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Notre ami et adhérent, Roger
Soncarrieu, nous a transmis ce texte, envoyé à plusieurs
organes de Presse. Il y a quarante ans, cétait la révolte estudiantine de mai 1968 : point nest besoin toutefois de rappeler cette période dont on nous rebat les oreilles de façon régulière. Mais qui se souvient, en revanche, de mai 1958 ? Il y a cinquante ans en effet, cétait une autre révolte, pacifique celle-là, avec un 13 mai 1958 qui reste lun des moments forts de lhistoire tourmentée et de la France, et de lAlgérie. Dans lAlgérie française dalors, cétait le 13 mai de la fraternisation ! Le 13 mai et les jours qui suivirent virent en effet quelque deux cent mille personnes, Français de souche européenne et Français de souche nord-africaine se rassembler sur le Forum dAlger, main dans la main, pour manifester leur souhait que la terre dAlgérie reste à jamais française. Partout en Algérie, les deux communautés, pied-noire et musulmane ont ainsi, pendant plusieurs jours, vibré à lunisson. Le 13 mai, ce sont des milliers de drapeaux tricolores, la « Marseillaise » et le « Chant des Africains » repris par une foule en délire, des « Vive lAlgérie française » scandés par tout un peuple à ladresse du pouvoir militaire comme du pouvoir politique. Que de grandes choses auraient pu alors être faites pour la construction dun avenir meilleur, et pour la France, et pour lAlgérie ! Le 13 mai, cétait la chance de tout un peuple rassemblé dans un même élan de fraternité. « Le Comité de salut public du 13 mai 1958, conscient de lunion qui existe entre toutes les communautés vivant sur le sol de lAlgérie, affirme à la face du monde que désormais rien ne pourra entamer cette unité et déclare à lunanimité que tous les citoyens de cette province sont Français à part entière ». Voilà ce que disait le serment du 13 mai ! On sait maintenant comment finira lAlgérie française : elle ne servit finalement quà ramener De Gaulle au pouvoir. Quatre ans plus tard, en effet, le même De Gaulle séparera lAlgérie de la France dans les pires conditions qui soient malgré les promesses faites lors dun périple triomphant à Alger, à Oran, à Bône ou encore à Mostaganem. Car en Algérie, cest bel et bien une Algérie française que promet De Gaulle : il en donne sa parole et engage aussi celle de larmée française et des officiers, des officiers qui, par la suite, préféreront souvent la désobéissance dans lhonneur plutôt que reniement et déshonneur. « A quelles hécatombes condamnerions-nous ce pays si nous étions assez stupides et assez lâches pour labandonner » disait De Gaulle lors dune conférence de presse, le 23 octobre 1958. Malgré les objurgations des plus hauts dignitaires de larmée et notamment du maréchal Juin , malgré les objurgations dun grand nombre dhommes politiques dont notamment Jacques Soustelle, Georges Bidault ou encore le bachaga Boualam, vice-président de lAssemblée nationale rien ne fera infléchir la politique dabandon suivie par De Gaulle. De Gaulle mystifiera ainsi aussi bien les militaires que le peuple dAlgérie, pieds-noirs et musulmans, qui croyaient en la France. Il nest donc pas de plus grande trahison que celle de celui que certains sévertuent encore à qualifier dhomme providentiel alors que dautres voient en lui le plus cruel félon de toute lHistoire de France. La signature des accords dEvian parachèvera labandon gaullien : des accords dEvian que De Gaulle ne sera même pas capable de faire respecter ! Car si, lEtat français et De Gaulle ont libéré les détenus algériens du FLN qui se trouvaient dans les prisons françaises, ce même Etat français et ce même De Gaulle nont pas su faire face à la vague de violences et denlèvements qui sest opérée en Algérie après le 19 mars 1962 : cent cinquante à deux cent mille harkis et leurs familles tués et torturés dans des conditions abominables, plusieurs milliers de pieds-noirs également tués et torturés tandis que dautres étaient enlevés et jamais rendus à leurs familles, enfin des centaines de militaires français prisonniers, eux non plus, jamais rendus à leurs familles. « Quils se débrouillent avec lEtat algérien » dira même, cynique, le général De Gaulle. Ainsi à lespoir suscité par la fraternisation du 13 mai 1958, à lespoir suscité par le vote massif exprimé en septembre 1958 pour une France de Dunkerque à Tamanrasset (vote massif exprimé aussi bien par les Français de souche nord-africaine que par les Français de souche européenne), à lespoir suscité par la mise en oeuvre du plan de Constantine effort financier sans précédent de la France pour ses départements algériens , à lespoir suscité par une guerre gagnée militairement sur le terrain, ainsi à lespoir de toute la population dAlgérie na succédé quun immense gâchis avec des milliers de morts inutiles. Les jeunes générations se doivent de connaître la vérité et ce cinquantième anniversaire est loccasion de rappeler ce que fut cette période. Roger Soncarrieu Roger Soncarrieu, auteur de « Ma vérité sur la guerre dAlgérie » et de « Guerre dAlgérie : jen ai assez ! » (éditions Dualpha) |