958 : le président
du Conseil, Charles De Gaulle, fixe les attributions et l'organisation
du secrétariat général pour les affaires algériennes
; le président Charles De Gaulle prend d'une main ce qu'il a donné
de l'autre au général Raoul Salan ; le même jour,
l'organisation de la Délégation Générale du
Gouvernement français en Algérie est arrêtée
; enfin sont définies les conditions dans lesquelles l'autorité
militaire exerce provisoirement les pouvoirs départis normalement
à l'autorité civile : à tous les niveaux, des adjoints
civiles reçoivent délégation de leurs attributions
administratives et/ou civiles.
" Le président Charles De Gaulle, nomme finalement ministre
de l'information Jacques Soustelle qui, sur le point de partir au Costa-Rica,
après des hésitations, accepte le poste.
1er juillet 1958 : pour
le président Charles De Gaulle, l'objectif est l'intégration.
" Le président du Conseil effectue un voyage en Algérie
du 1er au 5 juillet.
" Devant 250 officiers du C.A. de Constantine, à Télergma,
le président Charles De Gaulle demande à l'armée
française son aide, en parlant désormais d'intégration.
" Des mesures, parfois plus symboliques qu'importantes sont annoncées
pour resserrer les liens entre Algérie et Métropole : unification
des P.T.T. avec timbres identiques Métropole - Algérie,
intégration des C.F.A. à la S.N.C.F., rattachement d'E.G.A.
à E.D.F.-G.D.F. ; parité des billets de banque.
" Les deux collèges sont abolis et toutes les consultations
électorales sont se dérouler au collège unique. Mais
la législation coranique n'est pas abolie : les tribunaux coraniques
continuent à fonctionner et les magistrats islamiques à
rendre la justice. Les Musulmans, dans leur immense majorité, ne
sont pas intégralement soumis au droit français ; ils ont
le statut local.
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